Changer de nom de famille : la nécessité d'avancer, de simplifier les démarches et d'avoir une meilleure équité

Aude Luquet

La proposition de loi "choix du nom issu de la filiation" a été adoptée en première lecture à l'Assemblée nationale ce mercredi. Aude Luquet, députée de Seine-et-Marne et vice-présidente du groupe MoDem et Démocrates apparentés à l'Assemblée nationale, est oratrice pour le groupe à ce sujet. Interview. 

Quel est l’état du droit actuel concernant le « nom de famille » ?

Rappelons d’abord qu’un nom de famille, ce ne sont pas de simples lettres écrites sur un morceau de papier. C’est une identité, des racines qui vous ancrent dans une histoire entre passé et futur. C’est aussi un héritage avec le poids qu’il comporte. Une responsabilité qui incombe à l’enfant avant même que celui-ci en ait conscience. 

Si le nom s’est démocratisé en France au XIIème siècle, on a longtemps parlé de « patronyme », pour aujourd’hui parler de « nom de famille »

Alors que l’automaticité du nom du père était voulue pour rattacher un sujet à sa lignée en l’inscrivant de façon visible dans une continuité généalogique, il est désormais possible pour les parents, depuis une loi du 4 mars 2002, de choisir entre le nom de la mère, du père ou bien d’accoler les deux.

Comment cela se traduit concrètement ?

Malgré un choix désormais libre, 80% des parents donnent encore le nom du père seul, admettant, consciemment ou non, que la mère donne naissance, et que le père donne son nom. Les parents ne ressentent pas cela comme un sacrifice mais comme un équilibre dans le rapport à l’enfant.

Quelle était la situation jusqu’à aujourd’hui pour toutes les personnes demandant à changer de noms de famille ? Quelles sont les démarches à suivre ?

Chaque année, plusieurs milliers de français entament une démarche pour changer leur nom de famille ou celui de leurs enfants. Alors que les demandeurs étaient 2.500 en 2017, ils étaient plus de 4200 en 2020.

Aujourd’hui, vouloir changer de nom est une procédure longue et qui a un coût.

Il faut commencer par publier sa demande au Journal officiel et dans un journal d’annonces légales (JAL). Les frais sont à la charge du demandeur et s’élèvent à 110 euros par annonce. Il faut ensuite adresser sa demande de changement de nom au ministère de la Justice en envoyant un dossier comprenant de nombreux documents. Le délai pour obtenir une décision est variable mais se compte en plusieurs mois et même années.

Au-delà de ces démarches, il faut pouvoir démontrer un « intérêt légitime » pour justifier sa demande de changement de nom.

Pourquoi cette proposition de loi visant à faciliter les changements de noms est-elle une véritable avancée ? Que prévoit-elle d’instaurer de nouveau ?

Cette proposition de loi distingue deux choses : le « nom d’usage » et le « nom de famille ».

Pour ce qui est du nom d’usage, il s’agit d’abord de clarifier, de simplifier et d’assouplir les conditions dans lesquelles toute personne peut, à titre d’usage, porter le nom du parent qui ne lui a pas transmis le sien en codifiant la règle dans le code civil afin d’en garantir l’accessibilité. Il sera possible de porter, à titre d’usage, un nom composé par l’adjonction du nom qui n’a pas été transmis mais aussi de procéder à la substitution du nom qui n’a pas été transmis.

Cette assouplissement des règles relatives au « nom d’usage » sera possible pour les enfants mineurs par décision des titulaires de l’exercice de l’autorité parentale. Comme pour le « nom de famille », le changement du « nom d’usage » nécessitera le consentement de l’enfant de plus de 13 ans.

Pour ce qui est du « nom de famille », cette loi permettra, une fois dans sa vie passé 18 ans, d’avoir recourt à une procédure simplifiée afin de pouvoir choisir son nom de famille. Ce choix ne pourra se faire qu’entre celui de la mère, du père, ou les deux, dans le sens que l’on souhaitera. Il suffira désormais de remplir une déclaration Cerfa à l’État civil à la mairie.

Il faut insister sur le fait que cette proposition n’ouvre pas un droit à choisir n’importe quel nom mais seulement un ou ceux issus de sa filiation. Cette procédure simplifiée ne peut être utilisée qu’une seule fois ; une nouvelle demande devra impérativement se faire selon la procédure actuelle du « motif légitime ».

À quels besoins répond-elle ?

Cette proposition de loi répond avant tout à des souffrances du quotidien. Pour certains, leur nom est comme une marque indélébile face à ce qu’il leur apparait comme un parcours du combattant pour en changer. Je pense à celui ou celle qui a subi l’inceste d’un parent, celui ou celle qui a été abandonné dès le plus jeune âge par un de ses parents dont il ou elle porte le nom, je pense à cette mère ou à ce père qui a la garde de son enfant avec pour unique nom celui de l’autre parent et qui doit sans cesse prouver sa maternité ou paternité. 

L’automatisation du double nom est-elle une voie envisageable pour remédier à cela ?

Si au groupe MoDem nous sommes favorables à la simplification de la procédure de changement de nom, il nous apparait nécessaire, en parallèle, de travailler à une meilleure connaissance et application de la loi de 2002 qui nous semble bien faite. Les parents sont libres de choisir le nom du père, de la mère ou d’accoler les deux. C’est une vraie liberté.  

Au-delà de ce choix du nom, pour nous, le véritable combat pour une égalité concernant l’enfant est davantage à aller chercher du côté du rôle de chacun vis-à-vis de celui-ci plutôt que vers le choix du nom de l’enfant en lui-même.

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