📺 Revoir Le Grand jury RTL/LeFigaro/LCI de François Bayrou

François Bayrou
(© François Bouchon/Le Figaro/2019)

François Bayrou, président du Mouvement Démocrate, était l'invité de Benjamin Sportouch, ce dimanche 19 avril à 12h, dans l'émission Le Grand Jury de RTL/Le Figaro/LCI.


Pour revoir l'émission ▶️ https://www.lci.fr/replay/video-le-grand-jury-du-dimanche-19-avril-2020-2151429.html

Retrouvez ci-dessous la retranscription de l'émission :

Bonjour, François Bayrou.

Bonjour.

Merci d'être avec nous en duplex de la ville de Pau.

On dit que vous avez toujours l'oreille du Président de la République. Il ne vous a pourtant pas écouté quand vous avez plaidé pour le report du premier tour des municipales qui reste pour beaucoup comme un manque d'anticipation de cette crise sanitaire, un loupé parmi d'autres estiment les Français.

Il appartient maintenant au gouvernement de réussir le déconfinement.

Déjà des inquiétudes se font sur la rentrée scolaire prévue le 11 mai prochain progressivement. N'est-elle pas trop précoce cette rentrée ? C'est aussi ce que pensent des enseignants, mais aussi des parents. C'est l'ancien ministre de l'Éducation Nationale que nous voudrions entendre sur ce sujet.

Vous, qui êtes un Européen convaincu, les 27 sont-ils à la hauteur de l'histoire avec un grand H, doivent-ils s'endetter ensemble pour éviter les faillites individuelles des États dans un élan de solidarité qui, visiblement, ne va pas de soi ou, au contraire, la dette est-elle une fausse réponse ? Pendant des années, François Bayrou, vous avez été un farouche pourfendeur des déficits publics. Cette crise vous a-t-elle fait changer d'avis ?

Pour commencer, en tant que maire de Pau, vous êtes en première ligne sur la question des masques, principal sujet de préoccupation des Français.

On a encore du mal à comprendre comment tout va s'organiser au niveau national à partir du 11 mai quand on sortira progressivement du confinement. Est-ce que vous, à Pau, vous avez déjà les idées claires sur la manière dont la population sera équipée ou pas de masques, est-ce que vous vous allez en distribuer et combien, le cas échéant, cela va coûter à la ville et à la population, s'il y a un coût ?

C'est une crise qui, comme tout le monde le dit et tout le monde le sait, est absolument sans précédent et je trouve que c'est une crise qui va nous obliger à réfléchir, et réfléchir dans les grandes largeurs.

Je vais répondre à la question des masques évidemment, mais peut-être un petit panorama de ce que cette crise nous dit.

Voilà que les plus grandes organisations du monde, le marché mondial, le marché commercial, les multinationales, tout cela est paralysé par le plus petit organisme que le vivant connaisse : un virus.

La taille d'un virus, c'est un millième de millimètres divisés par quelque 10e. Et donc c'est un organisme que, comme vous savez, on ne voit même pas au microscope, il faut des microscopes particuliers électroniques pour les voir.

Cela dit quelque chose du rapport entre l'homme, la nature, ce qu'on doit en attendre.

Cela dit beaucoup du rapport entre les hommes eux-mêmes et cela dit beaucoup de l'organisation de nos sociétés ou plutôt de l'absence d'organisation de nos sociétés en face du nouveau, de l'imprévu ; de l'inédit et parfois de l'inimaginable.

On va parler de tout cela.

Pour les masques, qu'est-ce nous avions fait à Pau ? Dès la première minute où nous avons entendu parler de cette épidémie, de sa survenue, j'ai réuni les spécialistes hospitaliers, les praticiens et j'ai réuni ensuite l'ensemble des personnels soignants hôpitaux publics cliniques privés, professionnels, médecins de ville, infirmiers, infirmières, pharmaciens, au moins ces cinq catégories-là et nous nous sommes aperçu évidemment qu'il n'y avait pas de masque.

Nous nous sommes mis, nous, responsables de la ville, à la chasse aux masques. Nous en avons trouvé beaucoup parce qu'il se trouve qu'un certain nombre de ces masques avaient été distribués lors de la grippe H1N1, lors de l'épidémie que l'on craignait autour de 2010. Ces masques avaient été distribués, tout le monde avait oublié qu'ils étaient là, y compris l'État, ce qui dit quelque chose de la manière dont l'État évidemment gère la société.

Nous en avons trouvé beaucoup, nous en avons distribué, de sorte que tous les soignants à Pau ont été équipés.

Que ferez-vous pour la population auprès le 11 mai ?

Pour la population, nous avons décidé de commander 500 000 masques que nous faisons fabriquer grâce à des entreprises locales ; entreprises locales dont certaines fournissent les tissus, ont assuré l'agrément biologique de ces tissus et de ces masques. Nous en avons commandé 500 000.

Nous espérons en avoir suffisamment pour le 11 mai, le total c'est pour le mois de juin, nous espérons en avoir suffisamment pour le mois de mai, nous allons les distribuer à tout le monde.

Gratuitement ?

On distribue à tous ceux qui en ont besoin, gratuitement, mais on va demander, parce que cela me paraît civique - à ceux qui le peuvent - de donner une contribution qui correspond au prix du masque.

