François Bayrou, invité du Grand Rendez-vous Europe 1/CNews/Les Echos

François Bayrou, Président du Mouvement démocrate, était l'invité de Sonia Mabrouk sur Europe 1 et CNews ce dimanche 18 septembre à 10h00, dans l'émission "Le Grand Rendez-vous".

Bonjour à tous et bienvenue au Grand Rendez‑Vous. Bonjour François Bayrou.

Bonjour.

C'est justement votre grand rendez‑vous ce dimanche, patron du MoDem, Haut‑Commissaire au plan, Secrétaire général du Conseil national de la refondation et proche du Président. Tandis que la crise énergétique s'installe et s'amplifie, comment éviter selon vous l'étincelle sociale.

L'hiver pourrait être électrique pour Emmanuel Macron qui ne compte pas renoncer à sa réforme des retraites malgré de nombreuses mises en garde, dont la vôtre, ce matin dans Le Parisien, le tout, François Bayrou, dans un contexte politique européen électrisé par la victoire de l'union des droites en Suède.

Pour vous interroger sur tous ces sujets, je suis entourée de mes camarades, Nicolas Barré des Échos et du penseur et sociologue Mathieu Bock‑Côté.

François Bayrou, tout d'abord, c'est la réforme de tous les dangers. Elle est communément appelée « la mère des batailles », dans le Parisien ce matin, vous alertez sur le risque d'un passage en force sur la réforme des retraites. Bruno Le Maire vous a répondu qu'ils iront jusqu'au bout des compromis. Vous restez sceptique ce matin ? 

Non, pas du tout, je trouve que ces affirmations du Gouvernement ce matin vont dans le bon sens.

De quoi s'agit‑il ? La réforme des retraites est vitale. Elle est une nécessité pour le pays. Mais si l'on veut que la réforme des retraites prenne tout son sens et qu'elle soit acceptée, il faut la conduire selon une méthode que le président de la République a présentée à l'élection présidentielle, c'est même l'engagement majeur qui a été le sien, on va renoncer aux réformes qui tombent d'en haut toutes faites et – c'est notamment le sens du Conseil national de la refondation – on va faire mûrir ces réformes avec toutes les forces économiques et sociales de la société.

Avec qui, quand la plupart n'en veulent pas ?

Je suis en désaccord avec vous.

Dites‑nous pourquoi.

Moi, je pense que la société française est prête pour cette réforme.

Je pense qu'une grande majorité des Français pense au fond d'eux-mêmes qu'il va falloir, en effet, pour équilibrer les retraites travailler plus longtemps. Simplement, beaucoup d'entre eux n'ont pas entre les mains les raisons pour lesquelles il va falloir faire cette réforme. On entend des messages dans tous les sens qui disent que ce n'est pas nécessaire, des messages, y compris des autorités, qui disent : « Mais non, c'est équilibré, on n'en a pas besoin, ce n'est pas urgent. » 

Le Conseil d'orientation des retraites vient de dire qu'on en aurait pour 25 ans de déficit, si l'on ne fait rien.

Le Conseil d'orientation des retraites a dit cela hier. Comme vous le savez, sur les trois dernières années, ils avaient assez souvent dit que c'était équilibré sur le moyen terme. Comme vous le savez, vous avez écrit 15 papiers là‑dessus. 

Je pense qu'il y a la nécessité de réunir toutes ces forces pour, et c'est le deuxième enjeu, pas seulement pour réussir la réforme des retraites, mais pour que naisse en France une méthode qui permette que les sujets traités ne soient pas toujours conflictuels, ne soient pas toujours dans l'affrontement, ne soient pas toujours dans la déchirure systématique du pays.

C'est pourquoi le président de la République a créé le Conseil national de la refondation qu'il m'a confié. 

Et vous voyez bien la contradiction...

Les oppositions lui ont tourné le dos. La plupart des syndicats n'y étaient pas. Où est le début de la méthode ? 

Pas du tout, pourquoi dites‑vous cela ? La CFDT était là, ce n'est pas le moindre des syndicats français. Jusqu'à maintenant, c'est même celui qui est le plus important. L'Unsa était là, et la CFTC était là. 

Peut‑on parler du verre à moitié vide ?

Non, pas du tout, parce qu'il me semble nécessaire de voir, c'est qu'il existe en France un grand courant réformiste, social réformiste, qui est prêt à avancer sans renier du tout ses positions.

Il n'y a aucune raison que qui que ce soit renie ses positions, mais il faut savoir qui est prêt à avancer pour que le pays lucidement soit capable de s'organiser comme les temps l'exigent.

Or, ce courant réformiste‑là, si l'on choisit une méthode, on va dire, brutale, ex abrupto, comme on aurait dit en latin, ce courant réformiste va entrer en contradiction, en confrontation, en opposition avec les responsables du pays. Est‑ce qu'on a besoin de cela ? On a besoin du contraire.

Le courant réformiste existe, vous le mentionnez, il est très présent. C'est la majorité à l'Assemblée. Mais il existe d'autres courants, on peut penser à la Nupes, au Rassemblement National, donc le pays réellement ne tient pas seulement dans ce courant réformiste, il est divisé. 

Bien sûr, mais...

De votre point de vue, est‑ce que l'espace de débat n'est pas l'Assemblée qui a l'avantage d'une alter‑assemblée que serait votre CNR ? 

D'abord, ce n'est pas mon CNR, c'est celui du président de la République, si vous le permettez.

Bien sûr.

