Plan d'investissement : "Une bonne direction mais une très faible dimension"

Pour François Bayrou, invité des 4 Vérités sur France 2, le plan d'investissement présenté hier par le gouvernement "n'est pas en mesure de changer fondamentalement les choses" et reflète un "manque d'inventivité".

Les 4 Vérités – Hier Jean-Marc Ayrault a présenté son plan d'investissement pour les dix ans à venir. 12 milliards dont une bonne partie consacrée à la transition écologique, est-ce que vous pensez que c'est un gage donné aux écologistes après le départ de Delphine Batho ?

François Bayrou – Il y a de ça. Pour regarder le plan dans son ensemble, on peut dire que la direction est bonne. Tout le monde se réjouit quand on pense à des investissements. Mais la dimension est très faible parce que, vous venez de le dire vous-même, à peu près 10 milliards sur 10 ans....

Dix à douze.

Oui, ça fait à peu près un milliard par an. Les dépenses publiques en France, c'est 1.000 milliards par an. C'est donc un plan de 0,1% des dépenses.

Vous auriez voulu beaucoup plus ?

Non, tout le monde sait que l'on n'a pas les moyens, on va d'ailleurs en dire un mot, j'imagine, après. Il y a une chose qui moi me frappe, c'est qu'il y a bien des domaines dans lesquels on devrait avoir une imagination plus inventive, une réflexion plus originale que ce que nous avons aujourd'hui.

"L'ACCROISSEMENT DES DÉPENSES CONTINUERA TANT QU'IL N'Y AURA PAS DE RÉFORME EN PROFONDEUR DE L’ÉTAT"

Ça vous paraît un petit peu "plan-plan" ?

"Plan-plan" pour un plan, c'est vous qui avez cette formule. (rires) Je vous cite un exemple. Depuis des années on nous raconte que l'on va faire un réseau de très haut débit numérique en France. Vous savez bien qu'il y a de nombreuses zones qui sont des zones blanches, rurales, dans lesquelles on ne peut pas avoir le débit espéré. Or, il existe une solution que l'on n'explore pas, c'est celle d'antennes dirigées vers des satellites qui puissent permettre à chaque foyer, voire à chaque village, d'avoir sa propre liaison et de faire en sorte que le haut débit, ce soit tout de suite. Là on nous raconte que dans dix ans nous aurons le haut débit, en vérité cela ne se fera pas parce que le nombre d'abonnés est trop faible. Donc, on vit toujours avec des illusions, on présente des illusions, alors qu'on pourrait avoir des réalités pourvu que l'on fasse un effort d'imagination un peu plus important. Ce plan-là est un plan dont la dimension fait qu'il ne changera pas fondamentalement les choses. Il y a des idées qui sont bonnes, moi j'approuve l'idée que l'on puisse remplacer les trains Corail actuels par des trains de nouvelle génération.

L'abandon des lignes TGV, ça ne vous choque pas ?

Bien sûr que ça me choque. Comment voulez-vous qu'un élu des Pyrénées ne soit pas choqué par l'abandon de l'idée même d'une liaison TGV qui serait reportée désormais aux calendes grecques dans les années 2030-2040 ? Bien sûr que c'est choquant. Mais le fait que l'on puisse réhabiliter les liaisons de proximité par des trains d'une nouvelle génération, j'approuve cette décision.

Ce plan, vous disiez qu'il était insuffisant, mais il va falloir trouver l'argent. Est-ce qu'on ne va pas encore creuser les déficits avec ça ?

Si, c'est ce que l'on va faire. Vous avez vu hier sortir les chiffres, ils sont très impressionnants. Les chiffres disent que le déficit ne cesse de croître, et quand on fouille pour essayer de trouver les vraies raisons, alors on s'aperçoit que les dépenses continuent à augmenter à un rythme qui n'est pas soutenable. On nous annonce que l'on va faire des économies, en vérité on continue à augmenter les dépenses. Ça continuera tant que nous n'aurons pas une vision de réforme en profondeur de l’État et des collectivités publiques, et que l'on continuera à empiler les interventions les unes sur les autres. Songez que l'on est en train d'inventer de nouveaux échelons tout en gardant tous les échelons anciens, le département et la région, au lieu de fusionner cela dans une collectivité qui serait une collectivité d'aménagement du territoire, de plein exercice et pas avec une multiplication d'élus et administrations qui paralysent l'action publique en France.

