François Bayrou, invité du Grand Jury RTL / Le Figaro / LCI

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(© François Bouchon/Le Figaro/2019)

François Bayrou, Président du Mouvement Démocrate, était l'invité de Benjamin Sportouch, dans l'émission Le Grand Jury RTL / Le Figaro / LCI ce dimanche 27 février à 12h.

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Bonjour à vous, François Bayrou.

Bonjour.

Merci d'être avec nous aujourd'hui.

Nous sommes à un mois et demi de la présidentielle, 42 jours précisément du premier tour, mais cette campagne n'en a, pour l'instant, que le nom, frappée de plein fouet d’abord par la pandémie qui a tétanisé l'opinion publique, puis maintenant, bien sûr, par cette guerre de la Russie contre l'Ukraine. 

Nous avons vu apparaître sur les réseaux sociaux ce terrible mot-clé qui a entraîné beaucoup de conversations : "Troisième guerre mondiale". 

C'est dire le niveau d'inquiétude, d'angoisse qui a saisi le monde, sa jeunesse notamment.

Même si cela peut paraître secondaire à ce jour, au regard des enjeux humains de cette crise internationale, nous nous interrogerons, bien sûr, sur l'impact politique, chez nous, sur cette campagne présidentielle : dans quelles conditions et comment la poursuivre.

Nous aurons aussi l'occasion d'évoquer votre initiative, diversement appréciée, d'une banque de parrainages pour aider les candidats qui ne parviennent pas à obtenir les 500 sésames nécessaires pour se présenter. Nous en parlerons dans la seconde partie de cette émission.

Commençons bien sûr par les derniers événements en cours en Ukraine, avec un exode massif d'Ukrainiens qui a commencé.

Le Haut-Commissariat aux réfugiés annonce déjà 368 000 réfugiés et c'est un début. Certains élus, en France, ont commencé à recenser les possibilités d'hébergement. C'est le cas, par exemple, de la maire de Lille, Martine Aubry, socialiste, qui appelle à accueillir massivement des Ukrainiens dans nos villes, sur nos territoires.

Pensez-vous que c'est ce qu'il faut faire ? Souhaitez-vous accueillir massivement, dans votre ville de Pau, des réfugiés Ukrainiens ?

J'ai déjà reçu des propositions de familles qui disent : "Nous sommes prêts à accueillir des Ukrainiens".

Il faut mesurer l'émotion que cela représente et mesurer le choc que cette invasion signifie pour l'équilibre du monde, l'équilibre des puissances et le choc que cela signifie aussi naturellement pour la politique française.

En effet, tout d'un coup, c'est tout un pan de naïveté, au mieux, car nous pourrions trouver d'autres mots, qui s'effondre, avec tous ceux qui croyaient que Poutine était un interlocuteur fiable…

À qui pensez-vous ?

Nous les connaissons.

Nommons-les.

Il y a évidemment François Fillon, Marine Le Pen, Éric Zemmour, Jean-Luc Mélenchon, avec des déclarations incroyables, quand on cherche les déclarations avancées ces dernières années.

Pourquoi pas Emmanuel Macron lui-même ? Le Président de la République n'a-t-il pas fait preuve de naïveté en pensant que la voie diplomatique était la bonne ? Du coup, n'avons-nous pas été dupes de la réaction de Vladimir Poutine qui, à ce moment-là, laissait entendre que c'était possible ?

Franchement, excusez-moi, mais mettre sur le même plateau de la balance ceux qui sont des complices actifs, des zélateurs, des propagateurs de la propagande du dictateur russe…

Ceux que vous venez de citer ?

Oui et il y a plein de déclarations, si cela vous intéresse.

… Et ceux qui essaient de résister, y compris en ne fermant jamais la porte de la paix, la porte de la diplomatie. J'espère que vous avez été, comme moi, frappés par l'attitude incroyable du Président de la République dans ses confrontations avec Poutine et la conférence de presse que vous avez peut-être vue, lorsqu'il s'est rendu à Moscou, dans laquelle il lui a dit en face ses vérités, sans jamais prendre le risque de blocage de la conversation et de l'échange, en laissant toujours la petite porte nécessaire pour que - on ne sait jamais - la paix soit choisie.

Ainsi, s'il y a un chef d'État qui a résisté dans cette période, dans sa fonction de Président de la République française et dans sa fonction de responsable européen, c'est évidemment le Président de la République.

Vous parliez à l'instant, vous-même, de ces zélateurs, de ces propagandistes de Vladimir Poutine et vous avez cité François Fillon. Nous avons une question des internautes, car le sujet a été vraiment très commenté sur les réseaux sociaux. 

François Fillon a finalement annoncé qu'il démissionnait de ses mandats dans les Conseils d'administration de deux entreprises russes et certains internautes laissent entendre qu'il y a été poussé par la menace de sanctions britanniques.

Trouvez-vous que l'ancien Premier Ministre a pris sa décision trop tard ?

Dans l'idée que je me fais d'un responsable public en France, d'un responsable de la République française, de quelqu'un qui avance ou prétend avoir des idéaux républicains, ce n'est pas qu'il aurait dû démissionner plus tôt, c'est qu'il n'aurait jamais dû accepter, mais ce que nous mesurons aujourd'hui, c'est qu'il y a, depuis des années, un appareil de prise de contrôle.

On achète les responsables politiques par le lucre, par l'argent, on les achète financièrement.

A-t-il été acheté ?

On achète les responsables, mais pas seulement en France, M. Schröder, l'ancien Chancelier autrichien, M. Schüssel, François Fillon, le premier qui a développé, bien avant l'élection présidentielle de 2017, mis en évidence et exposé ses liens avec Poutine, qui a été reçu en 2018 dans la maison personnelle de Poutine.

C'était peut-être ses convictions, François Bayrou. Il y a toujours eu, à droite, en France, des personnes ayant considéré que la Russie devait être un partenaire, qu'il y avait une réalité géographique et que l'Europe allait de l'Atlantique à l'Oural, comme avait dit un grand ancien.

