"Un peuple tout entier a choisi de changer le cadre de sa vie démocratique"

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Au micro d'RTL, si pour François Bayrou "l'élection présidentielle n'est jamais gagnée d'avance", le président du MoDem se félicite du changement de cap que les électeurs semblent ont amorcé en s'exprimant dans les urnes, au 1er tour de l'élection présidentielle.

Pour réécouter l'interview, suivre ce lien.

Bonjour François Bayrou.

Bonjour.

Vos aviez apporté votre soutien à Emmanuel Macron à un moment crucial de cette campagne et il est arrivé en tête hier soir à l’issue de ce premier tour de l’élection présidentielle. Dans son discours, le favori a donné le sentiment d’avoir déjà gagné la présidentielle. N’y avait-il pas un excès de confiance hier soir ?

C’est normal lorsqu’on a gagné un premier tour,  et qu’on l’a gagné dans ces circonstances-là – il faut tout de même imaginer que les deux grands partis qui tiennent le pouvoir en France depuis des décennies ne seront pas au deuxième tour – et donc pour cette aventure lancée il y a un an seulement, c’est normal qu’il y ait une espèce d’exaltation.

Une euphorie qui donnait l’impression qu’il avait gagné d’avance.

Moi, je ne partage pas ce sentiment éventuel de certains. Je crois qu’une élection présidentielle n’est jamais gagnée à l’avance. C’est un moment grave pour un peuple. Nous venons à l’instant d’entendre ce que seraient les grandes questions de l’élection présidentielle. C’est cela qui va être le cadre des deux semaines dans lesquelles nous sommes.

L’atmosphère d’hier n’était pourtant pas celui d’un 21 avril. Marine le Pen n’a jamais été si haute… tout cela n’est-il pas occulté par l’exploit sidérant d’Emmanuel Macron ?

C’est un cadre nouveau. On ne se rend pas bien compte, je crois, de ce qui est arrivé hier. C’est-à-dire qu’un peuple tout entier a choisi de changer le cadre de sa vie démocratique, a choisi, contre vents et marées, contre tout pronostic, contre les puissances que représentent les deux partis, avec leurs appareils, leurs élus. 

Le vote d’hier est d’abord une demande de recomposition ?

De renouvellement, oui, et de rassemblement, je crois. Je vais essayer de vous dire ce que je ressens. Jusqu’à maintenant, le fond des campagnes successives était le pessimisme. C’était le sentiment qu’on ne pouvait s’en tirer, que le monde était hostile, que l’Europe était un danger ou un risque, qu’il fallait se replier, qu’il n’y avait pas de chances pour les générations qui viennent. Ce qu’Emmanuel Macron a apporté et ce qu’on a vu hier dans le scrutin, c’est qu’au contraire, toutes classes sociales confondues, tout milieu, toutes sensibilités confondues, au-delà des frontières habituelles – que je combats, comme vous le savez, depuis longtemps – alors les Français étaient capables de dire : « de ce pessimisme, nous ne voulons plus ». J’avais écrit dans un livre il y a quelques mois : « Il arrive un moment où l’on se lasse de la lassitude elle-même ».

Mais c’est 23,86% des voix contre 21,7%. C’est une France tout de même fracturée, coupée en deux : est-ouest, pour dire les choses simplement. Ce sont des tranches d’âge partagées. Les 18-25 ans votent Le Pen et les 25-35 ans, ceux qui gagnent un peu mieux leur vie, votent plutôt Emmanuel Macron. Il y a des fractures.

Comme vous le savez, ces fractures sont profondes. L’enjeu de l’élection présidentielle est au contraire de réduire les fractures. L’enjeu de l’élection présidentielle, contrairement à ce qu’un certain nombre de gens affirme, est d’unifier le pays au-delà des difficultés, des angoisses qui sont les siennes, au-delà des ruptures, pour que ce pays se rassemble et se ressaisisse, pour qu’il aille de l’avant. 

Cette fracture principale vous intéresse, elle tourne autour de l’Europe. Ce sera un référendum pour ou contre l’Europe. Louis Alliot l’a rappelé à l’instant sur RTL. C’est ça, le match qui est en train de se jouer. Est-il gagné d’avance ?

Je n’emploie pas cette expression, c’est un regard qui n’est pas le mien.

N’est-ce pas un match risqué ?

Je pense que c’est un combat qu’il faut mener, et gagner. Ce que je crois, ce que je sens, ce pourquoi je vais me battre, c’est que précisément sur ce sujet, le France fasse un choix qui soit contraire aux choix désespérés qui sont les siens habituellement. C’est très simple. Ce ne sont plus des problèmes théoriques. 

Quels sont ses atouts ?

