Justine Bénin : "Notre inquiétude est grande sur la situation en Outre-mer : nous ne nous battons pas à armes égales avec l’Hexagone contre le COVID-19"

Justine Bénin
(© Assemblée nationale)

Justine Bénin est députée de la Guadeloupe. Elle met en lumière les difficultés spécifiques auxquelles font face les territoires d'Outre-mer en cette crise sanitaire du Covid-19, et plus spécifiquement dans sa circonscription. 

Mouvement Démocrate - Quelle est à ce jour la situation épidémique des territoires d’Outre-mer et en particulier de la Guadeloupe dont vous êtes députée? 

Justine Bénin - Nous comptons plus de 1 000 cas diagnostiqués sur l’ensemble des Outre-mer, avec 145 hospitalisations dont 44 en réanimation (chiffres du 8 avril). Sur mon territoire de Guadeloupe, le seuil épidémique a été franchi il y a deux semaines : nous comptons 141 contaminations, avec 21 hospitalisations dont 13 en réanimation, et nous déplorons 8 décès aujourd’hui. Notre inquiétude est grande sur la situation en Outre-mer : nous ne nous battons pas à armes égales avec l’Hexagone contre le COVID-19.

Nous manquons de personnels soignants, de matériels de protection, de respirateurs…

La priorité aujourd’hui, c’est que le confinement soit strictement respecté par tous dans nos territoires, car nous avons plusieurs semaines d’avance sur l’épidémie par rapport à l’Hexagone. Cela doit nous permettre d’éviter que le virus ne se propage davantage, pour empêcher la vague de patients présentant des formes graves dans nos établissements de santé.

Justement, avez-vous des inquiétudes concernant l’approvisionnement en matériel des personnels soignants et les équipements des établissements de santé ?

Notre système de santé est déjà très fragilisé, depuis l’incendie du CHU il y a deux ans. Il faut que nous soyons plus armés pour affronter l’épidémie. C’est pour cela je travaille depuis plusieurs semaines en lien permanent avec les élus locaux, le CHU de Guadeloupe, les établissements médico-sociaux, les aides à domicile et l’agence régionale de santé, pour identifier les besoins et les priorités. À ce titre, j’ai pu échanger avec le ministre des Solidarités et de la Santé, Olivier Véran, afin de lui demander du matériel de protection supplémentaire et des respirateurs en plus pour la Guadeloupe. Nous recevrons dans les prochains jours davantage de moyens pour faire face à l’afflux de patients au CHU. Des professionnels de santé de la réserve sanitaire sont également venus en renfort des personnels soignants de Guadeloupe. Ce sont des signaux positifs, mais il faut aller plus loin, pour que notre système de santé sur place, déjà très fragile avant la crise, soit mieux armé pour affronter l’épidémie.

Quelles conséquences économiques et sociales craignez-vous pour ces territoires dépendant en grande partie du tourisme? Quelles réflexions faut-il mener selon vous pour préparer "l’après" dans les territoires d’Outre mer?

À la crise sanitaire s’ajoute une crise économique et sociale dont on voit déjà les effets extrêmement graves sur nos entreprises, en particulier dans les Outre-mer. En Guadeloupe, le tissu économique est composé pour 95% de TPE, d’artisans, de commerçants. Par ailleurs, le tourisme, l’hôtellerie et la restauration font vivre des milliers de personnes sur notre territoire. Les mesures de confinement ont donc mis en grande difficulté toutes leurs activités, et ils menacent aujourd’hui leur survie. Le Gouvernement a mis en place des outils intéressants pour soutenir nos entreprises et nos indépendants, toutefois, ils s’appliquent mal en Outre-mer. Par exemple, le Fonds de solidarité qui permet aux indépendants et aux TPE de bénéficier de 1 500 € pour le mois de mars est conditionné au fait d’être à jour du paiement des charges sociales et fiscales. Or, en Guadeloupe, beaucoup de TPE ne remplissent pas cette condition, compte tenu des retards de paiement des créances et des problèmes de trésorerie ! Je travaille depuis maintenant trois semaines pour que le Gouvernement mette en place des dispositifs de soutien renforcés et adaptés pour nos territoires. La crise actuelle ne doit pas être une difficulté de plus, la difficulté de trop, pour nos Outre-mer qui subissent déjà un chômage bien plus élevé que l’Hexagone, et un niveau de vie plus faible. Il faut faire plus pour ceux qui ont moins, en pensant dès maintenant au redémarrage de nos économies et en refondant tous nos modèles.

Sur le long-terme, l’épidémie de COVID-19 devra irrémédiablement nous interroger sur le monde que nous voulons pour demain.

Quel modèle de développement social et économique ? Quelle protection pour les plus fragiles ? Quelles solidarités entre les territoires ?

En parallèle de la gestion de la crise au quotidien sur le terrain, je travaille d’ores et déjà sur des propositions concrètes pour nos Outre-mer. Nous devrons inévitablement repenser l’action publique dans nos territoires pour réussir, enfin, le développement économique et social que nous appelons tous de nos vœux pour les ultramarins.

Il faudra nécessairement poser la question de la gouvernance des territoires, et en cela, la gestion de la crise par certains territoires devra nous guider. Je pense par exemple à Marie-Galante, à Saint-Barthélemy…  Les réponses que nous apporterons à la crise sanitaire, économique et sociale devront irrémédiablement être territorialisées, y associant les populations, pour qu’elles soient efficaces, adaptées et ambitieuses.

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