Maud Gatel : « Une alternance à la mairie de Paris oui, mais pas un retour en arrière »

Maud Gatel, secrétaire générale du MoDem, présidente du groupe "MoDem et Indépendants" au Conseil de Paris et cheffe de file MoDem dans la capitale, a répondu aux questions du Parisien sur ses attentes et sa vision pour les prochaines élections.
Quel sera votre rôle dans cette campagne ?
Les chefs de file sont ceux qui sont censés préfigurer un certain nombre de choses dans la perspective des élections municipales. Puis viendra l'étape de l'investiture, qui relève également de nos instances.
Vous souhaitez être tête de liste ?
Mon rôle n'est pas, aujourd'hui, celui-ci. Dans la vie, il y a les gens qui sont et les gens qui font. Je me situe dans la deuxième catégorie parce que c'est ce dont Paris a besoin pour relever cette capitale que j'aime tant et qui nécessite d'avoir un nouveau souffle.
Vous allez vouloir une alliance du centre et de la droite ?
Depuis plus d'un an, on travaille sur le programme. Dix ans d'Anne Hidalgo ont profondément discrédité la gauche à Paris.
Il y a une volonté des Parisiens d'ouvrir un nouveau chapitre, je crois qu'il y a une véritable opportunité. Mais pas à n'importe quel prix.
C'est-à-dire ?
Cela doit se fonder sur un projet qui porte une nouvelle ambition à Paris. Tous les grands maires ont une vision pour leur ville. Je pense à Pau (François Bayrou) ou au Havre (Édouard Philippe). Je veux continuer à travailler sur le projet de Paris en 2050. La question de l'adaptation au changement climatique est un prérequis, pas une ambition. La maire de Paris a pris beaucoup de retard. On va travailler au centre puis on discutera avec d'autres formations politiques.
Quelles seront vos limites ?
Il y a une volonté d'alternance mais pas pour un retour en arrière. Je suis assez frappée par le fait que beaucoup de candidats s'expriment sans exposer leur ambition pour Paris à horizon 2050.
Que retrouve-t-on dans cette vision ?
Cela se fait autour de trois thèmes, à commencer par la réconciliation qui n'a jamais été aussi urgente. Paris brille quand on arrête d'opposer les Parisiens entre eux, comme pendant les JO. Puis Paris à 2050 donc. On a aussi perdu une énergie parisienne d'innovation.
Et 140 000 habitants...
C'est l'équivalent d'un arrondissement comme le XIVe arrondissement. C'est énorme. Cela passe par l'amélioration de l'espace public, de la voirie, la végétalisation, l'entretien du patrimoine...
Bref, une ville pour les Parisiens et pas simplement une carte postale pour les touristes.
Ces départs ne sont pas tous liés aux politiques municipales.
Il y a eu un effet Covid. Ces habitants ont vu que ça coûte très cher d'habiter à Paris, avec beaucoup de sacrifices, pour peu de choses en face. Au lieu de partir de Paris au moment du deuxième enfant, vous partez au moment du premier en raison des coûts du logement. On doit faire face à plusieurs difficultés sur ce thème : explosion des meublés touristiques, logements vacants, échec du dispositif « louer solidaire »...
Il y a aussi les conséquences de l'impossibilité de mettre sur le marché des logements aux DPE (diagnostic de performance énergétique) mauvais. Or ceux classés E, F et G représentent 54 % du parc parisien. C'est une bombe à retardement. Nous ferons une proposition forte et novatrice en ce sens.
Vous voulez aussi vous attaquer à la dette de 10 milliards d'euros de la Ville.
Cette question des finances publiques n'est pas une lubie centriste.
Dans la situation actuelle, on n'a plus les moyens d'agir pour adapter Paris au changement climatique. 200 millions par an sont consacrés aux remboursements des intérêts. Il faut donc en passer par un plan massif de désendettement et l'évaluation des missions essentielles de la Ville. De nombreux exemples montrent que certaines dépenses ne sont pas destinées à l'intérêt des Parisiens. Par exemple, il faut mettre fin aux 600 000 euros par an que reçoivent les élus pour leur présence dans des conseils d'administration annexes de la Ville.
(...)
Vous avez ainsi une ambition pour la petite enfance.
Nous ferons de la jeunesse parisienne une priorité à travers le lancement d'un service public de la petite enfance : place en crèche à la journée pour accueillir les enfants en cas d'urgence ponctuelle, accueil des enfants dès 2 ans et demi à l'école maternelle.
Mais les associations restent dans votre viseur...
La quasi-totalité accomplit excellemment bien son travail. Mais comme on n'a pas suffisamment d'informations, ni de moyens d'évaluer leur impact sur les politiques publiques, il faut qu'on puisse vraiment le mesurer. Je le regrette, mais en période de disette budgétaire, il y a des priorités et toutes les politiques publiques ne peuvent pas être des priorités.
Mais les actions de la Ville sont importantes pour beaucoup de Parisiens.
On peut faire plus avec autant de moyens, voire avec moins.
C'est possible au regard du nombre d'agents de la Ville. Si vous rationalisez mieux les aides diverses et variées qui sont données, c'est 300 millions d'économies très rapidement.
À vous suivre, vous la cycliste, il faut arrêter de faire des pistes cyclables...
Non mais il faut les planifier dans le temps. Et réaliser les annonces. Beaucoup de projets, et pas que des pistes cyclables, ne sont pas tenus. En 2026, seulement 50 % du plan vélo sera mis en oeuvre. Alors qu'il y a 200 carrefours accidentogènes identifiés.
Il faut faire un peu moins de promesses et livrer un peu plus.
Vous avez reçu 3 500 contributions de Parisiens, que réclament-ils ?
La réforme du mode de scrutin arrive sur le podium avec la sécurité et la propreté. Puis vient le lien social, Paris est un océan d'isolement.
Vos idées sont parfois proches de la gauche, parfois de la droite de Rachida Dati (Changer Paris). Où vous situez-vous ?
On est pragmatiques, dans le quotidien des Parisiens. Il y a vraiment une envie d'autre chose.
Du « en même temps » pour changer à tout prix ?
Non, ce n'est pas changer à tout prix. Par exemple, je suis une féroce défenseuse du vélo à Paris et je souhaite qu'on continue à aménager la ville pour mieux partager l'espace public. Mais il faut un plan de circulation global.
Une demande répétée de la droite.
Encore une fois, je pense l'avoir demandé avant eux.
Je suis extrêmement favorable à la diminution de la place de la voiture dans le centre de Paris, mais vous ne pouvez pas faire la plus grande ZTL du monde. Il faut le faire par petits quartiers.
On a fait comme si Paris était une île. Les théâtres, vous ne les remplissez pas qu'avec les Parisiens, ce sont les banlieusards qui viennent aussi.
(...)
Et Rachida Dati, donnée favorite des derniers sondages, est au gouvernement de votre leader François Bayrou.
D'abord le projet, l'incarnation plus tard. Il ne faut pas brûler les étapes. Il y a la place pour tout le monde mais cela doit être un collectif. Bien sûr qu'il y a une incarnation, mais gérer un budget de 10 milliards, gérer 10 milliards de dettes, gérer dix-sept arrondissements, tout ça doit être un travail collectif de gens légitimes.
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