Jean-Marie Vanlerenberghe : « Le conclave sur les retraites ne s’est pas achevé par une fumée blanche, mais il ne faut pas en rester là »
Jean-Marie Vanlerenberghe, sénateur du Pas-de-Calais et doyen de la chambre haute a annoncé sa démission de son mandat. Ce mercredi 25 juin, il a interrogé pour la dernière fois le gouvernement et plus particulièrement le Premier ministre sur la clôture du conclave sur les retraites.
Gérard Larcher : Avant de lui donner la parole, je souhaite saluer notre doyen : Jean-Marie Vanlerenberghe. En effet, sénateur du Pas-de-Calais depuis 2001, il a décidé de mettre un terme le 31 août prochain à son mandat après 24 années passées au sein de notre Haute Assemblée. Je voulais, au nom du Sénat, le remercier pour son engagement, d'abord au sein de la Commission des affaires culturelles, puis au sein de la Commission des affaires sociales, dont il a été vice-président puis rapporteur général pendant sept ans, Alain Milon s'en souvient particulièrement bien. Au cours de ses mandats successifs, il a contribué à de nombreux travaux du Sénat en matière sociale. Je pense au projet de loi de financement de la sécurité sociale, mais aussi au texte relatif à l'amélioration de notre système de soins, à l'évolution de notre système de retraite ou encore aux transformations du marché de l'emploi. Il a présidé en 2005 la mission d'information sur le bilan et les conséquences de la contamination par l'amiante, dont les travaux ont fait date et dont je me souviens personnellement particulièrement. Je vais maintenant lui donner la parole en lui exprimant la gratitude du Sénat. Voilà.
[Applaudissements]
Jean-Marie Vanlerenberghe : C'est trop. Merci, merci. Merci, monsieur le président. Merci, mes chers collègues. Je ne suis pas sûr de mériter toutes ces louanges, mais je les accepte bien volontiers.
Alors, Monsieur le Premier ministre, le conclave s'est achevé, mais ce n'est pas achevé par une fumée blanche, comme nous l'espérions. Je le regrette, mais comme vous, je pense qu'il ne faut pas en rester là. Vous aviez décidé en effet, il y a cinq mois, de confier aux partenaires sociaux le soin de réviser la réforme des retraites. Vous précisiez alors qu'il s'agissait d'une discussion ouverte, sans tabou, sans totem, pas même sur l'âge d'ouverture des droits. Vous précisiez quand même qu'il fallait respecter l'équilibre en 2030 du système.
Mais vous aviez, c'était une chance, une chance inespérée on peut le dire, pour le paritarisme et le dialogue social auquel vous êtes attaché, comme nous, comme nous tous d'ailleurs. Alors c'était d'ailleurs un retour aux sources, en quelque sorte, pour les partenaires sociaux, pour les syndicats et le patronat, qui pendant longtemps ont géré exclusivement le système des retraites, et notamment celui du privé. Alors comme l'est d'ailleurs toujours le système complémentaire, la retraite complémentaire, l’Agirc-Arrco, qui, avec 86 milliards de réserves, et avec environ 100 milliards de dépenses, est un système exemplaire. C'est une gestion qui mérite effectivement d'être saluée.
Alors, M. le Premier ministre, vous avez donné l'opportunité aux partenaires sociaux de reprendre la gouvernance du système, au moins pour les 80% de salariés qui sont dans le secteur privé. J'ai d'ailleurs noté que l'ensemble des participants au conclave étaient favorables à cette gouvernance qui rapprocherait le régime de base du régime des complémentaires, pour le privé, je précise toujours. Les premières conclusions aussi, vous y avez fait allusion, faisaient même état d'avancer sur des questions essentielles, comme la pénibilité, comme le droit des femmes, des mères de famille, et sur bien d'autres sujets. Donc pour moi, comme pour vous, une voie de passage existe.
Alors, monsieur le Premier ministre, ma question est simple. Désormais, que comptez-vous faire pour le système des retraites ? Merci.
Gérard Larcher : Pour vous répondre, la parole est à monsieur le Premier ministre.
François Bayrou : Monsieur le Président, mesdames et messieurs les sénateurs, monsieur le sénateur Jean-Marie Vanlerenberghe.
Les compliments qui ont été ceux du Président, relayés par les applaudissements nombreux de l'Assemblée, peut-être un certain nombre de sénateurs ne savent pas que j'aurais pu y joindre les miens depuis le premier jour de mon engagement politique. Beaucoup, naturellement, n'ont pas suivi cette longue histoire de militantisme, d'amitié entre nous. Et je revis sans cesse, en vous voyant, l'épisode qui a fait que tout jeune garçon venant de passer l'agrégation, je suis allé sonner à la porte du parti politique qui est toujours le nôtre, le vôtre et le mien. J'avais à peine 20 ans et celui qui m'a accueilli derrière la porte, c'était un certain Jean-Marie Vanlerenberghe. C'est dire que ça n'est pas une histoire récente. Dans cette histoire, il y a des convictions. Et c'est parmi ces convictions, il y a l'attachement à l'idéal de démocratie sociale. C'est-à-dire l'idée qui n'est pas accepté sur un certain nombre de bancs, qu'il est des domaines de la vie de la société qui ne relèvent pas du politique, mais qui relèvent de la société civile organisée et des corps intermédiaires. C'est ainsi qu'on peut apaiser une société au lieu de perpétuellement la rendre plus conflictuelle. Nous pensons, vous et moi, et Dieu sait que nous en avons parlé, pas beaucoup moins de mille fois, nous pensons que la question des retraites et de ces questions-là.
Nous avons, vous et moi, perpétuellement cru que la responsabilité des partenaires sociaux pouvait être engagée et bienfaisante. Et nous le croyons encore. Et nous le croyons encore, c'est votre question, à la lumière de cette négociation sur les retraites dont nous pensons, nous, qu'elle peut aboutir positivement, qu'en tout cas elle a fait considérablement progresser les choses.
Et donc, je vous confirme la détermination qui est la nôtre, qui est celle du gouvernement, et que je suis sûr vous approuvez, de faire que rien ne soit perdu du chemin qui a été parcouru, et que nous puissions mener jusqu'à son terme le travail de concertation qui a été celui des organisations syndicales et patronales.
En tout cas, permettez-moi, devant le Sénat, de vous adresser des remerciements affectueux.