"IL EST SCANDALEUX QUE LE NON-CUMUL DES MANDATS NE SOIT PAS APPLIQUÉ DÈS 2014"

Mais est-ce qu'il faut rectifier le budget ? Faire ce que l'on appelle un collectif budgétaire pour se mettre en phase avec la réalité ?

Ça, c'est le ministre des finances qui verra. Moi je ne vois pas beaucoup de différences avec les pratiques antérieures. Il y avait quelquefois des collectifs budgétaires, c'est bien, mais moi je voudrais que, quand l'Etat ou la puissance publique ou les décideurs disent quelque chose, ça se fasse. Or, l'Etat en France, la politique en France, ce sont des affirmations qui ont l'air séduisantes, fortes, et puis après, quand on regarde la réalité et les suites, il n'y a rien. Regardez, on a adopté hier à l'Assemblée la loi sur le cumul des mandats...

Vous y êtes favorable.

Non seulement j'y suis favorable, mais je considère comme scandaleux, insupportable, le fait que, tout en nous disant que l'on limite le cumul des mandats, on en reprenne pour un tour. On va avoir des élections en 2014...

Et la loi sera appliquée en 2017.

Voilà, la loi sera appliquée aux calendes grecques, comme on disait autrefois, c'est-à-dire à un horizon de temps dont nous ne sommes pas sûrs qu'il ne sera pas modifié entre temps par des alternances politiques ou quoique ce soit d'autre. Vous voyez bien que le contrat de l'élection présidentielle c'était de mettre un terme au cumul des mandats le plus vite possible. En vérité, comme ça dérangeait un très grand nombre d'élus, dans tous les partis d'ailleurs, on a décidé qu'on allait le remettre à plus tard. On adopte avec les grands principes une loi et en vérité la réalité ne suit pas. Les électeurs vont repartir avec des élus qui seront cumulards en 2014. Ça, c'est la réalité du bilan.

Nicolas Sarkozy a dit qu'il ne faisait pas son retour en politique, comment vous interprétez ça ?

J'ai trouvé que c'était une phrase qui méritait le prix de l'humour en politique. Franchement, on a une orchestration que tout le monde a bien vue, avec grand son de trompe, grosse caisse, cuivres, et évidemment tous les médias. Tout ça est soigneusement organisé, y compris la retransmission du discours et la première phrase "ceci n'est pas mon retour en politique". En vérité, Nicolas Sarkozy n'a jamais abandonné la politique, donc il n'a pas à faire son retour. Mais vous voyez bien qu'il y a quelque chose qui est là encore de l'ordre de l'organisation de la communication et pas de la sincérité que les électeurs seraient en droit d'attendre de leurs élus et responsables.

EUROPÉENNES : "J'APPELLE À UN RASSEMBLEMENT DE TOUS CEUX QUI CROIENT QUE L'EUROPE EST VITALE POUR L'AVENIR"

Pour les élections européennes de l'année prochaine, est-ce qu'il faut une liste commune du centre ? Est-ce qu'il faut que vous vous alliiez avec l'UDI de Jean-Louis Borloo ?

Je pense qu'il faut prendre la question non pas à partir des appareils de parti mais à partir du projet européen. Aujourd'hui, tout le monde le voit bien, le projet européen est fragilisé, bousculé, il souffre d'une contestation profonde parmi les Français. Donc, il faut que tous ceux qui croient que l'Europe est pour nous l'atout principal, si on le jouait bien, de notre avenir, se réunissent, se rassemblent et s'adressent ensemble aux Français.

Donc, une liste commune du centre ?

Pas seulement du centre. Le centre est évidemment le cœur de ce courant européen qui existe en France, mais il y a bien d'autres sensibilités, personnalités qui partagent ce sentiment. Ce que j'appelle de mes vœux, c'est un rassemblement de tous ceux qui croient que l'Europe est pour la France une condition vitale pour son avenir. Si tous ceux-là se réunissent et s'adressent ensemble aux Français, alors ils seront entendus. Autrement, la division fait courir des risques de faiblesse.

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