François Bayrou dans "Questions Politiques" sur France Inter 

François Bayrou, Président du Mouvement Démocrate, était l'invité d'Ali Baddou sur France Inter et France Info (télévision) dimanche 14 mars, dans l'émission "Questions politiques". 

Bonjour, François Bayrou, soyez le bienvenu.

Bonjour.

Sujet sérieux, François Bayrou à propos de la stratégie sanitaire : nous avons tous compris le choix qu'a fait le Président de la République, l'esprit en tout cas de sa stratégie, à savoir que chaque jour non confiné est un jour gagné. C'est un pari qui a été fait.

N'est-ce pas, au final, un pari trop risqué ?

C'est un pari absolument juste. Je ne crois pas que l'on puisse enfermer un pays durablement. Je ne crois pas que l'on puisse enfermer des familles durablement ni enfermer des jeunes durablement. Si c'est pour une courte période, avec la certitude ou au moins la probabilité de stopper un moment particulièrement virulent de l'épidémie, je comprends, mais vous voyez bien que les confinements successifs que nous avons choisis ne sont, à mon sens, pas compréhensibles, s'ils ne débouchent pas sur autre chose.

Je crois que le Président de la République a eu raison de faire, y compris contre la plupart des experts et des conseillers, ce choix-là et je pense que l'on doit aujourd'hui réfléchir à de nouvelles décisions, une nouvelle manière.

Lesquelles ?

Une étude vient de sortir cette semaine, absolument éclairante et indiscutable, car elle porte sur des dizaines de milliers de cas et dit quelque chose d'extrêmement simple à laquelle, à mon sens, il faut que nous réfléchissions.

Que dit-elle ?

Elle indique que les contaminations ont lieu pour 95 % dans un lieu clos, pour les deux-tiers au moins de ces contaminations dans un lieu clos et fermé.

Si les fenêtres sont ouvertes, tout change et, à l'extérieur, il y a à peine 5 % des contaminations ; de plus s’il y a les distances et un masque s'il le faut, un masque s'il n'y a pas les distances, à ce moment-là il n'y a plus de contaminations.

Vous voyez que, pour tous ceux qui vivent ces situations et tous ceux qui nous écoutent, il y a, là quelque chose de radicalement différent de ce que l'on fait. Si l'on pouvait rendre à chacun d'entre nous le plein air, la nature, le jardin, l'espace ouvert, les bords de Seine ou les rivières qui passent dans chacune de nos villes ou du Gave de Pau par exemple !

J'allais le citer !

C'est très beau vous savez !

Si l'on rendait le plein air à tous ceux qui sont angoissés de se trouver confinés, enfermés dans un appartement, ne pouvant pas sortir, cela changerait beaucoup de choses.

Une question, puisque vous évoquiez justement cette étude, une autre étude a été menée par Vittoria Colizza, épidémiologiste qui intervient régulièrement, car elle est chercheuse à l'Inserm. Au cours des conférences de presse que tient le Premier Ministre chaque semaine c’est elle qui présente ces modèles que nous avons pris l'habitude de voir tous les jeudis ou quasiment. À la question posée à Vittoria Colizza « Est-il possible de freiner l'épidémie sans confiner ? », sa réponse tient en quatre mots : « C'est très peu probable ».

Les experts sont là pour apporter leurs certitudes et c'est très bien que l'on en tienne compte.

Que pense le Président de la République ?

Éviter un confinement présente des avantages sociétaux et économiques, mais cela induit beaucoup d'infections, d'hospitalisations, de Covid long, sans parler des décès.

Est-ce le pari d'Emmanuel Macron ?

Son pari, c'est que l'on rende cette situation de lutte contre le virus acceptable, socialement acceptable, familialement acceptable pour éviter de se trouver avec un grand nombre de nos compatriotes qui soient enfermés dans une solitude invivable.

Je voudrais ajouter une deuxième chose, vous m'aviez demandé tout à l'heure quoi faire. Je suis frappé de voir que le plein air n'est pas un lieu de contamination et il y a une deuxième chose…

Le plein air en hiver c'est un peu compliqué.

On vient de sortir, chacun d'entre nous a vu des beaux jours et même le fait de sortir sous la pluie n'est pas un sujet.

Il y a une deuxième chose, je trouve que l'éducation de la population n'est pas faite comme elle devrait l'être. Il est, par exemple, très difficile pour les personnes de se représenter quelles sont les vraies distances, quand on doit mettre le masque et que l'on ne doit pas y échapper. J’estime qu'il faudrait une campagne d'éducation populaire par votre entremise, celle des radios, des télévisions, des réseaux sociaux, simplement pour être assurés qu'il faut ouvrir les fenêtres chaque fois que l'on peut. Un masque se met dès l'instant qu'il n'y a pas les distances, y compris dans le cercle familial, si l'on n'est pas assuré de l'état sanitaire de ceux qui le composent. Il y a un travail d'éducation populaire très important qui, pour l'instant, je trouve, n'a pas été fait.

Je considère que les Français, ceux qui nous entourent, ne sont pas très au clair sur la manière dont le virus se transmet, nous avons entendu des choses dans tous les sens.

Même de la part de Ministres.

Par exemple, aujourd'hui, la transmission par la main est moins mise en cause que la transmission par les aérosols, comme on dit. Je trouve que ce travail d'éducation par une communication percutante, efficace et simple serait, elle aussi, une manière de lutter contre le virus et la manière la plus importante, est évidemment la vaccination.

