Question de terrain : La crise du logement

Nous comptons en France plus de 3,6 millions de personnes mal-logées sur l'ensemble du territoire français. Le logement est un facteur important de stabilité et d'insertion sociale qui pèse aujourd'hui lourdement sur le pouvoir d'achat des ménages et les impayés augmentent. Antoine Veillard, conseiller général de Haute-Savoie, nous apporte ses réflexions.
Le Genevois français est l'un des territoires en tension sur le front du logement, quelles sont selon vous les conséquences de la pénurie de logements ?
La proximité avec Genève a conduit à un triplement de la population en 40 ans créant une pénurie de logements. Les prix des logements ont triplé sur les 10 dernières années. A 4500 euros/m2 à St-Julien-en-Genevois, les ménages modestes sont contraints de déménager à 50km du centre d'agglomération pour vivre. Cette crise du logement a contribué à un étalement urbain qui se paie très cher aujourd'hui en consommation d'énergie, en qualité de l'air, en infrastructures de transport ou encore en coûts publics de réseau, de collecte et de voirie. L'augmentation des prix des logements a amputé de manière considérable le pouvoir d'achat des ménages les plus modestes. Cela s'est nécessairement partiellement répercuté sur le coût de la main d'œuvre au détriment de la compétitivité des entreprises et de la création d'emplois.
Quelles sont les origines de cette crise du logement ?
C'est d'abord une crise de la production de logements. Les évolutions réglementaires ont limité les capacités de production : Les documents d'urbanisme n'ont pas assez anticipé les besoins de foncier pour loger : les jeunes, les familles divorcées et les nouveaux arrivants dans les métropoles.
La pénurie de main d'œuvre dans le bâtiment participe aussi aux difficultés. Phénomène qui s'aggrave dans les zones en fortes tensions sur le marché du logement, car les ouvriers n'arrivent à se loger.
Les oppositions à l'ouverture de carrières ont limité la concurrence et conduit à des augmentations des coûts de matériaux de construction. L'instabilité réglementaire, et la multiplication des normes ont contribué à augmenter les coûts des entreprises. Foncier, coût des matériaux, main d'œuvre : tout a concouru à une augmentation des coûts de construction et une limitation des capacités de production. Dans le même temps, des dispositifs fiscaux très incitatifs ont contribué à ce que les ménages orientent l'essentiel de leur patrimoine sur l'immobilier. La conjonction des deux a contribué à ce que la France soit désormais considérée par des spécialistes comme l'un des pays au monde où l'immobilier est le plus surévalué.
Comment construire assez de logements pour tous à des prix abordables ?
Pour préserver le foncier agricole, l'environnement et maîtriser les dépenses publiques sur les réseaux, dans le Genevois français nous mettons en œuvre les principes de densification des villes. Il faut que cette densification des villes soit qualitative pour que les habitants aient envie d'y vivre. La santé et la qualité de vie des habitants exigent que nous retrouvions un équilibre entre le minéral et le végétal dans nos villes. Par ailleurs, nous sommes engagés dans un programme local de l'habitat qui vise à accélérer la construction de logements aidés pour les ménages les plus modestes, dont les ouvriers du bâtiment. Nous utilisons nos modestes moyens de pression et de conviction pour que l'effort de construction de logements
soit partagé par les territoires voisins en particulier le canton de Genève. Nous devrons en faire plus pour faciliter le travail des entreprises du bâtiment et renforcer la concurrence.
Aujourd'hui il est urgent de mieux comprendre l'augmentation des coûts de la construction et de revoir un certains nombre de normes pour impulser une vraie dynamique en termes de construction de logements à des prix accessibles.