đŸ“ș  François Bayrou, invitĂ© de Darius Rochebin sur LCI

François Bayrou, Président du Mouvement Démocrate, était l'invité de Darius Rochebin pour le grand entretien de son émission mercredi 25 mai, à 20h25 sur LCI, dans l'émission Le 20h de Darius Rochebin. Retrouvez ci-dessous la retranscription de l'interview. 

Bonsoir François Bayrou.

Bonsoir.

Vous ĂȘtes l'homme du long terme, mĂȘme trĂšs long terme, on va en parler. Quelques mots sur le trĂšs court terme. Exemple, Ă  l’instant, GĂ©rald Darmanin versus Audrey Pulvar, la plainte, plus la plainte, la rencontre : c'est de l'action ou de l'agitation ?

Ne me mettez pas dans des situations comme cela car j'ai un principe qui est de ne pas trop dire du mal des gens et encore moins des gens qui sont dans la majorité ou dans le courant majoritaire.

Donc vous en auriez un peu envie.

Non, je pense que tout le monde a compris que ce n'est pas de cette maniÚre-là que l'on doit exprimer des idées politiques, et encore moins des jugements politiques.

Il y a toute l'arÚne politique pour défendre des positions et des principes.

Pour nous, journalistes, c'est trùs amusant, le ministre qui twitte quelques minutes aprùs le passage d’Audrey Pulvar sur LCI. Trùs bien.

Pour la politique, est-ce bien ?

Un, que ce soit amusant pour vous, journalistes, c'est une chose que j'arrive Ă  comprendre, mais ce n'est pas ainsi que finit l'histoire. Ce n'est pas dans l'amusement des journalistes.

Non. Vous savez bien quelle est la pression du moment, la pression de l'instantanĂ©. Vous ĂȘtes une chaĂźne qui vit de la pression.

Je ne parlais pas de l’instantanĂ©, mais plutĂŽt du problĂšme du gouvernement en l’occurrence.

Donc, la pression est trÚs importante. Je pense que les politiques doivent y résister.

Ils n'y résistent pas assez. M. Gérald Darmanin n'y résiste pas assez, selon vous ?

Non, n’essayez pas, vous ne me prendrez pas à ce piùge !

Des ministres aussi en campagne ou rĂ©gionales, on voit que les mƓurs changent, c’était l’usage qu’un ministre se prĂ©sente avec un risque, s'il perd, il doit dĂ©missionner. Maintenant, on dit : non, non, il peut y aller, s'il perd, tant pis.

Est-ce normal ?

Non, ce sont des élections locales. J'aurais souhaité qu'elles fussent encore plus locales qu'elles ne le sont.

La France a une faiblesse qui est de nationaliser tous les scrutins.

Vous qui ĂȘtes Suisse, vous savez exactement que l'on peut avoir des dĂ©bats locaux et mĂȘme des majoritĂ©s locales qui ne se dĂ©calquent pas sur une majoritĂ© nationale et, chez vous, en plus la situation institutionnelle de la Suisse fait qu'il n'y a pas de majorité comme cela.

Envoyer plusieurs ministres, cela nationalise.

Non, je pense qu’ils ont voulu montrer quel Ă©tait leur engagement dans la majorité ; je ne vais pas leur en faire reproche.

J'aimerais un jour arriver à vivre dans un pays qui ait une vie démocratique suffisamment riche pour que l'on ne soit pas obligé de nationaliser toutes les élections locales !

Vous avez des débats, des enjeux qui sont régionaux, des enjeux municipaux et vous n'allez pas en faire le décalque. J'ai toujours refusé de faire une majorité locale qui soit le décalque de la majorité nationale ou de l'opposition nationale.

On va parler des rĂ©gions, de la vie des rĂ©gions qui vous tiennent Ă  cƓur.

Quelques mots encore sur l'hyper centre, Emmanuel Macron, l'homme que vous avez soutenu il y a quatre ans, cette alliance trÚs forte, vous l'avez vu évoluer, le contraste est saisissant. Vous, cela fait bientÎt 40 ans que vous avez été élu pour la premiÚre fois et, lui, cela fait 4 ans.

40 ans/4 ans.

En 4 ans, est-ce qu’il a changé ?

Oui beaucoup

Pourquoi ?

Il suffit de regarder son visage. Vous ĂȘtes des mĂ©dias de l'image, vous regardez le visage et vous voyez sur son visage le choc de la rĂ©alitĂ©, les chocs qui l'ont atteint, plus qu'aucun de ces prĂ©dĂ©cesseurs.

