François Bayrou présente son plan d'action : "La France solidaire: le programme"

François Bayrou a présenté son projet, intitulé "La France solidaire: le programme", à partir duquel il entend bâtir un nouveau modèle de société basé sur "la solidarité", mercredi 14 mars.

François BAYROU présente son programme : « La France solidaire » Conférence de presse du 14 mars 2012

Merci d'avoir accepté de participer à cette rencontre, à cette conférence de presse. Je vais faire une introduction et je répondrai ensuite à quelques-unes des questions que vous voudrez bien me poser. Nous sommes à l'ouverture de la campagne électorale officielle, puisque c'est le 16, vendredi, que nous connaîtrons la liste de ceux qui sont autorisés à se présenter à cette élection. Ce qui est frappant pour moi, c'est que cette élection est aujourd'hui, pour les Français, exaspérante. Le sentiment que les Français expriment le plus souvent est un sentiment d'exaspération parce qu'ils ont le sentiment justifié d'une campagne électorale qui ne traite aucune des questions qui sont celles de leur vie. Ce qui est vraiment frappant, si vous prenez, dans les enquêtes que vous avez publiées, tous, la liste des questions qui sont, pour les Français, des questions brûlantes, cela commence toujours par le chômage, cela continue toujours par l'appauvrissement, le pouvoir d'achat, cela passe forcément par l'éducation. Ils ont des sentiments de précarité par la précarisation, la précarité pour leur vie, pour leur famille, pour leurs enfants, le sentiment que l'avenir est absolument illisible. Ceux qui vous lisent savent que le déficit et la dette sont des questions très brûlantes. Aucune de ces questions n'est traitée dans la campagne électorale, sauf, je me permets de le dire, par nous. Je ne laisse pas passer cette campagne sans que les sujets que les Français attendent soient effectivement abordés et traités.

Pour moi, il est extrêmement frappant que ceux qui ont la charge du pouvoir depuis des années et ceux qui ont la charge de l'opposition officielle depuis des années aient, d'un commun accord, choisi d'éluder toutes les questions qui se posent à notre pays et à ceux qui le forment.
Je ne laisserai pas cette campagne électorale s'égarer ainsi dans la diversion, et ma responsabilité c'est précisément que l'on pose dans cette campagne les sujets qui sont ceux de la vie et de l'avenir des Français, à un moment où c'est l'avenir même de notre pays qui se trouve mis en cause, qui se trouve fragilisé, qui est entré dans la précarité.
Pour moi, l’idée principale est celle-ci : on utilise pour la situation du pays des mots qui évoquent une crise que la France rencontrerait. Or, ce n'est pas une crise au sens où ceux qui en parlent le disent parce que la crise, comme ils la présentent, c'est une crise qui viendrait de l'extérieur du pays, c'est une crise qui pour les uns serait celle qui vient du capitalisme international, de la finance, des banques, pour les autres de l'Europe ou de l'Euro, pour les troisièmes des immigrés, enfin toutes ces questions-là qui nous seraient arrivées dessus sans que nous ayons une responsabilité.

Pour moi, la crise que nous rencontrons, la situation inquiétante, angoissante du pays, c'est exactement le contraire. Ce sont des responsabilités nationales, un ensemble de décisions mal inspirées, une chaîne d'orientations et de dérives que nous avons acceptées qui expliquent la situation dans laquelle nous sommes.
Ce n'est pas en raison de la finance internationale de l'Europe ou de l'Euro que nous n'arrivons pas à apprendre à lire à nos enfants. C'est notre responsabilité ! C'est la responsabilité de notre école et aucune cause extérieure ne peut expliquer cet échec. De la même manière que ce n'est pas en raison de l'Europe et de l'Euro que nous avons connu l'effondrement qui est le nôtre en matière de commerce extérieur qui fait que nous n'arrivons plus à produire pour nous-mêmes, que nous n'arrivons plus à produire pour vendre, que nous perdons du terrain constamment dans tous les marchés européens et internationaux. Alors que nos voisins, avec la même monnaie, avec le même coût du travail et avec un modèle social comparable, eux, au contraire, marquent des points et avancent.