Est-ce que les habitants de Pau devront porter ce masque, est-ce qu'il y aura une forme, à défaut d'obligation, au moins de recommandation, par exemple dans les transports en commun ?

Vous posez une très bonne question. Pour moi, on voit très bien quels sont les points de passage obligé, les sujets cruciaux que l'on va avoir à traiter.

Il y a la question de l'école qui était évidemment, à mes yeux, nécessaire si l'on voulait sortir du confinement. Un peuple ne peut pas vivre enfermé, pour toutes les raisons du monde, à la fois psychologiques et économiques donc l'école évidemment, mais la question la plus cruciale qui, pour l'instant, ne me paraît pas traitée comme on pourrait s'y attendre, c'est la question des transports en commun et notamment des transports en commun dans les grandes agglomérations.

Là, il me semble que le masque devrait être obligatoire dans les transports en commun, notamment dans les grandes agglomérations.

Chez vous aussi et vous demanderez 3 €pour ceux qui peuvent ? C'est cela, contribuer solidairement ?

On va simplement dire à toute la population : vous avez les masques, on vous fournit les masques gratuitement, mais pour ceux qui peuvent, par geste de solidarité, si vous en avez les moyens, vous avez besoin à peu près de 3 masques par personne, essayez ou acceptez de contribuer pour que la charge de la collectivité soit diminuée.

Est-ce que vous considérez que, ce travail, c'est à vous, en tant que maire de Pau de le faire ? On voit que certains de nos collègues, dans d'autres villes, à Nice par exemple, Christian Estrosi a annoncé que les distributions de masques commenceraient dès demain. Est-ce que cela ne devrait pas être aux départements, aux régions, Laurent Wauquiez le fait dans sa région ? L'État va donner d'ici quelques jours ses propres recommandations et consignes, il y a une sorte de flou, de brouillon entre la responsabilité des différentes strates territoriales.

C'est une question qui renvoie à celle que je posais au début de cette émission.

On a - c'est visible dans les résultats et dans la lutte contre cette épidémie - un problème d'organisation de la société française. La société française se tourne perpétuellement vers l'État centralisé, or cet état centralisé n'a pas la souplesse, la capacité d'anticipation qui permet de faire face à des crises inattendues et qui ne permet pas non plus aux initiatives de prendre corps.

Cette organisation entièrement centrée sur l'État, à mon sens, prouve ici qu'elle n'est pas adaptée.

Il suffit de regarder par exemple ce qui s'est passé en Allemagne et on a une idée. Je ne suis pas en train de dire que l'on sait tout sur les chiffres allemands - est-ce que ce sont les chiffres précis, récoltés de la même manière que les nôtres - mais on voit que l'impact de cette épidémie sur la société allemande, sur les Allemands eux-mêmes, est plus faible que chez nous.

Pourquoi ? Il nous semble qu'il y a deux éléments.

Le premier, c'est qu'il y a eu une anticipation plus grande, la communauté médicale avait semble-t-il une stratégie pour l'instant qui semble réussir et, deuxièmement, il y avait l'initiative locale, régionale ou des villes qui fait que, par exemple, le nombre de lits de réanimation était plus important qu'il ne l'était chez nous.

Vous faites confiance aux régions et aux collectivités locales. Est-ce que ce sera aussi le cas, est-ce que vous pensez que pour les écoles et la réouverture des écoles, ce doit être le fait et la responsabilité des collectivités et des municipalités plutôt qu'une instruction globale de l'État ?

Je pense que cela doit être la responsabilité partagée, réfléchie en commun des directeurs d'école donc de l'organisation de l'Éducation nationale, au plus près du terrain et des municipalités, qui en ont la responsabilité.

C'est là que l'on doit organiser les choses.

Par exemple, Martine Aubry dit : ce n'est pas raisonnable de rouvrir les écoles à partir du 11 mai prochain.

Est-ce aussi votre point de vue ? Sinon, comment allez-vous faire à Pau pour que la réouverture se fasse dans des conditions de sécurité satisfaisante ?

Quelle que soit la décision de l'État, vous le savez bien en France, il y a toujours des gens qui sont en désaccord. C'est même une sorte de sport national d'être en désaccord et, que la décision soit blanc ou noir, de toute façon il y a des oppositions qui s'expriment.

Je pense que l'on peut relever ce défi. En tout cas, on peut le relever dans les régions qui sont moins atteintes que d'autres car le public, les enfants sont, comme on le sait, la population la plus préservée et parce qu'on peut travailler avec les enseignants pour transmettre les bons gestes, les précautions, les mesures de sécurité pour apprendre aux enfants.

Il y a des parents d'élèves et des enseignants qui, eux, sont inquiets et qui ne voient pas d'un bon œil cette réouverture le 11 mai en ayant le sentiment d'une certaine manière que l'on va sacrifier enseignants et enfants au nom d'un impératif économique.

D'abord il n'est question de sacrifier personne. Ensuite, comme vous le savez, je suis un enseignant, d'origine, de vocation, et cela a toujours tenu un très grand rôle dans ma vie.

J'ai été ministre de l'Éducation nationale pendant une période importante en ayant, je crois, de très bonnes relations avec le monde enseignant.