Votre propos confond deux choses : d'une part, la Russie avec son histoire, avec la géographie, avec les liens que nous avons pu avoir avec ce grand pays et que nous aurons de nouveau un jour, car nous allons, j'imagine, en parler et, d'autre part, la dictature de Poutine.

Qui pouvait ignorer, au moins à partir de l'annexion de la Crimée, ce qui se passait ? Qui ?

François Fillon s'est prononcé contre les sanctions en 2014. Il y a eu, au Parlement, un débat sur un texte, déposé par LR ou UMP à l'époque, demandant que l'on renonce aux sanctions.

A-t-il agi par intérêt personnel plus que par convictions ?

Oui, je ne sais pas bien faire la différence.

Il y avait sûrement, à d'autres époques, à d'autres moments de guerre, des personnes qui étaient de bonne foi avec d'autres dictateurs, mais qui voyaient, là, leurs idées, leurs idéaux et, en réalité, elles étaient, se faisant, des ennemis de tout ce à quoi nous croyons et devons croire en France.

Une question complémentaire des internautes : "Pensez-vous qu'il faut interdire aux anciens dirigeants le fait d'intégrer des entreprises étrangères ?".

C'est une question qui se pose.

Quelle est votre opinion ?

En effet, je ne trouve pas normal que l'on aille monnayer son carnet d'adresse, son influence auprès d'entreprises, notamment celles qui sont liées à des États étrangers avec qui nous sommes dans des situations de tensions extrêmement lourdes. Je trouve cela totalement anormal.

Il paraît que c'est la mode maintenant, mais, vous savez, ce n'est pas la première fois que les Russes proposent de l'argent à des dirigeants politiques français et il est arrivé qu'ils disent non.

Vous citiez tout à l'heure outre François Fillon, Marine Le Pen, Jean-Luc Mélenchon et également Éric Zemmour.

Il se trouve que ces dirigeants politiques, ces candidats à la présidentielle se sont exprimés pour évoquer une condamnation de l'action de Vladimir Poutine. Ils n'ont pas exprimé de soutien cette semaine.

Dites-vous qu'ils sont désormais en ligne ?

Excusez-moi. Vous passez l'éponge, mais ce n'est pas ce qu'ils ont dit.

Ils ont, sur tous les tons et sur toutes les antennes, dit : "Ce n'est pas seulement la faute de Poutine, c'est la faute de l'OTAN, à savoir que c'est l'occident qui est, en réalité, responsable".

C'est la faute de l'OTAN, comme si l'OTAN, alliance défensive moyennement efficace, comme nous le voyons, souvent en difficulté, était responsable.

N'aurait-il pas fallu dire que l'Ukraine n'entrera pas dans l'OTAN ?

C'est ce qui a été dit.

Cela n'a pas été dit clairement.

Cela a été dit clairement par la France et par l'Allemagne.

Pas par les États-Unis qui sont les décideurs en dernier ressort.

Non, il n'y a aucun décideur en dernier ressort, si la France et l'Allemagne ne sont pas de cet avis, dans l'OTAN aussi.

La procédure était ouverte pour faire entrer l'Ukraine. Était-ce une erreur ?

Vous voyez bien que vous êtes en train d'apporter de l'eau à ce moulin-là.

Nous essayons de comprendre.

Non ? Vous n'essayez pas de comprendre, vous essayez d'avancer des arguments justifiant des positions que je condamne.

Vous voyez bien de quoi il s'agit.

Les Français ont tous vu. Qui peut dire que ce n'est pas Poutine qui a décidé de l'invasion de l'Ukraine sous vos yeux ? Sous les yeux ébahis de toutes les opinions, singulièrement de la nôtre et après que le Président de la République et d'autres dirigeants européens et du monde libre aient essayé d'empêcher, de dévier, de détourner cette volonté belliciste, mais, quand on réfléchit, tout d'un coup, c'est un paysage qui vient de se dévoiler et ce dévoilement montre que c'est quelque chose qui se préparait depuis des années.

Nous allons y venir, mais une question sur l'OTAN : l'Ukraine continue à taper à la porte de l'OTAN et l'UE. Devons-nous lui dire "non" définitivement ?

Vous voyez bien que vous essayez de poser, dans une période de crise, des questions qui doivent se poser dans des temps calmes.

Cependant cela pourrait peut-être régler la crise.

Non, je ne le crois pas. Cela pourrait rendre la crise plus aiguë.

C'est pour cela que nous ne le faisons pas ? Par peur de la réaction de Vladimir Poutine ?

Par peur de la guerre nucléaire.

Vous êtes drôles. Nous sommes sur un plateau de télévision, mais ce dont nous parlons, c'est de la guerre nucléaire.

Il y a deux puissances, plusieurs puissances, et la France en est une libre de son choix, mais vous voyez bien que, dans les arsenaux nucléaires, il y en a deux de première importance et capables de faire sauter la planète, en tout cas une grande partie, ce sont les arsenaux russes et américains.

Nous dites-vous que vous pensez que Vladimir Poutine, d'un côté, et les Occidentaux, de l'autre, pourraient en venir à recourir à l'arme nucléaire ?

C'est ce que Poutine a dit sur vos écrans. Je ne prête aucune intention. J'ai écouté, stupéfait, cette fameuse conférence de presse dont je parle entre Poutine et le Président de la République française.

C'était l'affrontement de deux volontés qui refusaient de céder un pouce et, heureusement. Dans cet affrontement, Poutine a dit : "Avez-vous en tête que nous pouvons vous vitrifier ?".

Cela signifie-t-il qu'il faut sacrifier l'Ukraine ?

Non.

Il y a un parfum, et vous le savez, la référence historique beaucoup avancée actuellement, c'est 1938 et les accords de Munich au moment où la Tchécoslovaquie, la région de Sudètes, a été sacrifiée sur l'autel d'une paix qui fut illusoire.