Vous venez d'avancer l'argument majeur dans le sens de ce que je dis. Vous avez en effet deux pôles extrêmes, gauche et droite, qui sont sur ce sujet en particulier en radicale opposition avec les responsables du pays. En radicale opposition. Ils disent même qu'ils veulent revenir à la retraite à 60 ans sans condition.

Et vous avez ce que vous avez vous‑même avalisé comme courant réformiste, et si jamais on n'a pas la bonne démarche, il va être perdu pour les réformes.

Mais quel risque pour le pays ? On a compris que si pour vous le courant réformiste ne passe pas, la France aura du retard... Mais quel est le risque ? Est‑ce qu'il y a un risque social ? Est‑ce que vous dites : « attention » ce matin, si vous utilisez le 49.3, si vous ne trouvez pas la bonne méthode cette fois‑ci, eh bien le risque…

Je n'ai pas dit cela du tout.

Je vous pose la question.

Je pense qu'il y a une probabilité certaine pour qu'au bout du chemin, on doive utiliser un instrument institutionnel comme le 49.3. Peut‑être qu'on peut l'éviter, mais il n'y a rien d'infamant à l'utiliser. Ce qui n'est pas normal, c'est utiliser le 49.3 sans la préparation nécessaire pour le texte. Beaucoup de Français ont au fond d'eux‑mêmes l'idée que, oui, c'est un sujet, mais ne savent ni pour quoi, ni comment, ni pour quel montant. La préparation n'a pas été faite, la préparation pas seulement auprès des partenaires sociaux, je me suis laissé dire que même le patronat, mais vous allez pouvoir le confirmer Nicolas Barré, n'est pas chaud. Il faut faire cette préparation. Il faut adopter la démarche que le président de la République...

Il y a eu une campagne présidentielle. Que ne l'a‑t‑il pas fait, Emmanuel Macron ? Pourquoi tout ce temps perdu et venir aujourd'hui à quelques mois de cette réforme des retraites si importante, on le sait, et l'expliquer maintenant ?

La réforme des retraites, comprenons‑nous bien, ce n'est pas pour les mois qui viennent. Le président de la République a dit : « Je voudrais que ce soit en place dans l'été 2023. », et moi Je dis : on peut parfaitement arriver à adopter le texte avant ou au début de l'été 2023.

Qui parle de réforme brutale ? Vous avez l'air de sous‑entendre que l'Élysée veut brutaliser les choses. C'est cela ?

Les échos que l'on a et que vous avez... 

Vous avez plus que des échos de votre côté quand même, vous avez l'oreille du Président.

Et ce que vous avez, c'est qu'on avait imaginé de passer cette réforme par un amendement quasi subreptice au projet de financement de la loi de Sécurité sociale, ce qu'on appelle le PLFSS. Ce n'est pas comme cela qu'on fait une grande réforme pour un pays.

Pourquoi ? Parce que la question des retraites n'est pas seulement la question d'un déplacement magique et choquant pour beaucoup de l'âge du départ à la retraite, il y a beaucoup d'autres sujets.

Ce n'est pas la même chose d'arriver à l'âge du départ à la retraite épuisé par une vie professionnelle très lourde. Je pense à cela chaque fois que je vois les hommes qui bitument les trottoirs à Paris avec une taloche et des seaux de goudron à genoux dans le goudron. Probablement qu'à 65 ans ils ne seront pas dans le même état que ceux qui ont eu des vies plus préservées. Il y a des gens qui sont épuisés nerveusement et il y a des gens qui sont en pleine forme.

Je crois qu'on peut par l'incitation et peut‑être aussi par une accélération de la réforme Touraine comme on appelle, qui a créé la situation actuelle, des incitations, de la souplesse parce que l'idéal pour moi qui plaide pour la réforme par point depuis 20 ans est que chacun puisse choisir son départ à la retraite. Le départ choisi.

Et si l'on arrive à allonger le temps de travail volontairement y compris avec...

C'est la réforme Bayrou. On verra si c'est la réforme Macron.

Y compris avec des incitations, alors je pense qu'on aura fait des choses : on aura rééquilibré les retraites et on aura montré qu'on pouvait réformer différemment. Le deuxième enjeu est pour moi aussi important que le premier.

J'y reviens parce que cela me semble central. Vous nous dites que fondamentalement les Français comprennent que la réforme des retraites est nécessaire, se reconnaissent avec des nuances dans le projet que vous proposez. Doit‑on comprendre que le CNR est finalement plus représentatif de la Nation que l'Assemblée nationale ?

Non, en rien, et ce n'est pas le même rôle. Le CNR, c'est quoi ? 

C'est un « machin », un « bidule » disent certains. 

Oui, disent certains. « L'ONU » aussi disait aussi le général De Gaulle et on ne peut pas s'en passer.

Je reviens à la question. Le CNR, c'est l'idée qu'il y a dans le pays des forces, des courants de pensée qui ont le droit et le devoir d'être représentés dans la réflexion sur les grandes questions que nous allons devoir traiter. Nous entrons dans une crise qui, pour moi, va être une crise historique, mondiale, planétaire, avec des rééquilibrages qu'on n'imagine même pas, des problèmes nombreux en Chine parce que la démographie va créer des conditions pour le pays totalement inédites. Ils vont perdre 500 millions d'habitants, plus que l'Europe.

Quel rapport avec les Français et le Conseil national de la refondation ?

