La solidarité entre les générations: auditions de Jean-Marie Vanlerenberghe, Jean-Marie Beaupuy, Alice Le Moal, Christian Vannobel, François-Xavier Pénicaud

La question démographique est essentielle. Les générations ne peuvent être séparées les unes des autres. La crise a révélé de manière aiguë le problème du grand-âge. Penser l’enchaînement des cycles, de la naissance à la mort, demeure essentiel. Olivia Leboyer et Raphaël Liogier ont auditionné dans Université 133 : le sénateur Jean-Marie Vanlerenberghe (rapporteur général aux Affaires sociales), l’ancien député européen Jean-Marie Beaupuy, la secrétaire générale adjointe du Mouvement démocrate et élue locale Alice le Moal, le maire de Sissonne Christian Vannobel et le conseiller régional Auvergne Rhône-Alples François-Xavier Pénicaud.

Olivia Leboyer (docteur en science politique, Sciences po, coordinatrice d’Université 133) a souligné la chaîne des temps qui unit les générations, de la naissance à la mort. Auguste Comte concevait la société dans sa totalité : nous avons une responsabilité envers nos contemporains, envers les générations à venir, mais aussi envers nos morts. Et, dans sa pensée, c’est la famille qui forme le socle de la société. Raymond Aron, libéral et de sensibilité centriste, a beaucoup médité sur la temporalité de Comte. Plus directement inspirateur du centre, le solidarisme de Léon Bourgeois échafaude une théorie d’ensemble des droits et des devoirs en société. Chaque citoyen contracte ainsi envers ses ancêtres et envers ses contemporains une dette sociale. Plus tard, Pierre Laroque, fondateur de la sécurité sociale, dira « l’interdépendance entre tous est et doit être la base d’une solidarité consciente ». Notre société a tendance à tenir la mort à distance : le corps même des morts n’occupe plus autant de place que par le passé. Et la solidarité familiale, souvent spontanée, est encore trop peu visible et peu reconnue. Raphaël Liogier(sociologue, professeur à l’Université d’Aix-Marseille) remarque que, dans les sociétés traditionnelles, en effet, la question de la solidarité ne se posait pas, il y avait une évidence. Aujourd’hui, avec la spécialisation du travail et l’industrialisation, nous avons besoin de mécanismes de redistribution. Aussi doit-on réfléchir à une solidarité qualitative. Les personnes âgées peuvent constituer une richesse. Et la retraite, trop souvent, donne aux personnes une impression d’inutilité et les exclut.

C’est à l’arrière de sa voiture, sur le trajet Arras-Paris, que Jean-Marie Vanlerenberghe répond à nos questions. Notre modèle ne fonctionne pas bien, si l’on réfléchit en termes d’argent seulement, et pas d’efficacité. La crise rend caduque le débat sur les retraites. Or, le problème des travailleurs pauvres se pose. Jean-Marie Vanlerenberghe nous livre ses réflexions sur le revenu universel, qu’il faudrait expérimenter. Raphaël Liogier approuve, et rappelle que nous avons débattu longuement de ce sujet lors de notre précédent atelier avec Sarah El Haïry. La question fiscale est la clé de cette question. Car le financement doit être défini. Jean-Marie Vanlerenbergue propose un financement par les paiements scripturaires. Il faut repenser le modèle social.

Jean-Marie Beaupuy revient sur l’enchaînement des temps, passé-présent-avenir. C’est sur le long terme que le politique doit envisager les questions. La cellule familiale est le noyau de la vie de chacun. En Grèce, lors de la dernière crise, le pays tenait par ses solidarités familiales, mieux préservées que chez nous. Jean-Marie Beaupuy approuve l’idée d’expérimentation proposée par le sénateur du Pas-de-Calais. Il souligne également l’importance de la notion de responsabilité, très présente du temps de l’UDF, moins employée aujourd’hui, et qu’il faut réactiver. Tout comme le personnalisme d’Emmanuel Mounier. Un point central est la question de l’équilibre. Sans oublier le caractère spirituel du lien entre les générations, entre la vie et la mort.

Alice Le Moal est à la fois conseillère municipale de Clichy et conseillère départementale des Hauts-de-Seine. C’est en élue locale qu’elle nous expose les réalités du tissu associatifles initiatives qu’il faut encourager. La lecture dans les écoles, l’aide aux seniors, aux handicapés. Dans les solidarités, l’accompagnement est une phase essentielle. Le plan anti-solitude mis en place à Pau peut servir de modèle pour d’autres villes. La solitude est le mal du temps, qui touche les personnes âgées, mais aussi les jeunes. Alice Le Moal mentionne un dispositif public qui lui est cher : le service civique, créé en 2010 et dont elle a été parmi les premiers bénéficiaires.

Christian Vannobel est maire de Sissonne (Hauts-de-France), 2200 habitants et médecin. Le mot « distanciation sociale » sonne tristement pour lui. Car, dans sa commune, il cherche à établir des liens solides entre les concitoyens. Il nous détaille un arsenal de dispositif, véritable laboratoire d’idées : mise en place d’une mutuelle communale, activités périscolaires, création d’une maison sociale, transformation de la petite bibliothèque en un tiers lieu, plus vaste, lieu de vie et d’échange. Et cette belle idée, qui ne coûte que 4000 euros par an à la mairie : la cantine à 1 euro par jour pour les 80 enfants qui en bénéficient. Intrégrer les quelque 60 réfugiés, en majorité Africains, en les accueillant dignement, est indispensable. Christian Vannobel a également mis en place une délégation environnement et transition énergétique, ainsi qu’une commission sécurité pour prévenir les problèmes de délinquance.

François-Xavier Pénicaud, à l’échelle régionale quant à lui, livre un diagnostic : il est nécessaire de penser les solidarités à un niveau global. Prenant un pot à eau, il expose avec clarté la manière dont on le remplit de cailloux, sable et eau pour faire tenir le tout sans que cela déborde. L’Etat-Providence ne peut pas tout. C’est au niveau des interactions interindividuelles, avec ses voisins dans cette période de crise, que les solidarités peuvent se nouer efficacement. Candidat à Bron, François-Xavier Pénicaud nous explique que les jeunes, souvent en déshérence, ne souhaitent pas s’entendre demander ce dont ils ont besoin. Ils veulent qu’on leur demande quel est leur potentiel, en quoi ils peuvent être utiles. Oui, intervient Raphaël Liogier, ce qu’il y a de remarquable au Mouvement démocrate, c’est cela : On ne donne pas aux gens une vie clé en main, mais on leur donne les moyens de désirer ce qu’ils veulent devenir. Olivia Leboyer renchérit : c’est le sens d’un libéralisme bien compris, liberté et responsabilité. François-Xavier Pénicaud soulève également la question des seuils d’âge, délicats à fixer.

Très riche, la discussion s’enchaîne avec Blandine Chelini-Pont (professeur d’Histoire contemporaine à l’Université d’Aix-Marseille) qui compare la situation française à celle des Etats-Unis, autrement critique. Puis c’est au tour du député et psychiatre Brahim Hammouche de nous livrer ses réflexions sur les cycles de vieet sur les notions de fraternité et de solidarité, qu’il convient de bien distinguer.

La fraternité s’éprouve, là où la solidarité, ou les solidarités, se construisent ensemble. Et l’atelier se clôt avec cette idée d’un Mouvement démocrate où la liberté se couple avec la responsabilité, pour des solidarités de justice, tournées vers le bien commun.

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