Marc Fesneau : "Les agriculteurs ont surtout besoin de cohérence"

Marc Fesneau

De la Roumanie aux Pays-Bas en passant par la Pologne et l’Allemagne, les agriculteurs sont en colère. La tension monte aussi en France. Le ministre de l’Agriculture, Marc Fesneau, répond aux questions du JDD sur ce dossier brûlant.

Le JDD : Dans le Sud-Ouest, les agriculteurs en colère demandent la visite du Premier ministre et des aides, que leur répondez-vous ?

Marc Fesneau : Les agriculteurs n’ont pas seulement besoin de la venue d’un ministre ou d’un Premier ministre, ils attendent surtout des réponses, et nous y travaillons.

J’ai échangé vendredi après-midi avec les acteurs de la filière bovine pour renforcer notre soutien face à la maladie hémorragique épizootique qui frappe durement cette région. Nous déployons un dispositif d’aide qui va prendre en charge une large partie des frais vétérinaires.

Deuxième sujet, la viticulture, une filière en crise – pas seulement en Occitanie : on finalise un plan, au-delà des aides d’urgence déjà fortement mobilisées, plus de 220 millions d’euros en 2023.

Enfin, la question de l’eau, avec des plans à déployer plus vite dans cette région qui fait face à des difficultés immenses liées au dérèglement climatique.

Quelles réponses concrètes allez-vous apporter à l’« overdose normative », pour reprendre le terme d’un rapport du Sénat ?

​Il est encore un peu tôt pour vous donner les détails, mais oui, on a la volonté d’avoir des procédures qui soient raccourcies, sur le modèle de ce qu’on a accompli sur la question énergétique.

Il y a des départements entiers, en Bretagne ou ailleurs, où les éleveurs renoncent, à cause des contraintes de procédures, à leur projet de bâtiment d’élevage, dont ils ont pourtant besoin pour améliorer le bien-être animal, ce qui nous amène au sujet de la cohérence des règles entre elles.

Nous avons déjà fait beaucoup avec la loi industrie verte, dont bénéficiera à 100 % le secteur agricole.

Un autre exemple, la haie : tout le monde s’accorde à dire que c’est un élément important de biodiversité, contre l’érosion des sols, etc. Or, le cadre normatif dissuade les agriculteurs de les réimplanter !

Nous nous sommes attelés à tout cela, et devons accélérer, conformément aux demandes du président de la République et du Premier ministre.

Et au niveau européen ?

La politique agricole commune (PAC) s’adapte avec un certain nombre d’éléments supplémentaires, notamment les éco-régimes, la rotation des cultures… La rotation, ce n’est pas simplement une norme environnementale, elle a un intérêt aussi pour améliorer la productivité ou pour augmenter la matière organique dans les sols.

On a néanmoins parfois trop de dispositifs empilés : un seul exemple, sur lequel je me bats depuis huit mois, c’est la question des jachères. Nous sommes un continent qui importe désormais structurellement des céréales : 20 millions de tonnes en 2022, 40 cette année ! J’ai mobilisé la quasi-totalité des ministres européens pour saisir la Commission européenne.

Si on ne sait pas répondre à la demande française, on acte une forme de décroissance et le fait que d’autres vont nous nourrir. Là encore, les agriculteurs réclament surtout de la cohérence.

N’êtes-vous pas aussi prisonnier d’un « en même temps », entre annonces françaises et impératifs européens ? Alors que le Sénat s’est prononcé à l’unanimité cette semaine contre l’accord avec le Mercosur, on attend toujours la « clause miroir » annoncée par Emmanuel Macron l’an dernier au Salon de l’agriculture…

L’accord avec le Mercosur, nous nous y opposons, et il n’est pas adopté, parce que le président de la République se bat depuis sept ans ! Même chose pour l’accord de libre-échange avec l’Australie.

Nous défendons nos intérêts au niveau européen. Par exemple, la France a obtenu la révision du statut du loup : 25 ans que ça traînait ! Il y aura une réunion des ministres de l’environnement à ce sujet le 31 janvier.

Quand on se bat, on fait bouger les choses. Mais j’insiste : sauf à penser qu’on pourrait être un pays autarcique, heureusement qu’on a l’Union européenne.

Pour nos indications géographiques protégées (IGP), pour avoir un étiquetage harmonisé, par exemple pour mieux différencier le miel d’origine française ou européenne. Pour exporter nos produits, aussi. Il faut faire du Green Deal, pensé avant le covid et la guerre en Ukraine, un objet de transition au service d’un objectif de souveraineté.

(...)

Malgré des sujets qui restent clivants, la société française semble prendre conscience des difficultés du monde agricole. Vous avez annoncé vouloir le faire découvrir aux écoliers et collégiens…

Les Français aiment leurs agriculteurs et les ont toujours soutenus. On a besoin, dès le plus jeune âge, de comprendre notre lien aux territoires ruraux et à l’agriculture, qui s’est distendu dans un monde plus urbanisé que jamais.

Il nous faut une imprégnation collective de la réalité des sujets agricoles, et aussi un regard positif.

Tout le monde le reconnaît en dehors de nos frontières, on a une agriculture formidable avec des produits exceptionnels ! C’est là-dessus qu’il faut qu’on arrive à capitaliser, et qu’enfin on reconnaisse nos agriculteurs et change de regard.

📰 Retrouvez l'intégralité de l'entretien dans le JDD

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