Exactement tous les rapports. Les États‑Unis sont dans une crise sociale et sociologique d'une violence incroyable, et en Europe, l'Allemagne qui était la locomotive s'est mise, comme on le sait, entre les mains de Poutine. Tout ceci crée une situation de crise historique, séculaire, mondiale, devant laquelle la France aurait beaucoup d'atouts, mais elle a devant elle des problèmes insolubles depuis longtemps. L'Éducation nationale est un problème insoluble, le travail est pour l'instant très difficile à résoudre. On va a besoin de réfléchir à tout cela avec des forces vives du pays.

On va marquer une courte pause et nous dire comment réfléchir parce qu'évidemment, vous avez cité tous les problèmes, le premier étant le défi énergétique. On va vous poser la question, vous qui avez beaucoup travaillé sur le nucléaire, comment en est‑on arrivé là en France ?

Une courte pause et on se retrouve en direct. 

(Publicité).

Merci à vous d'être avec nous et nos camarades Mathieu Bock‑Côté et Nicolas Barré, notre invité ce dimanche, François Bayrou. Beaucoup de questions à lui poser notamment sur le nucléaire et vous vous posez certainement cette question, comment en est‑on arrivé là en France ?

Tout d'abord, François Bayrou, le bouclier tarifaire pour 2023, chèque énergie exceptionnel pour les foyers les plus modestes, le Gouvernement craint, l'étincelle sociale étant de protéger au maximum, fort heureusement. Est‑ce que le risque de cette étincelle est bien réel sur un sujet aussi sensible ?

En tout cas, vous voyez bien que c'est une des menaces les plus importantes que nous ayons devant nous, que la crise énergétique fasse qu'il y ait des coupures de courant, qu'il y ait du black out comme cela, comme on dit en franglais, simplement par manque de production énergétique.

Essayer de pallier ces difficultés par des centrales à charbon, alors, c'est aller exactement à l'encontre de tout le mouvement qu'on a défini et c'est précisément dans ce drame qu'est l'Allemagne. La décision dramatique, je crois, des Allemands, de son Gouvernement, de fermer toutes les centrales nucléaires a placé l'Allemagne dans la dépendance de la Russie et de Poutine. Comme vous le savez, il y a beaucoup de dirigeants allemands qui ont fait en sorte ou favorisé cette dépendance parce qu'ils étaient eux‑mêmes stipendiés par les Russes.

Quand on compare, on se console par rapport à l'Allemagne, mais quand on regarde notre situation, certes un peu différente, on n'est pas mieux, c'est la question. François Bayrou, vous avez en tant que Haut‑Commissaire au plan rédigé un rapport sur le nucléaire qui était très fourni. On vous a reçu ici même le matin sur Europe 1. Pourquoi vous n'avez pas été entendu plus tôt par le Président ? Pourquoi ce sursaut n'a pas eu lieu plus tôt ?

Ce n'est pas par le Président, c'est par la totalité des responsables exécutifs français au travers des dernières décennies.

Je dis une phrase un peu bizarre : Ce ne sont pas les gouvernants qui gouvernent les pays, ce sont les opinions publiques qui gouvernent les pays.

Pourquoi ? L'opinion était contre le nucléaire ? 

L'opinion était archicontre le nucléaire ! Tout le monde était contre le nucléaire, toutes les forces politiques, moi pas en tout cas, mais jamais puisque je n'ai jamais pensé le contraire.

Ni vous, la droite, ni beaucoup de responsables...

Ni la droite à moitié...

Nicolas Sarkozy, vous le savez bien. 

Ni la droite à moitié. Moi, j'ai toujours pensé que c'était la seule énergie qui ne soit pas émettrice de gaz à effet de serre. Et si l'on considère que le drame climatique est causé ou sinon causé, du moins, accéléré par les émissions de gaz à effet de serre, alors cela dicte une priorité. Mais l'opinion était très contre, notamment à partir de Fukushima, ou relancé par Fukushima. Il était dans l'idée de toutes les forces politiques qu'on allait baisser...

Donc on suit l'opinion. C'est quand même incroyable, ce que vous dites. À quoi servent les gouvernants s'ils suivent l'opinion ? 

Il y a un certain nombre de responsables politiques, vous en avez un devant vous, qui ne suit pas ce genre de chose depuis très longtemps et sur tous les sujets, sur la dette, sur le nucléaire, sur d'autres sujets, sur la nationalisation des autoroutes, sur la privatisation d'EDF, sur tous ces sujets, ma position était différente de celle des gouvernants. Mais bien sûr, les gouvernants, c'est l'opinion publique qui fait les élections...

Parmi les gouvernants, il y a Emmanuel Macron, il a eu tort sur le nucléaire pendant son premier quinquennat. Il a fallu le deuxième pour qu'il le relance.

Je pense qu'il était prudent et c'est dans son premier quinquennat qu'il a fait cette relance et il est vrai que le rapport que vous avez cité...

Il a fermé Fessenheim. 

Oui, c'était décidé par le Gouvernement précédent et cela a été exécuté par son Gouvernement.

Pourquoi ne pas reconnaître une erreur pour avancer dans notre pays ? Pourquoi ne pas reconnaître que la fermeture de Fessenheim était une erreur ? 

Parce qu'il y a des gens qui adorent se flageller et il se trouve que, moi, j'ai toujours été sur l'autre ligne.

Diriez‑vous que dans la classe politique, il y avait une adhésion au nucléaire, mais qui ne pouvait pas être avouée ou reconnue parce que l'opinion animée par quelques lobbies était trop forte ?