Les gilets jaunes notamment. Il en parle dans l'interview Ă  Zadig aujourd’hui. Les gilets jaunes, cela a Ă©tĂ© un choc, notamment.

Cela a été un choc. J'étais l'autre jour dans un magasin à Pau. Il y avait des vendeuses trÚs sympathiques autour de moi et qui m'ont dit : « Monsieur Bayrou, vous le voyez, vous, M. Macron, souvent ? »

J’ai dit : « oui, cela m'arrive ».

Elles m’ont dit : « Écoutez, vous allez lui dire quelque chose de notre part, c'est plutĂŽt lui que nous, car, ce qu'il a affrontĂ©, on ne voudrait pas ĂȘtre Ă  sa place. »

Autre mouvement, le Mouvement DĂ©mocrate a montrĂ© un peu d’humeur sur un certain nombre de sujets ces derniers temps, sur le pass sanitaire que les dĂ©putĂ©s ne voulaient pas voter en premiĂšre lecture, sur la proportionnelle : promesse non tenue.

Est-ce qu’il y a une dĂ©ception?

Non.

Pour l’instant...

L'incident dont vous parlez sur le texte d'Ă©tat d'urgence sanitaire a durĂ© deux heures. Il faut ĂȘtre objectif.

Mauvaise humeur de 2 heures, admettons. Mais enfin, est-ce que vous ĂȘtes déçu ?

Mauvaise humeur pour des raisons fondées.

Pour la proportionnelle que vous évoquez, je sais bien que tout le monde considÚre ; affirme urbi et orbi que c'est une affaire pliée.

Moi, je ne suis pas de cet avis. Je pense que c'est un combat absolument essentiel. Il faut comprendre. De quels outils disposons-nous si l’on considĂšre qu'il faut trouver un nouvel Ă©quilibre, un meilleur Ă©quilibre entre la fonction prĂ©sidentielle et la reprĂ©sentation du pays.

Quels outils ? Aucun. Si l’on veut continuer comme cela, on est sĂ»r que les mĂȘmes causes reproduiront les mĂȘmes effets et ma conviction, Ă  moi, c'est qu'il y a une chose trĂšs simple Ă  faire, c'est dĂ©cider que, dans une AssemblĂ©e Nationale qui reprĂ©sente le pays, tous les grands courants du pays seront reprĂ©sentĂ©s.

Ainsi, il y aura un Ă©quilibre.

François Bayrou, vous parlez d'un pouvoir plus dĂ©centralisĂ© Ă  tous points de vue. On en est si loin aujourd'hui ? On a l'impression au contraire que, non seulement dans la lettre, mais dans l'esprit, tout est trĂšs centralisĂ©, au fond : un cerveau Emmanuel Macron, un autre cerveau, Alexis Kohler, son secrĂ©taire gĂ©nĂ©ral Ă  l’ÉlysĂ©e, souvent, on a l’impression que cette relation un peu Richelieu, PĂšre Joseph... Ce sont les personnes qui ont tout en-tĂȘte, c'est trĂšs central.

Cela pourrait donner cette image, mais ce serait centralisé si c'était efficace.

Ce que je reproche Ă  l’État aujourd'hui, ce n'est pas tant d'ĂȘtre centralisĂ© que d'ĂȘtre inefficace : haute administration, vie gouvernementale, et vous avez l'impression qu'aucun des problĂšmes que le pays a dĂ©couvert, diagnostiquĂ© depuis des annĂ©es, ne se trouve rĂ©glĂ©.

Vous savez que je suis beaucoup intervenu par exemple sur l’effondrement de notre appareil productif, industriel, agricole, de services et on se retrouve en queue des classements sur un trĂšs grand nombre de sujets oĂč nous pourrions exister.

Vous pourrez faire campagne sur ces sujets, notamment.

On va dĂ©velopper certains de ces sujets de fond, mais un mot encore sur Emmanuel Macron, l’avenir, la candidature Ă  la prĂ©sidentielle cela peut ĂȘtre quand ?

Janvier.

C'est d'abord à lui de décider s'il se représente ou pas.

Il va se représenter, évidemment.

Vous avez des certitudes, je vous laisse vos certitudes.