Je suis un enseignant et je connais de par toutes mes fibres cet univers. Je ne crois pas que les enseignants puissent soutenir la thèse que tout le monde est au travail, les soignants sont au travail, les aides-soignants sont au travail dans les EHPAD, les médecins au premier chef, les infirmières et les infirmiers, les caissières dans les supermarchés, tout le monde est au travail, mais les enseignants ne devraient pas assumer leur part de responsabilité et laisser les enfants seuls sans maître ?

Je ne le crois pas, je ne le croirais jamais.

Les professions que vous venez d'évoquer sont des métiers dans lesquels on met en place des protections, ces personnes travaillent avec peut-être des gants, des masques pour l'essentiel. Vous imaginez les enseignants faire cours avec des masques par exemple ?

Chacun va y réfléchir. Tout le monde le sait, il y a au moins une chose sur laquelle les médecins spécialistes des épidémies sont tous d'accord, c'est que, dans cette épidémie-là, les enfants sont la population la plus préservée, la mieux préservée.

Oui, mais qui peut être contagieuse, d'où l'inquiétude des professeurs. Est-ce que vous les considérez comme égoïstes dans leurs réactions ?

Je ne veux pas employer des mots comme cela. Vous voulez m'y pousser, je ne le ferai pas.

Je vous dis clairement que je ne connais pas d'enseignants qui diront : « Qu'ils se débrouillent et que les enfants resteront tout seuls dans leur classe. » Je n'en connais pas.

Ce n'est pas un réflexe, ce n'est pas une attitude, ce n'est pas l'état d'esprit de la vocation des enseignants, je ne le crois pas.

Vous excluez un droit de retrait de la part de certains enseignants ?

Je trouve que ce ne serait pas civique.

Est-ce que vous pensez que la décision qu'a prise Emmanuel Macron du 11 mai est une décision qu'il a eu raison de prendre alors que certains scientifiques considéraient qu'il fallait aller au-delà du 11 mai ? Certains y voient une considération d'abord économique, que le 11 mai n'est pas l'impératif sanitaire.

Je ne partage pas du tout ce sentiment.

Pourquoi ? Premièrement, parce qu'on ne peut pas laisser un peuple enfermé, une société enfermée pendant des mois et des mois.

Pourquoi avons-nous fait le confinement ? Pour ralentir la propagation du virus, pour faire en sorte qu'il n'y ait pas une vague qui envahisse les services d'urgence et de réanimation, pour s'organiser s'organisait en face de cela, pour voir où l'épidémie frappait.

De ce point de vue, il suffit de regarder les chiffres qui, jour après jour, tombent. La propagation du virus est ralentie, l'entrée dans les services de réanimation est ralentie et le nombre de décès, heureusement, baisse même s'il faut parler de tout cela avec une grande prudence.

Pour vous, la date du 11 mai est acquise. On ne reviendra pas dessus, le Président de la République avait évoqué la possibilité, si les conditions sanitaires n'étaient pas réunies, de la repousser.

Pour vous, c'est exclu ?

Disons que ce n'est pas probable, mais le Président de la République, comme tous les gouvernants, mais spécialement le Président de la République, sait que l'on s'adapte, que, gouverner, c'est à chaque instant s'adapter aux conditions qui changent, être capable de prendre en compte les grandes évolutions et de les affronter.

Je ne dis pas que tout est écrit dans le marbre, ce n'est pas la question.

Mais qu'est-ce c'était le 11 mai ? Cela voulait dire deux choses, qu'il y avait huit semaines, deux mois entiers que la population française était confinée. Ce confinement a des conséquences très importantes ; vous disiez tout à l'heure d'un air un peu, comment dire, méprisant qu'il y avait des considérations économiques.

Bien sûr il y a des considérations économiques. L'économie, c'est la vie. Les commerçants, les artisans, toutes les professions indépendantes qui sont sans revenus depuis deux mois, est-ce que vous croyez qu'il ne faut pas les prendre en compte ? À condition de respecter naturellement les précautions sanitaires nécessaires.

Pour moi, de ce point de vue, la date du 11 mai est une date raisonnable.

C'est important, vous dites qu'il faut accepter le risque de victimes supplémentaires pour éviter la faillite de l'économie ?

Non, je regrette beaucoup cette présentation. C'est une présentation sensationnelle ou sensationnaliste.

C'est la question que les Français qui nous écoutent se posent.

C'est une formulation qui vise à dire des choses choquantes pour nos compatriotes.

Ce n'est pas du tout l'idée. L'idée, c'est de protéger au maximum, comme cela se doit, l'ensemble de la population et, en même temps, que cette population puisse vivre car, si on continuait comme cela, naturellement, les ressources pour que chacun puisse vivre, pour payer les retraites, payer les salaires des fonctionnaires, pour assumer les charges, pour faire face aux dépenses de sécurité sociale, ces dépenses-là ne pourraient plus être assumées et donc c'est naturel de faire repartir le pays.

Regardez autour de nous, tous les pays prennent, les uns après les autres, et généralement pour une date plus précoce que la nôtre, la décision d'essayer de faire revivre l'économie, le pays, les relations, l'ensemble de la production.

Cela va mettre des mois, ne vous trompez pas. La crise dans laquelle nous sommes entrés, va être la plus importante que le monde ait connue depuis deux siècles.

Cela veut dire des millions de chômeurs en France ?