Hélas, non. Je voudrais bien que ce soit vrai, mais l'idée s'était introduite dans les esprits notamment à partir de Fukushima qu'il fallait baisser la part du nucléaire dans ce qu'on appelle le mix énergétique. Et, au fond, tous les grands courants du pays constitués, poussés par l'opinion ou pressés par l'opinion étaient sur cette ligne.

Et le président de la République a changé d'avis à partir du moment... enfin il a revu sa position et, heureusement. Et il a bien fait de prendre cette nouvelle orientation qui engage beaucoup l'avenir du pays parce qu'il va falloir des dizaines de milliards d'investissements pour rendre à la France sa place de leader en matière du nucléaire.

François  Bayrou, notre objectif ce matin n'est pas de pointer des responsabilités, on veut tous que notre pays s'en sorte. La question est que malgré tout François Hollande a donc acté la fermeture de Fessenheim. Emmanuel Macron a signé. Il avait comme ministre un certain Nicolas Hulot dont je me souviens qu'il avait dit sur cette antenne et d'autres : « Le nucléaire n'est pas une énergie d'avenir. »

Quand on choisit un tel ministre si emblématique, quel signal donne‑t‑on soi‑même à l'opinion ?

Encore une fois, vous auriez fait une enquête à cette époque, les gens vous auraient dit la même chose parce que, Fukushima, c'était des images tellement spectaculaires. Je rappelle que Fukushima n'était pas un accident nucléaire, c'est un tsunami qui a tout d'un coup mis en panne, en grosse difficulté les centrales japonaises. Les Japonais ont décidé depuis de reconstruire des centrales nucléaires parce que tous les pays du monde ont compris que si, vraiment, la crise climatique était un sujet d'urgence, il n'y avait qu'une réponse efficace, c'était celle‑là.

Emmanuel Macron a pris une décision très courageuse d'investissement très important de plusieurs tranches des nouvelles usines de production nucléaire.

Vous savez combien il faut de temps puisque vous avez travaillé ce sujet...

Oui.

Alors combien de temps pour construire une centrale, pour obtenir les autorisations, pour passer toute l'administration ?

On dit 2035 pour la première. 2035, ce n'est pas dans très longtemps. La première condition, c'est de remettre en état de service les centrales que nous avons. Nous avons plusieurs dizaines de centrales, 56, 60, dont aujourd'hui une trentaine sont en réfection parce qu'on a découvert une faiblesse dans les tuyaux d'inox qui permettent d'amener de l'eau de refroidissement et on a découvert qu'il y avait des fissures dans ces tuyaux. Comme on a monté les standards de sécurité et d'une certaine manière, on peut dire que quand même, c'est utile, les standards de sécurité nouveaux se sont appliqués et obligent à réparer les tuyaux d'alimentation du refroidissement. Ce n'est pas du nucléaire, c'est du refroidissement.

On le voit bien, aujourd'hui, il y a une situation d'urgence. EDF traverse une crise monumentale. 

Pas depuis aujourd'hui.

Aujourd'hui le Gouvernement a annoncé début juillet le remplacement de son patron, on n'a toujours pas de nouveau patron chez EDF. Si c'est vraiment une situation d'urgence, comment vous l'expliquez ?

Peut‑être que le poste n'est pas si attractif que cela après tout ce qui s'est passé.

Il y a eu beaucoup de crises internes à EDF. Personne ne le dit. Le directeur financier a démissionné il y a deux ans parce qu'il ne voulait pas assumer la situation. Mais, comme toujours en France, c'est loin de l'opinion. Comme ce sont les sujets d'opinion à laquelle vous participez, opinion, vous êtes d'une certaine manière des noyaux actifs de l'opinion.

L'opinion qui nous regarde ce matin, François Bayrou, elle se dit en vous écoutant : on a démantelé le nucléaire en France, on souscrit au marché européen qui allie les prix de l'électricité et du gaz. Tous les gouvernants ont fait cela et, aujourd'hui, on nous demande de prendre moins de douches, de baisser le chauffage. Est‑ce que ce n'est pas un peu fort de café ? C'est vrai, ce sont des choix des gouvernements qu'aujourd'hui les populations portent.

Ce sont des choix des gouvernements choisis par les électeurs, sous la pression des grandes évolutions de l'opinion publique auxquels, il faut bien le dire, vous participez.

C'est quand même une inversion des responsabilités assez forte ce matin.

Non, ce n'est pas une inversion. Ma vision est que nous sommes tous co‑responsables des situations que nous décrivons comme insupportables, cataclysmiques.

Les Français sont attachés à l'atome depuis longtemps. Moi, j'ai le souvenir de sondages depuis plusieurs années où ils étaient attachés à cela.

Non. Je crois que c'est faux. C'est factuellement faux. Les Français sont de nouveau attachés à l'énergie nucléaire. J'ai vu un sondage, 80 %.

Exactement, dans le journal du dimanche.

La légitimité du nucléaire n'est pas contestée.

Elle n'est plus contestée. Nicolas Barré, elle était contestée. On fait comme si on avait une mémoire de poisson rouge. Nous avons vécu un temps où toute l'opinion, sous des pressions diverses de mouvements politiques, de leaders d'opinion, vous en avez cités, toute l'opinion publique avait glissé contre le nucléaire.

Où est le courage politique ? Où est la volonté, alors ?

On attend d'un leader c'est quand même parfois des propositions.

Eh bien, choisissez des leaders qui ont depuis longtemps défendu cette thèse. 

Si je peux me permettre, d'ici la relance du nucléaire, pénurie, rationnement, black‑out, inévitables ?