Ce n'est pas la faute des autres, c'est notre faute ! Cette affirmation, pour moi, n'est pas seulement une affirmation d'accusation, c'est une affirmation profondément optimiste parce que si les causes sont chez nous, au contraire de ce que raconte le reste du débat politique, alors nous pouvons y porter remède. Si vraiment, comme je le crois, les situations terribles que nous vivons proviennent d'une succession d'erreurs et de fautes, alors nous avons entre les mains de quoi nous redresser ! Et c'est cette vision du redressement du pays dépendant de nos responsabilités, de nos décisions, de notre volonté nationale entraînée par un rassemblement inédit qui est la proposition que je fais aux Français dans cette élection.

Pour soutenir cette proposition-là, je mets entre vos mains d'abord un livre qui sort demain matin, je pense, et qui s'intitule « La France solidaire ».
Je vais dans une minute vous expliquer pourquoi il porte ce nom et vous présenter la totalité du programme. Vous aviez eu, jusqu'à maintenant, le programme, si j'ose dire, découpé en forums et là, vous avez l'ensemble du programme que nous avons écrit à partir de ces contributions nombreuses, de ces centaines d'experts, personnalités qui sont venus partager avec nous cette réflexion. Le livre, au fond, dit pour moi l'essentiel : quand je réfléchis à ce qu’est la situation du pays aujourd'hui, alors je vois que les Français ont en tête, au fond, deux interrogations :La première de ces interrogations est : est-ce que l’on peut s’en sortir ?Pour l'instant, dans le débat politique, ils ne trouvent aucune raison d'accrocher leur espoir et aucun élément pour dire que le pays peut s’en sortir. Ils voient les difficultés et les précarités dans lesquelles nous sommes et ils n'entendent, dans les propositions politiques qui sont faites, aucune réponse sérieuse, concrète, accessible à ces interrogations.

La première réponse que j'apporte, c'est : oui, on peut s'en sortir !Dans le livre que j'avais écrit pendant l'été, j’avais écrit comme première phrase : "Les mauvais jours finiront", qui était un des vers d'une chanson de la Commune, qui est dans vos mémoires naturellement. Nous pouvons nous en sortir et nous allons nous en sortir, à condition de prendre, j'allais dire, billes en tête, les yeux dans les yeux, les sujets d'affaiblissement du pays.

Voilà pourquoi je proposerai quatre chapitres de redressement que vous trouverez naturellement énumérés dans le programme. Le premier de ces chapitres de redressement, ce sont les finances publiques du pays. Car il est impossible de conduire quelque politique de redressement que ce soit si nous sommes dans la débâcle des finances publiques comme nous y sommes depuis maintenant des années, peut-être des lustres, et peut-être aussi des décennies, et donc redressement des finances publiques du pays à partir d'une stratégie que j'ai souvent élaborée ou énumérée devant vous qui est une suppression du déficit du pays en trois ans -jusqu'en 2016- par une augmentation des ressources de l'État de 50 milliards d’euros et une baisse des dépenses publiques en valeur réelle de l'équivalent de 50 milliards par la fixation de la règle de l'évolution zéro des finances publiques pendant deux annuités budgétaires, 2013 et 2014.

Avec cette règle d'une évolution zéro, avec le gonflement en masse par l'inflation et la croissance, je dis cela avec prudence que nous trouvons les ressources nécessaires ou les économies nécessaires pour arriver à la suppression du déficit d'ici à 2016. Laquelle réduction du déficit redonnera une perspective de confiance. Il est impossible de faire quoi que ce soit dans le pays si la confiance, la certitude de confiance n'est pas de retour. Première étape.