Vous me donnez le sentiment - je peux me tromper - que vous esquivez notre question selon laquelle, la stratégie d'Emmanuel Macron, on l’a très bien comprise, a sans doute été juste il y a encore quelques semaines. Quand on voit la situation dans les hôpitaux, dans certaines régions (l'Île-de-France, les Hauts de France, le Grand Sud, la région anciennement PACA), n'a-t-on pas attendu trop longtemps ?

Du coup, le coût politique pour Emmanuel Macron ne va-t-il pas finir par être très cher ?

Je n'esquive rien. C'est tout à fait possible qu'il y ait un sentiment selon lequel il aurait fallu tout fermer. J'ai seulement dit que je comprenais le choix du Président de la République de ne pas tout fermer et il y a des millions et des millions de Français qui le comprennent et voient avec angoisse l'idée que l'on pourrait procéder à un ré-enfermement généralisé, à un re-confinement généralisé.

Ce que je défends comme idée, c'est qu'il existe peut-être d'autres moyens d'arriver à la sécurité sanitaire que celui du confinement généralisé pour des raisons qui ne tiennent pas seulement à l'économie ; même si cela compte, mais tient à autre chose tel que le caractère insupportable de la solitude enfermée pour un grand nombre de ceux qui la vivent.

En effet, lorsque vous avez une famille ou êtes dans l'âge où l'on peut rencontrer des gens, cela va, mais, lorsque vous êtes dans d'autres situations, comme les étudiants qui sont parfois seuls au moment d'entrer à la faculté, n'ont pas d'amis et sont dans une situation de profonde gêne, un profond isolement et une profonde tristesse, je pense à eux ainsi qu’aux personnes plus âgées.

Il y a beaucoup de situations personnelles et familiales dans lesquelles la solitude est très difficile à supporter.

Éric Piolle, Maire écologiste, déclare sur notre antenne concurrente et amie d’RTL qu'il ne comprend plus rien à ce que fait le Président qui annonce des décisions, seul et qu'il n'y a plus de démocratie sanitaire.

Vous êtes à la tête d'un mouvement qui s'appelle le Mouvement Démocrate.

A-t-il raison ? N'y a t-il plus de démocratie sanitaire ?

Il faut bien que quelqu'un prenne des décisions ! Des débats à l'Assemblée nationale, il y en a chaque semaine.

Une personne qui doit prendre des décisions, a-t-il raison de s'entourer des conseils les plus sérieux ? Oui, il a raison. Est-il possible de mieux partager, sans doute, mais ce n'est pas le sujet principal de ceux qui nous écoutent.

Le sujet principal de ceux qui nous écoutent est le suivant : est-ce que l'on referme ou a-t-on une autre voie ?

L'Italie sera re-confinée à partir de lundi.

Absolument, à partir de demain.

Y a-t-il d'autres solutions avant de refermer ?

Si l'on réfléchit aux lieux où la contamination se passe et aux modes de transmission du virus, alors je suis sûr qu'il y a une voie différente de celle du re-confinement généralisé.

Tout le pari d'Emmanuel Macron reposait sur la vaccination massive : en gros, chaque jour gagné, c'était un jour où l'on pouvait tenir en vaccinant, pour éviter le reconfinement.

Aujourd'hui, la logistique a l'air de rouler, mais le manque de doses va-t-il l'obliger à….

On voit parfaitement dans les courbes aujourd'hui que la vaccination fonctionne.

Sur les plus de 80 ans dont un grand nombre commence à être vacciné, on voit que les hospitalisations, tout comme les admissions en réanimation baissent. Cela fonctionne donc.

Le mois à venir n'est pas terrible et c'est Olivier Véran qui le dit.

Ce n'est pas Olivier Véran, c'est la planète entière qui voit les difficultés et les très graves défis que cette épidémie propose, en tout cas au monde occidental, car il y a d'autres régions du monde qui sont plus préservées.

Ou mieux préparées.

Regardez - vous êtes un Européen convaincu - les difficultés que l'on rencontre aujourd'hui dans l'espace européen et le Commissaire européen Thierry Breton était ce matin très en colère contre le Groupe pharmaceutique Astrazeneca qui annonçait hier une réduction des livraisons de vaccins contre le coronavirus pour la deuxième fois depuis le début de janvier, "annonce inacceptable" dit Thierry Breton.

Comment l'expliquez-vous ?

Il sait mieux que moi ce qu'il en est. Lorsque vous avez l'offre et la demande et que la demande augmente de manière considérable, mais que l'offre ne suit pas, vous avez hélas des mécanismes de marché.

Pourquoi cela ne se produit-il pas aux États-Unis ou en Grande-Bretagne ?

Ce n'est pas un plaidoyer pour l'Europe. L'UE, à son corps défendant, n'a-t-elle pas misé sur le bon vaccin à son corps défendant ? Astrazeneca n'était-il pas le bon ?

Y a-t-il eu des erreurs ? Peut-être.

Est-il possible de les corriger ?

Oui. D'ici très très peu de semaines, nous devrions avoir une offre de vaccins immense. Nous allons, dans la ville dont j'ai la responsabilité, à Pau, mettre en place, à partir du mois de mai, une unité de production et de mise en place de vaccins qui va faire un million de bouteilles par mois et chaque bouteille contiendra 20 doses, soit 20 millions selon les prévisions.

Ce n'est naturellement pas que pour la France, mais il existe plusieurs unités comme cela en France et ce n'est qu'un vaccin, c’est le vaccin allemand qui s'appelle Curevac je crois, à partir du mois de mai.

C'est loin, mai.

D'autres vaccins ont été acceptés hier. Cela va venir.