Non, je crois que ce n'est pas inévitable. Je pense qu'il y a des solutions que l'on peut trouver. J'en ai même quelques‑unes en tête. Je pense qu'il y a des solutions pour rééquilibrer la dépendance énergétique devant laquelle nous allons être. Si vous voulez que j'en cite une, j'en ai parlé avec le président de la République : nous avions à Pau le gisement de gaz de Lacq qui a été arrêté. Cela vaudrait le coup d'aller voir si par hasard les pressions n'ont pas remonté dans le gisement et si par hasard on ne pourrait pas se servir du gisement résiduel pour pendant quelques années rendre un équilibre à la production énergétique française.

On va continuer à en parler. Très intéressant ce que vous avez dit sur le nucléaire. Si l'on a suivi l'opinion sur le nucléaire, pourquoi ne l'a‑t‑on pas suivi sur d'autres sujets comme l'immigration ? C'est la question que l'on va vous poser dans quelques instants sur CNews et Europe 1. À tout de suite.

(Publicité).

François Bayrou, pendant la pause aussi on continue d'évoquer le nucléaire et l'énergie. 

On va passer à un autre sujet, mais, finalement, dans la méthode, on vous pose la question parce que vous avez dit, François Bayrou, que les choix parfois des gouvernements sont dictés, en tous les cas peut‑être poussés et nourris par le choix des opinions sur le nucléaire. Pourquoi ne le sont‑ils pas sur l'immigration ? Sondage après sondage, les Français, d'ailleurs, quelle que soit leur croyance politique, sont pour une maîtrise de l'immigration, pour faire de ce sujet une priorité avec, évidemment, le pouvoir d'achat. Pourquoi ne les a‑t‑on pas davantage écoutés là‑dessus ?

Il n'y a pas un homme politique français qui ne pourrait répondre à son compte les mots que vous avez utilisés. Mais entre les mots et la réalité, il y a un certain nombre d'obstacles. Je vais vous dire ce que, moi, je crois de tout cela et que j'ai souvent écrit dans des livres.

Premièrement, les peuples ont droit à des garanties d'identité sur leur identité. Les peuples sont attachés, comme chacun d'entre nous le sommes, au caractère, aux convictions, aux modes d'être, aux modes de vie qui font que la France est la France, la Suisse est la Suisse, le Canada est le Canada et l'Italie est l'Italie.

Il y a, au fond, cette crainte du sentiment populaire que ce sont ces signes d'existence, d'identités, qui sont menacées parce qu'on ne fait pas attention au glissement. C'est la première chose.

Deuxièmement, il y a d'énormes difficultés, la principale de ces difficultés est que lorsqu'on songe à renvoyer des personnes qui sont sur le territoire national sans droit d'y être, les pays d'origine ne veulent pas les reprendre.

Vous avez eu une formule très importante, je crois que vous parlez du droit qu'ont les peuples de devoir respecter leur identité, il y a des garanties. Est‑ce que ce droit a été piétiné ces dernières décennies ?

En tout cas, on n'y a pas fait suffisamment attention parce qu'on a confondu ce droit, cette quête de droit, avec la stigmatisation. Cela fait deux blocs : les « stigmatiseurs » et ceux qui ont le sentiment que tout part à la dérive.

Pourquoi j'ai accepté le CNR, par exemple, l'idée de refondation, parce que ces questions peuvent être énoncées à mes yeux en termes nouveaux et dans lesquels tous ceux qui sont de bonne foi peuvent se reconnaître.

À la question : Comment obliger les pays d'origine à reprendre les ressortissants qui sont partis ? Jusqu'à ce jour, personne n'a de réponse. On a fait des pressions beaucoup sur l'autre rive de la Méditerranée. Pour l'instant, le résultat n'a pas été probant.

On a des questions de justice qui font qu'il est très long, même si cela a été raccourci sous l'impulsion du président de la République, c'est très long de déclarer que quelqu'un n'a pas de droit. Et puis, il y a quelque chose au fond...

Il y a la volonté politique. Quand Emmanuel Macron annonce encore un projet de loi pour 2023 et il se dit aussi favorable à l'accueil d'étrangers dans les zones rurales, pour les repeupler, disons les mots...

Non.

Vous êtes direct, il faut choisir les mots pour peut‑être casser une logique communautaire.

Il se trouve que je suis originaire, j'ai grandi dans la partie, une partie rurale du pays. Les agriculteurs ne trouvent plus personne pour travailler à la ferme. Les éleveurs ne trouvent plus personne pour travailler et il arrive très souvent qu'ils viennent me voir en disant : « François, j'ai trouvé un garçon très bien d'origine africaine, il est vaillant, il veut travailler. Je ne peux pas avoir de papiers pour lui. » 

Je vais exprimer quelque chose qui, probablement, est imprudent. On devrait exiger deux choses : premièrement, la maîtrise de la langue qui est la garantie de la volonté de s'intégrer, de participer à un pays avec son mode de vie et, deuxièmement, la volonté de s'engager dans le travail pour gagner sa vie...

Vous vous rendez compte : vous dites les choses avec prudence mais qui semblent tellement logiques qu'on aurait pu les faire et le dire depuis 20 ou 30 ans.

Oui, tellement logique, mais le problème est que depuis 20 ou 30 ans, on ne les lit par parce qu'on fait de ce sujet, un sujet absolument idéologique.

