Loi Travail : "Rien de bon ne sortira de ce bras de fer entre la CGT et le gouvernement"

Invitée de la matinale de LCP ce matin, la vice-présidente du MoDem a déploré les violences qui ont accompagné les récentes manifestations et a appelé à des mesures concrètes pour empêcher ces débordements et à davantage de responsabilité de la part du gouvernement et de la CGT.
Brigitte Boucher - Est-ce qu’un rassemblement statique est moins dangereux qu’un défilé ?
Marielle de Sarnez - C’est en tous les cas la position du gouvernement, je suppose qu’ils ont réfléchi aux conditions de sécurité. En tout cas, je ne veux plus jamais revoir ce qu’il s’est passé à proximité de l’Hôpital Necker. Je suis parisienne, élue de Paris, c’est impensable d’avoir 800 personnes qui sont des casseurs, qui sont des gens porteurs d’une idéologie du chaos, qui sont des nihilistes absolus, on ne veut plus voir ça. C’est la première mesure que doit prendre le gouvernement pour que plus jamais ceci ne puisse être vu.
Cela passe par quoi ?
Qu’ils se mettent d’accord ! Franchement, c’est fatigant pour les Français tout ça, cette espèce de feuilleton, de péripéties entre la CGT d’un côté, le gouvernement de l’autre. S’ils sont incapables de trouver une solution qui soit technique pour garantir la sécurité des biens et des personnes, c’est que vraiment il y a un gros problème dans le pays.
C’est une faillite de l’autorité de l’Etat ?
Vous voyez bien que rien de bon ne sortira d’une espèce de bras de fer où chacun veut montrer qu’il ne veut pas céder, qu’il empêchera l’autre d’avancer ; tout cela est ridicule. Qu’ils se débrouillent, c’est la responsabilité partagée du gouvernement et des organisations syndicales de trouver une solution. S’ils sont incapables d’en trouver une, vous comprenez bien que c’est grave pour l’un et pour l’autre. Ajoutons en plus que tout cela se fait pour un projet de loi qui est arrivé à un moment je pense, pas opportun. Il a été mal expliqué, sans aucune pédagogie, sans aucune préparation, sans aucune concertation. Un document, il faut le rappeler ici, de 151 pages : mais qu’est ce que vous voulez que les Français approuvent ?
C’est vrai que les Français ne comprennent plus rien aujourd’hui.
Je suis du côté des Français, je les comprends. L’article 2 fait plus de 50 pages, la loi fait 151 pages, on se moque du monde, on ne peut plus gouverner de cette façon-là. Tant de temps perdu. Toutes ces protestions, toutes ces manifestations, sont normales et légitimes. Ces défilés, toutes ces tensions, toutes ces violences pour un texte que je crois, n’était absolument pas ce qu’il fallait faire. D’autant plus que cette loi ne changera rien au final.
Il faut retirer cette loi ?
Il faut aller jusqu’au bout même si elle a été extrêmement mal préparée. Elle a été mal faite et dans la précipitation. La précipitation produit toujours des effets néfastes. Ce qui serait bien en France, c’est qu’on arrive à gouverner de façon différente, qu’on n’ait pas le nez sur les évènements, qu’on anticipe les choses, qu’on les prépare, qu’on mette en place une sorte de pédagogie de ce que l’on fait, qu’on explique la nécessité des réformes que l’on accomplit. On doit expliquer pourquoi on agit, on ne peut plus gouverner de cette façon-là.
On va écouter Gérard Filoche qui s’est exprimé ce matin sur le sujet pour le PS et vous réagirez ensuite.
(Enregistrement de Gérard Filoche)
Est-ce que vous craignez qu’il y ait des bavures dans ces manifestations ?
Ce n’est pas sérieux ce que l’on vient d’entendre ! Je sais que cette personne est candidate à la primaire de la gauche… Je ne suis pas tellement favorable à ce système, je trouve que c’est contraire aux institutions de la Vème République, en tout cas telles que je les vois, telles que je les pense. Ces propos donnent une telle caricature de la politique. Cela donne lieu à une échelle de perroquet et on nous dit des choses de plus en plus grosses. Quand on nous parle de 1,3 million de manifestants, c’est évidemment faux. Enfin, tout le monde dit n’importe quoi et cela concourt forcément à creuser un fossé entre les Français, leurs gouvernants et leurs représentants. Il faut que ça s’arrête. On ne peut plus gouverner le pays de cette façon-là.
Il y aura deux primaires, à gauche et à droite. Henri Guaino a réaffirmé sa candidature ce matin.
(Enregistrement de Henri Guaino)
Tout cela va-t-il mal finir ?
Vous savez bien qu’avec François Bayrou, nous avons dit depuis le début que nous craignions ce genre de processus qui ne sont pas des mécanismes pour la France. Je les entends, je les écoute et je trouve qu’il y a un grand désordre. Un grand désordre intellectuel, un grand désordre politique, un grand désordre gouvernemental, et en face, malheureusement, les Français ne pensent pas que la droite ferait mieux d’un coup de baguette magique. Il y a tout un travail de reconstruction, de pensée, d’appréhension de notre démocratie qui est absolument fondamental et que l’on devra faire dans les mois qui viennent.
Vous soutenez Alain Juppé dans cette primaire, à l’instar de François Bayrou qui est l’allié de ce candidat.
Si Alain Juppé sort vainqueur de la primaire, ce que je souhaite, nous serons à ses côtés, nous le soutiendrons car je crois sincèrement qu’il aura les capacités nécessaires pour redresser le pays.
Vous le soutiendrez et, en échange, que pourrait-il y avoir ?
Ce n’est pas une question d’échange, nous le soutiendrons tout simplement.
Il n’y a pas de prix pour le ralliement ?
Non, moi je ne fais pas de politique comme ça et François Bayrou ne l’envisage pas non plus. On est peut-être rares sur le champ politique à ne pas penser petits intérêts, petits calculs politiciens. Nous soutiendrons Alain Juppé s’il sort vainqueur de la primaire car nous penserons que ça sera bon pour le pays. Nous serons à ses côtés mais je me méfie de la mécanique de la primaire. Je vois ce que la primaire des Républicains a donné aux Etats-Unis avec Donald Trump donc je garde une grande méfiance. Vous savez que dans le cas contraire, si ce n’était pas Alain Juppé qui sortirait vainqueur, nous éclaircirions notre position en gardant notre pleine et entière liberté.
Avec un possible accord avec Alain Juppé, est-ce que vous souhaiteriez avoir un groupe parlementaire à l’Assemblée nationale ?
Ces questions seront abordées le moment venu. Ce que je peux dire c’est que personne demain ne pourra réformer le pays en s’appuyant uniquement sur une approche partisane de son noyau de culture. Il va falloir œuvrer et travailler pour un pôle central qui sera déterminant pour la stabilité, pour la gouvernance et pour les réformes au profit du pays.
Merci Marielle de Sarnez d’avoir été avec nous ce matin.