Voilà ce que l'on dit : un parfum munichois.

Allons-nous abandonner l'Ukraine, car il existe cette menace nucléaire ?

Vous le voyez, certainement non. C'est cela le piège.

Le piège est de dire  : soit vous appuyez sur le bouton pour déclencher la bombe atomique, soit vous abandonnez l'Ukraine. C'est la thèse que vous défendez à l'instant.

Quelle est la solution alternative, car Vladimir Poutine n'entend pas du tout pour l'instant cesser cette guerre ?

La solution alternative, c'est le rapport de forces avec d'autres armes que la bombe nucléaire et c'est que nous sommes en train de faire avec les sanctions financières et avec des livraisons d'armes à l'Ukraine.

Avez-vous entendu le Président ukrainien ? Il a dit que, dans cette affaire, le Président de la République française est le véritable ami de l'Ukraine et, en effet, nous livrons - pas seulement nous, puisque j'ai lu que même le Portugal a décidé de livrer des armes à l'Ukraine, tout comme beaucoup de pays européens - des armes qui sont des armes de défense, pour se défendre comme l'on peut.

Quoi qu'il en soit, je ne crois pas une seconde qu'il n'y ait rien d'autre à faire que la bombe atomique.

Justement, vous avez évoqué une guerre mondiale et nous avons beaucoup de commentaires sur les réseaux sociaux, car la "troisième guerre mondiale", c'est le mot-clé apparu sur les réseaux sociaux dès les premières minutes de l'invasion de la Russie en Ukraine.

Très honnêtement, y avez-vous pensé ? S'agit-il d'une vraie menace dont les Français doivent s'inquiéter ?

C'est une vraie menace et je n'ai jamais, de toute mon histoire personnelle, pensé que cette menace avait disparu, car je sais ce qu'est la folie des hommes et je sais ce qu'est la folie des engrenages.

Nous en avons connu d'autres dans l'histoire.

Je n'ai donc jamais écarté cette menace, ce danger.

Encore moins aujourd'hui.

Et encore moins là, évidemment. Je pense que c'est une grave menace.

Je considère que ce que Poutine a fait dénote un déséquilibre personnel, une dérive profonde d'un homme qui décide qu'après tout, il va abandonner tous les accords, tous les traités, tous les principes que nous avons, depuis des années et des décennies, décidés ensemble, car il a cette folie de refaire de son pays l'empire qu'il fut.

Vous avez visiblement été l'un des seuls, à vous entendre, à penser qu'il pouvait passer à l'action. Beaucoup se disaient : "Non, ce sont des rodomontades, il n'ira pas plus loin", y compris au sommet de l'État aujourd'hui.

Pas du tout.

Je sais que le Président de la République a toujours pensé que le risque existait et avec une inquiétude plus grande qu'aucun de ceux qui l'entouraient, mais il n'a jamais voulu abandonner la piste d'un apaisement.

Lorsque l'on arrive à des paroxysmes, car c'en est un, d'enfermement, dans une logique qui n'a plus rien à voir avec le réel, et la capacité d'entraîner son pays dans cette logique, car sa dictature s'est, par exemple, construite sur le fait qu'aujourd'hui, les Russes ne savent pas, vous m'entendez, ne savent pas que l'on envahit l'Ukraine.

Aujourd'hui, François Bayrou, tout le monde dit qu'il s'agit d'un dictateur, mais, il y a quelques semaines encore, la classe politique française refusait ce mot.

C'est possible.

On parlait d'un autocrate, car il y a des élections.

Jean-Yves Le Drian, à votre place, ne voulait pas prononcer ce mot et parlait d'un "voisin encombrant".

Je ne discute pas ce point et, moi, sans doute, je n'aurais sans doute pas prononcé ce mot avant ce drame.

Avons-nous donc été collectivement naïfs ?

Laissez-moi m'arrêter une seconde sur un point : la Russie est un grand pays.

Deuxième armée du monde.

Aujourd'hui, les Russes ne savent pas, car leurs médias ne leur disent pas, qu'il y a une attaque contre l'Ukraine et contre Kiev.

On leur dit qu'il y a, au Donbass, une intervention militaire pour mettre fin à des exactions. C'est cela qu'on leur dit.

Que l'opinion politique russe puisse être interdite de la connaissance des événements que son pays est en train de conduire à ses portes et faisant courir un risque au monde, vous voyez bien qu'on a, là encore, un indice du caractère complètement confisqué de ce régime.

Nous n'avons pas de prise pour corriger cela ?

Si. Je répète ce que j'ai dit : 1, l'aide à apporter à l'Ukraine et, 2, les sanctions, y compris financières et ce n'est pas mince.

Sont-elles suffisantes ?

Nous venons de décider que nous allions même interdire les banques russes sur le système d'échange Swift.

Il a toujours contourné ces sanctions financières dans le passé. 

Peut-être.

Cela l'a même renforcé après 2014 et la guerre en Crimée.

Vous voyez, j'entends bien qu'il s'agit de poser des questions, mais je ne veux pas laisser penser, y compris en étant désabusé, qu'il n'y a rien à faire, car le Président ukrainien, qui donne, au passage, un bel exemple d'honneur - c'était un comédien qui a été élu Président de la République -, se révèle être un homme d'honneur et de vision.

Peut-être va-t-il y perdre la vie, mais il a visiblement choisi de sacrifier, y compris au risque de sa propre vie, les avantages qu'il pouvait avoir, au service de son pays et de son peuple.

Cela signifie-t-il que l'Ukraine ne peut pas emporter cette guerre ?

Non.

Vous dites qu'il peut perdre la vie.

L'Ukraine ne peut probablement pas emporter la guerre immédiate, mais je vous dis que la décision de Poutine condamne, 1, d'une certaine manière, l'Ukraine, mais, 2, à terme, aussi la Russie et son régime.