Vous savez, je suis frappé d'une maladie trÚs bizarre. Je n'ai jamais aucun souvenir des conversations que j'ai avec le Président de la République, c'est une amnésie récurrente, comme l'on dit.

Mais c'est Ă  lui de prendre la dĂ©cision et, aprĂšs, de regarder la maniĂšre dont s'organise le temps politique. La France va prĂ©sider l'Union EuropĂ©enne Ă  partir du 1er janvier, responsabilitĂ© trĂšs importante. Elle va ĂȘtre concomitante avec l'Ă©lection prĂ©sidentielle. Je ne sais pas si vous mesurez l'ampleur des sujets qu'il faut saisir.

C'est un beau tremplin.

Oui. En tout cas, cela donne une bonne Ă©chelle qui permet de mesurer la dimension de la fonction et l'engagement de celui qui s'y investit.

François Bayrou, parlons du temps long et mĂȘme trĂšs long, bien plus loin que 2022, c'est la natalitĂ© de la France, le dĂ©clin dĂ©mographique. C'est une de vos grandes propositions : faire davantage d'enfants.

Regardons les chiffres qui résument tout : la fécondité en moyenne.

On était à un peu plus de 2 enfants par femme en 2010, on est maintenant à peu prÚs autour de 1,8. Quel est le minimum pour renouveler la population ?

C'est deux, on est passé en-dessous.

Énorme Ă©vĂ©nement.

C'est un signe trÚs inquiétant pour la France car la France était le pays d'Europe qui avait la natalité la plus dynamique. Ceci est un problÚme trÚs important, car il y a un élément auquel on n'attache pas d'importance et qui est vital : c'est qu'en France tous nos systÚmes de solidarité, tous nos systÚmes sociaux et tous nos systÚmes de services publics sont fondés sur les actifs.

Il faut les payer.

Ceux qui payent des impÎts et ceux qui cotisent pour les assurances sociales et donc, si vous avez une population qui se restreint, forcément, les services publics et les assurances sociales, la solidarité, vont se restreindre aussi.

Or, la France, ce n'est pas possible car la France est un pays qui est fondé sur ce contrat social-là.

Pour payer les retraites, pour payer ce systÚme, est-ce que, qu'on le veuille ou non, ce n'est pas l'immigration qui sera la seule solution ?

Non. Tout à l'heure dans votre introduction, vous avez dit : «François Bayrou dit que».

Non. À la question que vous posez : est-ce que l'immigration peut ĂȘtre la rĂ©ponse Ă  cette baisse et peut-ĂȘtre Ă  cet effondrement, la rĂ©ponse est non.

Pour deux sortes de raison. La premiÚre est arithmétique. Il y a à peu prÚs entre 8 et 10 millions de femmes qui sont en ùge d'avoir des enfants en France.

Si on voulait y adjoindre un nombre suffisant de personnes d'origine étrangÚre, est-ce que vous vous rendez compte de la dimension du nombre de personnes qu'il faudrait introduire ?

Cela n'a pas de sens arithmétiquement et c'est dangereux culturellement, car si vous organisez un choc entre communautés diverses
 Vous savez, les Allemands l'ont fait en une fois, ils ont introduit un million de personnes.

Un million de migrants en 2015. Madame Merkel. On se rappelle ces selfies avec les migrants.

Pas seulement Mme Merkel. Trois ou quatre mois avant la décision de Mme Merkel, je crois savoir que le patronat allemand a dit : « Il nous faut 1 million de personnes supplémentaires. »

Ce sont eux qui le voulaient, ils l’ont eu.

Le patronat demande, le gouvernement décide. On a fait entrer un million de personnes en une seule année.

Je crois qu'une telle expérience n'est pas renouvelable.

François Bayrou, lorsque l’on regarde la rĂ©alitĂ©, nos confrĂšres d’AFP Factuel ont montrĂ© Ă  quel point, lorsque l’on regarde les courbes : c'est trĂšs spectaculaire ! Sans dĂ©tailler, la petite courbe bleue en bas reprĂ©sente ce que serait l'accroissement naturel sans l'immigration dans l'Union europĂ©enne.

On voit à quel point la société se métisse, de fait.

Est-ce que lĂ  on ne se voile pas la face ? Notre sociĂ©tĂ© est en train de se mĂ©tisser et elle se mĂ©tissera toujours. N’est-ce pas le cas ?

Elle se métisse, du moins se pluralise ; il y a des mélanges d'origines et de populations depuis des siÚcles.