Cela veut dire des menaces de millions ou de centaines de milliers de faillites si l'État n'est pas là pour aider, cela veut dire des millions de chômeurs si l'État n'est pas là pour aider, cela veut dire un blocage du pays et, non seulement du pays, mais de l'ensemble de l'économie du monde. Et, donc, bien sûr, il est légitime de prendre en compte cette nécessité qu'un pays puisse repartir après une épreuve comme celle-là, à condition que soient aménagées toutes les conditions de sécurité. Comme vous le dites, j'étais opposé à la tenue du premier tour des élections municipales parce qu'il me semblait que les conditions n'étaient pas réunies.

Une partie de la population dont on n'a pas encore parlé jusqu'à maintenant, on a bien compris, désormais, ce sera la responsabilité individuelle qui comptera, on n'imposera pas aux personnes âgées vulnérables de rester chez elles après le 11 mai, on leur recommandera. Est-ce que cela vous paraît être la bonne ligne ? On a du mal à comprendre pourquoi le virus est si dangereux avant le 11 mai qu'il faille demander aux gens de rester chez eux et, après le 11 mai, de faire appel au discernement de chacun.

Je pense que c'est une très bonne orientation et, si elle n'avait pas été prise, cela aurait été une faute.

Vous ne pouvez pas condamner 25 millions de personnes à ne plus sortir de chez elles quand, autour d'elles, on essaie de faire partir la société. En revanche, on doit multiplier les précautions, les appels à la prudence, l'utilisation de masques, le respect des distances. D'ailleurs, j'ai toujours pensé que 1 mètre, c'était trop près. Je ne suis pas épidémiologiste, mais 1 mètre, c'est trop près, je trouve que 2 mètres ou 1,50 mètre, c'est en tout cas ce que, nous, nous nous efforçons de faire respecter dans notre ville, et sur les marchés en particulier. On va vers un accroissement des distances de sécurité entre les personnes.

À partir de là, bien sûr, on fait appel à la conscience de chacun. Et, chacun ayant à protéger la santé des autres et sa propre santé, il est naturellement participant à cette réflexion.

Pour participer à la sécurité des autres, il y a des projets de traçage numérique à partir des smartphones qui permettent de suivre les Français, si c'est mis en place.

Est-ce que ce système vous inquiète ? Certains déplorent qu'il serait contraire aux libertés individuelles car cela permet de suivre chaque citoyen.

Non, je ne partage pas du tout ce sentiment, d'autant que ce qui est indiqué, la réflexion menée, c'est que c'est fait sur une base volontaire. Si chacun dit : J'accepte que l'on suive mes déplacements pour que je puisse être prévenu en cas de danger, si on repère dans une rue quelqu'un dont on sait qu'il est contagieux, on peut avertir tous ceux qui le croisent et l'ont croisé et cela fait des précautions.

Je ne vois pas de risque, je ne vois pas malice dans cette affaire-là.

Cela ne mérite pas un vote au parlement ? Il y a un débat, mais sans vote, cela crée un peu d'émoi.

Il y aura peut-être un vote, une discussion, je fais confiance au parlement pour cela. Mais cela me rappelle quelque chose que j'ai vécu comme maire. Quand j'ai été élu, j'ai décidé de mettre en place un dispositif de vidéo protection dans la ville de Pau. Il n'y en avait pas. Zéro.

On avait connu des drames absolument épouvantables, vous vous souvenez peut-être de ce pauvre petit garçon qui avait été enlevé, assassiné et hélas coupé en morceaux, il n'y avait pas une seule image, il n'y avait qu'une caméra de banque qui l'avait filmé.

J'ai décidé de mettre en place un dispositif de vidéo protection et l'opposition a dit : Mais cela va être du flicage, la surveillance de la vie privée.

Depuis que c'est en place, et que c'est un réseau serré de vidéo protection, il n'y a pas eu un seul incident qui puisse inquiéter de ce point de vue et, mieux encore, moi qui suis le maire, je n'ai jamais entendu, ni dans les services, ni dans la police municipale qui en est chargé, le moindre signalement d'une activité privée. Donc je fais pleinement confiance à la conscience de ceux qui vont avoir la charge de ce repérage ou de ce suivi pour respecter évidemment les libertés individuelles.

Il y a un autre sujet qui fait débat, c'est le recours à la chloroquine défendu par le professeur Raoult. Est-ce que vous pensez qu'il faut la rendre accessible à tous les malades qui le souhaitent sans attendre les résultats des études ?

Je sais quelle est la responsabilité des pouvoirs publics et je trouve que le Président de la République, spécialement, a suivi cette responsabilité.

Quelle est la responsabilité des pouvoirs publics ? C'est de garantir à tous les citoyens et à tous les patients que l'expérimentation, que le travail de reconnaissance et de suivi d'un traitement est fait de la manière la plus honnête et la plus respectueuse possible, que l'on va regarder ce que les traitements donnent, qu'on va les prendre au sérieux.

Il y a eu des polémiques j'allais dire, pardon, insensées à propos de l'hydroxychloroquine, des polémiques que je n'attendais pas à l'intérieur de la communauté scientifique comme s'il se vidait des querelles très anciennes.

Je suis heureux que l'on ait pu faire cette expérience. Je ne sais pas quel sera le résultat au bout du compte.

Je vois très bien les débats, mais non, il faut garantir que l'expérimentation est faite, qu'elle est bien faite, qu'elle est sérieuse et qu'en effet elle est mise à disposition largement dès lors que les praticiens hospitaliers ou généralistes ont le sentiment, la certitude, l'intuition, que c'est un bon traitement.