Cette décision condamne probablement Poutine lui-même, car je ne connais aucun exemple de ce type de décision qui débouche, au bout du compte, sur quelque chose de positif, d'heureux, d'apaisé.

Lorsque l'on sème, à ce point, l'orage, on récolte le pire, y compris pour soi-même. Oui, je pense donc, en effet, que Poutine a perdu le sens du réel, enfermé dans ses palais depuis des années, avec tous les éléments de la puissance qu'il a rétablie sur l'idéologie du KGB.

Poutine a peut-être aussi profité de notre faiblesse.

Cette semaine, sortant de l'Élysée, Nicolas Sarkozy disait : "Nous avons des outils impuissants. Il faut tout reprendre à zéro à commencer par l'OTAN".

Oui et vous savez que le Président de la République l'avait dit il y a plusieurs années. Il avait dit que l'OTAN était en état de mort cérébrale et je crois que c'était juste.

Oui, je crois que nous avons à reconstruire, mais à une condition, c'est que nous ne considérions pas que la nécessité de reconstruire devrait aujourd'hui nous entraîner à la passivité, au fatalisme et à l'acceptation, ni l'un, ni l'autre.

Nous avons été dans cette situation il y a plusieurs années, notamment en raison des forces occultes que j'évoquais, dirigées par Moscou, qui ont convaincu tout le monde qu'après tout, il fallait revenir à la normale, que les annexions, les prises de contrôle souterraines, ce n'était pas si grave, qu'au fond, nous n'y comprenions pas grand-chose et c'est la vérité.

Que la Crimée avait toujours été russe.

Et qu'au fond, quelle est la justification de l'existence de l'Ukraine ?

Voilà, ce que nous entendions et que nous entendons encore, mais les Ukrainiens ne l'entendent, eux, pas de cette oreille.

Ainsi, je ne crois pas du tout que la résignation soit la bonne voie.

Une question nous ramène à l'histoire : nous avons eu des commentaires de beaucoup d'internautes qui sont choqués et qui comparent Vladimir Poutine à Hitler. Trouvez-vous qu'il s'agisse d'un raccourci simpliste ou, au contraire, au regard ce qu'il a pu faire en Tchétchénie, trouvez-vous cela logique ?

Non, ce n'est pas simpliste. C'est une comparaison que la réalité appelle évidemment.

Personnellement, je ne l'ai pas faite, car je pense qu'il ne faut pas aller encore plus loin que le point dramatique auquel nous sommes arrivés.

Je pense que, chaque fois que des dictateurs décident de favoriser leur espace vital, comme on disait en Allemagne à une certaine époque, de s'étendre et de retrouver je ne sais quelle mythique possession et qu'ils le font avec tant de violence et tant de ruses, alors, oui, cela rappelle évidemment d'autres exemples historiques.

Voyez-vous venir derrière un génocide, car, Hitler, c'est certes l'expansion territoriale, mais c'est aussi ensuite un génocide.

Est-ce le projet de Vladimir Poutine de votre point de vue ?

Non, pas du tout. Vous confondez tout.

C'est l'histoire d'Hitler.

Excusez-moi, mais cela n'a rien à voir. Ce à quoi nous faisions allusion, là, c'était Munich.

Pour vous, le parallèle s'arrête là ?

J'essaie -ce n'est pas simple, dans une situation historique tellement critique, tellement inquiétante et tellement angoissante - de mettre les mots et les analyses à leur juste place.

Vous venez tout de même de reprendre la comparaison avec la folie d'Hitler.

Dans la folie d'Hitler, il y avait des gradations et Dieu sait que ce n'est pas pour adoucir le jugement que je dis cela. Il y avait des gradations dans sa folie et la gradation ultime, c'était la volonté d'effacer le peuple juif de l'histoire du monde.

Je ne confonds donc pas les tentatives d'invasion, de prise de contrôle, d'envahissement de pays voisins, avec cette dramatique Shoah.

Vous parliez aussi tout à l'heure de propagande, de médias propagandistes. Se pose la question en France de la diffusion, de l'autorisation d'émettre de RT, chaîne pro-russe.

Quelle est votre conviction sur ce point ? Faut-il, ou non, interdire sa diffusion aujourd'hui ?

Je pense qu'il existe des lois et une justice. Il existe des autorités audiovisuelles. Qu'elles fassent leur travail.

En effet, je pense qu'il y a, au vu et au su de tous, une chaîne ouvertement russe et Poutinienne, qui est payée par le pouvoir russe, ce que tout le monde sait. Cela pose des questions.

Dans les sanctions, il peut y en avoir de cet ordre et Dieu sait que je ne suis habituellement pas pour la censure.

Le CSA doit s'en emparer.

Dans ces initiatives que peut prendre la France, il y a les sanctions, il y a l'appui à l'Ukraine en fournissant des armes. Y a-t-il aussi une initiative diplomatique ?

Nous savons que le Président ukrainien a dit : "Nous sommes d'accord pour discuter avec les Russes". Cela devrait-il se passer en France ? Emmanuel Macron devrait-il prendre l'initiative ?

Ce serait une très belle idée.

Après, cela dépend du possible et je pense donc que, dans cette affaire-là, le Président de la République française a une responsabilité qu'il exerce de manière tout à fait remarquable. Aux yeux de tout le monde, il est devenu un interlocuteur de premier plan. Jean-Pierre Chevènement dit cela ce matin dans le Journal du Dimanche, en annonçant son ralliement au Président de la République.

Il dit : "La France a retrouvé une voix". C'est la vérité et je ne doute pas que tout ce qu'elle pourra faire pour que des négociations, si elles sont utiles, si elles peuvent servir à autre chose qu'à être le masque au-dessus de la violence brutale, car c'est une question qui doit se poser, alors je trouve que, oui, toutes ces propositions seraient bonnes.

