Crise chypriote : "Il est urgent d'harmoniser la fiscalité de la zone euro".
Pour Marielle de Sarnez, invitée mercredi midi d'Europe 1, la crise chypriote démontre l'urgence "d'harmoniser la fiscalité" et de "renforcer la démocratie" de l'Union européenne.
Europe 1 - Nous avons un pays de la zone euro qui va chercher de l’aide à l’extérieur, la Russie et son régime. C’est quand même un échec pour l’Europe, non ?
Marielle de Sarnez - C’est un échec total, nous marchons sur la tête. Nous parlons tous le jours d’une politique commune en matière d’énergie en Europe, d’ailleurs je le dis depuis longtemps. Il faut imaginer que le gaz chypriote demain pourrait représenter jusqu’à 40% de la consommation de l’Union Européenne. Vous voyez à quel point c’est important et stratégique. Il y avait peut-être là une manière de regarder les choses. Peut-être pouvait-il y avoir un emprunt obligataire auprès des Chypriotes, gagé à terme, sous 5 ou 10 ans, par une partie de l’exploitation gazière. Évidemment que Gazprom regarde cela avec un certain œil : ce serait, demain, des concurrents extrêmement importants pour les importations de gaz de l’Union Européenne.
Mais le problème ne situe-t-il pas plus en amont ?
Il y a plusieurs problèmes.
L’Union Européenne connaissait la situation de Chypre. Est-ce que le problème, finalement, n’est pas d’avoir laissé Chypre entrer dans l’UE ?
Il y a des problèmes depuis l’adhésion de Chypre. La vérité, c’est que Chypre a adhéré alors que sa situation politique, c’est-à-dire la question du conflit avec la Turquie, n’était pas réglée. Et cette situation n’étant pas réglée, nous avons eu un embargo de Ankara. Tout ceci a détourné Chypre de sa tradition navale et commerçante. Et Chypre est quasiment devenu ce qu’on appelle aujourd’hui un paradis fiscal. Il faut savoir, par exemple, que les comptes courants dans les banques sont rémunérés de 3 à 10% à Chypre, que l’impôt sur les société est à 10% alors qu'en Europe il est en moyenne à 25%, qu'il y a l'un des taux les plus faibles en matière d’impôt sur le revenu en Europe. Tout ceci ne va pas, ne marche pas. Je suis pour un approfondissement de l'intégration de la zone Euro, avec des convergences et une harmonisation fiscale.
Tout ceci est donc la preuve de l’échec de la gouvernance de la zone Euro ?
Tout ceci est la preuve de la nécessité d’une plus grande intégration, c’est-à-dire d’une plus grande harmonisation fiscale. On ne peut plus avoir des fiscalités divergentes au sein même de l’Union Européenne, ce n’est pas acceptable. Tout ceci signe aussi l’ardente vitale obligation d’avoir demain une démocratie européenne. C’est-à-dire une gouvernance européenne repensée dans laquelle les citoyens européens trouvent leur place.