Deuxième étape : concentrer les forces du pays sur la question du « produire » que j'ai là encore très souvent abordée devant vous, que j'ai traitée encore hier matin devant l’AFEP (association française des entreprises privées), et ce matin devant l'Institut de l'Entreprise, autour de cette idée que la France a perdu indûment des batailles qu'elle aurait dû gagner, qu'elle avait tout pour emporter. Mais notre effacement dans le commerce extérieur, notre incapacité à faire face à notre marché intérieur, notre baisse continue sur tous les marchés où nous étions présents et notre incapacité à gagner de nouveaux marchés, ceci doit faire l'objet d'une obsession nationale.

Tout cela passe naturellement par une étude et par un travail sur la compétitivité des entreprises. J'ai indiqué hier devant l’AFEP que je ne croyais pas que c'était le coût du travail qui était la question principale, les salaires en France ne sont pas trop hauts, il suffit de les comparer avec les salaires des pays qui nous entourent, avec l'Allemagne, avec la Suisse, et on verra que ces salaires ne sont pas trop hauts. Il y a probablement, cela fera plaisir à Jean Arthuis qui est là, une question sur les charges et la répartition des charges.
Cette question est à étudier, mais, pour moi, l'essentiel est dans ce que l'on appelle la compétitivité hors coûts : l'image de marque des produits du pays, la capacité d'innovation et de recherche, le lien entre les entreprises et ses lieux de recherche et d'innovation, le soutien à la création de réseaux dans lesquels les grandes entreprises pourraient aider les entreprises petites et moyennes à faire face aux nécessités de l'heure, la création de stratégies nationales pour que notre pays relève les défis économiques et de production qui sont devant lui.C'est le deuxième sujet que nous avons à traiter dont je n'exclus naturellement pas la défense de l'image de marque des produits français, y compris auprès des consommateurs français. Deuxième question.

Troisième question : nous avons à répondre aux interrogations de notre système éducatif ou aux interrogations que notre système éducatif provoque dans le pays. Il est intolérable et inadmissible que nous soyons un pays dans lequel au moins 20% et peut-être davantage des enfants au moment de l'entrée en sixième ne maîtrise pas les acquis élémentaires, ce qui les rend absolument incapables de suivre une scolarité normale.

Il y a des évolutions profondes à conduire en matière pédagogique et c'est la raison pour laquelle j'ai focalisé l'attention sur le fait que nous avons à consacrer la moitié du temps scolaire dans le primaire à la lecture, l'écriture et la langue parce que je suis persuadé que la langue est la clef de la réussite des études à suivre. Nous avons à revoir l'organisation du temps scolaire. Il y a beaucoup à gagner en limitant, par exemple la semaine scolaire à 28 heures, c'est-à-dire quatre journées de 6 heures plus une journée de 4 heures, et l'organisation des études surveillées au sein des établissements. Il y a beaucoup à gagner en améliorant les rythmes scolaires. Nous avons beaucoup à gagner en traitant différemment les problèmes d'orientation. Nous avons à revoir l'entrée dans l'enseignement supérieur qui, pour l'instant, est pour les jeunes Français une aventure dont beaucoup n'arrivent pas à surmonter les difficultés. Tout cela, c'est une politique nouvelle à mettre en place, un contrat national nouveau à mettre en place autour de l'école.

Quatrième sujet, c'est le sujet qui touche à la moralisation de la vie publique en France.
Cette moralisation de la vie publique est, comme vous le savez, sujette à beaucoup d'interrogations et peut-être même ce qui se passe ces jours-ci autour des sondages a-t-il quelque chose à voir avec cette moralisation de la vie publique…

Mais l'essentiel pour moi, c'est ce que le Parlement redevienne un parlement de plein exercice, que le Parlement retrouve sa liberté de parole par rapport à l'exécutif, ce qui fait qu'il convient que les élus reçoivent leur légitimité non pas du pouvoir ou du principal parti de l'opposition, mais du peuple, ce qui veut dire qu'il faut une loi électorale nouvelle, ce qui signifie aussi que les parlementaires doivent être fermement invités à remplir la plénitude de leur mandat à l'Assemblée Nationale ou au Sénat. À l'Assemblée Nationale, en tout cas, je suis pour que les votes soient désormais personnels et publics et ne puissent être délégués à personne. Je suis pour qu’il n'y ait de vote au parlement que si les gens sont présents, ce qui est le cas au Parlement européen et tous ses votes sont publics.