Vous dites oui pour des pourparlers. Tout à l'heure vous souligniez le fait que le Président ukrainien mettait également sa vie en danger dans cette crise. Considérez-vous qu'il est également de la responsabilité de la France d'intervenir pour le faire sortir du pays et lui permettre d'avoir la vie sauve ?

Évidemment oui, s'il le souhaite, mais vous avez vu qu'il a répondu aux États-Unis d'une manière fière. Les États-Unis lui ont proposé de l'exfiltrer et il a répondu : "Je n'ai pas besoin d'un taxi, j'ai besoin d'armes et de munitions".

Encore une fois, c'est une figure qui se révèle.

Oui, évidemment, nous avons là-bas des forces, y compris spéciales, si j'ai bien compris, qui peuvent aider, mais j'admire personnellement le chef d'État qui est à la tête de son peuple et qui ne veut pas quitter son peuple dans la crise si grave qu'il subit.

Le soutenons-nous suffisamment ? Ne faut-il pas lui envoyer encore plus d'armes, au regard de la citation que vous rappeliez en réponse aux États-Unis ?

Nous le faisons. Nous le soutenons suffisamment et, encore une fois, c'est lui qu'il l'a dit. Il a fait, hier, une longue déclaration en disant : "Le Président de la République française, c'est le vrai ami de l'Ukraine".

Je reviens à une de nos premières questions : devons-nous accueillir en France les réfugiés ukrainiens qui le souhaiteraient ?

Oui. Nous devons faire notre devoir. C'est la guerre, il y a des réfugiés. C'est sur cela que nous sommes construits.

Je vous le répète. J'ai reçu, à Pau, plusieurs propositions de familles qui se disent prêtes à accueillir des familles ukrainiennes pendant la durée de cette crise si difficile.

2ème partie de l'émission :

Nous restons un tout petit instant encore sur la situation en Ukraine.

Le constat que vous faites est extrêmement grave, vous dites qu'il y a un risque d'embrasement, un risque de conflit nucléaire.

La France est-elle menacée ? Y a-t-il des mesures à prendre pour nous protéger ?

Les mesures de précaution sont prises. Dans cette affaire, l'idée de notre sécurité collective, parce qu'il ne s'agit pas seulement de la France, vous savez bien le propre de ces armes, c'est qu'elles sont peu localisées étant donné leur puissance et que notre atmosphère, par exemple, est une. Et, donc, je n'ai aucun doute que les précautions nécessaires sont prises.

Une question sur ce mot de "guerre" : estimez-vous que le mot "guerre" est approprié ? Faut-il l'utiliser et parler d'une guerre en Russie ?

Il y a une guerre en Ukraine ! Il n'y a aucun doute !

Est-ce que la France est en guerre ?

Non, mais l'Ukraine est, en effet, l'objet et le lieu d'une guerre. On a l'air de mettre en doute… Un pays qui masse 200 000 soldats à ses frontières, avec l'armement le plus puissant que l'on puisse trouver en termes de blindés, d'aviation, d'hélicoptères, en termes de roquettes ‑ qui d'ailleurs sont moyennement précises d'après ce que je vois, ‑ ce pays-là déclenche une guerre, ce qu'il a fait.

Il essaie, par sa propagande, de faire croire que c'est une opération spéciale. Ce n'est rien de tout cela. C'est une guerre, désormais, généralisée, puisque hier, Poutine a donné l'ordre de généraliser l'attaque contre l'Ukraine et c'est la première guerre de cette ampleur sur le continent européen depuis la fin de la guerre mondiale.

Vous vous êtes souvenu du mot d'Emmanuel Macron, nous étions en guerre contre le Covid. Est-ce que vous dites que la France est en guerre aujourd'hui ?

Non, je vous ai dit non. La France n'est pas en guerre, mais l'Ukraine est l'objet d'une guerre dont il serait scandaleux que nous niions la gravité, l'importance historique et les dangers qu'elle recèle de l'aveu même, je répète les propos qui ne sont pas les miens, ce ne sont pas des propos personnels, ce sont ceux de Vladimir Poutine lui-même au micro.

On vous entend. On parlait, je vous le disais en introduction de cette émission, nous sommes à 6 semaines seulement de la présidentielle et la campagne est passée un peu sous les radars.

Samedi prochain, est censé se tenir le premier gros meeting de campagne d'Emmanuel Macron. La ville de Marseille avait été évoquée. Vendredi soir, à 18 h, le Conseil constitutionnel clôt le processus de récolte des parrainages, des déclarations des candidats et de patrimoine.

Considérez‑vous, dans les jours à venir, que le Président doit, malgré la crise en Ukraine, prendre un moment pour dire solennellement aux Français qu'il est candidat à sa propre succession, pourquoi il l'est et tenir ce meetingenvisagé la semaine prochaine ?

Meeting, je ne me prononce pas. Cela dépend de tout ce qu'il se passe et de ses responsabilités.

Est-ce que c'est approprié ?

Que le Président de la République, d'ici au 4 mars, saisisse ou crée une occasion de communication avec les Français pour leur dire le plus simplement du monde pourquoi il a décidé de se présenter à cette élection, je n'ai pas beaucoup de doute sur le fait que ce soit nécessaire.

Et le contexte ne change rien à cela ?

Le contexte change le style, les approches, l'attitude, le climat, l'ambiance, mais ne change pas la nécessité de la déclaration de celui qui est Président de la République et qui aura à dire aux Français, qu'il a décidé de se présenter et pourquoi. Cela me paraît la chose la plus normale du monde.

La situation change-t-elle concernant les éventuels débats entre candidats avant le premier tour ? Compte tenu de la situation, ne serait-il pas normal que le Président de la République débatte avec les autres candidats, de savoir les décisions qu'il prend, la position de la France ?

