📻 François Bayrou, invité d'Europe 1

François Bayrou était l'invité de Sonia Mabrouk sur Europe 1 ce mercredi 23 septembre. Retrouvez ci-dessous la retranscription de son interview.

Bonjour François Bayrou.

Bonjour.

Jean Monnet, l'artisan de la planification en France, avait pour coutume de dire : le Plan ne décide pas, il oriente.

Est-ce à dire que vos pistes ne seront que consultatives ou vous envisagez de faire adopter vos propositions ?

Poser les questions et décider des pistes pour répondre aux questions, j'espère que cela va aider à la décision, mais pas seulement à la décision des gouvernants, car en réalité si l’on réfléchit bien, si l’on regarde bien les choses sur la plupart des sujets, qu'est-ce qui pèse dans la décision du gouvernement ? C'est l'opinion publique, c'est-à-dire vos auditeurs, vous-mêmes, commentateurs et faisant passer des idées.

Donc, la réalité c'est que, si l'on touche l'opinion publique avec un certain nombre de sujets, alors les gouvernants écoutent, et c'est le but que nous nous sommes fixé, c'est-à-dire qu'après un long temps où l’on avait trop souvent l'impression que la décision politique depuis 20 ans de plus était uniquement dirigée par l'urgence, par les scandales, par les accidents, par tout ce qui bouillonnait sur les réseaux sociaux ou les télévisions en continu, de sorte que les Français avaient l'impression que l'on ne savait pas très bien où l'on allait et donc essayer de montrer à 10, 20, 30 ans quel est le chemin à suivre, moi je trouve que cela peut, d'une certaine manière, aussi rassurer les Français.

Est-ce que vous avez l’assurance, François Bayrou, du Président de la République, que ce travail que vous allez mettre en marche sera pris en compte réellement ?

C'est plus qu'une assurance, car le Président de la République a voulu que l'on fasse renaître cette grande entreprise, cette grande aventure de la réflexion de l'avenir en commun, pour une raison très importante : quand on réfléchit loin, alors cela rassemble plus les gens que l'actualité immédiate qui est source de conflits, d'affrontements, de disputes, que l'on n'arrive même pas à éteindre.

Et donc, cela aussi, c'est un facteur de rassemblement.

Je crois que, plus on réfléchit de manière - j'allais dire détendue, en tout cas sans la pression de l'immédiat, en se demandant où l'on veut aller… Je veux prendre un exemple très simple.

Tout le monde se rend compte qu'il faut avoir une politique de l’eau pour la France, pour l'humanité ; on est dans des temps de sécheresse, il faut avoir une politique de préservation et de gestion de l'eau.

Alors, si c'est à l'instant, vous avez un problème d'un lac caulinaire dans un département du Sud et cela crée des passions et des bouleversements.

Si vous réfléchissez à long terme…

Vous ne pourrez pas faire fi des passions.

Je prends un autre exemple, vous parlez de l’eau, parlons du nucléaire ; est-ce que vous irez contre les politiques actuelles, est-ce que vous aurez cette audace ? Certains disent qu'il faut préserver la politique industrielle et nucléaire, la souveraineté de la France, est-ce que vous croyez à la politique de baisse de programmation du nucléaire en France ?

Il y a une question centrale, si vraiment pour la protection du climat, la question principale, comme beaucoup de scientifiques le disent, c'est l'émission de gaz à effets de serre, c'est-à-dire tout ce qui vient de la combustion des hydrocarbures, si vous dites que c'est le sujet alors je ne vois pas - c'est à titre personnel de citoyen, les études que l'on va produire le montreront ou pas - je ne vois pas comment on peut à la fois baisser les émissions de gaz à effets de serre et se détourner du nucléaire qui est la seule source qui, de ce point de vue là, la seule source massive, est une source propre qui n'émet pas de gaz à effet de serre.

Et donc ceci est une question. Vous avez exactement, là, l'exemple.

Vous ne pourrez pas être consensuel sur ce sujet François Bayrou. Depuis tout à l'heure vous nous dites : je ne veux pas provoquer de débat de choses clivantes, on attend de vous de trancher.

Les affrontements on peut essayer de les éviter.

J'ai dit hier devant le Conseil Économique et Social ce qu'est la méthode que je vais suivre.

On va poser les problèmes, on va les exposer de manière brutale s'il le faut, de manière nette, sans se perdre dans des phrases qui ne servent qu'à noyer le poisson.

On va les exposer en termes simples pour que tout le monde puisse les comprendre, que tous les citoyens y aient accès et aient envie d'y participer et, ensuite, on va ouvrir plusieurs pistes de réponses.

Ces pistes de réponses là ne seront pas toutes dans le même sens. Il y aura des débats violents et des choix : On va dans tel sens ou dans tel autre sens.

Vous venez d'exposer un des sujets sur lesquels, naturellement, il faudra faire des choix.

Est-ce qu’on peut à la fois réfléchir à la France de 2030, 2040 et même plus et s'occuper aussi la réélection d’Emmanuel Macron en 2022 ?

Je ne suis pas dans le problème électoral.

Ce Plan, cette réflexion que nous allons conduire ensemble, naturellement pourra inspirer le programme des uns et des autres, mais je vais faire la différence très précisément autant que je pourrai.

Vous êtes toujours président du Modem !

