Renforcer le statut des lanceurs d'alerte en France, une nécessité 

Sylvain Waserman

Le député du Bas-Rhin et Vice-président de l'Assemblée nationale, Sylvain Waserman, est l'auteur d'une proposition de loi visant à protéger le statut des lanceurs d'alerte et à compléter les dispositifs actuels. Entretien.

Quelle est la situation actuelle du statut des lanceurs d’alerte en France ? 

La protection des lanceurs d'alerte est un marqueur démocratique et, en France, ils bénéficient d'une protection plus élevée que dans d'autres pays, y compris européens. Cependant, cette protection est incomplète et nécessite plusieurs améliorations à la fois pour mieux traiter les alertes mais aussi pour mieux lutter contre les représailles qu'ils peuvent subir. C'est ce que ma proposition de loi souhaite faire avec une réponse pour chaque étape de la vie du lanceur d'alerte : 

  • une définition large et plus claire du lanceur d'alerte
  • la possibilité pour un lanceur d'alerte de saisir directement des autorités indépendantes qui auront l'obligation de traiter son alerte dans des délais impartis
  • l'exclusion de sa responsabilité pénale et civile sous certaines conditions
  • la lutte contre les "procédures bâillon" qui visent à ensevelir les lanceurs d'alerte sous de nombreuses procédures judiciaires ou encore la mise en place de sanctions pénales contre ceux qui mènent les représailles. 

Nous innovons dans ce texte en étant le premier pays à reconnaître et étendre la protection aux facilitateurs (personnes ou associations qui aident les lanceurs d'alerte) ou en mettant en place la possibilité pour le juge d'imputer les coûts d'avocat du lanceur d'alerte à l'organisation qui lui intente un procès, et cela en cours de procédure.

Cette proposition de loi est issue de deux rapports parlementaires (le mien en 2019 au Conseil de l'Europe et celui de MM Marleix (LR) et Gauvain (LREM) de 2021 sur l'analyse des lacunes du droit actuel) et transpose une directive européenne, ce qui est rare pour une proposition issue du parlement. 

Est-ce que des lanceurs d'alerte comme Julian Assange ou Edward Snowden auraient dû être protégés par la France ?

Ces cas emblématiques de lanceurs d'alerte posent un véritable défi à l'heure actuelle pour nos États de droit. En effet, la question de l'asile est complexe du fait que ni Julian Assange ni Edward Snowden ne se trouvent sur le sol français pour faire une demande. Mais je tiens à rappeler que tout lanceur d'alerte qui subit des représailles dans son pays d'origine peut, une fois arrivé en France, demander l'asile politique. 

Je pense que la réponse doit être européenne, car protéger les lanceurs d'alerte fait partie maintenant de notre socle de valeur européen.

Il faudra imaginer une procédure d'asile européen, pour répondre spécifiquement aux cas des lanceurs d'alerte emblématiques. 

Pourquoi y a-t-il une nécessité à étendre au niveau européen la protection des lanceurs d’alerte ? 

Tout d'abord pour harmoniser le cadre juridique d'un lancement d'alerte relatif au droit de l'Union européenne et pour que sur le territoire européen, l'auteur d'un tel signalement puisse être protégé. Mais c'est aussi un message pour tous les citoyens européens : avec cette directive, l'Union européenne protège mieux les citoyens et invite chaque État à aller plus loin encore, pour faire de la protection des lanceurs d'alerte une véritable avancée démocratique. Enfin, il est préférable d'avoir un traitement responsable et efficace des alertes car il s'agit de remédier notamment à un crime, délit, ou un préjudice pour l'intérêt général. Si une telle situation n'est pas traitée, elle peut avoir de graves conséquences pour les institutions ou les organisations qui n'auraient pas agi suite au signalement.

Comment peut-on renforcer leur protection pénale sans une remise en cause de la transparence de leur statut ?

La protection des lanceurs d'alerte après l'adoption de ma proposition de loi sera renforcée tout en faisant le maximum pour garantir la confidentialité sur leur identité. Tout d'abord une alerte pourra passer par un canal interne ou directement par un canal externe, ce qui permettra de traiter l'alerte sans révéler l'identité du lanceur d'alerte au grand public. Cependant, si l'alerte n'est pas traitée ou suivie, le lanceur d'alerte pourra divulguer publiquement son signalement tout en restant protégé en cas de représailles.

Quelles sont les échéances à venir ?

Le 10 novembre a eu lieu le passage en commission des lois, le 17 novembre aura lieu le passage en hémicycle et en fin d'année ou début janvier le passage au Sénat. Nous espérons donc une adoption au début de l'année prochaine. Une fois que nous aurons voté ce texte, notre législation en matière de protection des lanceurs d'alerte sera la plus aboutie de l'Union européenne et nous aurons trouvé, je crois, une juste réponse à cet enjeu démocratique.

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