Frédéric Petit : « Quand allons-nous enfin annoncer la fermeture du ciel ukrainien ? »
Aux questions au gouvernement, notre député des Français établis hors de France, Frédéric Petit, a interrogé le gouvernement sur la situation en Ukraine.
Question de Frédéric Petit :
Monsieur le ministre de l'Europe et des Affaires étrangères, quand allons-nous enfin annoncer la fermeture du ciel ukrainien ?
Oui, protéger le ciel d'une partie de l'Ukraine, à distance du front, est une opération certes complexe, cela sera sans doute utilisé et déformé par l'ennemi, y compris par ses relais ici en France ou ailleurs en Europe, mais cette opération est désormais une obligation morale et stratégique.
Je reviens d'une longue mission en Ukraine. J'ai rencontré de nombreux acteurs de nos deux sociétés civiles. J'ai vu des enfants à Kherson écrire une histoire avec ceux d'Avignon, dans une bibliothèque scolaire souterraine, des entrepreneurs à Odessa se lancer dans des clubs d'affaires internationaux, des nouvelles collectivités territoriales faire sortir de terre leurs maisons de santé, l'hôpital de Lviv pour les blessés de guerre, sans doute le plus en pointe aujourd'hui en Europe. J'ai fait 40 kilomètres sous les filets envoyés par les pêcheurs bretons.
Fermer le ciel, cela signifie protéger des citoyens engagés, c'est protéger notre fraternité. La France et les Européens se sont toujours tenus à côté des plus vulnérables. Ne laissons pas tuer des enfants dans leur sommeil, déchirer des familles par des drones ou des missiles russes.
La France et les Européens, depuis 80 années, bâtissent ensemble, unis dans la diversité. Ne laissons pas détruire des infrastructures énergétiques, des gares et des trains du quotidien. Ce sont sur ces ruines que les drames de la division risquent de renaître pour notre malheur commun. Fermer le ciel ukrainien, c'est aussi un message qui sera entendu et surtout compris à Moscou. Qui peut prétendre que protéger des civils c'est entrer en guerre ? Le président Zelensky vient de proposer des élections à une condition : c'est que nous les protégions. Peut-on imaginer que cela se fasse sous un ciel débordant de drones et de missiles ? Si l'annonce de cette fermeture du ciel est clairement expliquée aux Français, partagée avec eux, alors elle sera portée par notre pays tout entier.
Monsieur le ministre, fermer le ciel ukrainien, ça ne sera pas parfait du jour au lendemain, mais vous devez l'annoncer maintenant. Quand tout sera parfait, Il sera trop tard.
Réponse de Jean-Noël Barrot :
Mesdames et messieurs les députés, monsieur le député, je veux d'abord vous remercier pour votre implication personnelle, pour la mission que vous venez de conduire et au travers de vous saluer la place que les parlementaires ont pris dans le soutien de la France à Kiev, mais aussi les collectivités territoriales, puisque vous citez un certain nombre d'initiatives jusqu'au filet des pêcheurs bretons qui, mis bout à bout, constituent un ensemble de marque de soutien à l'Ukraine aujourd'hui envahie.
Vous avez été modeste quant au rôle qui est le vôtre dans l'initiative de fermeture du ciel ukrainien qu'on appelle « Sky Shield », que vous avez lancé cet été, qui a déjà rassemblé plus de 60 000 signatures autour d'une pétition que nous avons accueillie avec beaucoup d'intérêt et que nous intégrons dans la réflexion concernant le soutien militaire de la France à l'Ukraine.
Ce soutien militaire, il concerne d'abord toute la période qui nous sépare encore du cessez-le-feu. Et à la fin du mois d'octobre, le président de la République a annoncé que de nouveaux avions Mirage ainsi que de nouveaux missiles Aster seraient transférés à l'Ukraine pour que le ciel ukrainien puisse être ainsi défendu.
D'autre part, et inspiré en partie par votre initiative, nous avons organisé lors de la visite du président Zelensky récemment, un forum des drones qui a permis aux industriels de nos deux pays de se rencontrer pour bâtir en quelque sorte ces capacités conjointes pour mieux protéger le ciel ukrainien.
Il y a ensuite le moment du cessez-le-feu. Et dès lors que le cessez-le-feu interviendra, nous nous tenons prêts avec la coalition des volontaires que le président de la République, le Premier ministre britannique, ont lancé ensemble, qui se réunira demain, à apporter d'abord les moyens à l'Ukraine de régénérer sa propre armée et puis les capacités militaires qui garantiront que cette paix ne puisse pas être interrompue par de nouvelles agressions ou incursions russes.
Et puis il y a ensuite le long terme. Pour un pays qui a acquis son indépendance en 1991 et qui ne dispose pas encore de flotte aérienne, ce sont les accords trouvés à la fin du mois de novembre, ici à Paris, lorsque l'Ukraine a exprimé son intention d'acquérir jusqu'à 100 avions Rafale, des systèmes de défense SAMP/T et d'autres équipements qui lui permettront durablement, pour les décennies à venir, de protéger son ciel.