Je vais faire la différence entre les impératifs électoraux, je crois que je vais y arriver, et le soutien, le jugement que l'on peut apporter à l'action des gouvernants et du Président de la République.

Vous allez donc mettre une muraille de Chine entre le président du Modem et le Haut-commissaire au Plan ?

Je vais cultiver quelque chose d'oublié aujourd'hui qui s'appelle l'impartialité.

On peut avoir des opinions et on doit en avoir comme citoyen, comme personne, comme père de famille, on a des opinions. On a des préférences et des choix, mais on peut examiner les problèmes de manière impartiale.

Vous êtes à la tête d'un parti.

Qu'arrive-t-il, François Bayrou, au parti dont vous êtes le premier allié à la République En Marche ? Départ du numéro 2, défaite cinglante aux Législatives partielles ce dimanche, des députés qui quittent le Parti ? Rien ne va plus.

Je vais vous dire, ce que je vous dis là, je l'ai dit au Président de la République depuis le premier jour et chaque fois que nous en avons parlé.

C'est très difficile de faire un parti nouveau et, si vous regardez le paysage politique français, chaque fois qu'on a essayé, que l’on essaie de fonder un parti nouveau, chaque fois, il y a de grandes difficultés et des crispations, des rivalités et, au fond, le MoDem, le Mouvement Démocrate, est un des seuls partis nouveaux qui ait réussi à s'enraciner et, croyez-moi, cela n'a pas été facile.

Qu'est-ce vous lui dites au Président : Attention, regardez ce qui est en train de se passer, votre numéro 2 quitte ses fonctions ?

Ce n'est pas au Président de la République que j'ai envie de m'adresser ; si je dois adresser un message sur ce sujet, c'est à ceux qui sont les acteurs de ces crispations et de ces discussions.

J'ai envie de leur dire ceci : nous sommes dans le temps de crise le plus aigu que la France ait traversé depuis plus d'un siècle et peut-être beaucoup plus, avec, on le sent bien, des secousses, des répliques, comme l'ont dit pour un tremblement de terre, qui vont venir, avec les entreprises qui sont en difficulté parce qu'elles n'ont plus de carnet de commandes, avec des licenciements prévisibles, avec toutes les adaptations qui ne sont pas faites et l'invention d'une nouvelle manière de construire la vie française et donc ce n'est pas le moment de se livrer à des rivalités internes.

Ce ne sont que des rivalités internes, cela ne va pas plus loin ?

Ce sont des difficultés de ligne, des difficultés très importantes.

C'est important, certains quittent le parti en disant : Eh bien, son point d'équilibre est d'être trop à droite.

Ils ont tort ?

Encore une fois, je ne suis pas membre de En Marche.

Vous êtes le premier allié en tant que Président du Modem, c'est important.

Dans la majorité, et j'espère que nous en incarnons un, il faut qu'il y ait des pôles d'équilibre, des pôles de stabilité et si je peux, si nous pouvons, toute l'équipe qui m'entoure, on essaiera de construire ces pôles de stabilité là, mais quand la crise est si brûlante, ce n'est pas le moment de se livrer aux guerres internes.

Je ne sais pas sous quelle forme je peux le dire, mais la politique c'est souvent cela, des rivalités, des contestations, cela marche comme cela, hélas ! Et, au fond, je suis absolument certain que la forme des partis politiques doit changer, leur manière.

Allons plus loin, est-ce qu’Emmanuel Macron a vraiment besoin d'un parti pour 2022 ?

Je lis beaucoup d'articles sur ce sujet et je vous entends. Je ne sais pas ce que cette phrase signifie.

Un Président de la République, il a un contact direct avec les Français, cependant avoir autour de lui des équipes solidaires, des gens qui s'entraident, des gens qui s'entendent…

Vous les voyez, vous ?

Je les vois, mais je pense qu'il faut qu'il s'organise de cette manière-là. Vous vous souvenez, Emmanuel Macron a été élu aussi en partie grâce à l'idée de la bienveillance.

Eh bien, ce qui serait bien, c'est que la bienveillance commence à l'intérieur.

La bienveillance commence entre ceux qui l'ont soutenu, ceux qui se sont prononcés devant les Français pour son élection et il faut que ces querelles reculent.

À bon entendeur.

Monsieur le Commissaire au Plan, je voudrais que l'on termine véritablement sur la France, j’allais dire du lointain.

La Chine vient de lancer les nouvelles routes de la soie, la Turquie veut reconstituer l'empire ottoman d'ici le milieu du siècle, la Péninsule arabique prépare l’après pétrole, et la France ?

La France et l'Europe. Devant les mastodontes dont vous venez de décrire les projets et les arrière-pensées, un pays seul et isolé ne pèse pas.

Posons-nous une question très simple : qu'est-ce nous serions aujourd'hui dans la crise s'il n'y avait pas eu la BCE qui nous avait permis d'emprunter des centaines de milliards à 0 % ?

0 %, cela veut dire que l'on peut différer l'amortissement dans longtemps, le temps de se rétablir, que l'on a pu ainsi avoir, ce que l'on appelle quand on achète un appartement ou une maison un différé d'amortissement.

C'est très important et c'est dû uniquement au fait que la BCE est une des grandes banques.

C'est votre projet pour les prochaines années ?

Oui, c'est le moyen de porter les projets qui sont les nôtres pour les prochaines années.

La solidarité européenne dans ce monde livré à toutes les épreuves de force est une nécessité vitale.

Merci.

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