François Bayrou, invité de Darius Rochebin sur LCI

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François Bayrou, Président du Mouvement Démocrate, était l'invité de Darius Rochebin sur LCI ce dimanche 20 février à 20h40.

SEUL LE PRONONCÉ FAIT FOI

Bonsoir François Bayrou.

Bonsoir.

Effectivement, Éric Woerth c'était il y a 10 jours, vous, c'était il y a 5 ans.

Exactement, à peu près jour pour jour.

Pas de regret ?

Aucun regret et je n’en ai pas eu un seul pendant 5 ans car, en fait, la seule question qui se pose dans une élection présidentielle c'est : est-ce que celle ou celui pour lequel vous votez, a la dimension, a les épaules pour ce défi incroyable qui est de conduire un peuple dans des temps aussi en désordre, dans des temps de si profondes inquiétudes.

Il y a 5 ans vous aviez apporté à Emmanuel Macron un soutien décisif en termes électoral, personne ne pourra jamais le chiffrer exactement, mais c'était quelques %, beaucoup peuvent considérer que vous l'avez fait gagner. Cette fois, ce sont des plus petits ralliements, sans offense pour ces personnes, mais aujourd'hui Mme Élisabeth Guigou, Mme Marisol Touraine, on voit que c'est beaucoup plus marginal, disons.

Il y a 5 ans, c'était important. Je crois que cela a été déterminant, mais aujourd'hui, tous ces ralliements que vous qualifiez de petits, ce qui n'est pas du tout mon jugement, ils disent quelque chose.

Ils disent que ceux qui sont le plus expérimentés dans le monde de la démocratie française, ceux qui en ont vu beaucoup, et les très grands, et les moyens, et de beaucoup plus petits, tous ceux-là disent « franchement, cet homme-là, il est au-dessus des autres, il est pour la France une garantie plus importante, une puissance plus importante, une voie plus importante dans les temps si troublés qui sont les nôtres. »

Parlons-en justement. Temps troublés, c’est l’Ukraine aujourd'hui, et on est vraiment là au cœur de l’actualité, je rappelle cette déclaration du Premier ministre britannique Boris Johnson qui dit : « aujourd'hui nous sommes dans un risque de guerre qui serait sans précédent depuis 1945. »

C'est votre point de vue ?

Oui.

Pourquoi ?

Vous voyez bien, je ne sais pas si vous avez suivi la conférence de presse que le Président de la République française et M. Poutine ont donnée ensemble.

C'était une conférence de presse, pour moi, dont je ne connais pas d'exemple dans les périodes précédentes.

Dureté de Poutine, très grande âpreté.

Dureté de Poutine, solidité d’Emmanuel Macron qui a tout dit. Il a dit à Poutine : « Vous ne seriez pas nerveux, vous, s'il y avait 125000 soldats étrangers à votre frontière ? »

C'était impressionnant parce que c'étaient deux forces qui portaient chacune une volonté incroyable et un risque incroyable.

J'ai été très frappé parce que le Président de la République a constamment marqué ses limites, dit avec force où étaient les bornes et a toujours laissé une porte ouverte pour que jamais on n’ait le sentiment de ce blocage, ce qui n'était pas du tout le cas de Poutine.

La traduction : aujourd'hui, quelques jours après, c'est ce téléphone Macron - Poutine, on peut revoir les images - la photographe de l’Élysée les a publiées il y a quelques instants - où l’on voit comment cela s'est déroulé avec l’Élysée qui a dit à Vladimir Poutine : « Il est trop tôt pour s'engager sur le fait que l'Ukraine n'entrera pas dans l'OTAN. »

Faut-il céder quelque chose aux Russes ? Faut-il leur donner maintenant des gages pour apaiser ?

Il ne faut rien céder et tous ceux qui s'engagent pour céder, au bout du compte, perdent, mais il faut essayer de saisir le point crucial, nodal, de cet affrontement et le point crucial et nodal comme je le ressens, c'est, au fond, la peur.

C'est normal que l'Ukraine ait peur, mais j'ai ressenti dans les expressions de Poutine quelque chose aussi comme une crainte et cet immense besoin de sécurité, de sécurisation.

