Christophe Grudler : "Faire de la France une championne de l’hydrogène décarboné" 

Christophe Grudler
(© Parlement européen)

Convaincu que l'hydrogène est une énergie d’avenir, l'eurodéputé MoDem Christophe Grudler - membre de la Commission de l'industrie, de la recherche et de l'énergie au Parlement européen - analyse le plan hydrogène présenté par le Gouvernement français. 

Mouvement Démocrate - Les 7.2 milliards d’euros d’investissements prévus pour l’Hydrogène sont-ils selon vous une première étape décisive dans le cadre de la transition énergétique ?

Christophe Grudler - Oui, incontestablement. La transition énergétique occupe une place importante dans le plan de relance présenté par le gouvernement. 7 milliards consacrés au développement de l’hydrogène décarboné d’ici 2030, c’est un investissement sans précédent, permettant de développer rapidement cette énergie.

Pour atteindre la neutralité carbone, il faut non seulement une réduction de la consommation d’énergie, mais aussi de nouvelles énergies pour accélérer la transition : c’est l’objectif de la production d’hydrogène vert. Grâce à ce procédé, la France pourrait passer d’une production d’énergie reposant à 94% sur les énergies fossiles à une production décarbonée.

Comment le plan hydrogène annoncé et les 7.2 milliards d’euros investis pourra-t-il permettre d’aller plus loin dans la transition énergétique ?

La stratégie hydrogène annoncée par le Gouvernement français s’articulera autour de trois objectifs visant à soutenir la transition énergétique.

Tout d’abord, au travers de la décarbonation de l’industrie, notamment grâce à la production d’hydrogène propre. L’objectif fixé est une capacité de production d’hydrogène décarboné de 6.500 Mégawatts d’ici 2030.

La technologie est également prometteuse grâce à sa capacité de stockage de l’énergie, ce qui est très intéressant en lien avec les énergies renouvelables (éolien, solaire …). On devrait pouvoir utiliser le surplus d’énergie produite par les énergies renouvelables afin de produire de l’hydrogène et stocker ce gaz pour un usage ultérieur.

Ensuite, la priorité est de développer l’offre de mobilité hydrogène, en particulier pour les transports « lourds ». Cela permettra de réduire les émissions générées par le secteur des transports, et d’économiser plus de 6 millions de tonnes de CO2 d’ici 2030.

Finalement, le dernier volet porte sur la construction d’une filière industrielle créatrice d’emplois verts, notamment dans les territoires.

Tous ces aspects devraient jouer un rôle fondamental pour atteindre les objectifs climatiques fixés à la fois au niveau français, mais aussi au niveau européen.

Cette somme est-elle suffisante ?

En matière d’innovation, et tout particulièrement dans le domaine de l’énergie, les investissements ne sont jamais suffisants. On peut en cependant se féliciter de l’adoption de ce plan d’une ampleur inédite ! 2 milliards d’euros seront mobilisés dès 2020 dans le cadre du Plan de relance, qui viendront compléter une enveloppe globale de 7.2 milliards d’euros d’ici à 2030.

Cette somme permettra de mettre en œuvre des actions ambitieuses pour développer la filière hydrogène française, à la fois en terme de production d’hydrogène (électrolyseurs), mais aussi de son utilisation dans un ensemble de secteurs clés (transports, bâtiment, aéronautique, industrie).

Cependant, les investissements dans le secteur de l’énergie doivent être à la hauteur de nos ambitions climatiques. Ce plan est un premier signal positif en faveur du développement d’une filière hydrogène française forte et compétitive, ainsi que pour donner de la visibilité à l’ensemble de ses acteurs. Nous ne devons pas relâcher nos efforts, notamment pour le développement des énergies renouvelables. Il faudra continuer sur cette lancée et je suis personnellement engagé pour soutenir le développement de cette filière à la fois au niveau français et européen.

Qu’est-ce que l’hydrogène vert ?

