John Stuart Mill : De l'assujettissement des femmes (1869)

8 mars

Dès le XIXe siècle, le penseur libéral anglais John Stuart Mill publie The subjection of women (De l'assujettissement des femmes), un essai vibrant en faveur de l'égalité des sexes. Mill plaide notamment pour le droit de vote féminin. Une pensée originale et libre de toute étiquette (Mill se disait à la fois démocrate, socialiste, conservateur), attachée à la représentativité de toutes les opinions et de toutes les catégories de la société.

John Stuart Mill combat fermement les pouvoirs arbitraires et toutes les formes de domination. Condamnant l'aristocratie de son temps, pourtant plus ouverte qu'en France, il se réjouit de la naissance de la démocratie. à l'instar d'Alexis de Tocqueville, avec lequel il correspond, Mill réfléchit au meilleur mode de fonctionnement envisageable pour le gouvernement représentatif et nourrit certaines inquiétudes. Ainsi, la "tyrannie de la majorité" risquerait d'étouffer les voix des minorités. John Stuart Mill estime que la démocratie ne peut accomplir sa promesse d'égalité sans pluralisme. Aussi préconise-t-il une représentation parlementaire de type proportionnel, pour une prise en compte réelle de toutes les opinions présentes dans la société.

En 1859, Mill écrit On Liberty (De la Liberté), une véritable ode à la liberté, qui échappe à toute définition réductrice. L'excentricité, la singularité sont valorisées, et le conformisme est décrit comme un épouvantail. Dix ans plus tard, c'est une défense exaltée de l'égalité que propose John Stuart Mill avec The subjection of women (De l'assujettissement des femmes). Et le sujet des inégalités criantes entre femmes et hommes hante en effet Mill depuis longtemps. Après une enfance solitaire et extrêmement studieuse, sous l'enseignement de son père, l'utilitariste James Mill, le jeune homme connaît une dépression. Amoureux d'une femme mariée, il attend patiemment, platoniquement. Veuve, Harriet Taylor devient ensuite son épouse et sa partenaire de discussion. John Stuart Mill ne cesse de répéter ce que sa pensée lui doit. Dans De l'assujettissement des femmes, il explore un paradoxe : quelques femmes de génie existent, alors qu'il leur a été si difficile de s'instruire dans une société qui les cantonne aux tâches domestiques. C'est donc qu'elles possèdent encore davantage de ressources que les hommes. Dans cet essai progressiste, John Stuart Mill défend également le suffrage pour les Noirs, assujettis au même type de domination injuste.

Dispenser une éducation universelle implique que les individus y aient également accès, sans que les inégalités, sociales ou de sexe, constituent un obstacle. John Stuart Mill est bien conscient de ce que les conditions égales d’accès ne sont pas encore réalisées. C’est à la société de considérer le problème et de faire en sorte que tous se trouvent placés dans des conditions satisfaisantes pour pouvoir développer leurs facultés. Il se refuse à envisager que la société ne veuille pas instaurer l’égalité des chances. En effet, elle agirait alors sciemment contre ses propres intérêts. Imprégné des conceptions utilitaristes, Mill veut croire que la société recherche le bien commun. "L’enseignement universel" est ainsi conçu comme le point de départ nécessaire au progrès politique.

La valeur la plus haute aux yeux de Mill est bien la liberté, qui permet aux facultés individuelles de s’épanouir. Aussi, une éducation accessible à tous donnerait à chacun les moyens de devenir véritablement autonome. Mill n’affirme pas que tous parviendraient ainsi au même niveau intellectuel. Néanmoins, il soutient que chaque individu, homme ou femme, peut se perfectionner, quand même cet effort finirait par éprouver sa limite. Si les conditions d’accès étaient les mêmes pour tous, les inégalités qui résulteraient alors de l’enseignement ne traduiraient pas les inégalités sociales. Elles ne témoigneraient pas non plus seulement des seuls écarts d’intelligence, mais également de la différence de motivation et de volonté dont les individus auront fait preuve pour s’élever. L’essentiel est bien qu’ils aient fait tout leur possible pour développer des facultés dont personne ne saurait déterminer a priori si elles sont grandes ou limitées. John Stuart Mill, dans son autobiographie, a ainsi cette formule frappante : « L’élève auquel on ne demande jamais que ce qu’il peut faire ne fera jamais tout ce qu’il peut. »

C’est d’ailleurs là un argument brillant pour défendre le suffrage des femmes : comment affirmer que les femmes sont intellectuellement inférieures aux hommes, alors que la société n’a jamais permis que les deux sexes se trouvent placés dans les mêmes conditions ? Considérant les obstacles qu’ont eu à surmonter les femmes pour s’imposer, la moindre qualité de l’éducation reçue, les œuvres que certaines d’entre elles ont déjà réalisées laissent entrevoir de réelles potentialités.

Par « éducation », Mill n’entend pas seulement l’apprentissage dans les livres, mais il comprend également la participation politique. La citoyenneté n’est pas un titre, mais une pratique dont l’exercice permet de mieux comprendre la vie politique. La participation est bien une forme d’éducation, ses effets se faisant tout particulièrement sentir au niveau local.

Lire aujourd'hui cet essai percutant de 1869 nous rappelle que le combat pour l'égalité entre les femmes et les hommes possède une histoire, qu'il nous revient de prolonger.

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