Là c'est beaucoup plus récent. En prenant mon exemple, je suis moitié iranien, j'étais dans une classe d'école il y a un certain nombre d'années et j'étais trÚs exotique à l'époque ! Aujourd'hui, cela s'est complÚtement déplacé.

Il n'y a pas que des inconvénients à tout cela. Le fait que l'on puisse avoir des rencontres de cultures, de communautés différentes, des maniÚres différentes de voir la vie, pour moi il peut y avoir des aspects positifs.

Les nationalistes appellent cela le « grand remplacement », c'est leur langage. Est-ce faux selon vous ?

Oui.

Pourquoi ?

C'est faux car, numériquement, ce n'est pas vrai. En France, le nombre d'immigrés qui entrent tous les ans est un des plus faibles des pays qui nous entourent, mais ce n'est pas la question.

Si vous voulez rĂ©flĂ©chir une seconde, si vous donnez Ă  une population qui a son histoire, son identitĂ©, sa culture, le sentiment que demain ces enfants ne vivront plus dans le mĂȘme pays, n'auront pas les mĂȘmes repĂšres culturels, alors vous dĂ©stabilisez profondĂ©ment ce pays.

Est-ce que ce changement n'a pas déjà lieu ? Tout à l'heure on regardait une photo de classe ; il y a des sites de fans de François Bayrou.

LĂ  vous ĂȘtes sur la photo, vous allez nous le dire.

Je suis le deuxiĂšme au premier rang en partant de la gauche.

Il ne s'agit pas du tout de caricaturer, mais cette photo, ce monde-lĂ , de fait a-t-il changé ? Oui, c’est davantage mĂ©tissĂ© aujourd'hui. Culturellement, Ă  tous points de vue, est-ce que l’on n'est pas en train de mĂ©sestimer complĂštement cette rĂ©alité ?

C'est une réalité avec laquelle nous allons devoir vivre. Le nombre de familles, parmi les personnes que je connais, dans le monde pyrénéen rural, le nombre de familles qui étaient trÚs à cran sur ces questions de rencontres, de couples, de mariages


Ils ont évolué.


Quand ils ont vu leur fille épouser quelqu'un d'une origine complÚtement différente, parfois d'une religion différente, ou leur fils avoir un couple qui soit un couple biculturel, ils découvrent tout d'un coup qu'il y a des richesses aussi, là-dedans.

Cela peut marcher mais vous savez trĂšs bien que beaucoup de gens pensent que non, cela amĂšne aussi des problĂšmes.

Qu'est-ce vous dites Ă  Éric Zemmour qui dit « il y a moins de prĂ©noms français » ? Qu'est-ce que vous dites Ă  la femme qui dit « à Montpellier, il n'y a plus de Pierre ». En rĂ©alitĂ© beaucoup de personnes


Il n'y a plus de Pierre nulle part ! Si je vous disais les prénoms de mes petits-enfants, vous auriez de sérieuses surprises ! C'est comme cela les histoires des prénoms, il y a des vagues.

J'ai toujours pensĂ© que si j'avais eu plusieurs vies, j'aurais fait une vie de sociologue et j'aurais Ă©tudiĂ© cette question : je suis fascinĂ© par cela. Vous avez des familles, des couples qui, lorsqu’ils apprennent qu'un enfant arrive, se creusent la tĂȘte pendant des mois pour trouver un prĂ©nom original et tout le monde choisit le mĂȘme.

Chez vous, vous avez six enfants, dont Calixte, c'était le nom de votre pÚre. Combien de petits-enfants avez-vous ?

C'est un secret professionnel.

Plus de 20 je crois. Cela met la population d’accord, mais on voit bien à quel point c'est difficile.

Pourquoi d'accord, si vous le concédiez ! ?

Vous savez trĂšs bien qu’en rĂ©alitĂ©, forcer la natalitĂ© c'est quasi impossible. Il y a des personnes de Droite qui vous disent « autorité » et ceux de Gauche qui dirigent les crĂšches, etc. En rĂ©alitĂ© cela ne fonctionne jamais, dĂšs que les individus atteignent un certain niveau social, ils font moins d'enfants


Monsieur, je ne crois pas du tout cela, je pense que la clef, le secret est dans l'optimisme du pays. Si l’on continue Ă  avoir en effet Ă  avoir un pays dĂ©moralisĂ©, alors les pays dĂ©moralisĂ©s ne feront plus d'enfants ou en feront moins, car ils ne peuvent pas se projeter dans l'avenir.