Cet immense besoin-là, il faut que l'occident, l'OTAN, l'Ukraine et la Russie le prennent en charge ensemble.

Rendons-nous précisément en Ukraine en direct. Mickaël Guilleux, vous êtes avec nous sur place, François Bayrou à l'instant dit : l'Occident ne doit rien céder, notamment Emmanuel Macron ne doit rien céder à Vladimir Poutine.

Que disent ce soir les Ukrainiens ? Est-ce que les Ukrainiens sont prêts, eux, à lâcher du lest ?

« Ce qui est sûr c'est que le Président ukrainien semble de plus en plus inquiet.

D'ailleurs, dans son discours, hier, il a posé cette question : les portes de l'OTAN sont-elles toujours ouvertes ?

Il a rappelé l'ampleur des territoires qui avaient été perdus par son pays. Il y a eu la Crimée, une partie du Donbass. Il a fait cette comparaison, comme pour le rappeler aux Européens, c'est plus grand que les Pays-Bas, c'est plus grand que la Suisse, alors comme une sorte de demande de garantie il a demandé un calendrier clair pour l'intégration de son pays à l'OTAN, mais il n'a pas eu de réponse claire à cette question, pour l'instant. »

Attend-on beaucoup de la France ? Est-ce qu’on attend beaucoup de l'Europe ? Que disent les Ukrainiens ?

On le rappelait tout à l'heure avec Bernard-Henri Lévy, cela fait 8 ans exactement depuis la place Maidan, la révolte de beaucoup de jeunes Ukrainiens, est-ce qu’il y a toujours cet espoir dans les Européens, les Français qui vont nous aider où est-ce la déception ?

« Je ne peux pas répondre à leur place mais on sent que cela a un peu changé.

Pendant un long moment, les Français étaient quand même vus comme les premiers partenaires, ceux qui étaient de leur côté, et puis, peut-être notamment à cause de l'absence de réponse à ce calendrier dont on parlait tout à l'heure, on sent que c'est en train de changer, notamment le Président ukrainien vient de demander à ce qu'il y ait une discussion entre l’OSCE, les observateurs indépendants, la Russie et l'Ukraine.

Il a arrêté dans son dernier tweet de parler de la Russie, de l'Ukraine avec la France et l'Allemagne, comme c'était le cas depuis plusieurs semaines.

On voit que c'est en train de changer. Reste à savoir ce qui va se passer ensuite et cela, c'est très difficile à dire »

Merci beaucoup d'avoir été avec nous en direct en Ukraine, à Kiev. Quand on entend les Ukrainiens qui disent que l’on attendrait davantage encore de la France, de quoi peut-on menacer exactement Vladimir Poutine ? Vous parliez de sa peur.

Quelles sanctions supplémentaires, quelles craintes lui inspirer pour l'arrêter ?

C'est assez simple.

Un mot au passage pour dire que, à ma connaissance, pas du tout sous les cinq dernières années, mais dans les années précédentes, jamais la France ni l'Allemagne ne se sont engagées pour l'entrée de l'Ukraine dans l'OTAN, à ma connaissance, je peux me tromper, mais je ne le crois pas.

Je pense que la France a toujours été d'une très grande circonspection sur ce sujet.

Et donc je pense qu'il faut trouver d'autres niveaux, et les accords de Minsk, c'est la recherche d'autres voies de garantie de la paix et de la sécurité.

Ce format que l'on appelle - les diplomates ont toujours des mots compliqués - Normandie, c'est aussi une manière de rechercher des garanties, c'est-à-dire à cinq de rechercher des garanties pour cette région.

François Bayrou, vous êtes un Européen historique, démocrate-chrétien c'étaient les fondateurs de l'Europe.

Aujourd'hui, on voit cette Europe, on rappelait la carte tout à l'heure des deux énormes alliances forces militaires face à face, ce qui frappe c'est que l'Europe est un géant politique, économique, mais militairement, c'est un nain. Elle ne pèse presque rien.