Je ne sais pas si vous appelez "débat" 1 contre 12. Je pense que c'est un peu déséquilibré. Je pense qu'il faut trouver un style, mais l'imagination des chaînes de radio et de télévision et de la presse écrite pour inventer des formes de débat…

Mais il doit débattre. Pourquoi ne débattrait-il pas avec…

Il faut une manière de débattre qui ne soit pas caricaturale et qui ne prête pas à ridicule dans la situation dans laquelle nous sommes.

Mais vous pensez qu'en tant que Président sortant, il doit quand même rendre des comptes de son bilan et présenter son programme ?

Rien ne me fait plus rire intérieurement, me "gondoler" intérieurement que cette affirmation que vous avez reprise qu'il n'y avait pas de campagne !

Avez-vous l'impression que depuis des mois, le Président de la République est à l'abri des critiques ?

Mais il n'est pas rentré en campagne.

Avez-vous l'impression que ses adversaires, en raison du fait qu'il n'a pas déclaré sa candidature ont retenu leurs critiques, leurs injures, leurs insultes ?

Mais il ne répond pas à ces critiques.

C'est très bien. Il y a des moments où il est très juste de ne pas répondre à ce qui est un peu médiocre et dévalorisant.

Mais n'est-ce pas le jeu d’une démocratie aussi de répondre aussi aux critiques, François Bayrou ?

Quand il y aura des questions de cet ordre, est-ce que, par exemple, il est normal d'avoir face à soi des opposants qui tous ont fait allégeance à la Russie ?

Même Valérie Pécresse ?

Valérie Pécresse, c'est François Fillon. C'est la même famille politique. Comme vous le savez, il y a eu beaucoup d'amusements autour de cette affaire, puisqu'elle n'a soutenu Alain Juppé que dans les 3 dernières semaines alors qu'avant, elle était proche de Fillon.

Pour vous, cela suppose nécessairement qu'elle soit sur les mêmes positions que François Fillon par rapport à la Russie ?

Je ne l'ai jamais entendue s'y opposer et vous non plus.

Elle s'est félicité que François Fillon quitte ses mandats dans les conseils d'administration russes.

Non. Il y a 4 jours à la télévision, interrogée sur les mandats russes de François Fillon, elle a dit : "il a quitté la politique. Il y a beaucoup de Français qui travaillent en Russie, il faut lui fiche la paix !", textuellement, ou presque textuellement, en tout cas, l'esprit est exactement celui-là.

Ne venez pas accréditer l'idée qu'elle se serait opposée à la démarche de l'ancien Premier ministre. Ce n'est pas vrai.

M. Ciotti qui est son bras droit, si j'ai bien compris dans cette élection, quelles sont ses positions par rapport à la Russie ?

Vous restez interdits vous-mêmes. Vous ne voulez pas débattre avec moi pour me répondre ?!

Que sous-entendez-vous, François Bayrou ?

C'est vous qui posez les questions !

Qu'est-ce que vous sous-entendez sur Éric Ciotti ? Vous êtes en train de nous dire que toute l'opposition était pour Vladimir Poutine ?

Oui, plus ou moins.

Ce n'est pas un peu caricatural ?

Anne Hidalgo ou Yannick Jadot sont aussi dans l'opposition et n'ont pas exprimé de position.

En effet, ni Jadot ni Mme Hidalgo…

Donc toute l'opposition de droite et d'extrême droite ?

Oui.

Êtes-vous certain, parce que c'est vrai que, parfois, l'on dit qu'il faut regarder dans son propre jardin avant de jeter la pierre, que vous, dans le passé, François Bayrou, n'avez pas eu des appréciations vis-à-vis de Vladimir Poutine qui pourraient être très éloignées de ce que vous dites aujourd'hui ?

Je ne crois pas. Peut-être en avez-vous trouvé ? En avez-vous cherché ?

Non, justement, je vous demande si vous avez eu ces échos-là ?

Cela, par exemple, Mélenchon, on est en novembre 2020, il dit : "La Russie est un partenaire plus fiable que les États-Unis".

Vous nous montrez un article, je le dis pour nos auditeurs.

Mais, François Bayrou, le Président de la République a reçu Vladimir Poutine à Versailles, à Brégançon. Lui aussi est dans une logique de coopération. N'est-ce pas un peu facile, maintenant, après cette invasion de l'Ukraine de dire : "regardez c'était évident, c'était écrit"?

Je ne dis pas cela, mais je dis qu'il y a eu d'un côté, complaisance et de l'autre, confrontation, discussion et même affrontement, comme Poutine, lui-même, l'a dit : "chaque fois, il m'a poussé dans mes retranchements".

Ce n'est pas la même chose. Vous êtes chef d'État, vous avez des relations à avoir avec les autres chefs d'État. Avec le Président chinois, j'imagine qu'aucun de nos responsables politiques ne partage ses thèses. Vous avez des relations à avoir qui sont d'État à État et de responsable à responsable, ce n'est pas pour autant que vous devez épouser les thèses de votre adversaire et devez vous laisser payer par lui.

Vous comprenez que ce n'est pas tout à fait la même chose ? Le fait d'accepter de recevoir de l'argent… Mais dans quel monde vivons-nous pour que cela n'indigne personne ?

On dira de vous que vous êtes, quelque part, peut-être en train d'instrumentaliser cette situation internationale pour faire de la politique intérieure, car depuis le début, vous "artillez" férocement contre cette opposition de droite.

C'est drôle que l'on puisse présenter les choses comme cela.

Vous êtes dans une situation où le monde entier est menacé par une guerre déclenchée par un dictateur au vu et au su de tout le monde. Il se trouve que ce régime et cette personnalité ont été soutenus avec toutes les révérences que l'on peut imaginer par des responsables politiques qui sont candidats à l'élection présidentielle.

Je m'arrête une seconde sur la situation que vous avez décrite et votre question. Il y a 5 ans, François Fillon aurait pu être élu Président de la République ? Oui. Il a été troisième à cette élection. Il a réalisé 20 % et aurait pu être élu. Dans quelle situation serions-nous aujourd'hui ?

