Fusion entre le CSA et la Hadopi : pour plus de régulation numérique 

Philippe Latombe

Le député Philippe Latombe s'exprime sur la récente fusion entre le CSA et la Hadopi, laissant place à l'Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique (Arcom). Pour lui, le succès de l'Arcom sera dans sa capacité d'adaptation aux nouveaux usages du numérique. Explications. 

En quoi consiste l’Arcom, Autorité de régulation de la communication audiovisuelle et numérique, née de la fusion entre le CSA et Hadopi ? Qu’est-ce que cela va changer ? 

Tout d’abord, il convient d’expliquer quels étaient le rôle du CSA et de la Hadopi. 

Le Conseil Supérieur de l’Audiovisuel (CSA) est une autorité indépendante chargée de réguler et gérer les difficultés sur les médias audio et vidéo, comme par exemple les règles pour les campagnes électorales avec le temps de parole. Il intervient exclusivement sur les médias traditionnels, donc pas ceux sur Internet. Il a également un pouvoir de sanction et d’injonctions face à un dérapage médiatique et il pouvait être saisi par les médias et le public. 

La Haute autorité pour la diffusion des œuvres et la protection des droits sur internet (Hadopi) est un organisme qui devait protéger les ayant-droit des copies illégales sur les réseaux informatiques. Il avait uniquement un rôle de sanctions et de détection de la fraude. Son champ d'action se cantonnait aux contenus audio et vidéo sur Internet. 

Les deux n’avaient rien en commun. Mais aujourd’hui, les médias audio et vidéo se prolongent sur la toile. Et certains médias natifs d’Internet ont même une visibilité supérieure aux médias traditionnels. Il était grand temps de rapprocher les deux.

L’Arcom a les attributions des deux et a pour objectif de créer une synergie, de devenir une autorité indépendante qui a vocation à s’étendre et à s’épanouir sur l’ensemble des médias. 

Les missions de l’Arcom se sont élargies mais comment va-t-elle agir spécifiquement en faveur de davantage de régulation numérique ? 

Je vais illustrer cela au travers d’un exemple très concret. Un projet de loi a été voté récemment pour imposer aux fournisseurs d’accès de mettre dans leurs systèmes de connexion un contrôle parental obligatoire. Ainsi, si auparavant les clients et utilisateurs pouvaient déclencher ce système parental de manière optionnel, il sera maintenant activé dès le départ et nécessitera une action de désactivation autonome. Cela rentre dans le champ des missions de l’Arcom. 

La lutte contre les fake news est devenue impérative dans notre société. L’Arcom a-t-elle une vocation à intervenir sur ce sujet ? 

Il ne s’agit pas explicitement d’une des attributions de l’Arcom mais elle a vocation à intervenir par nature sur ce sujet. 

Auparavant, si un média audio/vidéo ne diffusait que des fake news, le CSA avait un pouvoir de sanctions et pouvait le déréférencer. Le CSA fusionnant avec la Hadopi pour créer l’Arcom, cette mission devient un sujet d’intervention par effet de conséquences. 

Comment compte-elle lutter durablement et efficacement contre le piratage ? Quelle nouvelle approche peut avoir l’Arcom pour contrer ce phénomène de masse ? 

Jusqu’ici, c’était la mission de la Hadopi. Seulement, la Hadopi coûtait très chère et rapportait peu. On la finançait depuis des années pour rien puisque le retour sur investissements était négatif. Mais le fondement de la Hadopi a été repris pour la création de l’Arcom. 

Ce que je regrette, c’est qu’on ne prend pas en compte les nouveaux usages de la musique et de la vidéo : on n’est plus propriétaire des contenus audio et vidéo que nous écoutons et regardons mais bien locataire. On ne grave plus notre musique sur CD ou sur un lecteur MP3. Aujourd’hui, tout se fait par le streaming. 

La fraude, elle-aussi, a changé, tout comme le numérique. Maintenant, pour contourner la loi et sans trop de risques, il suffit d’un bon VPN qui permet d’accéder à tout en instantané.D’ailleurs, une décision de la Cour de justice de l’Union européenne et du conseil constitutionnel a obligé les opérateurs de téléphonie et Internet à ne plus conserver les métadonnées des clients. Le problème, c’est que la Hadopi les stockait de son côté…

Il faut donc que l’Arcom évolue avec son temps de ce point de vue là et avec les nouveaux usages du numérique.  

Comment les internautes pourront-ils se repérer afin de savoir si telle ou telle plateforme est légale et qu’ils n’entravent pas la loi ? 

Par principe, toute plateforme est légale. Il faut prouver qu’elle est illégale pour sa fermeture comme avec des plateformes d’incitation à la haine raciale par exemple. 

À l’heure actuelle, la justice peut faire fermer des sites Internet directement auprès des fournisseurs d’accès en France si elle pense que c’est nécessaire. Le problème vient du fait que la lutte est sans fin. Si l’on possède un VPN, on pourra malgré tout accéder au site qui a été fermé en France puisqu’on sera délocalisé. La seule solution est la fermeture définitive du site et des sites miroirs à côté. 

L’idée est de faire en sorte que pour le commun des citoyens ce soit compliqué d’accéder à des contenus interdits. Aujourd’hui, quelqu’un de bien équipé peut facilement y accéder. Il y a donc un vrai problème du numérique avec la délocalisation. Il n’y a pas un Internet mais des Internet. 

Pourquoi l’Arcom peut-elle réussir là où la Hadopi a échoué ?

Elle peut réussir si elle évolue avec les nouveaux usages du numérique et d’Internet. Nous allons de plus en plus vers du contenu audio et vidéo non propriétaire. Finalement, les plateformes comme Netflix n’ont fait que reprendre le concept d’un certain nombre de chaînes de télévision américaines dans les années 80 qui faisaient payer leurs contenus intégralement. De même que Canal + qui avait, elle, la particularité de crypter seulement une partie de ses programmes.  La différence avec des plateformes comme Netflix, c’est qu’elles proposent un contenu beaucoup plus large qu’une chaîne de télévision. Les États-Unis n’ont jamais eu d’Hadopi, ils savaient vers où aller, comme au travers de l’exemple d'Apple avec ITunes, créant ainsi sa propre plateforme de streaming musical. 

L’Arcom va avoir du travail sur les chaînes abonnements, notamment sur le sport. En effet, je pense que la lutte contre le téléchargement illégal, contre le piratage se fera surtout sur les événements sportifs puisque les citoyens veulent les vivre en direct. C’est donc sur le direct que la lutte sera compliquée et qu’il faut agir. 

Autre problème, à l’image d’une chaîne comme Bein Sports qui risque de perdre ses revenus si la fraude est trop importante, le sport sera financé autrement, et non plus par les droits télé. 

L’Arcom va avoir du travail et devoir travailler en commun.

 

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