"L'Alternative, c'est du concret et du réel pour répondre aux problèmes des Français"
François Bayrou et Jean-Louis Borloo étaient mardi les invités du 20h de TF1, pour présenter le partenariat du MoDem et de l'UDI, baptisé l'Alternative.
Gilles Bouleau - Le journaliste que je suis est un peu décontenancé... D'habitude, quand on invite deux hommes politiques sur le même plateau, ils se chamaillent, ils ne sont d'accord sur rien. Après vos fiançailles aujourd'hui, êtes-vous d'accord sur presque tout ?
Jean-Louis Borloo - Nous sommes d'accord sur l'essentiel. C'est chez vous, fin août, que j'avais indiqué qu'à partir du moment où nous étions clairement dans l'opposition, il n'y avait aucune raison que nous ne cheminions pas ensemble. Si la situation française n'avait pas été aussi grave, si le désarroi des Français n'était pas aussi grave, peut-être que nous ne serions pas ensemble sur votre plateau. Mais, il y a un moment, où dans des situations comme celle-là, il faut s'oublier un peu soi-même pour bâtir une alternative politique. Il peut y avoir du désarroi, il peut y avoir de la violence, mais il y a forcément une sortie politique. Nous avons décidé de mettre les mains dans la cambouis et de répondre avec un projet global à la situation désespérante dans laquelle est la France. Nous avons commencé par nous-mêmes. Nous avons des parcours différents, mais à la vue de la gravité de la situation, nous avons décidé de rassembler nos forces pour présenter une véritable alternative au pays.
Les hommes politiques sont connus pour avoir des tempéraments et des égos assez forts. Vous avez tous les deux de fortes personnalités et de fortes convictions. Est-ce que votre alliance va résister à cela ?
François Bayrou - Il n'y a aucun doute que nous avons décidé de bâtir ce rassemblement non pas pour un moment, non pas pour quelques mois, non pas pour une élection, mais pour une génération. Vous avez dit, tout à fait justement, que les hommes politiques se chamaillent. Aujourd'hui, ce sont tous les courants politiques qui sont en explosion et en division. Or, vous montrez la gravité de la situation sur votre écran : le peuple est en rejet de la politique, parce qu'il la pense et la trouve impuissante. Le peuple est même en sécession, il organise des manifestations contre le pouvoir, toute sensibilités confondues. Et il sait bien que ce n'est pas d'aujourd'hui que les choses vont mal. Cela fait des années et des années que les choses glissent. Nous avons choisi le chemin différent, qui est dire : nous allons montrer l'exemple de forces politiques qui ont eu des chemins séparés et qui décident de se rassembler parce qu'on a besoin d'offrir quelque chose qui ressemble à un espoir, à un horizon. C'est ce que l'on va faire, et pas seulement dans les mots. Le contrat que nous avons signé, il est très simple : nous allons mettre du concret et du réel pour répondre à tous les problèmes que les Français se posent.
Vous faites le même constat l'un et l'autre, de Français déprimés, plongés dans la colère et dans le désarroi. Vous dites que la Droite n'a pas réussi à résoudre cela et que la Gauche n'y arrive pas non plus aujourd'hui. Quel est, en termes très simples, le programme que vous proposez ? J'ai lu attentivement votre charte et ce n'est pas écrit dans le détail.
François Bayrou - Ce moment viendra, dans le détail et avec du concret.
Jean-Louis Borloo - Nous avons présenté des chantiers. D'abord, les Institutions. Le fait que des gens, qui ont des opinions parfois très éloignées des nôtres, ne sont pas représentés à l'Assemblée nationale, c'est un problème majeur.
On l'a précisé. Mais il y a dix ans, il y avait une centaine de députés centristes...
François Bayrou - Ils sont toujours là.
Ils sont très dispersés.
François Bayrou - Oui. C'est parce qu'ils étaient très dispersés que nous nous sommes rassemblés. Mais ce n'est pas une affaire pour le Centre seulement, c'est une affaire pour tous les Français qui ne savent plus à quel saint se vouer.
Jean-Louis Borloo - Tous les mois, nous allons présenter aux Français des solutions opérationnelles. C'est-à-dire : le chômage de longue durée, la compétitivité avec la baisse des charges, l'Éducation, la modification fondamentale de notre système de formation professionnelle, l'évolution du paritarisme, la multiplication des strates administratives et politiques qui sont ruineuses pour notre pays, les Outre-Mer qui pourraient être l'avancée de la France dans les mers et les océans, … Tous les 30 jours, vous aurez une proposition opérationnelle à débattre avec les Français. Nous sommes des optimistes. Le service politique, c'est penser que l'on peut aider un peu à une modification de la situation. Nous devions le faire, nous ne pouvions pas rester chacun dans notre petit coin alors que nous partageons des sensibilités républicaines, démocrates, humanistes, pour la liberté d'entreprise. Aujourd'hui, vous ne pouvez pas nous reprocher de poser un acte absolument majeur pour proposer une alternative politique. Pour la France, il y a un "plan B" en politique : c'est nous.
Ce qui se passe dans le pays, le chômage, cette déprime... Jean-Louis Borloo dit que vous êtes des optimistes. C'est le cas François Bayrou ?
François Bayrou - Nous sommes optimistes et déterminés. Je vais prendre un seul exemple, simple et cruel : la partie du chômage qu'est le chômage de longue durée. Si le chômage tournait, ce ne serait pas un problème colossal pour les gens Ils passeraient quelques mois au chômage, ils auraient une formation et ils retrouverait un emploi. Le fait que le chômage de longue durée soit une mise à l'écart, une relégation, que les gens voient détruire leur propre image, leur situation et leur confiance en eux, est-ce que ça ne doit pas être la mobilisation principale du pays ? Y compris en mettant les moyens nécessaires pour que les entreprises prennent ces chômeurs ? Regardez les sommes que l'on dépense pour l'ensemble des emplois aidés. Est-ce qu'on ne pourrait pas aider avec une proposition simple, par exemple que deux emplois pour les chômeurs de longue durée soient offerts aux entreprises sans charge ? De manière que commerçants, artisans, entreprises industrielles, associations pourquoi pas, soient enrôlées pour remettre au travail des gens qui n'en ont plus.
Jean-Louis Borloo - Nous avons des parcours différents. La situation de désarroi de notre pays nous a obligé à faire, au sens le plus noble du terme, ce qu'on fait. Mais nous sommes dans une clarté politique : nous sommes dans l'opposition, nous pensons que l'actuel gouvernement est dans un logiciel du siècle dernier et n'a pas les réponses. Nous sommes dans la clarté, mais dans l'ouverture d'esprit, à tous les déçus du socialisme. Il y a quatre mois, tout le monde rigolait, aujourd'hui nous sommes là et c'est fait ! Maintenant, nous devons bosser. Rien ne se fera avec des mots, il faut du concret.
François Bayrou - Et rien ne se fera en continuant à cultiver les divisions entre les gens. Nous avons besoin de bâtir quelque chose qui rassemble et pas qui sépare.