On ne va pas se mettre à fermer le robinet. Il n'y a pas à ma connaissance, pour l'instant, de traitement alternatif.

Est-ce que vous en prendriez-vous avant même que le médicament soit homologué ?

Honnêtement, je ne peux pas répondre à cette question car je ne suis pas en situation, mais je sais que l'hydroxychloroquine a été distribué à des centaines de milliers, sans doute millions de personnes, notamment celles qui se rendaient en Afrique et que, grosso modo, ses effets secondaires sont connus. Pour le reste, je n'ai pas l'intention de me prononcer sur le bien-fondé ou pas des traitements.

Je sais que, s'il y a une chance, il faut la suivre.

La question en plus.

Bonjour Monsieur Bayrou, je suis Jean-Philippe Derosier, constitutionnaliste et professeur de droit public à l'université de Lille.

Nous traversons une crise sanitaire d'une gravité et d'une ampleur exceptionnelle. Elle impose d'agir, mais elle ne justifie pas d'agir n'importe comment. Ne croyez-vous donc pas que les mesures prises mettent à mal nos droits et libertés fondamentaux ? Je pense bien sûr au confinement général pour l'ensemble de la population française, mais aussi et tout particulièrement à la détention provisoire qui a été prorogée de plein droit, rendant la justice aveugle aux yeux de personnes présumées innocentes au regard de la loi et de la Constitution ?

Je n'ai pas ce sentiment. Je connais très bien et j'apprécie beaucoup des gens qui ont cette préoccupation, je pense par exemple à François Sureau qui est quelqu'un que j'estime beaucoup, mais je ne partage pas ce sentiment.

Je pense que les pouvoirs publics font ce qu'ils peuvent, que la solidarité est nécessaire pour essayer d'éviter que le mal ne se répande, que l'épidémie ne se répande et donc, non, je n'ai pas cette inquiétude.

Avez-vous l'impression que le gouvernement quand même a pris des mesures globalement qui expliquent qu'aujourd'hui les Français soient défiants, méfiants ? Les sondages le montrent.

Est-ce qu'il y a eu des ratés ?

Le Président de la République l'a dit, et à juste titre : Est-ce qu'on était prêt ?

Non. On n'est jamais prêt en face de l'improbable ou de l'imprévisible.

C'est d'ailleurs un très grand sujet, peut-être pourrons-nous y consacrer quelques phrases dans une minute.

Est-ce que l'on était prêt ? Non, on n'était pas prêt.

Est-ce qu'il y a eu des manques et des ratés ? Oui, il y en a eu notamment, sur les masques et sur les tests.

On n'est pas le seul pays.

(Pause publicitaire.)

Revenons sur les carences de l'État, vous en parliez, et en particulier sur les tests.

L'État n'a pas produit suffisamment de tests, ce qui fait que des municipalités comme la vôtre sont obligées de passer des accords avec les laboratoires locaux. À Pau, vous allez produire 1 000 tests par jour.

C'est incroyable que des communes doivent se substituer à l'État ! Non ?

Pour un journaliste du Figaro, votre formule est surprenante. L'idée que vous considériez que c'est à l'État de produire les tests n'est pas habituelle dans la ligne éditoriale du Figaro !

Habituellement, vous pensez, et je pense, que ce type de production industrielle doit être assumé par le tissu industriel. Ce n'est pas par hasard que, dans ma vie, j'ai fait campagne, notamment à l'élection présidentielle, sur le thème Produire en France, Produire en Europe, car nous sommes trop dépendants de productions lointaines et, en effet, cela nous met dans une situation de faiblesse.

Vous êtes maire d'une grande ville et vous avez donc les moyens d'aider à la production, mais, dans les petites communes, ils ne pourront pas le faire.

Vous avez raison. C'est pourquoi il existe des réseaux d'intercommunalité et nous en avons d'ailleurs ici avec le Pays de Béarn.

Je reviens à la question centrale. Je le disais, l'habitude française, le type de fonctionnement de la société française est de perpétuellement se tourner vers l'État. Il se trouve que l'État, nous le savons depuis longtemps, n'a pas la faculté de prévoir et notamment ce qui est inédit, ce qui est bouleversant et qu'il se prépare trop souvent pour après selon les guerres d'autrefois. Nous l'avons vécu à de très nombreuses reprises.

En plus, l'État ne favorise pas les initiatives, car ces dernières sont toujours surprenantes, toujours dérangeantes, toujours hors normes. Une des grandes questions que nous devrons nous poser à mon avis concerne l'organisation de la société française.

Doit-elle continuer à être aussi centralisée qu'elle l'est ? Devons-nous toujours considérer ce que votre question induisait, à savoir que l'intervention d'une collectivité locale importante qui essaie de s'organiser est bizarre ? Que cela ne devrait pas arriver, que cela devrait être fait par l'État ? 

A contrario, je crois que, s'il y a un point que cette crise nous apprend, notamment en considérant l'Allemagne, s'il y a un élément que nous devons retenir, c'est que les réseaux d'initiatives locales sont plus efficaces pour répondre à l'imprévisible que l'État centralisé.

C'est une grande question.