Vous dites qu'il aurait été complice de Vladimir Poutine ou qu'il serait allé dans son sens ?

Je dis que la situation de la France et de son Président ne seraient pas les mêmes, étant donné les relations assumées antérieures, j'allais dire, exhibées. Je vous rappelle que Poutine a pris position publiquement pour Fillon au moment de l'élection en 2017.

Il aura peut-être eu l'occasion de vous répondre…

Précisément sur la chaîne Russie 24 que nous venons juste d'évoquer.

Vous citiez à l'instant, la droite, mais également les positions de Marine Le Pen, d'Éric Zemmour, de Jean-Luc Mélenchon, pro-Poutine à vos yeux. Et pourtant, il y a quelques jours, vous disiez qu'au nom de la démocratie, vous étiez prêt à les parrainer.

Exactement.

Vous considérez donc que ces candidats, quels que soient leur position et leur risque d'élection, méritent de concourir et qu'ils ne représentent pas un danger pour la France ?

Voulez-vous vous bien que nous considérions que ce sont deux questions différentes.

La question de la démocratie en France est précisément l'un des éléments qui nous permettront, j'espère un jour, de réconcilier le pays. Nous avons un pays qui est puissamment fracturé, des personnes qui ne considèrent plus appartenir au même ensemble et nous sommes menacés, nous l'étions, d'avoir deux ou trois des candidats principaux, c'étaient trois quand je me suis exprimé et deux aujourd'hui…

Jean-Luc Mélenchon a eu ses parrainages entre-temps.

Il a eu ses parrainages avec des parrainages de droite aussi. Il faut le rappeler également.

Nous avions trois candidats qui menaçaient de ne pas pouvoir être candidat à cette élection alors même qu'ils représentaient additionnés quelque 15 millions de voix, soit 40 % des suffrages.

Cette situation, à mes yeux, est inacceptable. Je sais bien que beaucoup de personnes se moquent de la démocratie pourvu que leurs idées triomphent.

Il y a des candidats qui disent : "mais pourquoi leur donnerait-on des signatures ? Il faut les exclure de cette élection !" Ce n'est pas mon point de vue. Je suis ‑ vous l'avez rappelé ‑ radicalement opposé aux thèses de ces trois candidats et, cependant, je dis qu'il faut qu'ils participent à cette élection.

Et à qui donnerez-vous votre parrainage, vous, François Bayrou ?

J'y viens. J'y viens.

Et comme ils étaient menacés de ne pas pouvoir le faire, position exprimée publiquement et dont je sais qu'elle était vraie, puisqu'il leur manque plusieurs dizaines, près d'une centaine de signatures au dernier décompte à chacun…

414 Marine Le Pen et Éric Zemmour, 415.

Oui, donc 85 à chacun. J'ai dit : "c'est impossible". Moi, comme citoyen, je considère que je ne peux pas défendre devant mes concitoyens de toutes opinions, l'idée que le Président de la République française serait élu dans une élection de laquelle les principaux candidats seraient exclus.

Des personnes s'en accommodent, moi pas ! Et c'est la raison pour laquelle j'ai lancé un appel qui a eu un succès remarquable - je crois pouvoir le dire - puisque l'on approche des 400 élus qui ont adhéré à "notre démocratie.fr".

Et vous allez utiliser ces parrainages ?

Ils vont l'utiliser eux-mêmes. Ce n'est pas moi, je ne suis pas chef de tout cela.

Et vous allez utiliser le vôtre ?

Oui.

Et pour qui ?

J'y viens. J'y viens.

D'accord. On attend votre réponse.

Donc, j'ai dit que nous devons assurer que les candidats principaux recevront leurs signatures. J'ai réuni vendredi soir, un très grand nombre puisqu'ils étaient près de 150, par visio, les élus qui participent à ce mouvement et tous, unanimement, ont dit : "oui nous pensons que c'est ce qu'il faut faire. Oui il faut trouver une parade à la crainte des élus et spécialement des maires qui ont peur que l'on assimile leur signature à un soutien" et c'est pourquoi nous avons décidé de faire signer à tous, à ces centaines d'élus, une déclaration disant : "c'est pour sauver la démocratie, mais nous, notre signature ne vaut pas soutien".

On peut être en désaccord et, évidemment, je ne me défilerai pas.

Alors qui allez-vous "sauver" ?

Nous allons sauver ceux qui, pour l'instant, ne les ont pas. Après, il y aura peut-être des signatures pour les autres. Moi, j'ai décidé de prendre ma part de cette charge et cela ne correspond pas exactement au rêve que j'ai de l'engagement politique. Je donnerai ma signature à Mme Le Pen.

Donc, aujourd'hui, vous nous annoncez que vous allez parrainer, en tant que maire de Pau, Marine Le Pen.

J'avais dit que je ferai ce que je demande aux autres de faire.

Pourquoi Marine Le Pen ?

Parce que c'est à elle qu'il manque une voix de plus et parce qu'elle est en tête au sondage.

Et parce qu'elle vous a appelé aussi. Je sais qu'elle vous a passé un coup de téléphone.

Zemmour aussi, tous.

Éric Zemmour vous a appelé aussi ?

Bien sûr.

Et donc, Marine Le Pen vous a dit qu'elle accepterait ce parrainage ? Parce qu'ils ne semblaient pas si enthousiastes que cela, non plus, de devoir accepter votre "aide".

Je ne sais pas si l'on peut refuser un parrainage. En tout cas, je sais que ces candidats-là, tous ont lancé des appels aux maires en leur demandant de les soutenir au nom de la démocratie.

Et comme je suis maire et que j'ai lancé ce mouvement : "notre démocratie.fr" alors j'assume ma responsabilité jusqu'au bout, non sans un petit pincement au cœur.