Aussi, cette question de dynamisme national, est aussi la question du dynamisme dĂ©mographique, mais il est possible d’y aider ! Il se trouve que si vous regardiez la courbe de la natalitĂ© française, le jour oĂč l’on a coupĂ© les allocations Ă  un certain nombre de Français, sous le quinquennat de François Hollande, cela s'est effondrĂ©.

Il existe donc aussi des responsabilités : avoir des crÚches ou des assistantes maternelles et garantir aux femmes qui ont des enfants que cela n'aura pas une conséquence négative sur leur carriÚre : trÚs souvent ce n'est pas le cas. Faire aussi en sorte que les pÚres de famille puissent prendre des responsabilités ; au fond faire en sorte qu'il y ait une attitude compréhensive de soutien de la Société. Cela, c'est une vraie clef !

Plus de natalitĂ©, on voit que chez vous cela vous tient Ă  cƓur. Nous parlions tout Ă  l'heure de la sensibilitĂ© dĂ©mocrate-chrĂ©tienne. Est-ce que qu’elle fait partie de cela ?

J'essaie de ne jamais mĂ©langer les problĂšmes civiques et les problĂšmes de convictions spirituelle et personnelle, ce n'est pas un secret que je suis croyant et que je suis mĂȘme, comme on dit pratiquant, mais je ne mĂ©lange pas ces sujets.

Le sujet du dynamisme dĂ©mographique de la France est un sujet civique, c’est un sujet dĂ©mocratique. Encore une fois ce qui est en jeu, c'est de savoir si nous allons garder le contrat social le plus gĂ©nĂ©reux au monde que nous avons ou est-ce qu’il va s'effondrer ?

Est-ce que l’on accepte qu'il s'effondre ? Est-ce que l’on accepte autrement dit, de baisser sans cesse dans la reconnaissance des nations ?

Mon avis, c'est qu'il est une responsabilitĂ© gĂ©nĂ©rale de pouvoir aller dans le sens de ce dynamisme et il y a une preuve, une chose que l'on doit prendre en compte pour retrouver l'optimisme dont je parle. Lorsque l’on fait des enquĂȘtes d'opinion, pour demander aux femmes ou aux couples combien d'enfants ils voudraient, la rĂ©ponse est gĂ©nĂ©ralement trois, alors qu’ils en ont moins de deux. Vous voyez bien ce que je veux dire, il y a une attente.

Est-il possible de soutenir cette attente ou rassurer face à cette attente ? Je trouve que c'est le devoir d'un pays.

Allons-y ! Ce soir vous dites aux couples : « Allez-y, il est 20 h 48, faites trois enfants et plus ! ». C’était DebrĂ© qui disait cela.

Non, franchement je ne dis pas ce genre de chose - Dieu sait que c'est un sujet qui peut prĂȘter Ă  sourire - mais je ne dis pas ce genre de choses, car la dĂ©cision d'avoir des enfants est une dĂ©cision situĂ©e prĂ©cisĂ©ment au carrefour du plus intime de l'intime et de l'enjeu de SociĂ©té : je ne mĂ©lange pas l'un et l'autre.

Ce que je constate, c'est que les femmes ou les couples voudraient avoir en moyenne un enfant de plus que ceux qu'ils ont. Aidons-les Ă  les avoir.

Vous avez eu 70 ans hier, 40 ans de vie politique, Yann BarthÚs, dans Le Quotidien vous « chambrait » là-dessus.

J'ai beaucoup rajeuni !

Ah bon ? !

Beaucoup, d'un seul coup.

Jusqu'Ă  rĂ©cemment, j'avais six ans de moins que le PrĂ©sident des États-Unis et maintenant j'ai neuf ans de moins que le prĂ©sident des États-Unis.

Tout est relatif !

Les grands dirigeants de la planÚte, quels ùges ont-ils aujourd'hui ? Ils ont l'ùge de l'expérience : vous prenez Vladimir Poutine, Xi Jinping, vous prenez évidemment Joe Biden et vous voyez que les peuples ont assez souvent besoin d'expérience.

En France, nous avons la chance d'avoir un Président jeune et autour de lui, des personnes qui ont en effet une capacité, une expérience ; je trouve que c'est plutÎt bien.

Quant à moi, je me sens d'une juvénilité que j'ai rarement rencontrée dans ma vie.