Nous avons vécu tous ensemble quelque chose d'assez simple. Il y a un mois ou un mois et demi, les projecteurs de l'opinion publique que vous relayez étaient contre la vaccination.

Au tout début.

En janvier, même.

Quand je me suis battu pour la vaccination, j'ai même évoqué l'idée d'un certificat de vaccination, d'un passeport vaccinal comme on dit, et cela a été des levées de boucliers incroyables : tout le monde était contre la vaccination ! Puis tout d'un coup, on se trouve dans une situation où tout le monde ouvre une polémique, car il n'y a probablement pas assez de vaccins.

Les choses ont-elles toujours été bien faites ? Je n'en suis pas sûr.

Y avait-il d'autres chemins ? Je ne sais pas, mais je sais une chose avec certitude, c'est que sur cette épidémie qui était une épidémie inédite, il y a au moins des réponses qui viennent et arrivent dans les prochaines semaines.

Êtes-vous vacciné ?

Je ne le suis pas encore, je le serais quand ma classe d'âge sera concernée, cela va venir. Je n'ai pas voulu de passe-droit.

Vous qui connaissez bien Emmanuel Macron, considérez-vous qu'il a changé après cette année, cette épreuve du pouvoir, ce confinement et en quoi a-t-il changé ?

Il a changé depuis 4 ans, c'est un homme très jeune qui a été élu Président de la République de manière complètement inattendue au terme d'un mouvement de révolution qui a été proposé aux Français et que les Français ont adopté. Il a ensuite découvert que la réalité, la perception que l'on pouvait avoir d'un dirigeant dans l'opinion publique, dans les médias, pouvait être extrêmement déformée, extrêmement éloignée de ce que lui était ou avait le sentiment d'être. Il a découvert que c'était très dur.

Il joue avec la vie et la mort des gens.

Si vous voyez son visage, oui, je trouve que son visage a changé, pour ma part, en mieux. Je trouve que des rides de souci, d'inquiétude, traduisent mieux que la légèreté du très jeune âge, ce qu'est cette fonction.

Les Français se trompent-ils sur lui ou se sont-ils trompés à son propos ?

Je pense que l'homme qu'il est n'est pas perçu par la majorité des Français.

L'homme qu'il est ou de ce que les Français peuvent avoir en-tête ?

Ce n'est pas moi qui vais dire le contraire, j'ai commencé mes relations avec lui de manière polémique, de manière un peu dure.

Les reproches qui lui sont faits, la perception qui est faite, à savoir une personne qui ne considère pas les gens, c'est, de ce que je vois tous les jours, absolument faux. De ce que je vois lorsqu’il est en situation avec des gens de terrain, avec les femmes, les hommes, les familles et les élus locaux en situation difficile, au contraire, son regard prend les gens en compte.

Par ailleurs, on a dit : "c'est l'homme des puissants". Je n'ai, pour ma part, jamais vu un Président de la République qui soit aussi indépendant des puissants que lui ; François Mitterrand peut-être si je dois remonter le temps. Il n'est manipulé et tenu par personne, alors que beaucoup de gens ont cru qu'il était plutôt l'homme des puissants, des puissances.

Enfin, ma dernière perception et on s'arrêtera là : l'idée de l'hégémonie est dans nos institutions. Si l’on ne change pas les institutions, on aura perpétuellement cette accusation.

Vous voulez dire que Jupiter est inscrit dans les textes de la Ve République ?

On va faire une minute de sciences politiques ! Ce n'est pas inscrit dans les textes. On peut avoir une autre perception. Par exemple, en cohabitation, nous avons eu une autre perception des Présidents de la République, mais, si vous avez un Président de la République élu au scrutin majoritaire et, si vous avez une Chambre qui est simplement la duplication du scrutin, alors vous êtes dans une situation où il n'y a plus le dialogue nécessaire entre exécutif et législatif.

Qu'est-ce que la Ve République ? C'est un Président choisi par les Français pour qu'il trace la ligne et c'est une représentation nationale, une Assemblée nationale qui est faite pour représenter les différentes sensibilités.

Faut-il, par exemple, revenir au septennat ?

Il faut arriver à la proportionnelle !

C'est votre combat de fin de quinquennat, la proportionnelle.

Non, c'est le combat du début. Je vous rappelle que c'était dans l'alliance que nous avons conclue avec Emmanuel Macron.

Aujourd'hui, est-ce le Président de la République ou sont-ce les autres partis que vous n'arrivez pas à convaincre là-dessus ?

Pas du tout. Ce qui bloque, c'est que, pour l'instant, on n'a pas trouvé la démarche démocratique nécessaire pour que le choix des Français se fasse entendre….

…Un référendum ?

Je n'ai jamais cru que l'on pouvait y arriver par la voie parlementaire, car vous avez une assemblée élue selon une certaine organisation. Elle ne va pas le faire spontanément.

Elle aurait pu le faire au début. Je vous rappelle que j'étais garde des Sceaux à l'époque et j'ai proposé un référendum le jour du deuxième tour des élections législatives pour que ce soit réglé. On m'a dit : « C'est trop tôt ».

Maintenant c'est trop tard ?

Après, pendant le quinquennat, on m'a dit, les forces politiques ont dit : « Ce n'est pas le moment » et maintenant, on dit : « C'est trop tard ».

Vous voyez là, l'éternel recommencement que nous connaissons depuis un demi-siècle sur ce sujet, c'est-à-dire qu'en réalité, sous des prétextes divers, personne ne veut changer.

Vous avez le téléphone d'Emmanuel Macron.

