Refondation de l'école : "La réforme ne réussira que si le ministre reste cinq ans !"

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Dans une semaine, l'Assemblée nationale débattra du projet de loi portant sur la Refondation de l'école. Si les rythmes scolaires ont fait la Une de l'actualité, l'essentiel de la réforme reste méconnu du grand public. Pierre Maurel, Inspecteur général de l'administration de l'Éducation nationale et de la Recherche honoraire et Conseiller national du Mouvement Démocrate, en détaille les points forts.

Une énième réforme était-elle vraiment indispensable ? 
Pierre Maurel - Notre pays ne cesse de reculer dans les classements internationaux et, enquête après enquête, force est de constater que le niveau de nos élèves baisse. Quarante pour cent quarante pour cent de ceux qui arrivent en classe de 6e - 300.000 enfants environ - ne maîtrisent pas vraiment la lecture, l’écriture et le calcul, certains même rencontrant des difficultés très sévères. De plus, 150.000 adolescents sortent chaque année du système scolaire sans diplôme et sans qualification. En résulte un immense gâchis social et économique, mais avant tout humain. Rendons-nous compte de l'humiliation ressentie par ces dizaines de milliers d'enfants qui ne possèdent pas les fondamentaux et qui vont devoir faire une scolarité en collège dans les pires conditions ! Le Mouvement Démocrate n'a eu de cesse d'alerter sur cette situation. Alors, oui, il fallait bouger. 

La priorité semble être donnée à l'école primaire, pourquoi ? 
Les coupes budgétaires pratiquées ces dernières années ont affecté plus nettement le primaire que le secondaire. Sur cette tranche d'âge, nous dépensons 1.000 euros de moins par an et par élève que la moyenne des pays de l'OCDE. La première action forte de ce texte de loi consiste à rattraper ce retard. C'est un point essentiel. Bien entendu, dans le contexte économique extrêmement grave qui est le nôtre, ces dépenses nouvelles devront se traduire par des économies en interne ou dans d'autres ministères. Il ne s'agit pas de dépenser plus, mais bien de redéployer les moyens. 

Pour lutter contre les inégalités, quelles mesures sont préconisées ? 
Les orientations redonnent aux parents plus d’espoir de scolariser leurs enfants dès deux ans en maternelle s’ils le souhaitent. Un glissement s'était produit ces dernières années : nous sommes passés de trente-trois pour cent d'enfants scolarisés dès deux ans, à seulement dix-huit pour cent, faute de moyens. Par ailleurs, dans les zones les plus défavorisées, il est proposé d'avoir plus de maîtres que de classes, c’est une mesure très importante. Ainsi, dans un cours préparatoire difficile, les enseignants pourront travailler en binôme et s'aider pour mieux repérer, aider et faire progresser les élèves les plus en difficulté. Enfin, autre orientation : réduire le stress que représente le passage du CM2 au 6e, pour les élèves fragiles. Le collège, c'est une autre dimension, un autre univers. Les jeunes passent d'un système à un professeur, à un système qui en compte dix ou onze. Il s'agit d'encourager les équipes pédagogiques à se rencontrer et à se parler, ce qui n'est souvent pas le cas aujourd'hui. 

Que devient le socle commun de compétences ? 
Il est maintenu et c'est une bonne nouvelle ! Nous avons entendu beaucoup de critiques à son propos parce qu’il serait d’inspiration trop néo-libérale. Tentons de regarder ce dossier sans parti pris idéologique. Le socle commun, c'est ce que doit connaître un élève à la fin de sa scolarité obligatoire, le bagage indispensable pour la femme ou l'homme du XXIe siècle. La nation doit vraiment s’engager à ce que cent pour cent de ses enfants soient munis de ce socle à la fin de leur scolarité obligatoire. Il ne doit évidemment pas s’agir d’un "SMIC culturel". Il faudra être exigeant et je suis sûr que le ministre y veillera au moment de l’élaboration des nouveaux programmes. 

Que devient la formation professionnelle des enseignants ? 
Pour des raisons idéologiques, le précédent gouvernement l'avait profondément déconstruite. Cela lui permettait aussi de tenir ses objectifs de suppressions de postes, sans être contraint de supprimer des classes. Le projet de Refondation de l'école assure la reconstruction de cette formation, au sein des universités et des futures écoles supérieures du professorat. Je salue particulièrement cette mesure qui une mesure phare. Elle doit garantir la qualité de la transmission des connaissances et des compétences à nos enfants. 

Pourquoi cette réforme réussirait-elle mieux que les précédentes ? 
C'est toute la question ! S j’ai peu de réserves sur les orientations du projet de loi, nous devrons nous montrer vigilants quant à leur mise en oeuvre. Mais nous ne sommes qu’au début du processus législatif et il nous faut attendre le texte définitif. Ensuite, il faudra examiner avec attention le contenu des nombreux décrets et arrêtés qui seront pris pour son application. Il restera enfin à veiller à une réelle mise en place dans les établissements et dans les classes. La réussite de cette réforme - comme toutes les réformes dans ce ministère - tiendra en grande partie à la stabilité ministérielle. Il faut que le politique garde la main, suive avec son équipe la réalisation des orientations sur le terrain grâce et mobilise tous les acteurs. Car il ne suffit pas de voter le texte, il faut ensuite le faire vivre ! J’ai vécu l’expérience de travailler avec trois ministres en trois ans à un moment où une loi d’orientation pour l’école était élaborée et votée. Cette succession des autorités ministérielles fait que le terrain ne sait plus trop s'il doit s'investir ou s’il doit attendre la prochaine réforme. C’est désastreux pour notre Ecole. Un ministre qui porte une profonde réforme comme celle qui se profile devrait être assuré de son maintien à la tête de son ministère pour la durée du quinquennat.

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