Vous l'avez dit, le Président de la République est un Jacobin, un centralisateur et, pour lui, l'État, c'est beaucoup… Vous dites que c'est trop. Le lui avez-vous dit ? En est-il conscient ? Est-ce l'un des changements qu'il est en train d'opérer ?

Il faut que vous sachiez que je ne raconte jamais un mot de mes conversations avec le Président de la République. C'est vrai avec Emmanuel Macron, mais, pardonnez-moi de le dire, c'était également vrai pour les précédents Présidents, car j'estime que, lorsque l'on est un responsable d'un grand courant démocratique du pays, on a une sorte de coresponsabilité, que l'on soit dans la majorité, ce qui est mon cas, ou dans l'opposition, ce qui était le cas auparavant.

Va-t-il changer ?

J'en ai évidemment beaucoup parlé avec lui et je ne crois pas que votre formule selon laquelle il est un Jacobin soit exacte. Je ne l'ai jamais entendu défendre une position jacobine. Il défend une position républicaine, ce qui n'est pas tout à fait la même chose.

Je reviens à la question.

Que nous manque-t-il le plus en France ? Si j'essaie de regarder les 30 ou 40 dernières années, durant lesquelles tous les courants politiques se sont succédés au pouvoir, qu'est-ce qui nous manque le plus ? C'est la faculté de construire des stratégies nationales à long terme.

Cela signifie - je réagis sur ce point - que, de votre point de vue, ce Gouvernement d'union nationale, dont nous entendons parler depuis quelque temps, serait une bonne idée face à la crise et la situation dans laquelle se trouve le pays ?

Pardonnez-moi, c'est la question suivante, mais je n'avais pas fini avec la précédente. 

Selon moi, nous devons songer à bâtir ou rebâtir une organisation qui, à mon sens, doit rendre compte au Président de la République, car c'est lui qui a la responsabilité du destin de la Nation, et se fixer comme mission de regarder ce qui pourrait arriver et qui serait difficile, inquiétant, qui poserait problème à la Nation, pour proposer des pistes d'organisation et de réponse.

S'agissant particulièrement de la crise que nous vivons, il y a dix ans, lors de la grippe H1N1, la France avait constitué des stocks de masques et de vaccins. Cela avait entraîné une grande polémique pour les vaccins, disant que l'État avait agi ainsi dans l'intérêt de multinationales ou de sociétés de pharmacie privée.

Du coup, on a laissé partir les masques et on s'est trouvé dans une très grande difficulté qui n'est pas encore résolue pour faire face à cette épidémie nouvelle.

Vous venez de mentionner que l'État prépare toujours la guerre d'avant. Pourquoi l'État serait-il capable aujourd'hui de faire ce qu'il n'a jamais réussi à faire, c'est-à-dire être le stratège prévoyant dont vous parlez ?

Car je ne compterai pas, si j'en avais le pouvoir, confier une telle responsabilité à l'État. Je pense que cette responsabilité doit être confiée à une petite équipe. Jean Monnet avait fait cela au lendemain de la guerre, en créant le Commissariat national au plan, qui était une manière de proposer des stratégies.

Je pense qu'il est temps que nous puissions, nous tous, la société française, et pas en se réfugiant uniquement derrière l'ombre tutélaire et protectrice de l'État, nous créions une réflexion stratégique partagée par tous qui envisage ce que les autres n'envisagent pas.

Cette réflexion doit-elle se faire dans le cadre d'un Gouvernement resserré d'unité nationale ? Jean-Pierre Chevènement parle de Gouvernement de salut public.

Si c'était amusant, nous pourrions en sourire, car vous aurez observé que chacun, et peut-être moi aussi, retrouve dans cette crise ses obsessions personnelles. Les nationalistes pensent qu'il faut faire du national, les écologistes pensent, et je l'entends, que l'on ne fait pas assez d'écologie dans le soutien à l'économie, ceux ayant une réflexion sur la monnaie plus stricte ou plus généreuse retrouvent absolument tous leurs certitudes et leurs obsessions. 

C'est comme cela et je vais essayer de ne pas retomber dans ces travers.

J'ai toujours défendu l'idée que, dans les circonstances graves, l'union nationale était une des réponses, mais l'union nationale n'est pas, pour moi, l'addition de partis en désaccord sur tout. Je vais même vous donner un scoop à l'avance : je suis certain que, si cela leur était proposé, les formations politiques en question le refuseraient, car c'est comme cela, car on ne veut pas faire de cadeaux aux personnes au pouvoir.

Faut-il le faire avec les personnalités sans passer par les appareils ?

Oui. C'est une piste et une possibilité. Ce qui est important, c'est que l'état d'esprit de l'équipe dépasse les intérêts partisans.

Faut-il changer le Premier Ministre dans le cadre de cette nouvelle étape que vous appelez de vos vœux ?

Pour l'instant, le Gouvernement est au travail. Le Premier Ministre s'exprime cet après-midi. Vous n'imaginez pas que je vais apporter une réponse positive à votre affirmation !

Au demeurant, la responsabilité personnelle du Président de la République est de constituer l'équipe gouvernementale. Cette question ne peut donc être posée qu'au Président de la République.

Toutefois, je veux simplement dire que le Premier ministre et l'équipe gouvernementale ont fait et font tous ce qu'ils peuvent dans ces circonstances-là.