Est-ce qu’elle doit prendre plus d'indépendance ?

Je pense qu'elle ira par nécessité. Je pense que ceux qui ont la naïveté de croire que les États-Unis vont continuer à prendre en charge la sécurité militaire de l'Europe, c'est qu’ils ne voient pas le monde comme il est.

Tout ceci est derrière nous et, d'une certaine manière, heureusement que c'est derrière nous car cette espèce de soumission, de sujétion dans laquelle ont été constamment entraînés les pays européens, pas la France grâce au Général de Gaulle en particulier, pas la France, mais cette espèce de soumission à laquelle ont été invités, convoqués, simplement parce qu’il fallait que d'autres s'occupent de notre sécurité, ceci n'est pas à la hauteur d'un pays comme le nôtre et d'une entité, d'un ensemble comme l'Union européenne.

Mais par nature et par la force des choses on va être obligé d'aller dans ce sens.

François Bayrou, demain soir, information du Parisien, réunion importante de cette Maison commune Ensemble !

Ensemble Citoyens !

Qu'est-ce qui va se passer ?

C'est un signe de mobilisation et d'unité.

Tout est prêt ?

Je peux vous faire la phrase en bas de votre écran, oui, vous voyez bien, tout le monde s'apprête à rentrer en campagne et tout le monde sait que si, dans une campagne comme celle-là, on n'est pas rassemblé, à ce moment-là on tire contre son camp. Et ceci, c'est une loi, et tous ceux qui avaient l'idée de s'en abstraire sont évidemment conviés et déterminés à rentrer dans cette unité.

Tous ceux, c'est Édouard Philippe ?

Non, je sais bien que vous adorez qu'il y ait des polémiques, mais moi je trouve que c'est vraiment complètement à côté de la plaque dans un moment aussi grave que celui que l'on vit.

Le Canard Enchaîné toujours assez bien informé a rapporté toutes ces petites frustrations, irritations entre Édouard Philippe et Emmanuel Macron. Cela a existé de tout temps, cela n’a rien de si original.

Que se passe-t-il entre les deux hommes ?

Ils ont été, l'un numéro 1, l'autre numéro 2 du pays pendant trois ans.

Simplement, vous voyez bien que les tempéraments ne sont pas les mêmes et peut-être les visions de l'avenir ne sont pas les mêmes. Vous vous souvenez qu'Édouard Philippe est entré à Matignon en disant : « Je suis un homme de droite » et jamais Emmanuel Macron qui est pour moi évidemment une figure du centre français et européen, du centre-gauche au centre-droit, en passant par la plénitude du centre…

Il ne s'est jamais reconnu comme cela.

Ce n'est pas sa sensibilité mais cela n'empêche pas que l'on travaille ensemble.

Si vous attendez pour travailler d'avoir quelqu'un qui pense exactement comme vous, alors vous allez attendre longtemps !

François Bayrou, est-ce que les événements en Ukraine sont de nature à retarder, hormis tout calcul politique, objectivement selon vous, la déclaration de candidature ?

Plutôt oui, mais vous savez….

Ce sera son choix bien sûr. Votre avis à vous ?

Il ne faudra pas attendre si longtemps car la date limite est le 4 mars et nous sommes le 20 février.

Voyez que cela laisse assez peu de temps.

Mais quand même, il y a une logique d'attendre le plus longtemps possible ?

Il y a une logique à attendre que l'actualité ne soit pas écrasée par les menaces et les dangers, les risques qui nous viennent de la frontière ukrainienne.

Vous avez pris un rôle premier dans la grande affaire des parrainages en assumant de manière très spectaculaire une banque des parrainages pour que des gens comme M. Mélenchon, Mme Le Pen, M. Zemmour qui pèsent plus de 10 % ou à peu près 10 % dans les sondages puissent avoir des parrainages, même si vous n'êtes pas d'accord avec eux.

C'est exactement cela, mais il faut aujourd'hui faire un pas de plus. Ce que je peux dire, si mes informations sont justes, c'est qu'aucun de ces trois candidats principaux, Mélenchon, Zemmour, Mme Le Pen, aucun n'a les parrainages. Il leur en manque à tous un nombre conséquent, plusieurs dizaines en tout cas.

