« Dans la tempête, l’Europe doit accélérer le pas ! » par François-Xavier Priollaud

À l’occasion de la fête de l’Europe du 9 mai, le Mouvement Démocrate donne la parole à ses militants et élus. Toute la semaine, ils livrent leurs billets d’humeur sur ce que l’Europe représente pour eux : un engagement, une conviction, parfois des doutes, mais toujours l’envie de faire avancer ce projet commun.
En cet anniversaire de la déclaration de Robert Schuman du 9 mai 1950, c'est François-Xavier Priollaud, maire de Louviers, qui prend la parole et appelle l'Europe a "accélérer le pas".
Cette tribune a également été publiée par Ouest-France.
Y a-t-il encore un chemin pour la construction européenne dans un monde de plus en plus hostile aux principes et aux valeurs mêmes sur lesquels notre Europe s’est patiemment bâtie depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale ? L’onde de choc provoquée par le retour au pouvoir de Donald Trump ne vient, en vérité, qu’amplifier un mouvement bien plus profond et plus global de contestation du droit international, du multilatéralisme, du libre-échange et de l’État de droit. Nous sommes manifestement au début d’un cycle long, dont la dimension est planétaire, et qui pose à l’Union européenne une question fondamentale : comment continuer à exister sans se renier ?
La période récente a révélé la capacité de résilience des Européens, faisant mentir tous ces Cassandre qui prédisaient notre inaction pendant le Covid et nos divisions face à la guerre en Ukraine. Les temps changent, et dans cette nouvelle époque, l’Europe doit éviter deux écueils. Le premier serait de ne rien changer, en nous imposant à nous-mêmes des règles que les autres ne respectent plus, ce qui revient à jouer contre nos intérêts en nous tirant une balle dans le pied. Les Européens doivent absolument en finir avec cette naïveté que les citoyens, à juste titre, n’acceptent pas. À l’inverse, le second écueil serait d’imiter ceux que nous combattons, en oubliant le droit international, en négligeant les principes démocratiques et en cédant aux sirènes du protectionnisme.
Entre ces deux écueils, la ligne de crête est étroite : l’Europe doit traverser la tempête en maintenant son cap, mais en adaptant sa navigation avec de nouveaux instruments. Elle a prouvé qu’elle en était capable. Autant le périmètre des sanctions infligées à la Russie que la réponse proportionnée apportée au délire du 47e Président des États-Unis d’Amérique sur les droits de douane ont montré que l’Union européenne savait allier la fidélité à ses principes avec un pragmatisme de circonstances. Mais l’ambition européenne doit aller bien au-delà de la seule réaction aux crises du moment.
Dans la tempête qui secoue le monde, l’Europe doit saisir sa chance, son heure, et passer enfin à l’âge adulte. Jusqu’à présent tournée sur elle-même, l’Union européenne ne peut plus ignorer le monde qui l’entoure. Subitement lâchée par les États-Unis, elle doit prendre en main sa sécurité, c’est-à-dire son destin. L’accumulation des crises, leur concomitance, appelle à faire tomber les tabous qui sont autant d’obstacles à l’affirmation d’une Europe autonome et puissante, capable de jouer en première division. Cela suppose au moins trois ruptures majeures.
La première est celle du leadership, pour faire entendre sa différence et dégager de nouveaux horizons et de nouvelles alliances face à Trump, Poutine et Xi Jinping.
La deuxième concerne les compétences nouvelles que l’Union devrait pouvoir exercer dans le champ régalien pour garantir sa sécurité et se protéger des nouvelles menaces.
La troisième est celle de son financement, tant le budget actuel de l’Union est dérisoire face aux défis à relever.
Qu’on le veuille ou non, sans ressources propres dignes de ce nom pour assumer ses missions, l’Union européenne sera condamnée au déclassement. Or, depuis 75 ans, la construction européenne a toujours été une force de progrès, à travers des réalisations concrètes. Aussi, fidèle à la vision de Jean Monnet, il est désormais urgent d’accélérer le pas !
François-Xavier PRIOLLAUD
Maire de Louviers
Vice-Président de la Région Normandie
Membre du Comité européen des Régions
Lire l'article dans le Ouest-France.