"Notre ambition et notre responsabilité sont de refaire aimer l'Europe"

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Face à la défiance et à la tentation extrémiste, Christine Espert a pris la défense du "projet européen", tout en proposant de "l'améliorer" et de la "réexpliquer aux citoyens", sur le plateau de LCI.

La revue de presse - Commençons par quelques questions liées à l’actualité. Je ne sais pas si vous avez vu le dernier sondage Ifop pour Valeurs Actuelles, publié mercredi. Trois partis arrivent en tête en intentions de vote aux prochaines élections européennes, à 21%, le Front National, l’UMP et le Parti socialiste. Vous, le MoDem, 7%. C’est une élection où d’habitude vous faites de bons scores parce que l’Europe est un peu l’ADN des centristes.

Christine Espert - Absolument. Les sondages doivent toujours être ramenés à ce qu’ils sont, c’est une prise de température à un instant T. Simplement, ça doit nous interpeler au sujet de la défiance. Quand le Front National arrive à ce niveau, c’est quand même une expression d’une perte de confiance et d’une perte de repère du citoyen français qui, pourtant, aime l’Europe, aime le projet européen. Il ne comprend plus ce qui est en train de se passer. Je crois que ça va être notre responsabilité, notre ambition aussi, de réexpliquer le projet européen, de le refaire aimer.

Si vous deviez le vendre en une ou deux phrases, comment vendriez-vous ce projet européen ? Parce qu’on s’y perd un petit peu depuis quelques mois, voire quelques années maintenant, depuis la crise de la zone Euro.

En une phrase c’est compliqué, mais si je n’avais qu’une phrase à dire, je crois que l’union fait la force. La France seule, c’est un pays dont nous pouvons être fiers et nous en sommes très fiers, mais au sein de l’Union européenne la France sera encore plus forte. L’union fait la force donc restons dans notre construction européenne. Par contre il faut la changer, l’améliorer, et la faire aimer car les gens ne l’aiment plus. Ce sera notre ambition.

François Hollande vient de déclarer que la crise de la zone Euro était terminée. C’est votre point de vue ?

Nous sommes un pays qui voit dans l’avenir… C’est comme l’inversion de la courbe du chômage. La crise de la zone Euro est finie, la courbe du chômage va s’inverser, très bien, c’est sa parole.

"FACE AU DEFI DU CHOMAGE DES JEUNES, LES MESURES NE SONT PAS À LA HAUTEUR"

Transition toute trouvée pour parler du premier article que vous avez choisi. Il est issu du JDD de la semaine dernière mais malheureusement les chiffres sont toujours d’actualité. La courbe du chômage explose, atteint des sommets, notamment pour l’emploi des jeunes. Vous venez de faire allusion à la promesse de François Hollande d’inverser la courbe du chômage avant la fin de l’année. Est-ce qu’au MoDem, on y croit ?

Non, et je pense qu’il n’y a pas qu’au Mouvement Démocrate que l’on n’y croit pas. Au mois d’avril, les chiffres sont absolument catastrophiques, on atteint des records absolus, plus de 3.260.000 personnes sont sans activité. C’est un chiffre extrêmement inquiétant, et au-delà de ce chiffre je voulais faire un focus sur le chômage des jeunes. Nous avons un niveau de chômage des jeunes effrayant, 26% des jeunes dans notre pays sont au chômage, la moyenne européenne est à 23%, en Allemagne ils sont à 7%. Donc, quasiment deux millions de jeunes au chômage dans notre pays et au-delà de ces jeunes au chômage on a 900.000 jeunes, presque un million, qui sont en déshérence totale. C’est-à-dire qu’ils ne sont ni en études, ni en emploi, ni en formation. Ce sont des jeunes qui ont entre 16 et 29 ans et qui n’attendent rien. Ils n’attendent rien de l’avenir, rien de personne, ils ne croient plus en rien. Dans un pays qui met sur le fronton de ses écoles "Liberté, Egalité, Fraternité", je pense qu’une situation pareille est absolument intolérable.

Les emplois d’avenir qui ont un peu de mal, d’après ce que l’on sait, à démarrer. Là aussi, c’est une promesse de François Hollande qui tombe à l’eau ?

Il s’était engagé à 100.000 postes à la fin de l’année. Pour des raisons un peu dogmatiques, ils avaient choisi de consacrer les emplois d’avenir au secteur public. Comme ça ne marche pas – on est à 25.000 signatures de contrat fin mai – ça va être ouvert au secteur privé ce qui, pour le coup, ne nous pose pas de problème particulier. Mais, très clairement, la mesure n’est pas du tout à la hauteur du défi. Quand on a un tel niveau de chômage, ce ne sont pas 100.000 contrats d’avenir qui vont régler le problème.

Et la fin de la scolarisation en alternance dès 14 ans ?