L’hydrogène vert est un gaz fabriqué à partir d’eau et d’électricité issues d’énergies renouvelables, au travers d'un processus appelé « l'électrolyse de l'eau ». On l’oppose à l’hydrogène « gris » qui lui est produit à partir d’énergies fossiles. Ce procédé technologique permet une production d'hydrogène dit « décarboné », car ni sa production ni son utilisation n'émettent de CO2, si la source d’électricité utilisée est-elle même décarbonée ou renouvelable (éoliennes, panneaux solaires, hydroliennes…)

Quelles opportunités de collaborations voyez-vous au niveau européen afin de développer la filière hydrogène ?

J’en vois beaucoup, et c’est d’ailleurs la raison pour laquelle je m’implique énormément au travers de mon mandat de député européen pour soutenir le développement de cette énergie d’avenir ! Je me réjouis de voir que la stratégie française s’inscrit pleinement dans une dynamique européenne, en conformité avec les objectifs annoncés par la Commission européenne dans le cadre de sa Stratégie Hydrogène de juillet 2020. La France est également particulièrement active au sein de l’Alliance Européenne pour l’Hydrogène, qui réunit les acteurs européens de l’ensemble du secteur de l’hydrogène afin de mettre rapidement en œuvres des projets de grande ampleur.

Le Plan hydrogène adopté devrait permettre de renforcer les liens avec nos partenaires européens et de développer ensemble des projets ambitieux. Dès 2021, le gouvernement construira un Projet Important d’Intérêt Européen Commun (PIIEC) sur l’hydrogène, sur le modèle de ce qui a été fait dans le cadre de l’Alliance Européenne des batteries. Ce projet concernera l’ensemble de la chaine de valeur au niveau européen.

De nombreuses entreprises françaises et européennes sont à la pointe de la technologie dans ce domaine et ont les capacités de produire de l'hydrogène propre. Je suis convaincu qu’en travaillant de concert au niveau européen, nous pourrons acquérir et développer un avantage compétitif dans le secteur de l’hydrogène, et ainsi faire face à la concurrence étrangère en provenance des États-Unis et de la Chine.

À ce titre, je tiens à souligner qu’il est indispensable de renforcer la collaboration entre chercheurs européens, en facilitant les coopérations industrielles, ainsi qu’en développant nos financements, par exemple avec le programme européen Horizon Europe.

Peut-on parler de la France comme d’un futur leader dans le domaine de l’hydrogène au niveau européen et mondial ?

Bien sûr ! Le plan hydrogène présenté montre d’ailleurs à quel point le Gouvernement est volontariste dans ce secteur et je pense sincèrement que nous sommes sur la bonne voie pour être demain l’un des leaders dans ce secteur. Aujourd’hui déjà, la France dispose d’un écosystème industriel et de recherche très actif, avec plusieurs entreprises prometteuses et qui ont vocation à devenir demain des champions européens et mondiaux.  

Nous assistons à une montée en puissance rapide de la filière, qui rassemble des entreprises présentes sur l’ensemble de la chaine de valeur : production d’hydrogène (Air Liquide, EDF, Engie…) et de stations (McPhy, Atawey), d’équipements pour les véhicules (Symbio, Plastic Omnium, Faurecia…), de constructeurs (Renault, PSA, Safran…) et d’opérateurs (Michelin). Sans compter les nombreuses start-ups dans le domaine.

C’est un secteur d’activité stratégique qui intéresse également beaucoup les collectivités. Elles manifestent un intérêt fort et investissent pour accompagner le déploiement de cette technologie, ce qui est une très bonne nouvelle. Le plan de relance constitue une opportunité de leur donner l’élan nécessaire. L’ambition autour de ce plan est de faire de la France un champion de l’hydrogène décarboné, tout en assurant notre souveraineté industrielle et énergétique européenne.

L’Allemagne est-elle selon vous le modèle à suivre ?

Dans le domaine de l’hydrogène, la France et l’Allemagne partagent la même ambition, et travaillent de concert. Ainsi nos voisins allemands ont présenté un plan de 9 milliards consacré à cette technologie, ce qui est juste derrière la France en rapportant ce montant au PIB.