Est-ce un casus belli pour vous ?

Je vais vous répondre dans une seconde.

Premièrement, ce à quoi nous sommes confrontés, c'est le conservatisme éternel des forces politiques qui veulent garder le pouvoir pour elles, des forces politiques majoritaires qui croient qu'elles vont le rester. Si elles regardaient l'histoire, elles y verraient une conclusion différente et surtout on ne touche à rien. Pour mon sentiment, c'est une faute.

Suis-je résigné ? Est-ce que j'y crois encore ?

Plus que jamais !

Quelle est votre démarche ?

Je lis très bien ce que vous écrivez ou ce que vous dites, c'est-à-dire que tous les bruits qui viennent des couloirs de pouvoir, quels qu’ils soient, c'est : « Cause toujours, tu m'intéresses ».

Est-ce cela que vous dit Emmanuel Macron, car vous vous lui parlez et nous pas, voyez-vous.

Il vous a fait cette promesse François Bayrou. Tiendra-t-il sa promesse ?

Je suis affecté d'une maladie très pénalisante, c'est que je suis frappé d'amnésie sur toutes mes conversations avec le Président de la République. C'est comme cela !

Vous ne vous souvenez même plus de l'alliance que vous avez scellée en 2017 ? C'était un projet politique.

Êtes-vous en situation de croire aux promesses que l'on vous fait ?

Eh bien, je suis précisément des très rares hommes politiques qui croient que les promesses engagent.

Quelle est votre démarche pour y voir ?

Si vous dites le Parlement, cela ne va pas se passer…

C'est assez simple.

Premièrement, tous ceux qui regardent le fonctionnement de notre démocratie constatent qu'il y a quelque chose qui ne va pas.

Tous ceux qui l’observent constatent qu'il y a un déséquilibre, que l'on a le sentiment que le pouvoir est toujours enfermé et qu'il prend ses décisions tout seul - nous en avons eu l'écho tout à l'heure. Quel que soit le Président de la République, quelles que soient les circonstances historiques et nous avons une deuxième certitude, c'est que les Français s'éloignent de plus en plus des élections, de la vie démocratique et considèrent que tout cela, c'est n'importe quoi.

Pourquoi ? Ils ne sont pas représentés.

Nous avons un Parlement fait pour représenter les citoyens dans lesquels, plus de 50 % des citoyens ne sont pas représentés.

Là, nous sommes d'accord, c'est un diagnostic que l'on vous demande, un pronostic.

Pas du tout, car leur vote à l'Assemblée nationale, pas dans les autres élections, n'est pas pris en compte.

Par exemple, je vois les prises de position des uns et des autres. Le Président du Sénat, Gérard Larcher, a pris position avec virulence contre la loi électorale juste qu'est la proportionnelle. Cela fait rire, car Gérard Larcher est, lui-même, élu comme Sénateur à la proportionnelle depuis toujours.

Les trois-quarts des Sénateurs sont élus à la proportionnelle.

La voie référendaire que vous voulez emprunter concrètement, comment l'organisez-vous ?

Je pense que, si l'on fait le constat qu'il y a une question qui empoisonne le débat public depuis longtemps, les gilets jaunes en ont beaucoup parlé dans leur cahier de doléances, ils ont dit très souvent qu'ils n'étaient pas représentés. Si l'on fait ce constat, alors, on se tourne vers notre histoire et nos institutions et on dit aux Français : « Il va falloir que vous tranchiez ».

Quand le fait-on ? Avant la fin de l'automne ? Dans le cadre de la campagne présidentielle ?

Je pense qu’il serait pas mal de le faire en même temps que les régionales, dès juin, si elles ont lieu en juin.

Avez-vous des discussions là-dessus avec le Président de la République ?

Je vous ai dit quel était mon problème de santé ! C'est cruel d'insister sur ce sujet.

Voyez-vous une possibilité que cela puisse aboutir ?

On verra, la possibilité institutionnelle est très simple cela ajoute quelque chose à nos institutions qui pour l'instant n'existe pas et qui est un manque.

Il faut qu'il y ait un instrument qui permette aux Français de se prononcer sans que soit en question la tête du Président de la République.

Est-ce que justement cela ne peut pas être le cas ? Cela peut se faire en référendum comme cela même si c'est en juin. Cela peut se perdre.

Je n'ai je n'ai jamais recommandé que le Président de la République dise « voilà ce que moi je veux ».

Je vous rappelle qu'on signait la même lettre au Président de la République, de Jean-Luc Mélenchon à Marine Le Pen en passant par les écologistes, en passant par toutes les forces du centre et des personnalités éminentes du PS et de LR.

Personnalité éminente par exemple, François Rebsamen, André Vallini. On dit : « mais cela a toujours été notre demande nous le Parti socialiste ». C'est le mode de scrutin que demandait Léon Blum et qu'a fait appliquer François Mitterrand.

Ils ont donc dit : « franchement, ce n'est pas raisonnable que nous ne soyons pas là ». Gérard Longuet à LR a fait un texte tout à fait dense et important et dit : « c'est le seul moyen de changer les rapports entre l'Exécutif et le législatif ».

Toutes ces sensibilités, si elles peuvent proposer un texte sérieux, par exemple le texte qui a déjà été appliqué en 1986, il n’y a donc rien de plus simple que de demander aux Français ce qu'il en est.

C'est la proportionnelle intégrale, cela ?

Ce n’est pas intégral, c'est la proportionnelle départementale avec un seuil à 5 %, c'est le scrutin que François Mitterrand avait prôné.