Qu'est‑ce qui vous choque dans le repeuplement ? Si l'on veut que des immigrés aillent dans les campagnes, c'est bien pour d'abord davantage repeupler, c'est ce qu'on dit, les zones rurales… 

Est‑ce que vous vous rendez compte que vous avez une grande importance aux yeux de ceux qui vous écoutent ?

C'est très important. Ce sont des rendez‑vous qui sont suivis et en partie parce que vous avez des personnalités qui plaisent à ceux qui vous écoutent.

Si vous agitez le spectre d'un remplacement de population, vous savez ce que vous…

C'est l'idée du président de la République.

Vous savez ce que vous nourrissez comme...

François Bayrou, qui fait cette proposition?

Nous sommes citoyens, vous et moi.

Est‑ce que vous ne stigmatisez pas vous‑même immédiatement ? On pose la question et vous parlez de « grand remplacement ». Est‑ce que ce n'est pas comme cela qu'on a fait taire...

C'est exactement ce que Sonia Mabrouk vient de dire.

Ma position : les peuples ont droit à leur identité et à des garanties sur la pérennité de leur identité. C'est un droit des peuples, c'est un droit des communautés. J'ai même dans un livre rapporté qu'il y a des pays, je crois, qui sont sur le continent africain qui ont inscrit ce droit dans leur Constitution. Je crois à cela. Je pense que les Français n'ont pas envie de devenir indéterminés dans l'avenir. L'Union européenne, pour moi, n'a jamais été un lieu d'indétermination. 

Si vous deviez qualifier les choses, qu'est‑ce qui aujourd'hui menace l'identité française ? Soyons précis.

Des modes de vie et des modes de pensée.

Oui, mais lesquels ?

Des modes de vie, des modes d'irrespect de ce que nous sommes, de la laïcité, par exemple, et qui ont besoin d'être réaffirmés.

C'est important, ce que vous dites par rapport à l'école. Je voudrais vous faire réagir, vous avez sans doute vu ce matin, c'est un sujet d'importance dans le journal du dimanche, un sondage effectué sur le thème de la Shoah. L'école a un rôle évidemment fondamental dans la transmission de la mémoire. Ce sondage montre que certains jeunes relativisent la Shoah. Vous parlez justement d'intégration et plus largement de partage de ce qui est collectif. Des jeunes relativisent, 10 % considèrent la Shoah comme un drame parmi d'autres de cette guerre qui a fait beaucoup de victimes. Vous avez été ministre de l'Éducation...

Vous voyez qu'on tire quand même par l'énoncé de la question, on tire ou on attire une certaine réponse.

C'est vécu par des professeurs, Monsieur Bayrou.

Oui. Il arrive souvent au sein de l'Éducation nationale qu'il y ait des pressions pour qu'une partie du programme ne soit pas enseigné ou qu'il ne soit enseigné qu'avec des signes de désapprobation de la part de certains élèves et parfois de parents d'élèves. C'est vrai, cela existe.

Pour autant, est‑ce que c'est ce que nous vivons dans toutes les écoles du pays ? Non.

Cela ne relève quand même pas de l'anecdote.

Non, cela ne relève pas de l'anecdote, mais cela relève d'une vigilance qui doit être celle de l'institution scolaire.

Les programmes sont établis nationalement et je n'ai jamais accepté l'idée qu'ils puissent être établis régionalement. Les programmes sont établis nationalement parce que ce sont des références qui vont faire un peuple, l'identité dont on parlait. Il faut de la fermeté.

Il faut. Et les professeurs qui se retrouvent seuls dans une classe et ceux qui n'arrivent pas à faire cours, et ceux qui voient la pression des élèves, et ceux qui voient la pression des parents, et ceux parfois qui n'ont pas le soutien de l'institution, et ceux qui viennent et se succèdent sur nos antennes pour nous dire : « On n'en peut plus, mais on continue parce qu'on aime ce métier », qu'est‑ce qu'on dit à ces professeurs, qu'est‑ce que les gouvernements, les responsables leur disent ?

On leur dit que la période qui s'ouvre, pour moi, est peut‑être la dernière chance de l'Éducation nationale parce que précisément, la place des professeurs n'a pas été respectée comme elle aurait dû l'être dans les dernières décennies.

La dernière chance avant quoi ? 

La dernière chance avant un effondrement de l'Éducation nationale.

Je ne sais pas si vous vous rendez compte sur deux sujets, le premier de ces sujets est la perception que nous tous, nous avons d'un certain effondrement de la transmission sur les disciplines, sur la langue écrite, la langue orale, les mathématiques, le calcul mental qui est assez souvent oublié.

On a la certitude ou le sentiment très appuyé dans beaucoup de familles que ce n'est plus comme c'était et de loin. J'emploie des mots simples exprès.

Deuxièmement, les classements internationaux sont d'une sévérité très grande pour la France.

D'une lucidité.

Oui, c'est une lucidité. Est‑ce qu'on peut rétablir l'Éducation nationale ? Je le crois. Et non seulement je le crois mais j'ai donné dans une interview ce matin un délai. J'ai dit : « Moi, je crois qu'on peut le faire en 4 ans. » 

Monsieur Bayrou, avec qui ? Ce ministre a‑t‑il la vision nécessaire, M. Pape Ndiaye ? 

Je le crois et je l'espère ou je l'espère et je le crois.

Vous l'espérez plus que vous ne le croyez ou vous le croyez plus que vous ne l'espérez ?

J'espère et je crois au même niveau.

Vous reconnaissez tout autant un Pape Ndiaye et qu'un Jean‑Michel Blanquer ?