Longue vie Ă  vous, le temps qui passe tout de mĂȘme a pris un sens particulier avec la mort d’une personne, Marielle de Sarnez, qui Ă©tait comme une sƓur pour vous en politique.

C'est trĂšs rare en politique des gens qui, Ă  leur mort, recueillent une sorte d’unanimitĂ© comme cela dans l'hommage.

Pour vous, cela a été un cap ?

C'est un moment de bascule de choses trÚs importantes. Vous perdez quelqu'un avec qui vous avez partagé 35 ans de vie et d'engagement et avec qui, tous les jours, dix fois par jour ou quinze fois par jour, vous examiniez les choses et les questions.

Oui, Ă©videmment, c'est un manque, mais ce manque-lĂ , pour moi, d'abord, il ne s'efface pas.

J'ai perdu aussi mon bras droit Ă  Pau qui a disparu.

La mort précoce de votre pÚre, la mort de plusieurs personnes de votre famille de maniÚre accidentelle, elle était là ?

Elle Ă©tait lĂ , elle est lĂ  et elle donne son sens Ă  la vie. Il y a des gens qui pensent que, la mort, c'est quelque chose qui est fini.

Pour moi, non. Je pense que les gens qui ont disparu, d'une certaine maniĂšre, ils sont lĂ  et peut-ĂȘtre on pourrait dire d'une maniĂšre certaine. Ils sont lĂ  et ils sont non seulement prĂ©sents, mais, pour moi, agissants.

Évidemment, cela crĂ©e des liens. Ce ne sont pas des liens tout Ă  fait ordinaires. Ce sont des liens dont la prĂ©sence n'est pas sensible.

Vous croyez à leur intervention ?

Oui, j'ai toujours pensĂ©, j'ai toujours vĂ©rifiĂ© lors d’évĂ©nements tragiques trĂšs prĂ©coces dans ma vie, qu’en effet ils Ă©taient lĂ  et qu'ils pouvaient aider.

Ce sont de grands mystĂšres, car c'est trĂšs difficile Ă  comprendre.

J'ai toujours pensĂ© que la mort, ce n’était pas la disparition, c'Ă©tait la sortie du temps.

Nous, nous sommes dans le temps, vous et moi, surtout vous qui avez le chrono qui tourne ! Nous, nous sommes dans le temps, et eux, tout d'un coup, ils ont acquis un autre mode d'existence.

Mais je vous fais, là, des confidences personnelles qui ne sont pas trÚs habituelles sur des plateaux de télévision.

François Bayrou un mot de conclusion.

Hier, nous recevions Stéphane Bancel, l'homme de Moderna. Je ne vais pas vous faire reparler de votre jeunesse, mais lui était dyslexique, vous étiez bÚgue et lui disait trÚs bien à quel point cela avait été une force pour lui de surmonter sa dyslexie.

Vous ĂȘtes d'une espĂšce diffĂ©rente, vous, les bĂšgues et les dyslexiques ? Est-ce qu’il y a une forme de


Je ne sais pas bien... En tout cas, je sais que c'est moins agréable à vivre que ce n'est à raconter aprÚs coup par les observateurs.

C'est une épreuve en réalité on ne l'oublie jamais quand on a été bÚgue ou dyslexique ?

Je pense que c'est ineffaçable et je pense que c'est bien que ce soit ineffaçable, car cela vous met tout d'un coup en relation avec les gens à qui il arrive de méchantes bricoles dans la vie, à qui il arrive des accidents, avec les gens dont on se moque, car cela joue un trÚs grand rÎle.

Vous aviez été moqué, beaucoup ?

Forcément, comment voulez-vous qu'il en soit autrement ? Vous connaissez quelque chose de plus cruel qu'une cour de récréation ? Je vous garantis qu'il n'y a rien de plus cruel.

C'est comme cela, c'est comme dans la meute des petits loups, on se mordille et donc, oui, c'est franchement pas sympa, comme on dirait.

Et, en mĂȘme temps, cela vous conduit Ă  quelque chose qui est de retrouver l'enfant que vous Ă©tiez et peut-ĂȘtre de l'apprivoiser un peu.

Voyez ce que je veux dire ?

Cela remonte encore ? On s'en guérit à jamais ou il y a toujours quelque chose ?

Je pense que l'on n'en guérit jamais, mais on paraßt en guérir. C'est déjà pas si mal.

Merci beaucoup François Bayrou.

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