"Pour notre modèle social, consommer français est une question de survie"

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Pour François Bayrou, qui a lancé le thème du "Produire en France" lors de la campagne présidentielle, "les mesures prises par l'exécutif ne sont pas à la hauteur du problème". Dans Made in France, il appelle à une stratégie d'ensemble en faveur "des entreprises, de la création et de l'emploi".

Made in France - Lors de la campagne présidentielle de 2012, vous avez vivement défendu le sujet du Made in France…

François Bayrou - Pourquoi parler de Made in France ? Je préfère en français les termes "produit en France", plus cohérents avec ce que nous voulons.  
Ce débat, je l’ai lancé pour une raison de bon sens. Si le modèle social est aujourd’hui confronté à des problèmes majeurs d’emploi et d’équilibre des finances publiques, c’est parce que la production française décline. Depuis quinze ans, des grands secteurs industriels du pays se sont effondrés. Comment dans cette situation créer de l’emploi, financer la protection sociale et équilibrer des comptes publics ? Ce n’est pas possible. 
Je pensais que ce serait fédérateur et que cela mettrait le combat sur le juste terrain. Certains m’ont expliqué que j’avais une approche nationaliste, que c’était tourner le dos à l’Europe. Une journaliste m’avait même demandé, comme si c’était un raisonnement contre-nature : "vous êtes prêt à dire qu’il faut consommer français ? ". Oui, je le dis. Si on ne comprend pas qu’il s’agit d’une question de survie, on ne comprend rien !

Acheter français : c’est une préconisation que vous étendriez à la commande publique ?

Oui. On marche sur la tête quand pour une économie de 1 ou 2 %, des conseils généraux passent commande de 90 autocars en Italie alors que nous avons des entreprises françaises remarquables dans ce domaine, ou que les puces des cartes Vitale sont fabriquées en Inde pour une économie de 5 ou 10 %. Il est évident que ces choix coûtent beaucoup plus à la collectivité qu’ils ne permettent d’économies.         
Alors, bien sûr, il y a la position technocratique de dire : oui, mais les directives européennes nous interdisent de faire ceci, nous forcent à cela.          
Mais on accepte bien que la commande publique fasse une préférence pour les établissements accueillant des personnes handicapées, on accepte bien qu’elle exprime une préférence puur l’écologie. Ce serait la moindre des choses qu’elle le fasse pour la localisation. Et si cela implique d’avoir un échange un peu tendu avec Bruxelles et l’Allemagne, ayons-le !

"L’ETAT N’A PAS DE STRATÉGIE, L’ADMINISTRATION FAIT BLOCAGE ET LA FISCALITÉ PÈSE COMME UNE MENACE"

Depuis 2012, le débat a prospéré. Quel regard portez-vous sur la politique de l’exécutif et l’action d’Arnaud Montebourg ?

Je suis un des rares à avoir approuvé la création d’un ministère du Redressement productif et le "choc de simplification" – qui n’est dans l’immédiat qu’annoncé. Cela étant, les mesures prises ne sont pas à la hauteur du problème. La question de la production en France n’est pas qu’un problème de marque ou de personne. C’est une question qui touche à l’ensemble du biotope des entreprises, de la création de valeur et de l’emploi.          
L’État n’a plus de stratégie, les administrations font trop souvent blocage, la fiscalité pèse comme une menace au lieu d’être un pacte de long terme, et les textes sont abstraits et incompréhensibles. Un seul exemple : le code du travail français représente plus de 3.000 pages, le code du travail suisse, à peine une centaine de pages !

Cependant, un certain nombre des mesures que vous proposiez – commissariat stratégique à la production, label France, écosystème de filières – ont été mises en œuvre ou sont en passe de l’être, avec les commissaires au redressement productif, les comités stratégiques de filières, le lancement programmé de la marque France et le label OFG…

Il ne faut pas confondre ce qui est annoncé et ce qui est fait. Vous savez, la réaction de l’immobilisme est toujours la même : d’abord, expliquer que ce n’est pas possible ; ensuite, expliquer que c’est déjà fait. Mais ce n’est pas fait, ce n’est pas durable et ce n’est pas compréhensible ! J’avais proposé un label qui indique la part d’un produit fabriquée en France ; il n’existe pas et la marque France annoncée n’est toujours pas lancée. Sur les filières, pensez-vous que les entreprises travaillent vraiment ensemble sur les drones ? Sur les voitures électriques ? Elles travaillent les unes contre les autres, il n’y a pas de filières !         
Les mesures que vous évoquez restent de l’ordre de la réponse technocratique ! Je remarque d’ailleurs que le Président de la République n’en dit pas un mot dans ses conférences de presse.       
La réponse ne peut pas être technocratique. Il faut qu’une vision s’impose, qui vienne du sommet de l’État. Rien n’est pire, rien ne décrédibilise plus le politique que d’apporter une réponse anodine à un problème brûlant.

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