Vous connaissez le reproche ou le commentaire que l'on fait quand on entend parler de cette question-là : de quoi on parle François Bayrou ? On est en pleine crise sanitaire crise économique, crise sociale nous traversons une période de catastrophe liée à la crise écologiste qui se rajoute à cela et on parle de proportionnelle et les politiques sont mobilisés sur la question et se déchirent sur ce problème d'organisation collective.

Vous connaissez cette très significative histoire chinoise, un proverbe chinois qui dit : « quand le doigt montre la lune, l'imbécile regarde le doigt ».

C'est en effet un débat qui paraît loin des gens, mais la vérité, c'est qu’on est là au cœur du cœur des raisons qui font qu'économiquement, cela ne va pas, que du point de vue sanitaire cela ne va pas, - c'est ce que vous disiez - et que du point de vue de l'opinion publique cela ne va pas, que l'on a le sentiment que les pouvoirs sont toujours isolés, seuls dans leur tour d'ivoire, qu'ils imposent en matière de liberté ou en matière écologique, des décisions qui ne ressemblent pas à ce que les citoyens souhaitent, tant que vous ne rendrez pas au peuple Français - sans vouloir employer des superlatifs - une représentation honnête qui fasse que chacun des grands courants du pays trouve à être partie prenante du débat que l'on mène et puisse contrôler le gouvernement, la proportionnelle, en tout cas la représentation juste.

Cela, c'est une vraie question.

Cela a une conséquence - vous vous trompez si vous pensez que, les institutions, cela ne compte pas, je pense que c'est essentiel - la loi électorale juste, c'est que quand vous êtes au pouvoir, vous êtes obligé de tenir compte des autres.

Malgré tout, si l’on observe vos cotes de popularité, elles diminuent en ce moment, elles perdent quelques points.

Non.

Si, dans le dernier IFOP publié dans Paris Match par exemple, vous perdez 5 points. Est-ce que vous le liez à votre combat depuis plusieurs semaines à la proportionnelle et avez-vous vraiment le sentiment que cela fait partie des attentes en ce moment des Français ?

Non. Lorsque vous êtes un responsable public, vous êtes obligé de discerner des problèmes, même quand l'opinion publique ne les ressent pas.

Je vous rappelle que je me suis battu sur la dette, et Dieu sait que ce n'était pas populaire. Dieu sait que l'on m'en a fait des reproches et parfois même des moqueries, mais c'était un vrai sujet.

Je me suis battu tout seul contre la privatisation des autoroutes, tout seul ; Dieu sait qu'à l'époque ce n'était pas sujet et aucune force politique n'était à ce combat, à ce rendez-vous.

Il arrive que l'on soit minoritaire et c'est… comment je peux dire, c'est un honneur d'être minoritaire quand on est du côté de ce que l'on croit juste.

Les combats politiques, ce n'est pas des combats démagogiques ; la démocratie, ce n'est pas la démagogie, ce n'est pas d'aller toujours dans le sens de l'opinion.

Bien sûr que ces problèmes institutionnels apparaissent comme des problèmes un peu lointains.

La vérité, c'est qu'ils sont au cœur du rapport entre le pouvoir et les citoyens et de la délégation des citoyens pour le pouvoir.

Il faudrait que vous nous expliquiez en quoi, s'il y avait une proportionnelle, cela changerait la perspective de la prochaine présidentielle ? Est-ce que cela changerait la perspective de la campagne ? Est-ce qu’il y aurait une idée de coalition qui pourrait être créée ? Est-ce que du coup cela pourrait aussi revigorer le front républicain ?

On mélange tout. Je ne veux pas mélanger tout.

Première question : est-ce que cela peut changer la prochaine présidentielle ?

Réponse, il faut que cela change la prochaine présidentielle car il n’est pas possible de proposer aux Français que le quinquennat qui vient soit exactement le même avec ses difficultés et ses impuissances que le quinquennat précédent.

Il faut changer le rapport au pouvoir et c'est, j'en suis sûr, une des questions que les Français se posent à propos de la manière d'exercer le pouvoir.

Il faut associer toutes les forces politiques volontaires ?

Oui, il faut donner à tous les Français le droit, la légitimité de se faire entendre dans le débat. Ce n'est pas compliqué. Ce sont des citoyens comme nous.

Prenez un exemple : vous êtes électeur à Neuilly-sur-Seine, vous êtes de gauche, votre voix ne sert jamais à rien car, par définition ce n’est pas la majorité ou bien vous êtes électeur du centre ou de droite à Saint-Denis, votre voix ne sert jamais à rien parce que ce n'est pas la majorité.

C'est n'importe quoi.

Est-ce qu’on doit le corriger ? Il y a des gens qui disent : « ce n'est pas le moment, c'est trop tôt, c'est trop tard. »

Moi, je vous dis, si on est responsable, si on ne veut pas voir se multiplier les sécessions - un sociologue avait écrit un livre sur ce sujet il n'y a pas longtemps - une société en sécession, en révolte perpétuelle sans que jamais aucun message ne puisse passer vraiment…

Vous parlez surtout de la sécession des élites ?

Oui, de la sécession du pays par rapport aux élites. C'est cela le sujet. Donc, oui il faut changer cela.

Ensuite, oui ce n'est pas indifférent qu'un très grand nombre de mouvements politiques extrêmement différents les uns des autres, portent le même projet parce que cela veut dire que l'on peut trouver d'autres rapports que le rapport de domination, une majorité qui écrase et ignore les minorités.

C'est absurde. Je pense que cela peut changer les choses.