Y aura-t-il besoin d'un nouveau souffle politique après cette crise ? C'est pour cela que nous posons la question d'une nouvelle équipe gouvernementale avec un nouveau Premier Ministre.

Cette crise est d'une dimension sans précédent. Elle va entraîner pour le pays, tous les pays européens, du monde occidental et de la planète entière, des difficultés économiques dont nous n'avons même pas idée et donc des difficultés sociales auxquelles il faudra faire face.

C'est à cela que le monde de la responsabilité politique doit se préparer. C'est cela qui m'intéresse.

Pardonnez-moi de vous dire que les considérations pour changer tel ou tel, remplacer tel ou tel par tel ou tel sont des considérations dans lesquelles je ne songe même pas à entrer.

Cela signifie-t-il, François Bayrou, que, pour préparer les chantiers qui s'annoncent et que vous venez de décrire, préparer une forme de planification que vous évoquez, qu'il faut abandonner les réformes qui étaient en cours, comme celle des retraites, celle de l'assurance chômage avec la dégressivité des allocations-chômage ?

Faut-il mettre toutes ces réformes de côté pour se concentrer sur les chantiers que vous commencez à esquisser ?

Si nous voulons que cet état d'esprit nouveau pour lequel je plaide, c'est-à-dire dépasser les intérêts "majorité contre opposition", "parti contre parti", essayer de se fixer uniquement dans l'intérêt national et l'intérêt des Français, si ce doit être la ligne, alors il faut que les sujets les plus polémiques soient écartés pour un moment.

Il faut que nous ayons le désintéressement de considérer que, si l'on veut rassembler le plus largement possible les sensibilités des Français, il est alors très important que l'on ne mette pas des mines, des sujets d'affrontement sur la table pendant toute cette période.

Ce que nous allons devoir vivre - je le répète, mais vous le savez bien si vous y réfléchissez -, c'est sans précédent depuis deux siècles. Cela ne s'est jamais produit, pas seulement chez nous, mais dans toute l'Europe et sur la surface de la planète.

Vous parlez de concorde nationale. Cela veut-il finalement dire qu'il faut repousser encore davantage les élections municipales, peut-être en mars prochain et les cumuler avec les élections régionales, pour éviter d'avoir un débat politique d'ici là ?

Qu'en pensez-vous ?

C'est une possibilité, mais, pour l'instant, des décisions ont été prises. Il nous a été indiqué que, vers la dernière décade du mois de mai, le 23 mai je crois, la Commission chargée de cette question de santé dira si, oui ou non, elle considère que ces élections peuvent se tenir au mois de juin.

Comme vous l'imaginez, j'ai quelques doutes, car je sais très bien que, si une partie de la population est encore confinée, si on lui demande de ne pas sortir, la concomitance entre les élections et cette discipline sanitaire est "contradictoire".

Je reviens à la gestion de cette crise. L'État a lancé un gigantesque plan de soutien à l'économie qui se traduit par une augmentation spectaculaire de la dette. 

Vous avez souvent dénoncé le caractère mortifère de la dette publique. Avez-vous changé d'avis sur ce point ?

Je n'ai sûrement pas changé d'avis, car la raison pour laquelle je me battais contre les déficits et l'endettement excessifs en temps de prospérité, c'était car, et vous retrouverez beaucoup de déclarations de moi sur ce sujet, il fallait réserver la capacité d'endettement au moment crucial où nous en aurions besoin pour des questions de vie ou de mort, pour simplifier. 

Cela n'a malheureusement pas été fait - responsabilité de tous les courants politiques sans exception -, ce qui fait que nous avons aujourd'hui moins de capacités d'action que nous n'en aurions eu si nous avions fait attention quand il le fallait.

C'est la même logique. La logique du sérieux dans la gestion, c'est de pouvoir agir quand on en a besoin. C'est pour garder ou constituer des moyens. Faire des économies pour pouvoir agir, c'est ce que font toutes les familles, c'est ce que font les collectivités locales sérieusement gérées et c'est ce que l'État doit faire.

À votre avis, faudra-t-il forcément augmenter les impôts pour régler cette facture ? Ne berce-t-on pas les Français d'illusion en leur disant que, pour l'instant, il n'y a pas d'augmentation, alors qu'il y en aura forcément par la suite ?

Tout dépend de la nature de la dette constituée.

Je veux soutenir une thèse devant vous : cette épidémie n'est la faute de personne. Aucun des pays frappés, même pas la Chine qui en est à l'origine, n'est le responsable de ce qui nous est arrivé à tous.

De ce fait, l'action publique, l'argent que nous avons à dépenser pour contrecarrer ce drame et pour préparer la suite, cet argent-là, il ne peut pas être mis au compte de chaque société exactement comme on lui fait des prêts ou on l'endette dans des circonstances normales.

Pour bien comprendre, s'agissant de cette crise sociale, craignez-vous aussi une révolte sociale et un retour, par exemple, d'une nouvelle forme des gilets jaunes dans le contexte économique très grave que vous décrivez ?

Il faut que je termine le raisonnement précédent et je répondrai après naturellement.

Comme cette épidémie n'est la faute de personne, alors il faut que nous en partagions la charge. Il existe plusieurs moyens pour cela. Nous pourrions effectuer des emprunts en commun - je pense notamment à l'Union européenne -, nous pourrions demander à la BCE d'être, d'une certaine manière, prêteur en dernier ressort et, d'une certaine manière, c'est ce qu'elle fait. 