Jean‑Michel Blanquer a fait deux ans formidables avec une adhésion très profonde de l'institution scolaire et des salles de professeurs, et puis quelque chose s'est cassé, quelque chose s'est perdu, il faudrait être historien pour comprendre ce qui s'est passé exactement. Mais je le lui ai dit souvent.

Deuxièmement, l'institution a été terriblement centralisée et notamment les questions pédagogiques ont été terriblement centralisées et selon moi, ce n'est pas la bonne voie.

Je dis : nous sommes assis sur une mine de compétences, d'inventions par des professeurs qui font progresser leur classe et personne ne les repère.

François Bayrou, ce n'est pas comme si vous étiez arrivé dans la politique ce matin.

Personne ne les repère.

Vous dites : « On ne l'a pas fait. » C'est incroyable.

Personne ne les repère. Personne ne se sert de leur expérience. C'est pourquoi je plaide pour la liberté pédagogique, le repérage des réussites et la propagation des méthodes inventées par ceux qui réussissent. Et je pense que si tel est le cas et si l'on s'occupe de préparer aussi aux épreuves et aux disciplines qui font les classements internationaux, alors je pense que l'on pourra avancer.

Ma certitude est que c'est dans le corps enseignant, ses richesses, son inventivité que se situe la clé du redressement de l'Éducation nationale, ce qui veut dire aussi que le traitement matériel, les salaires, sont tellement bas qu'il faut que le pays s'en saisisse comme une priorité.

Vous avez employé le mot « redressement ». On a parlé depuis tout à l'heure de retraite, donc de société, d'énergie, de nucléaire, d'éducation, d'école, de redressement, sinon quoi ? Il y a un scénario qui fait trembler, si je puis dire, l'Élysée et Emmanuel Macron, c'est ce qui se passe en Suède. L'union des droites, c'est la peur d'un scénario comme celui‑ci se déroule en 2027. Une courte pause et on en parle. Suède, Italie et d'autres en Europe.

(Publicité).

Notre invité ce dimanche, François Bayrou, beaucoup de choses ont été dites sur les retraites, l'énergie, l'école. C'est la méthode Bayrou qui a été énoncée avec quand même quelques coups de griffe sur la méthode actuelle.

D'ailleurs, pourquoi vous ne leur dites pas directement, Monsieur Bayrou ? Il paraît qu'hier, ils vous ont cherché partout, vos amis de la Macronie, au congrès de Renaissance. Point de François Bayou.

On a eu un petit problème d'organisation.

Il ne faut pas voir une volonté de ne pas assister, ne pas être d'accord sur tout ? 

Pas du tout. On a le devoir de défendre des positions à l'intérieur de la majorité parce que si la majorité devient tout d'un coup un corps qui n'a qu'une vertu, c'est d'obéir, alors, il sera évidemment l'objet de cibles.

Il y a un peu cette tentation dans la Macronie ?

Non, en tout cas, c'est une tentation contre laquelle je me battrai. La majorité, ce doit être des Hommes au féminin et au masculin libres. Cela doit être des voix qui soient capables d'énoncer une pensée, des principes d'action, de sentir le pays pour l'entraîner. C'est cela, la vocation politique. Et la vocation politique indique, ou la vocation civique, elle dit pour moi quelque chose : nous sommes co‑responsables de l'avenir. Quel que soit notre métier, notre participation au débat public, que nous soyons dans l'opposition ou dans la majorité, nous sommes co‑responsables de l'avenir.

Et on a bien vu dans cette affaire du nucléaire, les opposants et majoritaires ont été co‑responsables de l'avenir, ils se sont succédé au pouvoir, et, en fait, ils ont suivi la même ligne de force.

Cette capacité, je vais dire, de résistance à la facilité, cette capacité de ne pas perdre de vue une idée que l'on se fait de l'avenir et de la défendre.

Sinon, quoi ? Hongrie, Pologne, Italie, Suède avec l'alliance de la droite classique et de la droite dite radicale qui s'est hissée au pouvoir – là, je parle de la Suède, pourquoi selon vous, François Bayrou, tous ces pays et leur peuple opèrent à ces changements radicaux ? À cause de quoi ?

Parce que la mondialisation est un élément de déstabilisation sur la question que je posais du besoin d'identité et de sécurité. Ce n'est pas un monde sûr et il va l'être de moins en moins. Et beaucoup ont eu le sentiment que, au fond, ce à quoi ils étaient attachés était compromis par ce monde‑là.

Est‑ce juste un sentiment, selon vous ? 

Oui, mais regardez, la Suède, c'était le paradis de la social‑démocratie et justement, d'une certaine forme de protection. Et là, au contraire, ce pays bascule.

Peut‑être que la social‑démocratie parfois a été triste. Les besoins matériels ne sont pas les besoins ou ne sont pas les seuls besoins essentiels de l'humanité. Il y a des besoins qui sont de l'ordre, je vais dire, du spirituel au sens le plus large du mot philosophique, et il y a des besoins dans l'ordre de la vitalité. On a besoin de rire, d'être ému, on a besoin d'accepter les vagues.

Vous ne pensez pas que c'est un peu plus prosaïque qu'en Suède, c'est‑à‑dire un bouleversement démographique assez rapide, des criminalités assez graves, des émeutes se multiplient ?

Je n'ai pas eu le sentiment que la Suède était dans un bouleversement démographique comme cela.

La campagne en Suède n'a porté que sur cela : délinquance, immigration, insécurité.

Je répète : quand vous vous adressez à un pays, vous devez être capable de comprendre ses besoins et de les exprimer. Cela manque, quelquefois, la capacité d'expression.