Cela veut dire que vous ferez alliance et qu’en l’occurrence l'alliance continuera entre le Modem et la République en Marche dans la perspective de la présidentielle ? C'est ce qu'il faut comprendre, entre autres ?

Il faut d'abord attendre de savoir si le Président de la République prend la décision de se représenter.

Vous le souhaitez ?

Je pense que le travail n'est pas achevé et qu'il convient à tout prix de donner à l’espoir que l'élection d’Emmanuel Macron a représenté une perspective de réalisation.

Pour comprendre et compléter, on a l'impression que le front républicain, ce qui a existé pendant des années et des années, c'est une espèce de barrage vis-à-vis du Rassemblement national, est-ce quelque chose qui est en train de sauter ? Cela saute parce qu’on a l’impression qu’il y a des gens de gauche déçus par Emmanuel Macron qui disent : "J'irai à la pêche s’il y a Macron-Le Pen", on a l’impression que Jean-Luc Melenchon dit à peu près la même chose avec quelques précisions.

Êtes-vous inquiet par cette disparition de cette idée du barrage au Rassemblement national ?

Je n'ai pas la même idée que la plupart de ceux qui s’expriment sur le sujet.

Je pense qu'une élection présidentielle ne se gagne pas en se résignant à faire échec à l'un ou à l'autre.

C'est pourtant très souvent le cas.

Tweet François Bayrou présidentielle 2022

Une élection présidentielle cela se gagne sur de l’espoir, cela se gagne sur de l'enthousiasme, cela se gagne sur une capacité de réunir les Français, cela ne se gagne pas en créant des épouvantails car le temps des épouvantails est fini, il est derrière nous.

Les gens ont vu que, bon… On faisait de grands discours, mais que généralement ce n'était pas comme cela que les choses se passaient. Ils ont désormais besoin de croire à quelque chose.

Je suis minoritaire puisque tout le monde dit que, ce qu'il faut, c'est le front, national pour les uns, républicain pour les autres. Je ne crois pas à ces forteresses Potemkine.

Je pense que l’on se rassure à bon compte si l’on va dans ce sens.

Ce que je crois, moi, c'est qu'il faut donner de la vitalité, de la volonté, de l'espoir, de l'enthousiasme et du rassemblement.

Cela vaut la peine.

Mais si on va dans cette élection uniquement en disant : « vous ne voterez pas pour l’autre, ce n'est pas possible, etc. » Cela ne marchera pas comme cela. Vous voyez bien que les gens s'échappent donc je plaide pour l’espoir.

On a l'impression pourtant que, et Marine Le Pen et le Président de la République installent ce duel et leurs troupes également dans l'espace public. C'est une petite musique que l'on ne peut pas ne pas entendre.

Si je fais le tour de la table, vous étiez tous des observateurs politiques conscients sur les vingt dernières années pour simplifier. En tout cas, vous étiez attentifs.

Moi-même, j'ai fait des tirades à ces micros pour dire que ce n'était pas possible Ségo-Sarko, que l'on a installé des duels, que tout le monde était complice. Il m'est arrivé de le dire de manière un peu forte et entendue je dois dire. Mais c'est très simple ; la question, c’est : où sont les électeurs ?

Il se trouve qu'il y a, pour l'instant, dans les sondages qui valent ce qu'ils valent, des électeurs, des millions de personnes qui se sentent d'un candidat ou d'un autre.

Est-ce que cela peut changer ? Oui, cela peut changer, mais je vous ai répondu. Je ne crois pas, moi, qu'une élection présidentielle se joue sur la résignation à écarter quelqu’un. Je ne crois pas cela, je crois qu'une élection présidentielle, cela se gagne sur du positif, cela se gagne sur de l'espoir et cela se gagne sur la capacité à se faire entendre des gens.

Et, si l'on joue le contraire alors on se trompera.

Le Président du Modem et maire de Pau François Bayrou est l’invité de questions politiques jusqu’à 13 heures. Votre portrait.

Pendant plus de 20 ans, vous avez été persuadé, François Bayrou, vous avez même presque tout misé sur cette idée en particulier de réunir toutes les bonnes volontés, les bonnes volontés de droite comme de gauche. C’était pour vous, politiquement, la seule manière de tout changer, de tout réinventer.

Emmanuel Macron l’a fait ou en tout cas essayé. Ce n'est pas faute pour vous d'avoir tenté de l'accompagner, mais vous en conviendrez, François Bayrou, difficile de dire que cette affaire ait parfaitement fonctionné.

Aurez-vous une autre idée pour l'année prochaine, pour l'élection présidentielle ? Serez-vous toujours aussi écouté à l’Élysée avec une vraie capacité à influencer ?

Il y a quatre ans précisément, le futur Président n'avait pas hésité à venir vous chercher parce qu'il avait besoin du politique visible et expérimenté que vous étiez, mais désormais qu'espérez-vous encore, François Bayrou, lui apporter ?

Votre recul, peut-être, votre sens de la résilience ou bien votre éternel optimisme malgré toutes ces années où tout a souvent été assez compliqué.

« Il y a eu un moment de ma vie où j'ai su qu'il fallait changer les choses en France et pas être un acteur du jeu habituel et, cela, cela se fait dedans, cela se fait dans le caractère d'un homme ou d'une femme. »

C'était en mars 2017.

En fait, à bien vous observer il y a deux François Bayrou, deux grandes époques, l'une où tout vous a été donné, l'autre où tout s'est mis à vous résister.