On ne peut que se réjouir de voir de telles ambitions naître au niveau européen. Un train à hydrogène est déjà en circulation en Allemagne depuis deux ans, et des trains zéro émissions seront bientôt en circulation dans plusieurs régions Françaises également (Auvergne-Rhône-Alpes, Bourgogne-Franche-Comté, Grand Est et Occitanie). Les bus à hydrogène ont également le vent en poupe en France. Nous avons surtout de nombreuses opportunités de partenariats européens notamment à travers des PIIEC (Projet Important d’Intérêt Européen Commun), qui sont des projets de coopération européens, souvent transfrontaliers. Seule une vraie coordination européenne permettra un leadership dans ce secteur, et c’est ce à quoi nous travaillons.  

À qui profiterait le développement d’une filière hydrogène en France ?

A tout à notre tissu industriel évidemment : de la TPE à la grande multinationale en passant par les PME ! Le développement de la filière hydrogène en France profitera bien sûr aussi à l’emploi local.

Dans le secteur de l’industrie lourde, notamment celui des transports (aérien, ferroviaire, automobile, ...), la réduction des émissions de CO2 est à la fois un défi, mais aussi une opportunité. L’industrie étant le premier consommateur d’energie, le développement de la filière hydrogène permettra de remplacer les procédés de production basés sur les énergies fossiles à l’heure actuelle notamment dans les secteurs du raffinage, de la chimie et le secteur de l’électronique.

L’industrie sera aussi au cœur du développement d’une filière française de l’électrolyse, où l’on dispose déjà d’un fort potentiel industriel.

Le développement d’une filière hydrogène française permettra aussi de développer de nouveaux emplois locaux et non délocalisables. En effet, puisque la production et la distribution d’hydrogène se fera dans les territoires, cela créera de nouveaux emplois.

Enfin, si nous avons davantage de véhicules hydrogènes, cela signifie moins d’émissions de polluants issus des moteurs thermiques, ce qui serait une bonne nouvelle pour nos poumons !

Comment le développement de l’hydrogène peut-il participer à la relance française et notamment industrielle ?

Je suis convaincu que le développement de la filière hydrogène jouera un rôle important pour accélérer la réindustrialisation de la France. Grâce à ces investissements, nous pourrons développer nos capacités de production dans ce domaine, mais aussi accélérer la recherche et le développement. De plus, l’hydrogène sera produit localement et réduira notre dépendance aux importations d’hydrocarbure depuis l’étranger : cela aura un impact important sur notre balance commerciale.

Finalement, le plan hydrogène français permettra la création de nombreux emplois (jusqu’à 100.000 d’ici 2030), ce qui est crucial dans le cadre de la relance de l’économie et la sortie de crise.

Quels sont les obstacles qui existent à l’heure actuelle pour le développement de la filière hydrogène française ?

Je vois deux difficultés principales à l’heure actuelle, mais que nous sommes en mesure de résoudre.

D’une part, se pose le problème des coûts. L’hydrogène par électrolyse est une technologie prometteuse, mais le coût de fabrication des électrolyseurs reste encore élevé. La solution est de faire des économies d’échelles : ce plan hydrogène présenté par le Gouvernement y contribuera grandement.

D’autre part, le rendement de la production d’hydrogène pourrait être amélioré. On a aujourd’hui une perte d’environ 60% d’énergie au cours de la production puis de la transformation de l’hydrogène en électricité. La stratégie hydrogène française et les moyens investis au niveau européen permettront d’y remédier en soutenant la recherche et l’innovation afin d’améliorer le rendement. À ce titre, je suis entièrement mobilisé au Parlement Européen pour défendre le budget d’Horizon Europe, le programme européen qui finance la recherche. La proposition de budget faite en juillet pour ce programme est décevante. Les députés européens mobilisés sur les questions de la recherche et de l’innovation n’ont pas dit leur dernier mot et nous allons continuer de défendre un financement à la hauteur de nos ambitions !

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