Je suis pour que l'on reconnaisse le vote blanc, pour que l'on diminue le nombre de parlementaires, que l'on diminue les frais généraux de l'État, qu'on limite la composition du gouvernement à 20, que l'Élysée donne l'exemple en abaissant les frais généraux de cette maison estimable mais qui coûte extrêmement cher et, à mes yeux, trop cher. Je suis pour que la question éternelle des conflits d'intérêt se trouve réglée. On a réuni une commission autour des conflits d'intérêt. Cette commission est allée à son terme et personne n'en a rien fait. Autrement dit, tous ces sujets de la moralisation de la vie publique qui empoisonnent le pays depuis des années, j'ai proposé vous le savez, qu'on les traite par un référendum le jour du premier tour des élections législatives. Donc, au début du mois de juin, on se trouvera avec une moralisation de la vie publique qui sera assurée et assumée.

Voilà les quatre sujets du redressement. Chacun tient à l'autre : il n'y a pas de possibilité de retrouver l'état de la France que nous voulons si la confiance n'est pas rétablie ; la confiance ne peut pas être rétablie si les comptes publics ne sont pas rééquilibrés ; elle ne peut pas être rétablie si la moralisation de la vie publique n'est pas assurée ; les comptes publics ne peuvent pas être rétablis si la production du pays ne repart pas et si donc la force fiscale, la capacité de contribution des citoyens n'est pas réinstaurée ; et de la même manière, il n'y a pas de possibilité de réussir l'économie si l'éducation reste dans la panne où elle se trouve aujourd'hui. Voilà les quatre sujets qui permettent de répondre : Oui, nous pouvons nous en sortir ! Oui, il existe une stratégie que je propose au pays, qui est une stratégie de rassemblement de ses forces et de traitement des faiblesses dont il souffre et cela ne dépend d'aucune décision extérieure.

Naturellement, il est très important que nous suivions avec vigilance l'évolution de l'Europe -j'en dirai un mot dans une seconde- l'évolution du monde -j'en dirai un mot dans une seconde- mais le message d'espoir et d'optimisme que je transmets aux Français, c'est celui-ci : Nous pouvons nous en sortir par nos propres décisions, nous n'avons pas à attendre que le monde nous apporte les réponses tout seul, les réponses sont entre nos mains ! C'est exigeant, mais c'est plus optimiste que tous ceux qui prétendent qu'il faut que l'univers change avant que la situation de la France s'arrange. Voilà pour le premier sujet auquel je voulais apporter une réponse et qui est, au fond, le sujet des Français aujourd'hui.

Il y a un deuxième sujet qui n’est absolument pas traité dans la campagne et dans le débat électoral, ni dans les programmes, ni dans les projets, ni dans la manière dont s'expriment les différents candidats à cette élection. C'est celui-ci : est-ce qu’il existe un projet de société en gestation dans cette crise ? Cette question est absolument essentielle, car il n'y a pas de marche en avant s’il n'y a pas de cap. Il n'y a pas de cap s'il n'y a pas d'horizon. Si l'on ne sait pas vers quoi l'on va et l'angoisse de la société française aujourd'hui, c'est que, après des décennies dans lesquelles elle a cru que « liberté, égalité, fraternité » c'était assumé par l'État, que toutes les ressources du pays gérées par l'État faisaient que les services publics d'un côté, la Sécurité Sociale de l'autre, tout cela était garanti à vie, l'angoisse du pays aujourd'hui, c'est qu'il ne voit plus de chemin, il ne voit plus de projet pour son avenir.