La première remarque qui vient à l'esprit des internautes quand ils entendent parler de votre banque de parrainages, c'est qu'en est-il des autres candidats, ceux qui sont en dessous des moins de 10 % dans les intentions de vote : donc Nicolas Dupont-Aignan, Philippe Poutou, Christiane Taubira, Hélène Thouy du parti animaliste.

Ils ne sont pas dignes pour vous de pouvoir se présenter à l'élection présidentielle ?

Un mot d'abord, ils sont nettement en dessous des 5 %.

Et pour vous, cela justifie qu'ils n'aient pas de coup de pouce pour les parrainages ?

Non, cela ne justifie pas, mais je pense que l'élection présidentielle serait en danger, si les candidats principaux ne pouvaient pas se présenter et qui portent des courants dont vous voyez bien quelle est la dynamique alors même que je trouve ces courants, pour moi, insupportables.

Mais je vous ai dit, il manque 85 signatures à chacun. Cela veut dire qu'au bout du compte, il faudra 170 signatures pour qu'ils puissent accéder à cette élection, même un peu moins, parce qu'ils vont en trouver encore. Cela signifie donc qu'il restera des signatures, que la déclaration de garantie d'impartialité : "je signe, mais je ne soutiens pas" sera valable.

Donc, il est possible qu'une partie de ces maires décide de parrainer quelqu'un d'autre.

Donc Nicolas Dupont-Aignan, Philippe Poutou ? Les encouragez-vous à le faire ?

Tous m'ont appelé et j'ai dit à tous que, naturellement, j'étais partisan du pluralisme et je ne suis pas tout seul, car le Général de Gaulle aussi était partisan du pluralisme. Il y a eu des débats au Conseil des ministres quand on a décidé de la constitution qui demandait un certain nombre de signatures, 100, je crois à l'époque. Des membres du Gouvernement disaient qu'il fallait aller plus haut, prendre des garanties plus importantes et de Gaulle a dit : "écoutez-moi bien, les élections, les citoyens sont assez grands pour faire le tri".

Vous, vous dites qu'il faudrait revenir à ces 100 parrainages de l'époque et non les 500 d'aujourd'hui.

C'est une question compliquée, je propose qu'on la traite, qu'on la mette sur l'agenda, mais pas seulement, je vous rappelle que cette démarche est absolument en phase avec les autres propositions qu'au travers des années j'ai faites pour la démocratie en France : "la banque de la démocratie", parce que je ne trouve pas normal que des campagnes électorales ne puissent pas se financer et la proportionnelle, parce que je ne trouve pas normal que des courants politiques majeurs soient exclus du Parlement et de la représentativité…

Sur la proportionnelle c’est vraiment un grand regret que vous avez, François Bayrou, que le Président de la République ne vous ait pas suivi.

C'est un grand regret, mais pas une résignation.

Donc, vous pensez qu'il le fera pour un second quinquennat s'il est réélu ?

En tout cas, je ferai tout ce que je peux pour que la question de la rénovation de notre vie démocratique se pose et soit résolue, soit tranchée de manière nouvelle et positive.

Questions express :

Pour ou contre le retour du cumul du mandat député/maire ?

Contre.

Pour ou contre des juristes nommés au Conseil constitutionnel en lieu et place de politiques ?

Absolument contre.

Vous voulez continuer à ce qu'il y ait des politiques et Jacqueline Gourault, qui est quand même du MoDem, vient d'être nommée…

Deux réponses : le Conseil constitutionnel n'est pas une cour suprême.

Et cela ne devrait pas l'être ?

Surtout pas, le Conseil constitutionnel est fait pour l'équilibre des institutions.

Dans la Constitution, il y a les collectivités locales et Jacqueline Gourault a fait voter trois lois à la quasi-unanimité sur les collectivités locales.

Ministre des territoires dont la nomination est acquise pour le Conseil constitutionnel.

La question des rapports entre les collectivités locales et l'État, à l'intérieur de nos institutions, est une question éminente d'équilibre.

Je ne vois vraiment pas pourquoi il faudrait un monopole de juriste. Je vais prendre un exemple : Alain Juppé est-il juriste ?

Et donc vous trouvez très bien qu'il soit au Conseil constitutionnel…

Laurent Fabius, non plus.

Si, Fabius, oui, il a dû passer quelques mois au Conseil d'État.

Pour ou contre l'allongement de l'IVG, de 12 à 14 semaines ? Cela a été voté cette semaine.

Affaire de conscience. Cela a été voté.

Êtes-vous pour ou contre personnellement ?

C'est une affaire que chacun doit traiter pour soi-même. Je ne veux pas en parler légèrement si vous le permettez.

Pour ou contre, Marc Fesneau, ici présent dans le public, pour remplacer Julien de Normandie, au ministère de l'Agriculture, partant pour devenir le directeur de campagne d'Emmanuel Macron ?

Souhaitez-vous cette nomination de Marc Fesneau ?

Il me semble que ce serait la personnalité la mieux adaptée à la fonction, mais ce n'est pas moi qui nomme les ministres de l'Agriculture.

En tout cas, je sais de près quelle est la passion pour ce monde agricole que Marc Fesneau a développée tout au long de sa vie y compris professionnelle.

Enfin, pour ou contre, François Bayrou, Premier ministre d'un second quinquennat d'Emmanuel Macron ?

Je ne nomme pas les ministres de l'Agriculture, encore moins les Premiers ministres !

Est-ce que vous vous sentiriez être ministre vous-même ?

Je n'ai jamais répondu à des questions d'intérêt général par l'intérêt particulier. Jamais. Peut-être est-ce bizarre ? Peut-être que l'on considérera que c'est naïf, mais je ne suis pas à l'aise dans ce monde où l'on ne répond que pour son propre intérêt. Moi pas.

Merci, François Bayrou. C'était votre Grand Jury. Vous venez de nous annoncer que vous donnerez votre parrainage et non votre soutien à Marine Le Pen, pour qu'elle puisse se présenter à cette élection.

Très bonne journée à tous. À la semaine prochaine.

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