Le premier, c’est qu’il a choisi une ligne en mettant de l’enthousiasme dans son choix. La plupart des responsables politiques, lorsqu’ils parlent d’Europe, sont totalement précautionneux. Leur soutien est bancal. Emmanuel Macron a choisi son cap et il est européen, avec ce qu’il faut d’engagements. Deuxièmement, chacun de ceux qui nous écoutent, de ceux qui ont une famille, une retraite, un projet, chacun est engagé par le choix. Ce que propose Marine le Pen, c’est-à-dire la sortie de l’Union européenne et la sortie de l’euro, ceci est pour chacun un danger immense. Je vais prendre un exemple, qui touche chacun d’entre nous : dès l’instant qu’on entrerait dans cette dérive-là, dans cette folie-là, alors il y a une conséquence mécanique immédiate, c’est que lorsque vous aurez besoin d’emprunter pour acheter une maison ou une voiture, votre emprunt explosera et vous ne pourrez plus trouver d’emprunts à 1,5% comme c’est le cas pour bon nombre d’entre nous, aujourd’hui.

Emmanuel Macron sauve vos maisons, vos économies ?

Vous avez prononcé cette phrase comme si elle était déplacée.

Je cherche à identifier les arguments qui seront ceux de cette campagne.

Moi, je vous dis que ce n’est pas une affaire caricaturable, mais un grand choix national. Ce grand choix national concerne non pas des grandes idées politiques, mais la vie de chacun qui vont voter et qui nous écoutent.

La décision d’aller dans un restaurant suivi par des motards, était-ce forcément une bonne idée ? « Candidat bling-bling avant l’heure », dit le Front National…

Que des candidats aient des moments de satisfaction lorsqu’ils l’emportent, cela arrive même pour une élection au conseil général ou départemental ! Cela arrive donc pour grande élection nationale et pour toute cette équipe. Moi, je pense que les grandes joies sont intérieures.

Donc il fallait mieux pas l’extérioriser de cette façon-là ?

Non, je ne veux pas employer des arguments de cet ordre.

Dans son discours, Emmanuel Macron a insisté sur la nécessité de rassembler.

C’est une nécessité vitale, pas seulement pour l’élection mais pour la suite.

Mais rassembler avec l’idée d’amender éventuellement son projet ?

Vous savez que son projet a été accusé par un grand nombre de gens d’être trop tiède, de ne pas emporter de mesures radicales. Il y en a pourtant qui sont très importantes, mais elles sont dans le temps, avec le temps de les polir et de les mettre en application. Je pense par exemple aux retraites, qui sont un très grand projet, et qui emportent une justice plus grande pour l’avenir, mais c’est une projet sur dix ans, le temps d’entrer dans cette nouvelle équité dans laquelle les retraites vont être faites.

Moi, je crois qu’il n’y a aucune raison d’amender les choses puisque son projet est équilibré.

Comment passe-t-on de 0 à 289 députés à l’Assemblée ? Comment construire avec une projet aussi neuf une majorité à l’Assemblée ?

Des mouvement, il y en a au moins deux : le Mouvement Démocrate et En Marche, puisque nous avons cette alliance-là. Si vous pensez que les électeurs français ont fait tout cela, se sont affranchis de tant et tant de contraintes, d’habitudes, de poids des années, pour revenir dans le sillon cinq semaines après cette élection, alors nous ne voyons pas le même monde. Je crois que les Français ont médité ce choix et ils iront jusqu’au bout, en donnant une majorité à ceux qui veulent gouverner la France autrement.

François Fillon a eu une réaction claire et digne, hier soir.

Oui. Ce n’est jamais agréable de perdre, et de perdre dans ces circonstances, surtout quand on a traversé toutes ces étapes, très troublantes, difficiles à vivre. De ce point de vue-là, il a fait ce choix, il l’a exprimé.

On a changé de culture, c’est la politique en couple, maintenant, en France ? A l’américaine ? Brigitte Macron qui monte sur la scène avec son mari…

Cela fait longtemps maintenant que les épouses de candidats montent sur la scène… On l’a vu en 2012 avec François Hollande.

On n’a pas souvent vu sur la scène, la vôtre !

Parce que c’est son choix et c’est aussi le mien et que nous avons le droit d’avoir des choix différents.

Cela ne vous gêne pas ?

On a le droit d’avoir des attitudes différentes en face de cela. Je crois que c’est une aventure qu’Emmanuel et Brigitte Macron ont vécue ensemble. Qu’il y ait à ce moment-là la volonté, le sentiment de célébrer le moment où on va jusqu’au bout de l’aventure ensemble, je comprends cette affirmation. Mais vous savez, pour moi, il y a un président de la République : on vote pour une personnalité, et pas pour un couple.

 

 

 

 

 

 

 

 

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