Marc Fesneau : « On ne peut pas défendre les agriculteurs et bloquer toutes les réformes à l’Assemblée »
Grand invité politique de Sud Radio le lundi 23 décembre au matin, Marc Fesneau, ancien ministre et figure du bloc central, est revenu longuement sur la crise budgétaire, l’état du parlementarisme et la crise agricole. Face à Jean-François Achilli, il assume une ligne de responsabilité et dénonce les stratégies de blocage et de récupération politique, notamment de Rassemblement national et de La France insoumise.
Grand invité politique de Sud Radio le mardi 23 décembre au matin, Marc Fesneau, président du groupe Les Démocrates à l’Assemblée nationale, est revenu longuement sur la crise budgétaire, l’état du parlementarisme et la crise agricole. Face à Jean-François Achilli, il assume sa ligne, celle de la responsabilité, et dénonce les stratégies de blocage et de récupération politique du Rassemblement national et de La France insoumise.
Finances publiques : « La loi spéciale est un pis-aller »
Alors que les parlementaires s’apprêtent à examiner une loi spéciale pour assurer la continuité budgétaire de l’État, Marc Fesneau se montre sans ambiguïté. Pour lui, cette situation marque d’abord un échec collectif.
« C’est d’abord un échec pour les parlementaires, en particulier pour ceux de l’opposition qui disaient : “Laissez-nous faire, nous sommes capables de nous entendre.” »
Il rappelle que la loi spéciale ne constitue en rien une réponse structurelle aux difficultés des finances publiques : elle permet uniquement de lever l’impôt, reconduire le budget précédent, payer les fonctionnaires et emprunter sur les marchés. « Cela ne peut pas durer », insiste-t-il.
Le choix du gouvernement de ne pas recourir immédiatement à l’article 49.3 visait, selon lui, à faire le pari de la maturité parlementaire. Un pari partiellement perdu sur le projet de loi de finances, alors même que des compromis avaient été trouvés sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale.
Sénat, Assemblée : « Respecter les deux chambres »
Interrogé sur les tensions institutionnelles, Marc Fesneau récuse toute logique de confrontation avec le Sénat.
« L’ennemi n’est pas le Sénat. Il faut respecter les deux chambres. »
Il salue le travail de Sébastien Lecornu pour tenter de bâtir un compromis, tout en pointant les contradictions internes aux Les Républicains. Il regrette surtout que le texte issu du Sénat ait conduit à un déficit supérieur à 5 %, rendant nécessaire une reprise rapide des discussions budgétaires dès la rentrée.
49.3 : « Assumer des choix »
Sur l’éventualité d’un recours au 49.3, Marc Fesneau adopte une position pragmatique. Il refuse d’en faire un tabou démocratique :
« Le 49.3, c’est le gouvernement qui engage sa responsabilité. Si les parlementaires votent contre, le gouvernement est renversé. Si ce n’est pas démocratique, je ne sais pas ce que c’est. »
Il observe que certaines forces politiques, notamment au Parti socialiste, évoquent cette option en privé sans l’assumer publiquement. Pour lui, la cohérence politique suppose d’assumer ses choix : refuser le budget ou accepter qu’un pays ait besoin d’un cadre financier stable.
Crise agricole : « Une instrumentalisation politique »
Sur la crise agricole, Marc Fesneau insiste sur sa dimension d’abord sanitaire, liée à des décisions difficiles mais scientifiquement fondées. Il reconnaît la violence des mesures pour les éleveurs, tout en appelant à ne pas céder aux discours complotistes.
« Un responsable public ne peut pas être un apprenti sorcier. »
Il rappelle les enjeux : une maladie à forte mortalité qui, si elle se généralisait, pourrait entraîner la mort de centaines de milliers de bovins. Les protocoles peuvent évoluer, notamment avec la vaccination, mais uniquement sur des bases scientifiques solides.
Surtout, il dénonce la récupération politique :
« La France insoumise et le Rassemblement national essaient de s’en saisir pour en faire un objet politique. »
Selon lui, les agriculteurs sont de bonne foi, mais certains acteurs politiques tentent de « jouer » avec leur détresse, tout en bloquant par ailleurs les textes visant à alléger les contraintes pesant sur les filières agricoles.
Mercosur : « Dire la vérité aux agriculteurs »
Enfin, interrogé sur l’accord Mercosur, Marc Fesneau se montre prudent. Il rappelle que la France a posé des conditions claires : clauses de réciprocité, mesures miroir et clauses de sauvegarde permettant de suspendre les importations en cas de déséquilibre des marchés.
« On ne peut pas demander des garanties et, si on les obtient, dire qu’on ne signera pas. »
Il souligne également les limites de la méthode européenne : un accord négocié depuis vingt-cinq ans, largement invisible du débat public jusqu’à sa phase finale. Mais pour lui, le cœur du problème agricole demeure structurel : compétitivité, accès à l’eau, charges et sécurisation des contrats.