Le risque de vrai ratage existe pour chacun des trois selon vous ?

Oui et si l’on s'arrête à cela, si l’on place devant nous ce risque-là, alors je ne sais pas si on mesure quel tremblement de terre cela peut représenter.

On vit dans un univers dans lequel le phénomène principal, c'est la défiance entre les citoyens et les institutions.

Ils n'y croient plus, ils ne croient plus ce qu'on leur dit et si, de surcroît, on fait la démonstration que cette élection majeure de la vie politique française…

Donc, il faut les aider, les trois.

 voit un certain nombre de candidats exclus à cause des parrainages, alors cela ne peut pas aller. C'est pourquoi j'ai pris cette orientation que j'ai appelée notredemocratie.fr

Le pas de plus, c'est quoi ?

Le pas de plus, c’est, un, de dire qu'ils n'ont pas les parrainages et, deux, de faire le diagnostic exact des causes de cette absence de parrainage.

Les maires ont peur qu'on leur impute, s’ils signent, un soutien au candidat à qui ils permettent de se présenter.

Ils confondent parrainage et soutien. Et, si c'est cela, alors nous, nous avons pris cet engagement que nous publierions la garantie collective, pour qui que soit celui qu'on signe, que ce n'est pas un soutien. C'est la démocratie qui est en jeu, nous en sommes comme élus, comme maires, comme parlementaires, les garants, et cette garantie-là, elle doit aussi s'exercer auprès des citoyens.

Ce n'est pas une caution sur les idées.

C'est une caution de défense de la transparence et de l'honnêteté de la démocratie dans laquelle nous sommes.

Personne ne peut soupçonner que, pour ma part en tout cas, j'ai quelque sympathie que ce soit pour les idées qui sont développées par ces trois candidats.

Le cas d’Éric Zemmour, d'après notre dernier sondage roulant, marge d'erreur, c'est l’affiche Macron-Zemmour qui se détacherait au second tour en l'état.

Est-ce que, pour vous, c'est une affiche dangereuse ?

Je ne sais pas ce que cela veut dire dans une démocratie.

Ce qui serait dangereux, c'est un résultat qui ferait que la France choisirait des idées qui conduisent inéluctablement dans le mur, sans que jamais dans le monde, depuis que le monde est monde, cette espèce de guerre civile interne ait conduit à quelque chose de bon.

Que dites-vous à l'hypothèse - beaucoup de commentateurs la font - selon laquelle (François Mitterrand avait ce calcul avec Jean-Marie Le Pen à l'époque) les Macronistes s'arrangeraient très bien d'une affiche Macron-Zemmour, car cela aurait tous les avantages, cela ferait éclater le Parti républicain qui ne saurait pas pour qui voter, les pros, les antis Zemmour au second tour, cela ferait que vous auriez face à vous un candidat fort, mais quand même avec un plafond de verre, donc sûr de gagner.

Qu'est-ce vous répondez à cela ?

On a dit cela à toutes les élections sans exception, on a dit que Mitterrand avait ce calcul en tête, on a dit que Chirac avait ce calcul en tête.

De fait, cela a beaucoup aidé Jacques Chirac à être élu.

Réélu. C'était sa réélection.

Je pense que la vraie phrase, c'est celle que François Mitterrand répétait : « Je prendrai celui que les Français me donnent. »

Il y a trois semaines, on disait partout : c'est Le Pen qui l'arrange. Aujourd'hui, vous dites c’est Zemmour et, Mélenchon ce serait la même chose.

Vous voyez bien qu’il y a dans le pays des forces que j'appelle de sécession, des gens qui ne se reconnaissent plus dans le système.

Je sais bien que l'habitude, c'est de les rejeter complètement, moi je demande que l'on essaie de comprendre ce qui se passe.

Et qu'elles puissent s'exprimer démocratiquement.

Qu’elles puissent s’exprimer et que nous en garantissions l'honnêteté.

Merci beaucoup d’avoir été notre invité.

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