Et je répète que, selon moi, le besoin de garantie dans l'identité… L'avenir ne signifie pas que vous devez abandonner ce que vous êtes. L'avenir, cela veut dire que vous pouvez sublimer ce que vous êtes, le porter vers l'avenir.

J'ai entendu, mais vous m'interrogez sur l'extrême droite, des phrases qui disaient que le but de notre courant politique serait d'empêcher l'extrême droite de...

D'arriver au pouvoir en 2027.

Ce n'est pas du tout ma sensibilité.

C'est celle de la majorité. C'est important, ce que vous dites.

Je réclame le droit d'énoncer ce que je pense. Notre travail, c'est de faire un pays épanoui, aussi prospère que possible pour pouvoir assurer son contrat social et de lui donner des raisons de vivre, pas de perpétuellement désigner des forces de j'ai combattues toute ma vie et que je crois avoir des raisons de combattre, pas de faire des extrêmes l'obsession de la vie politique. « Des extrêmes », j'emploie le mot au pluriel.

Notre travail, c'est le peuple français.

Pourquoi il y a eu cette obsession ? Dites‑le. Cela a permis aussi...

Excusez‑moi, notre travail, c'est notre Nation.

Je comprends bien.

Notre travail, c'est le cadre européen sans lequel la Nation ne peut pas vivre. Notre travail, c'est l'équilibre mondial. Notre travail c'est la vie réelle, pas le combat.

François Bayrou, vous dites arrêtez de sortir l'épouvan... vous dites à Emmanuel Macron.

Non, je le dis à vous.

Pardonnez‑moi ?

Vous avez fait de ce sujet votre interrogation. Vous dites que quelque chose se passe, qui est effrayant en Pologne, en Suède, en Italie.

La situation suédoise et la situation italienne ne sont pas les mêmes.

Très bien, mais je veux quand même continuer avec cela parce qu'il me semble que c'est quand même, le président de la République qui a dit qu'il y avait le danger de l'extrême droite, et qui s'inquiète de ce scénario en 2027. Vous, vous nous dites : « Il ne suffit pas d'agiter ce cet épouvantail, il faut proposer autre chose. » Est‑ce que c'est bien cela ? Est‑ce que j'ai bien décodé le Bayrou ?

Il y avait un danger électoral. On était devant une élection. Là, dans une élection, il faut choisir si l'on favorise ou si l'on combat, si l'on arrête ou si, au contraire, on promeut. C'est cela, une élection. Mais dire : « Dans la période où nous entrons, notre seule obsession doit être les extrêmes », je ne suis pas d'accord avec cela parce que c'est leur donner un coup de booster, comme on dit en franglais, formidable.

C'est bien la question que je vous pose, est‑ce que le gouvernement n'a pas besoin de l'extrême droite et des extrêmes pour prospérer ?

Si vous faites d'une force politique le sujet central des médias, des discussions, des dialogues, vous la favorisez formidablement.

Je dis au contraire que nous sommes là pour assurer aux Français et assurer aux Français aussi comme Nation, dans le cadre qui nous permet de vivre en Europe et dans l'équilibre du monde, que leur avenir est pris en charge et que dans cet avenir, on n'oublie pas les raisons de vivre qui sont derrière.

Un mot de conclusion.

Est‑ce que, peut‑être une des faiblesses actuelles de la majorité, c'est qu'elle s'est construite comme un front anti‑extrême, comme un front Républicain contre les extrêmes d'un côté et de l'autre ? Est‑ce qu'en dernière instance, ce n'est pas la faiblesse des dernières législatives et même du président de la République ?

Je n'y crois pas, en tout cas, je n'ai jamais aimé l'idée de front, quel que soit le front.

Même républicain ?

Non, je pense que ce n'est pas une bonne chose que de considérer que notre seul point commun est d'être contre. Alors, il y a des moments historiques, quand c'est le nazisme, quand ce sont des menaces de cet ordre. Il y a des moments historiques dans lesquels on doit s'engager, mais dans la mission des politiques, qu'ils soient au Gouvernement ou représentants à l'Assemblée nationale dans le débat politique, leur mission est de s'intéresser aux problèmes les plus profonds que les gens rencontrent.

À bon entendeur, pour toutes les missions.

Disons une phrase parce que j'ai commencé à dire que, pour la Suède et l'Italie, la situation n'était pas la même. En Suède, l'extrême droite est dans la coalition, et pas au pouvoir. En Italie – l'Italie, c'est chez nous –, nous sommes menacés d'avoir l'extrême droite directement à la tête du pays. C'est un changement qui est plutôt très important et qui va fragiliser l'Union européenne. L'Union européenne ces dernières années, c'était France‑Allemagne‑Italie. Là, on a un risque et une menace sur l'avenir, donc intéressons‑nous aux questions qui font que les gens ont envie de vivre et de vivre ensemble.

L'envie d'avoir envie de vivre ensemble. Merci, François Bayrou, d'avoir été notre invité ce dimanche.

Thématiques associées

Je reçois la lettre d'information du Mouvement Démocrate

Engagez-vous, soyez volontaires

A nos côtés, vous serez un acteur de nos combats pour les Français, pour la France et pour l'Europe.

Chaque engagement compte !

Votre adhésion / votre don

Valeur :

Coût réel :

20 €

6,80 €

50 €

17 €

100 €

34 €

Autres montants

Qu'est ce que la déclaration fiscale sur les dons ?
Filtrer par