Dans les années quatre-vingt-dix, vous avez la quarantaine, tout s'est impeccablement déroulé, vous êtes nommé deux fois ministre : ministre de l'Éducation nationale, au plan local vous êtes élu Président des Pyrénées-Atlantiques, votre département et vous avez dirigé tous les partis centristes : CDS, FD et bien sûr l'UDF. Bref, on vous veut, François Bayrou, et surtout on vous voit partout.

Et, dans les années quatre-vingt-dix, la dynamique s’est cassée, vous n'avez plus qu’un seul but : l'élection suprême, sauf qu’entre elle et vous, cela n’a jamais marché.

Trois tentatives au total. À la quatrième, vous ralliez Emmanuel Macron et vous ne gagnerez que par procuration.

« Mon rôle est très simple, je vais tout faire pour aider »

« Emmanuel Macron - Il va m’apporter son expérience sa sensibilité, d’ailleurs cette différence entre nous qui est aussi une complémentarité. »

Mais après quatre années passées à ses côtés, qu'avez-vous su imposer, François Bayrou ? Certes quelques postes et places. Depuis longtemps vous savez négocier et peser, mais, sur le fond, qu'avez-vous sincèrement insufflé ?

Vous avez espéré une autre manière de parler et d'incarner la politique avec de nouvelles pratiques un peu plus démocratiques. Reconnaissez qu'à un an de la fin du pacte que vous avez scellé avec l'actuel Président, assez peu de conditions ont été pour l’instant rigoureusement respectées.

Je vous ai écouté attentivement, je vous écoute toujours attentivement. Il y a un parti pris, non pas un parti pris, il y a un angle dans votre analyse et, cet angle, c'est l'angle que beaucoup de gens adoptent, qui est l'angle monarchique.

Le papier dit : est-ce que vous avez eu de l'influence ? Est-ce que vous aurez de l'influence auprès du décideur suprême ?

Il se trouve que je ne crois pas à cette vision.

Pour moi, la politique est un combat, c'est un engagement et on n'est pas en situation de demander quelque chose, on est en situation de faire entendre ce qu'un pays dit, ce qu'une situation historique exige.

Vous avez compris cela. Je ne suis pas un courtisan. Je ne l'ai jamais été. Je n'ai jamais été prisonnier de cette vision des choses. J'ai, avec Emmanuel Macron, la personne, une relation je crois de confiance, assez, si j'osais je dirais assez profonde, mais je ne suis pas à essayer de susciter quelque chose de sa part.

Tweet François Bayrou

Quand je vois une situation grave pour le pays, je le dis, même si cela ne fait pas plaisir au cercle de pouvoir. Exemple : j'ai dit qu'il allait falloir un Plan Marshall pour essayer de reconstruire l'appareil productif français qui s'est affaibli au travers des années.

Nous sommes incapables, y compris de faire face à une partie majoritaire de la demande intérieure du pays. On est le pays en Europe qui a le déficit commercial le plus effrayant : 70 Md€, 75, certains disent 80 Md€ de déficit du commerce extérieur tandis que l'Allemagne a 200 milliards d'excédents et que même l'Italie est en excédent.

On est un pays dans lequel on ne sait plus produire. C'est un sujet majeur, même si l’on vous dit : « ce n'est pas urgent, ou n'est pas le moment ou tel plan suffit. »

Ce n'est pas vrai. Donc les combats que je mène ne sont pas des combats d'influence. Ce sont des combats où fait entendre le pays, et c'est cela le rôle d'un responsable politique.

C'est pourquoi je ne me sens pas dans votre angle, pour une fois.

On a des questions à vous poser et qui touchent aux convictions et parfois même aux convictions les plus intimes dans l'actualité. On voulait vous interroger sur l'euthanasie ou l'assistance à la mort dans la dignité, à cette possibilité.

Faut-il l'élargir ? Est-ce que vous comprenez qu'il y ait une proposition de loi donnant le droit à une fin de vie libre et choisie ? L'Assemblée Nationale devrait examiner ce texte début avril.

Je ne sais pas si la réflexion a été suffisamment conduite, mais je vais vous dire quelque chose qui est très intime pour moi.

J'avais deux amis qui étaient des enseignants que j'avais beaucoup aimés et même des maîtres, en tout cas pour l'un d'entre eux. Ils se sont suicidés dans des conditions horribles. Ils ont voulu mettre fin à leur jour et c'était, pour l'un et pour l'autre, des conditions horribles.

Je pense que c'est un débat qu'il faut avoir.

En même temps, vous savez quelles sont mes convictions les plus profondes. Je trouve que la vie est la chose la plus sacrée que l'on puisse trouver. Bon…

Vous avez soutenu la loi Léonetti en l'occurrence en disant qu'elle était plutôt bien équilibrée ; d'autres estiment qu'elle ne va pas assez loin.

On va avoir le débat. Les débats sur les sujets éthiques doivent être conduits et menés et, si l'on peut les conduire et les mener avec respect des opinions différentes, c'est aussi une manière de laïcité cela, respecter le plus profond des opinions, des convictions que portent nos concitoyens.

Je trouve que cela mérite.

Je voudrais rebondir sur ce que vous disiez en disant : il faut mener une campagne présidentielle qui soulève l'espoir et l'enthousiasme.

Quand on voit l'état dans lequel la France sort du confinement ou essaie d'en sortir, est-ce qu’il y a encore matière à mener des campagnes optimistes et sur quels sujets on peut le faire ?

Nous sommes un pays qui s'est sorti de deux guerres mondiales dont la première a été la plus épouvantable saignée que l'on pouvait imaginer pour un peuple. Un million et demi de jeunes garçons tués. C'est une saignée dont on n'est pas encore remis, mais on a fait face.