Nous pourrions imaginer des prêts spéciaux à remboursement différé, prolongés dans le temps, à quelques décennies. Après tout, il est possible d'emprunter à 30 ans, 40 ans ou 50 ans - je ne sais pas, c'est à nous d'en décider - pour pouvoir revenir "à flot".

Quoi qu'il en soit, on ne peut pas demander que la dette constituée pour faire face à cette épidémie soit traitée exactement de la même manière que les dettes de "confort" que nous avons consenties trop souvent.

C'est une circonstance exceptionnelle et il faut donc un mécanisme exceptionnel pour aider financièrement les États et donc les sociétés ayant à faire face à ce drame.

Craignez-vous une crise sociale ?

Oui.

Quelle forme pourrait-elle prendre ?

Tout d'abord, je souhaite que nous l'évitions, mais je pense que l'enchaînement crise sanitaire/crise économique/crise sociale/crise démocratique est un enchaînement dont l'histoire a montré qu'il était logique.

Cela signifie-t-il qu'il faudra voter plus tôt ? Faudra-t-il faire un référendum ? Toutes les questions sont sur la table, s'il y a crise démocratique.

Je ne connais pas la réponse, car je ne connais pas les circonstances, mais je décris un enchaînement dont quiconque a un peu ouvert les yeux sur l'histoire connaît le caractère menaçant. Je regarde cela avec précision et, oui, je pense qu'il existe un risque.

Pourra-t-il, selon vous, y avoir une victoire des populistes en 2022 ?

Je ne le souhaite pas et je ferai tout pour l'éviter.

Revenons au nœud de la question. Si ce risque existe, nous devons nous y préparer. Cela signifie qu'il faut une réflexion stratégique partagée du pays, des grandes forces démocratiques, des grandes institutions pour réfléchir à la manière dont il est possible de conjurer ce risque.

Étant donné la dimension de la crise, ce risque est immense et, face à ce risque immense, nous devons donc nous préparer. Cela signifie un état d'esprit non partisan, écartant la guerre entre formations politiques ou entre majorité et opposition, essayant de réfléchir, de la manière la plus désintéressée possible, aux réponses qu'une société comme la nôtre peut apporter. 

Je n'ai pas dit qu'une majorité peut apporter, ni qu'un pouvoir peut apporter. Je pense au pays et à la société tout entière.

Pendant cette émission, Jean-Luc Mélenchon s'est exprimé et il a indiqué qu'il n'enverrait pas son petit à l'école, car il existe trop de dangers à le faire.

Comprenez-vous cette position ?

Je sais très bien qu'une personne ayant une grande maison, un jardin, un grand appartement, la faculté de faire garder ses enfants peut adopter une telle position, même si je ne la trouve pas totalement solidaire.

Il estime que cette décision ne vise qu'à permettre aux Français de revenir au travail, car la compétition continue entre les différentes économies. Il n'y voit qu'une raison économique.

Excusez-moi, mais les raisons économiques sont nobles. Les personnes prétendant que l'économie, c'est mal, c'est sale, qu'il ne faut pas s'en occuper sont des personnes qui, pour la plupart d'entre elles, vivent, en réalité, des ressources que la Nation met à leur disposition.

Cependant, demandez à un artisan, un commerçant, un chef de petite entreprise ou un micro-entrepreneur s'il considère que l'économie, c'est nul.

Personnellement, je défends le fait que nous avons besoin d'une économie vivante et en bonne santé pour une société vivante et en bonne santé. De ce point de vue, je ne partage donc pas ce "mépris" qui consiste à dire : "Nous n'avons pas besoin que les enfants soient à l'école, nous pouvons nous en occuper tout seul dans la famille".

Lorsque vous vivez à cinq ou six dans un appartement de 75 m² dans un grand ensemble, je ne crois pas qu'il soit bon, juste et sain de dire : "Restez confinés et les enfants n'iront pas à l'école". 

Je ne partage pas ce sentiment pour toutes les raisons y compris les raisons sociales et culturelles, car on a besoin des échanges et de la langue.

Auchan avait annoncé une prime forfaitaire de 1 000 €. Elle devait être versée aux 65 000 salariés qui continuent de travailler. Finalement, le distributeur a indiqué qu'elle sera proportionnelle au temps de travail effectif. D'après les syndicats, certains caissiers toucheront seulement 50 € et, de ce fait, sur les réseaux sociaux, cela réagit beaucoup : "Le virus ne proratise pas ses victimes en fonction de leur contrat de travail" déclare la CFDT et d'autres appellent à boycotter Auchan.

Comprenez-vous la décision d'Auchan ou la trouvez-vous décalée, voire déplacée ?

À la mairie de Pau, nous avons institué une prime et elle est naturellement proportionnelle au temps de travail.

Toute autre est, bien sûr, la situation des contrats de travail précaires extrêmement courts, qui ne font que quelques heures et il ne serait pas juste de les priver complètement de prime simplement car ce sont des contrats de travail partiel.

Cela doit donc être réfléchi, à l'intérieur de l'entreprise, avec les syndicats de l'entreprise et si possible avec des conseils positifs et amicaux de la puissance publique.

Faut-il donner des primes au personnel des EHPAD ?

Oui.

Merci beaucoup, François Bayrou.

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