Lettre de François Bayrou au Président de la République à la suite des rencontres de Saint-Denis

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Retrouvez l'intégralité de la lettre de réponse de François Bayrou, Président du Mouvement Démocrate, au Président de la République à la suite des rencontres de Saint-Denis ayant rassemblé les différents responsables de partis politiques.

Monsieur le Président de la République,

Nous avons bien reçu votre compte-rendu de la réunion à laquelle vous nous avez conviés à Saint-Denis le 30 août dernier.

Nous voulons tout d’abord vous exprimer notre satisfaction de l’organisation de cette rencontre. Vous n’en serez pas étonné. C’est un des thèmes majeurs de l’engagement politique du Mouvement Démocrate que de voir consacré, mieux reconnu et renforcé, le pluralisme dont se nourrit notre démocratie. C’est bien ce que vous avez souhaité exprimer en invitant à cette rencontre tous les chefs de partis politiques représentés par un groupe au Parlement et nous y sommes sensibles.

Les points abordés lors de cette rencontre mériteraient tous un développement mais nous nous en tiendrons ici aux principaux.

Nous avons particulièrement apprécié l’unanimité qui s’est exprimée autour du soutien à l’Ukraine. Cette unanimité est tout à fait notable en ce qu’elle est un élément de nouveauté dans le paysage politique français. Pour nous, cette unanimité vaut engagement moral de mieux expliciter le type de soutien et le calendrier de ce soutien dans le moment éminemment critique de la contre-offensive de l’Ukraine.

Nous avons également apprécié l’engagement que vous avez exprimé d’organiser un débat sur la situation en Afrique. De nombreuses inquiétudes s’expriment à juste titre sur notre place sur le grand continent voisin où la France a compté et, nous en sommes persuadés, compte de nombreux partenaires et amis.

Au premier plan de ces préoccupations figure le Maghreb et l’attente que tant de nos compatriotes ressentent et expriment d’une refondation de nos relations avec les pays qui le composent. Au-delà de l’élan naturel de solidarité à destination du Maroc en cette période si douloureuse, les liens de fraternité qui devraient unir les deux rives de la Méditerranée imposent une reprise du dialogue sur de nouvelles bases.

La paix dans le Caucase est encore trop fragile pour que la France ne s’y engage pas de tout son poids. Les populations civiles, premières victimes du conflit entre l’Arménie et l’Azerbaïdjan, ne peuvent être placées en situation d’otages. Devant l’ampleur de la catastrophe humanitaire, les récentes déclarations de la diplomatie française, en appelant l’Azerbaïdjan à ses responsabilités, vont dans le bon sens à condition qu’elles ouvrent la voie à des actions concrètes, en concertation avec nos partenaires, en faveur d'un règlement pacifique et définitif.

S’agissant de l’organisation des pouvoirs, l’idée d’une expérimentation locale est pour nous très positive.

Pour ce qui est de l’organisation des collectivités locales, nous ressentons particulièrement les interrogations et les incompréhensions autour du mode actuel de définition et de fonctionnement des régions. L’immense majorité de nos concitoyens a même du mal à se représenter le périmètre régional, notamment, mais pas seulement, dans les grande régions récemment et artificiellement créées (Nouvelle-Aquitaine, Occitanie, Grand Est et même Auvergne-Rhône-Alpes).

Au-delà de cette question vitale d’identité, nous constatons deux dysfonctionnements majeurs. Les électeurs ne connaissent pas leurs élus. Il n’y a pas 5 % des électeurs qui peuvent citer un conseiller régional. Cela ne peut qu’apparaître insupportable dans un temps où la démocratie devient de plus en plus médiatisée et de plus en plus personnalisée. D’autre part, l’absence d’un dialogue entre les exécutifs régionaux et les grands exécutifs locaux présents sur le territoire régional (conseils départementaux plus proches du monde rural, grandes villes et grandes agglomérations) nous paraît être une pratique insoutenable. La définition nouvelle que nous appelons de nos voeux n’exclurait nullement l’élection des présidents de conseil régionaux (et d’une part de leurs exécutifs) au suffrage universel direct.

Le même type de critiques doit être fait sur la loi municipale « PLM ». Il n’est pas possible, que dans les trois plus grandes collectivités locales de notre pays, les maires soient choisis en-dehors de l’expression du suffrage de nos concitoyens. Cette survivance, résidu d’un temps où le pouvoir exécutif national craignait la concurrence des grands « féodaux » de la vie locale, n’a plus lieu d’être et est inexplicable.

La garantie du bon fonctionnement d’une démocratie réside dans l’expression du pluralisme des opinions.

En ce sens, la question de la proportionnelle est à nos yeux centrale dans une période de renforcement de la défiance entre le pouvoir et les citoyens. Elle est au coeur de notre engagement commun car elle permet la représentation juste et équitable des opinions des Français. À l’inverse, le mécanisme du scrutin majoritaire – renforcé par la proximité entre élection présidentielle et élections législatives – exclut des millions de voix exprimées d’une représentation. Et, nous le voyons, il ne garantit plus l’obtention d’une majorité absolue, argument longtemps opposé à l’instauration de la proportionnelle. La culture de l’affrontement, induit par le fait majoritaire, n’est ni bonne ni saine dans une démocratie pacifiée et efficace. En consultant et associant les partis politiques à l’occasion de ces rencontres de Saint-Denis, dans le dialogue et la responsabilité, vous participez heureusement à ce changement de culture politique que nous voyons comme nécessaire.

Autre instrument du pluralisme, le financement des partis politiques et en particulier des campagnes électorales. Il est de plus en plus difficile, y compris pour des partis politiques de premier plan, de trouver des financements pour leurs candidats. Ce refus des banques a pour conséquences la soumission de courants d’opinion à des intérêts privés ou à ceux de puissances étrangères. Cela ne peut être considéré autrement que comme insoutenable. Il nous paraît donc indispensable de remettre sur le métier la question de la Banque de la démocratie, engagement exprimé au cours de la campagne de 2017, dans le but d’assurer, dans l’équité et la transparence, le juste exercice de l’expression démocratique.

L’élargissement du champ du référendum est souhaitable si elle est réservée aux grands enjeux et aux sujets desquels l’ensemble des données et de l’information sur les enjeux, ait été donné aux Français. En tant qu’instrument constitutionnel, le référendum permet de sortir des blocages parlementaires en rendant la parole aux Français, agissant en citoyens éclairés. Il demeure que dépendant d’une révision constitutionnelle, cette réforme du référendum exige l’assentiment des deux assemblées parlementaires et leur accord sur le même texte. Un tel défi mérite d’être relevé, mais il constitue une gageure de laquelle les formations politiques devront se saisir et sur laquelle ils devront s’entendre.

Ce qui implique enfin une presse libre, la plus indépendante possible des grandes influences financières. L’organisation de la presse doit permettre en effet la diffusion d’informations fiables, les plus objectives possibles et, de ce fait, la vitalité démocratique. Nous regardons la concentration des principaux médias dans les mains de quelques groupes économiques privés avec inquiétude et pour cette raison participerons avec engagement aux États Généraux de l’information que vous avez annoncés. Nous tenons à honneur de voir repris sur ces sujets la réflexion du Conseil national de la Refondation.

Nous vous renouvelons nos encouragements et notre soutien dans votre démarche en faveur de la cohésion de la Nation et nous vous prions d’agréer, Monsieur le Président de la République, l’expression de notre très haute considération.

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