C’est une erreur. Pour des jeunes qui ne se retrouvent pas, qui ne se reconnaissent pas, ou qui n’arrivent pas à s’exprimer dans le système scolaire classique, leur permettre de sortir en alternance dès 14 ans, c’était une bonne chose. Le supprimer est une erreur.

Là je me dis que François Bayrou avait quand même appelé à voter Hollande au deuxième tour, il regrette aujourd’hui ?

Les décisions politiques sont prises à un moment donné dans un contexte donné. Je ne reviens pas sur ce que j’ai déjà dit et sur ce qu’il a dit, il a pris cette décision parce que, dans le contexte qui était celui de l’élection présidentielle, il fallait mettre un frein et un terme à un certain nombre de dérives. Donc, à ce moment-là, c’était le choix de son vote. Aujourd’hui la situation a changé. Ce n’est pas parce qu’à un moment donné on a fait un choix qu’on n’a pas le droit de dire qu’on n’est pas d’accord avec un certain nombre de choses.

Je crois qu’il regrette non ?

Je crois que, quand on prend une décision politique majeure, on n’a pas à la regretter. On l’analyse et puis on continue à avancer, c’est ce que nous faisons aujourd’hui, nous ne sommes pas prisonniers de cette décision.

TRANSPARENCE : "L’ATTITUDE DES ÉLUS NE PERMETTRA PAS DE RECONQUERIR LA CONFIANCE DES CITOYENS"

Autre regard critique sur François Hollande, votre deuxième choix avec un papier du Figaro du 4 juin qui porte sur la moralisation de la vie politique française et la transparence du patrimoine des élus. Là non plus, ça ne vous convient pas ?

Le changement des pratiques politiques était une promesse de François Hollande, on a eu le non-cumul des mandats qui s’est terminé en une espèce d’entre-deux sans ambition – "On vote la loi en 2014, on ne l’appliquera qu’en 2017" – qui n’était pas la promesse initiale. Ce n’était pas non plus notre demande. La loi dont il est question dans l’article a été annoncée à l’issue de l’affaire Cahuzac qui a été un véritable séisme politique. Nous sommes dans un pays qui est en crise de confiance vis-à-vis de sa classe politique, dans un pays qui est en situation de difficulté majeure, qui a besoin d’avoir confiance pour pouvoir engager un certain nombre de changements et d’évolutions. Ce qu’il se passe aujourd’hui, c’est que François Hollande avait annoncé à grand renfort de communication que l’on aurait une information et une publicité sur le patrimoine des élus. Je n’avais jamais pensé que cette mesure allait pouvoir modifier radicalement les choses et permettre de changer les pratiques fondamentalement. Ce n’était pas suffisant à mon sens, j’avais d’ailleurs trouvé consternante la course à l’échalote à laquelle se livraient les ministres pour déclarer les uns derrière les autres leur patrimoine, mais en tout cas c’était symbolique.

Ils étaient un peu obligés aussi.

Ils avaient été obligés mais ils étaient largement avant la date limite qui leur était imposée. C’était un symbole et je trouve que le fait que les députés reviennent là-dessus et s’organisent entre petits copains pour refaire leurs affaires et vider totalement de leur sens les annonces de François Hollande, tout cela ne va pas dans le sens de reconquérir la confiance de nos concitoyens.

Bartolone plus fort que Ayrault ou Hollande. Pour clore ce chapitre, le patrimoine des élus sera consultable en préfecture.

Oui, à la fin fond de la préfecture… Je n’étais pas pour que l’on mette en pâture les élus, leur patrimoine et leur famille, c’était compliqué…

Mais là c’est l’arrangement entre copains qui ne vous convient pas ?

Voilà, je pense que nous aurions pu trouver une situation intermédiaire qui aurait permis d’avoir un regard là-dessus avec beaucoup de décence et sans mettre ça au fin fond d’une préfecture.

Dernier papier dans Le Monde du 5 juin, un article sur la cyberdémocratie. Pourquoi ce choix ?

Je pense que des articles ou des critiques, on peut en trouver des dizaines à ce sujet. Mais la responsabilité des hommes et des femmes politiques, c’est de donner des voies de conquête et des voies d’avenir. Je crois que tout ce qui va concerner Internet et le numérique est une véritable voie de conquête et d’avenir. On a beaucoup critiqué, on dit par exemple que le peuple français est un peuple qui se replie sur lui-même, qui ne partage plus, qui est individualiste. Or l’intérêt d’Internet est aussi de recréer ces formes de partage, recréer ces formes d’échange et de co-création, Wikipédia est un exemple parfait. Je crois que nous devons investir le numérique et l’Internet et ce sera une vraie voie d’avenir.

Même s’il y a des dangers, on le voit actuellement aux Etats-Unis avec la NSA.

Evidemment, mais je crois que ça doit faire partie des évolutions, de ce qu’on doit réguler.

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