« Face au rouleau compresseur de l’extrême droite, retrouver souffle et voix » par Marie Eve Tayot

Lors de l’Université de rentrée du MoDem, Marie-Eve Tayot a animé un atelier sur l’essor de l’extrême droite. Face à un RN installé et médiatiquement dominant, elle appelle à nouveau dans ce billet d'humeur à muscler la communication démocrate, à réinvestir les symboles et à porter un récit clair qui parle aux Français.
J'ai animé, lors de l'Université de rentrée du Mouvement Démocrate, un atelier consacré aux enjeux du vote d'extrême droite. Le sujet est lourd, brûlant, et chacun sent bien qu'il ne s'agit plus seulement d'une hypothèse de science politique : l'extrême droite est déjà là, installée, normalisée.
Les participants ont d'abord partagé un constat d'impuissance. Comment rivaliser avec le rouleau compresseur médiatique du RN, avec la notoriété éclatante de Jordan Bardella sur les réseaux sociaux, dont les chiffres de followers ridiculisent ceux de nos propres comptes ? Comment répondre à une machine narrative qui a su s'approprier sans complexe les symboles de l'identité nationale, du drapeau, de la fierté populaire, tandis que les autres partis, nous compris, peinent encore à oser les porter ?
La discussion a fait remonter une impression lancinante : nous décrivons bien l'état des lieux, mais nous restons trop faibles sur l'incarnation et la communication. Parler aux catégories populaires, occuper l'espace numérique, rendre visibles les propositions et les lois portées par nos députés, voilà l'urgence. Car face aux slogans simplistes, il ne suffit pas d'opposer des analyses savantes : il faut un récit, une voix claire, une présence qui parle au quotidien des Français.
Certains ont insisté sur l'importance de démonter les contradictions et les mensonges du RN. Non pas seulement en cercle militant, mais devant l'opinion, avec pédagogie et constance. D'autres ont rappelé que si le RN séduit, c'est aussi parce qu'il promet une revanche sociale sans effort collectif, là où nous défendons sobriété, justice et solidarité. Ce décalage est un défi immense, mais il peut devenir notre force : opposer au repli, un horizon de confiance et de dignité partagée.
À la fin de l'atelier, une conviction s'est imposée : nous n'avons pas le luxe de la résignation. Le Mouvement Démocrate doit se muscler, assumer sa voix, multiplier les canaux de communication, et surtout oser réinvestir les imaginaires que d'autres ont confisqués. La République, l'Europe, le progrès social, ce sont nos combats. Et si nous ne les portons pas haut, d'autres continueront à les travestir.
Il y a urgence, mais aussi espérance : celui que dans chaque ville, chaque territoire, des élus, des citoyens et des militants refusent de céder à la facilité du repli. L'atelier n'a pas apporté toutes les réponses, mais il a confirmé que la bataille culturelle et politique ne fait que commencer – et que nous avons le devoir de la mener.
Marie Eve Tayot