On a surmonté tout cela.

Par rapport à la première campagne d’Emmanuel Macron, la campagne extrêmement optimiste qui disait ; on va faire le pacte européen, on va vers la croissance, on va faire l’égalité des chances.

Là, ce n'est plus le sujet du tout. Comment vous remettez de l'optimiste dans cette situation ?

Il faut que cela le redevienne.

Quels sont les ingrédients ?

La question, c'est l’élan vital du pays. La question fondamentale c'est pourquoi je crois que…

Il y a une forme de mystique quand vous employez cette expression ; l’élan vital du pays, qu’est-ce que cela peut être ?

Vous êtes agrégé de philosophie, me semble-t-il. Cela, c'est Bergson et cela s'applique à l'ensemble d'un pays.

On ne va pas avoir des débats de ce genre-là !

Vous le sentez l’élan vital encore ?

Je vais prendre un exemple.

C'est un problème majeur sur lequel je vais essayer de produire une note avec le Plan, c'est un problème majeur que la démographie de la France s'effondre.

On a besoin d'avoir des naissances qui permettront de porter ce qu'est notre avenir, notre recherche, nos découvertes et le contrat social qu'il y a entre nous.

Notre démographie s'effondre, c'est un grand sujet c'est de l’élan vital.

À propos de l’élan vital, est-ce que vous considérez que Jean Castex est rentré - il y a eu un papier dans Le Monde hier - dans la peau du véritable Premier ministre ? Est-ce qu’il joue le rôle d'un bon paratonnerre et protège suffisamment Emmanuel Macron et entraîne suffisamment le pays ?

Je n'ai jamais pensé que la fonction d'un Premier ministre était d'être paratonnerre, mais je pense que la fonction d’un Premier ministre est d'être un complément juste, positif et adapté au Président de la République.

Il est celui qui met en œuvre, qui fait entrer dans la réalité, il se cogne le réel et il fait face à ce réel.

Je trouve que Jean Castex le fait bien.

Vous regrettez Édouard Philippe ?

Je n’ai jamais eu à nommer un Premier ministre donc je ne vais pas rentrer dans ce genre de considération.

Jean Castex, le Premier ministre qui se cogne le réel, dans ce réel, en ce moment, il y a notamment les violences urbaines qui, à nouveau, se multiplient en banlieue parisienne, en particulier dans l'Essonne, en banlieue lyonnaise également, mais pas seulement, on parle aussi de l'Oise je crois.

On découvre l'ampleur du phénomène des rixes et des règlements de comptes entre bandes.

Vous êtes dans la vie politique depuis trente-cinq ans François Bayrou. Ces problèmes-là reviennent cycliquement, régulièrement.

Tout le temps.

Pourquoi on n'arrive pas à trouver de solution et quelle serait-elle ?

Parce qu'on ne sait pas bien analyser ce que doit être une sanction et on ne sait pas bien analyser ce que doit être une éducation.

La sanction : quand ces jeunes font des bêtises, il faut parfois attendre deux ans qu'il y ait une décision, et souvent elle n'est pas appliquée.

Par exemple, j'ai appris récemment que des jeunes condamnés à des travaux d'intérêt général - ce qui pour moi est une raison, mais il faut qu'ils soient effectués, ces TIG - qu'ils pouvaient ne pas être effectués ou qu'on pouvait les en dispenser, pour les premiers.

Ce n'est pas normal.

Je pense que la rapidité de la sanction et l'effectivité de la sanction sont quelque chose qui devrait être un devoir pour nous tous.

Nous avons, dans votre ville, offert près de 150 travaux d'intérêt général car c'est mieux d'être au boulot que d'être en prison, mais au boulot à condition que cela respecte, car la prison est très souvent un lieu de contagion des pratiques ou des attitudes les plus détestables et, par ailleurs, oui, je pense qu'il y a un très gros travail d'éducation à faire dans les collèges et les lycées et travail d'éducation populaire dans la rue pour que l'on n'accepte plus de se résigner.

Quand vous avez 15 jeunes gens dans une cité, qui sèment le bazar, qui participent à tous les trafics et qui défient la police, cela ne devrait pas pouvoir être accepté sans rien dire, cela ne doit pas.

C'est un impératif.

L'émission se termine, François Bayrou, question traditionnelle, mais qui est imposée par l'agenda de commémorations : faut-il commémorer le bicentenaire de la mort de Napoléon 1er ?

Oui, c'est une des grandes figures de la France.

On est perpétuellement soumis à une dérive qui est que l'on veut juger les figures de l'histoire à l'aune ou avec les critères de notre actualité.

Alors, franchement, si vous prenez Henri IV que j'aime tendrement, comme vous savez, si vous prenez Louis XIV, si vous prenez Napoléon, oui, avec les critères d'aujourd'hui, il y aurait bien des choses à leur reprocher, bien des scandales qui pourraient faire les tabloïds et probablement des protestations fondées sur la manière dont il voyait les femmes.

Est-ce que pour autant ce sont des gens qu'il faut écarter et effacer de la route ? C'est stupide.

Et pourtant il n'y a pas de rue Napoléon à Pau. Il n'y en aura pas ?

Je n'ai pas réfléchi à cela.

Vous pourriez mettre cela à délibération du prochain Conseil municipal, et n'y en a quasiment pas en France.

Je vous promets que je vous consulterai sur la dénomination des rues à Pau !

Je serai au rendez-vous !

Merci.

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