Et la réponse que j'apporte est celle-ci : Oui, il existe un projet de société qui ira au-delà de la crise, un projet de société que la crise va nous permettre d'atteindre et c'est le seul disponible à mon avis. On n'aura pas de projet de société dans un retour à l'État qui n'a plus les moyens de faire les choses à la place des Français, et on n'aura pas de projet de société dans un individualisme croissant dans lequel chacun jouerait pour lui-même et s'appuierait uniquement sur ses propres forces.

Et quand j'ai réfléchi à ce que pourrait être ce projet de société-là, il m'est apparu que le seul mot disponible pour que les Français retrouvent quelque chose à croire, quelque chose pour aller de l'avant, le seul mot qui dise vraiment ce que l'on peut faire ensemble dans la crise et au-delà de la crise, le seul mot, c'était : « Solidarité » ! C'est un mot que j'aime beaucoup. Vous savez les raisons historiques pour lesquelles je l'aime, parce que j'appartiens à une famille de démocrates dans le monde qui ont beaucoup aimé l'aventure de Solidarnosc, qui ont beaucoup attaché de prix à ce que ce pays sous domination étrangère, sous dictature, ce pays tout d'un coup ait su ressaisir ses forces, les intellectuels, les ouvriers, les cadres, les forces de l'industrie et de l'agriculture, les forces spirituelles aussi, sous la houlette de gens courageux. J'ai été un ami de Bronislaw Geremek qui a hélas disparu il y a quelques années dans un accident, qui est souvent venu ici, qui était un des intellectuels principaux de l'aventure de Solidarnosc.

Mais « Solidarité » cela dit au fond en un seul mot les vertus qui sont celles de notre projet national parce qu'il n'y a pas de solidarité sans liberté, il n'y a pas de contraintes pour la solidarité, il n'y a pas de solidarité sans sens de l'égalité et il n'y a pas de solidarité sans fraternité. Et, au fond, le mot dit les trois vertus à la fois. C'est, en même temps, un mot opératoire pour sortir de la crise et trouver un chemin au-delà. Une très grande partie de la crise économique que nous vivons est venue de ce que, dans le monde économique lui-même, chacun a joué pour son propre compte en considérant que c'était chacun sa boîte, chacun son entreprise, chacun son projet, et que au fond les autres étaient moins importants que le projet propre de chaque entreprise.

Or, il se trouve que, dans le monde dans lequel nous entrons, nous avons besoin de solidarité entre les entreprises, nous avons besoin de partager des projets entre les entreprises, nous avons besoin de partager des projets entre recherche et entreprise. Pendant très longtemps, comme vous le savez, en France et avec des raisons qui ne sont pas méprisables, la Recherche a imaginé que c'était seule la recherche fondamentale qui était l'engagement judicieux pour des chercheurs. On a même fait notre seul modèle de développement des recherches par les grands établissements, par les grands organismes pendant longtemps, mais vous voyez bien qu’il est besoin de créer des liens entre entreprises et recherche pour que la solidarité entre acteurs économiques fassent un projet national et pas seulement un projet d'individualisme.

Ceci est extrêmement frappant dans la société française. C'est une société d'insularité croissante. Chacun vit dans son petit îlot, sur sa petite île, séparé des autres et un très grand nombre de Français vivent cette solitude croissante avec angoisse et d'extrêmes difficultés économiques.

Et je fais, dans ce livre, la proposition que l'on permette aux Français de sortir de la solitude dans laquelle ils se trouvent aussi souvent que possible. J'ai fait la réflexion que, au contraire des règles qui sont aujourd'hui adoptées et qui régissent notre protection sociale, on favorise les rencontres et les vies partagées plutôt que de dissuader de ces vies.

