Sarah El Haïry : « Les espaces "no kids" disent quelque chose de comment on regarde notre société »
Sur l'antenne de France Inter, Sarah El Haïry, Haute-Commissaire à l'Enfance, a dénoncé l'apparition malheureuse des espaces sans enfants, dits "no kids", avant de formuler des annonces plus globales pour l'enfance.
Face à l'émergence des espaces "No Kids" en France, Sarah El Haïry, Haute-Commissaire à l'Enfance, identifie une tendance préoccupante de discrimination progressive qui révèle les failles profondes de notre cohésion sociale. « Aujourd'hui, c'est une tendance qui a explosé à l'étranger et qui est en train de s'installer en France », analyse-t-elle avec une lucidité qui appelle à l'action immédiate. Cette observation n'est pas anodine : elle révèle un processus insidieux d'importation de pratiques ségrégatives qui, sous couvert de modernité commerciale, fragmentent le tissu social français.
Le MoDem partage cette inquiétude car cette dérive illustre parfaitement les mécanismes de division sociale contre lesquels nous nous mobilisons depuis des années. L'hypocrisie de ce mouvement réside dans sa capacité à transformer la discrimination en produit marketing séduisant.
On s'autorise des choses avec les enfants qu'on ne s'autoriserait avec personne d'autre.
Cette tolérance sélective envers l'exclusion constitue un révélateur inquiétant de l'évolution de nos valeurs collectives.
L'extension de ces pratiques au-delà du secteur des loisirs constitue le véritable danger. Quand Sarah El Haïry constate que « ce qui nous inquiète, c'est que ça sort du loisir pour aller grignoter d'autres espaces », elle identifie un processus de normalisation progressive de l'exclusion. Du camping familial aux compagnies aériennes, de l'hôtellerie aux transports publics, cette logique ségrégative colonise progressivement l'ensemble de l'espace social, compliquant la parentalité.
Face aux stratégies de contournement développées par les acteurs économiques, du tourisme par exemple, l'ancienne députée déploie une approche basique et de bon sens qui incarne l'efficacité institutionnelle défendue également par le MoDem.
J'ai demandé une expertise très poussée sur ce texte [loi contre la discrimination] pour dire : Est-ce qu'aujourd'hui, les nouvelles pratiques commerciales tombent sous le coup de cette loi ou pas ? S'il faut la renforcer, on la renforcera.
Cette méthode pragmatique révèle une approche politique renouvelée : identifier les failles juridiques, mobiliser l'expertise technique, agir en conséquence.
La dimension innovante de cette réponse réside dans sa capacité à anticiper les évolutions sociétales tout en préservant les droits fondamentaux. L'organisation de la « convention citoyenne des temps de l'enfant » illustre parfaitement cette vision participative : associer les citoyens aux solutions plutôt que subir les dérives marchandes. Cette approche reconnaît les mutations contemporaines des structures familiales, l'augmentation de la monoparentalité, la complexification des calendriers de garde, l'éloignement géographique des solidarités traditionnelles, tout en refusant la facilité de l'exclusion comme réponse à ces défis.
Cette bataille pour l'inclusivité transcende largement les considérations commerciales pour révéler des enjeux civilisationnels majeurs qui interpellent directement notre projet de société. Quand Sarah El Haïry observe l'évolution du regard social porté sur l'enfance, elle met en évidence une transformation anthropologique profonde qui questionne nos valeurs collectives. « Laisser imaginer qu'un enfant ne peut pas aller à l'hôtel avec ses parents, ou ne peut pas aller au restaurant parce qu'on imagine qu'il est trop bruyant, non, non, c'est juste un enfant », rappelle-t-elle avec une justesse qui révèle l'ampleur de la dérive en cours.
On ne souhaite pas laisser s'installer un trait égal entre enfance et nuisance.
Cette résistance aux logiques ségrégatives s'inscrit dans une vision politique plus large qui caractérise l'engagement du MoDem : le refus de la fragmentation sociale comme réponse aux tensions contemporaines. L'exclusion des enfants de l'espace public constitue un révélateur particulièrement éclairant de notre rapport à la diversité des modes de vie. Dans une société vieillissante où les naissances diminuent, ces pratiques accélèrent dangereusement la rupture intergénérationnelle ainsi que le déclin démographique, compromettant les fondements mêmes de la solidarité collective.