Moralisation de la vie publique : "L’électrochoc démocratique n’est plus une option"
Frédéric Lefebvre, président du Mouvement Démocrate du Nord, s’inquiète de "la crise de confiance abyssale entre le Peuple et ses représentants". Il appelle à un "traitement de choc", dans une tribune publiée vendredi par la Croix du Nord.
"Si je m’interrogeais sur la nature de la relation des Français avec leurs élus, la réaction des Tourquennois rencontrés samedi dernier sur le marché aurait douché les derniers espoirs. Une crise de confiance abyssale s’est installée entre la population et ceux qui les représentent. En appelant à signer la pétition lancée par François Bayrou sur la moralisation de la vie publique, les langues se délient et les mots accusateurs fusent spontanément. Comment l’engagement au service des autres peut-il être aujourd’hui si décrié et sujet de suspicion ? Pourquoi les fautes impardonnables de quelques responsables politiques effacent l’honnêteté de l’immense majorité d’entre eux ?
L’affaire Cahuzac aura été de ce point de vue celle de trop. L’affaire est grave. Le ministre en charge de la lutte contre la fraude fiscale était lui-même organisateur de fraudes fiscales. Celui qui appelait les Français aux efforts a été pris la main dans le sac. Pour reprendre les propos d’une humoriste sur une grande radio « c’est comme si le ministre de l’Intérieur était accusé de trafic de drogue ». Alors, après les affaires Tapie, Clearstream, Karachi, Bettencourt, les Français n’en peuvent plus. Avec un sentiment de trahison sinon de dégout, ils rejettent les femmes et les hommes politiques sans distinction ni nuance.
La question de la confiance entre citoyens et élus est pourtant centrale. C’est la condition même du redressement du pays si nous voulons que les Français soutiennent les réformes indispensables au pays (redresser les finances publiques, mieux éduquer et mieux former, produire et créer des emplois en France, financer les retraites, prendre en charge le grand âge et la dépendance, …). Or, nous ne pourrons restaurer cette confiance sans un traitement de choc, sans une moralisation de la vie publique à tous les étages de la République. C’est notre printemps français, notre révolution démocratique.
Déjà, lors de la campagne présidentielle de 2012, François Bayrou avait courageusement proposé un référendum sur la moralisation de la vie publique. Parmi d’autres dispositions, son projet prévoyait de restaurer l’efficacité gouvernementale et le rôle du parlement, d’assurer l’indépendance de la justice, d’encadrer le financement des partis politiques, de prévenir les conflits d’intérêt et de garantir l’impartialité des nominations. Un an après, la question est plus que jamais d’actualité.
La balle est dorénavant dans le camp du président de la République. A lui de prendre ses responsabilités en soumettant au peuple une loi qui en finisse avec des pratiques indignes d’une démocratie équilibrée. Et si la classe politique est incapable de se réformer elle-même, ces questions doivent être posées par voie référendaire. Nous ne moraliserons pas la vie politique par des mesurettes. Quand nous voyons certains responsables politiques se précipiter à la télévision pour déclarer le prix à l’argus de leur voiture, on marche sur la tête. Il nous faut un véritable arsenal juridique qui aille au-delà de la transparence individuelle. Si certaines mesures annoncées pour lutter contre les paradis fiscaux et la fraude fiscale vont dans le bon sens, force est de constater que rien n’est envisagé pour changer la vie politique française en tant que telle.
Il faut interdire le cumul d’un mandat parlementaire avec celui d’un exécutif local dès 2014 car rien de sérieux ne justifie d’attendre 2017 sauf à ménager les ambitions ou les plans de carrière des uns ou des autres.
Il faut que les parlementaires soient obligés d’être présents en séance, comme c’est le cas, par exemple au Parlement européen, pour voter les lois et que tous les votes soient publics.
Il faut que les parlementaires dont la première mission est de voter l’impôt, soient soumis à l’impôt sur tous les revenus de leur mandat. S’ils ont des frais, ils doivent les justifier comme le font les salariés.
Il faut aller à l’efficacité en réduisant le nombre des députés, de sénateurs et de ministres. Moins nombreux, ils seront plus écoutés. Le congrès américain qui, au prorata du nombre d’habitants, comprend cinq fois moins d’élus qu’en France est-il moins puissant que le nôtre ?
Il faut instaurer un nouveau mode de scrutin pour que l’ensemble des Français et tous les courants politiques puissent être représentés à l’assemblée. Aucun démocrate ne peut justifier que 40% des Français en soit exclu.
Il faut éviter tout risque de conflit d’intérêts en interdisant aux parlementaires l’exercice d’une profession de conseil rémunéré.
Il faut renforcer le contrôle du financement des partis politiques, en supprimant la myriade de micro-partis de complaisance, destinés à contourner les règles de financement de la vie politique et des campagnes électorales.
Cet électrochoc démocratique n’est plus optionnel. Il est indispensable à la restauration de la confiance, elle-même indispensable pour réformer le pays. J’attends donc de nos gouvernants qu’ils prennent de vraies mesures permettant de tourner la page des scandales et de passer à une nouvelle étape de la vie politique française. C’est cette démarche que nous soutenons sur le terrain et à travers la pétition citoyenne mise en ligne sur moralisation.fr. Déjà 50 000 signatures en quelques jours. "