J'ai été très frappé dans la circonscription qui est la mienne et que je représente depuis longtemps de ce que, lorsque des gens qui sont dans la précarité, qui reçoivent des aides sociales, décident de se regrouper, on coupe les aides qu'ils reçoivent ! Eh bien, c'est exactement le contraire qu'il faut faire. C'est pourquoi, dans ce livre et dans ce programme, je propose un contrat de vie partagée sans aucune connotation de couple ou de vie sexuelle, simplement des femmes et des hommes qui décident de rapprocher leur solitude, de se serrer les coudes pour mieux faire face aux difficultés qui sont celles du temps. Et je fais la remarque dans le livre que, dans la crise où nous vivons, on n'aura pas davantage de ressources, que lorsqu'on vit avec 700 euros par mois ou 650 euros par mois, c'est l'extrême précarité pour ne pas dire la misère, mais si on est deux à 700 euros par mois ou trois à 700 euros par mois, alors les choses changent : on partage la charge du loyer, on partage la charge de la vie, on fait en sorte que l'on puisse faire face ensemble aux difficultés, on se donne des coups de main, la solitude recule et c'est un temps au contraire positif qui s'ouvre. Donc lutte contre la solitude. Je considère que c'est très important, y compris pour les étudiants.

Dominique Versini fait remarquer à très juste titre que la France est le pays dans lequel le taux de suicide des adolescents est le plus important de tous. Ceci est un constat d'échec que je n'accepte pas et donc si l'on analyse les causes, la généalogie de ces drames-là, alors on s'aperçoit que, souvent, la solitude des adolescents joue un très grand rôle. À l'entrée à l'université, quand on se retrouve dans un univers nouveau, un grand nombre d'étudiants se trouvent très seuls pour faire face à leurs nouvelles conditions de vie, aux études et au logement étudiant, chambre par chambre, des cités privées ou de logements étudiants publics. Alors on découvre que, dans ces solitudes-là, il y a beaucoup d'angoisse qui s'exprime.

Le fait que l'on puisse favoriser, par exemple, la colocation de logements plus vastes au sein desquels la solitude étudiante reculera, pour moi, c'est une chose très importante. De la même manière, solidarité encore pour faire les devoirs, au sein des établissements, au collège ou au lycée.

On peut tout à fait favoriser le fait que des étudiants viennent donner une partie de leur temps avec une bourse que j'appelle une « bourse d'engagement » qui d'une certaine manière soutiendra leur effort. On peut tout à fait imaginer le fait que des personnes retraitées jeunes veuillent donner une partie de leur temps à des élèves et tout cela, c'est une manière de faire reculer les difficultés scolaires par un engagement de solidarité de la part de ceux qui ont les moyens de donner une partie d'eux-mêmes et peuvent recevoir en échange une aide et un soutien.

C'est le cas, par exemple, dans les universités. J'ai toujours été exaspéré de ce que les bibliothèques universitaires en France sont fermées à 6 heures du soir, alors que, de la courte expérience étudiante que nous pouvons avoir chacun d'entre nous, nous savons que les heures entre 6 heures et minuit ne sont pas précisément des heures où les étudiants sont absents, c'est au contraire les heures de grande activité étudiante ! Si l'on veut que les bibliothèques universitaires demeurent ouvertes, il faut que des étudiants puissent jouer à l'intérieur des bibliothèques universitaires le rôle d'animateur. Société solidaire qui reçoit une aide, qui fait que cette aide améliore les conditions de vie et qui, en échange, propose un soutien. Vous voyez que c'est une vision complètement différente des visions qui demandent constamment des augmentations de postes que nous n'obtiendrons pas parce que nous savons l'état des finances publiques aujourd'hui.

Solidarité encore, c'est la solidarité entre générations. Il est extraordinairement frappant que les générations qui ont été aux responsabilités depuis quelques décennies en France ont complètement négligé l'avenir des générations qui suivent. Négligé du point de vue de la dette en les surchargeant, négligé du point de vue environnemental parce que ce que nous avons à transmettre comme patrimoine écologique et environnemental, c'est au fond le devoir qui est le nôtre à l'égard des générations qui suivent.

Penser et imaginer ce devoir de solidarité intergénérationnelle, c'est évidemment extrêmement important et on peut ainsi décliner dans tous les secteurs de la vie du pays ce qu'un projet de société nouveau, une France solidaire, peut apporter pour l'évolution des choses pour les familles, les associations. Regardez encore ce que -j'étais au forum des associations, peut-être certains d'entre vous aussi, dimanche- les associations qui sont l'expression même de la solidarité apporte à la vie du pays comme réponse aux problèmes sociaux, économiques, environnementaux, sportifs, de jeunesse, culturels qui se posent à lui. Il y a là quelque chose qui est l'expression même de ce projet de société dans la géniale loi de 1901, la France y a trouvé au fond l'ébauche de cette société solidaire dont nous avons besoin.

Voilà pour ce point-là, mais c'est évidemment extensible à l'Europe. Il n'y a pas d'avenir pour la France sans qu’une Europe solidaire s'établisse et, notamment, solidarité à l'intérieur de la zone euro, puisque la zone euro est désormais le cœur de l'Europe.

Au fond, l'Europe à deux cercles, elle est faite, c'est réglé, et cette Europe-là demande solidarité et transparence entre les États qui la forment, et c'est une démarche profondément cohérente avec ce que l'idéal européen suppose. Et puis, solidarité aussi plus largement au-delà des frontières de l'Europe dans le monde. Je suis très frappé que l'on traite des problèmes d'immigration sans jamais poser la question de l'état des régions du monde d'où viennent les migrants. Les migrants, ils viennent parce que, chez eux, c'est la misère absolue et ils viennent aussi parce que, chez nous, il y a un certain nombre d'emplois qui ne trouvent personne pour les occuper. Voilà les deux pompes aspirantes qui font que l'immigration atteint parfois des degrés et des niveaux qui sont déstabilisants pour une partie de la société française.

Mais si l'on ne traite pas sous forme de solidarité cette question des pays en difficulté de développement, de la santé qui y règne… Philippe Douste-Blazy dit qu'il suffirait de deux milliards de dollars pour régler la question du paludisme dans le monde. Deux milliards de dollars, c'est exactement rien pour le PIB de l'univers, c’est une part infime de ce que représentent les affaires, les échanges financiers dans le monde. C'est pourquoi j'ai indiqué, solidarité, que de la taxe sur les transactions financières, j'affecterai 10 % de son montant à la lutte contre ces grandes endémies par l'intermédiaire des ONG qui travaillent à faire reculer ces drames que sont les maladies jusqu'à maintenant jamais éradiquées. Ceci, c'est évidemment la solidarité nécessaire avec les pays en grande difficulté. Voilà le schéma qui est le mien.

Il y a en effet une stratégie pour sortir de la crise. Il suffit que les Français le veuillent. Il suffit qu'ils acceptent que nous regardions en face les difficultés qui sont devant nous et que je ne laisserai pas éluder dans cette campagne électorale. Je ne laisserai pas jouer les manœuvres de diversion qui font que l'on ne parle d'aucun des sujets de notre survie. Il y a eu tout un temps où l'on pouvait s'amuser à éluder les difficultés, les questions et les interrogations. On pouvait attendre. Aujourd'hui, on ne peut plus attendre. C'est de la survie du modèle français, du modèle social et du modèle républicain français qu'il s'agit. La stratégie pour s’en sortir est à portée de notre main. Il suffit que nous la voulions et que nous répondions aux questions brûlantes du déséquilibre des finances publiques, de la production, de l'éducation en France et de la moralisation de la vie publique.

Et, dans cette crise, il est un modèle de société qui est en train de naître et c'est d'ailleurs le seul disponible. La France est un pays qui ne peut pas vivre sans modèle. La France est un pays qui s'est bâti autour d'une philosophie, d'un idéal, de quelque chose qu'elle se proposait à elle-même et qu’elle avait l'intention de proposer au monde. Et ce modèle de société qui vient, c'est la France solidaire, la seule réponse possible à la crise et le seul projet possible pour après la crise, celui qui rassurera, qui permettra que l'on se serre les coudes, qui permettra que l'on s'en sorte même dans la difficulté des temps parce qu'il n'est aucune raison d'imaginer que cette difficulté des temps puisse faire reculer le grand projet national qui a fait la France.

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