Portrait : "Marielle de Sarnez, de Giscard à Bayrou"

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Cette semaine, le magazine l'Hémicycle consacre un long portrait à Marielle de Sarnez, vice-présidente du Mouvement Démocrate, députée européenne et secrétaire générale du Parti démocrate européen.

"L’actuelle vice-présidente du MoDem n’a pas de modèle revendiqué en politique, mais des admirations tenaces pour des personnalités hors norme. Portrait d’une femme atypique.

Rencontrer Marielle de Sarnez dans l’ancienne imprimerie du 133 bis rue de l’Université – le siège très tendance du MoDem – c’est suivre le parcours atypique d’une femme libre d’esprit. « Je me suis faite moi-même », lance-t-elle sans forfanterie, de sa voix nette et douce. Une façon élégante de ne pas se reconnaître de modèle, mentor ou gourou. Pas même son père, Olivier Lebel de Sarnez (et dans Lebel, on entend rebelle), résistant à 16 ans, gaulliste de toujours, président depuis 2004 de l’Association nationale des médaillés de la Résistance française. « Je n’ai pas fait d’études après le bac », dit-elle d’un ton dépourvu de regrets. Pas d’Ena, pas d’héritage familial d’une mairie ou d’une prébende. On pourrait ajouter que Marielle de Sarnez n’avait pas besoin de fréquenter les grands corps de l’État ou les circuits ordinaires de la République. Elle est une « enfant de la balle » et se revoit, à 10 ans, crier à tue-tête «OAS,SS!» du haut du balcon de ses parents. Très tôt l’indépendance de l’Algérie lui a paru s’imposer. Il faut dire qu’à la table dominicale prenaient souvent place le ministre de l’Intérieur Roger Frey (dont son père fut directeur de cabinet) et ces barons du gaullisme que furent Olivier Guichard, Michel Debré ou encore Alexandre Sanguinetti. Sur les murs de la salle à manger trônait un portrait du général de Gaulle.

Le premier élu

À l’évidence, son destin politique s’est écrit dans cette conscience éveillée très tôt, celle du service de l’État. Même si en 1968, elle reconnaît avoir milité... à gauche. « J’étais élève au lycée La Fontaine, après avoir quitté Sainte-Marie. Nous sommes allés envahir le lycée de garçons Jean-Baptiste Say. »

Pas de modèle revendiqué pour Marielle de Sarnez, mais des admirations tenaces qui se traduisent par des engagements profonds, une mise à disposition intense de son énergie. Le premier « élu » de son cœur politique, c’est Giscard. Son bac en poche après les « événements » de mai, la jeune femme exerce mille petits métiers. Ladislas Poniatowski lui propose de rentrer comme secrétaire au mouvement des Jeunes républicains indépendants (JRI). Elle accepte. Le futur Président incarne la modernité qu’elle recherche. En 1974, elle fera sa campagne « avec enthousiasme », animée du sentiment enivrant que les temps basculent. « Avec lui, j’ai eu l’impression qu’on passait du noir et blanc de Peyrefitte à la télé en couleur. VGE apportait un nouveau style. Il se montrait avec sa fille sur ses affiches officielles. Il prônait une réelle modernité sociale, la lutte contre les inégalités. En opposition avec les gaullistes de l’UDR. » Si elle ne perd pas de vue qu’il était un homme de droite, « l’image de sa jeunesse brouillait cela ». Et de souligner ce qui, chez Giscard, la motiva : « Rassembler deux Français sur trois, légaliser l’interruption volontaire de grossesse, ramener le droit de vote à 18 ans, j’étais d’accord avec tout ça ! »

« Génération sociale et libérale »

L’actuelle vice-présidente du Mouvement démocrate se souvient d’avoir lutté pour imposer le mot « social » dans le slogan de la campagne giscardienne : « Génération sociale et libérale ». Et elle n’a pas oublié qu’un homme lui cracha à la figure, pendant qu’elle circulait en France dans la caravane aux couleurs de son champion d’alors. « VGE avait serré la main à un détenu encore non jugé. Il avait transgressé. » Avec le recul, Marielle de Sarnez regrette que Giscard ne soit pas allé plus loin sur deux dossiers : l’abolition de la peine de mort et la libéralisation des radios libres. « Il a fini son septennat à rebours de ses débuts, otage des gaullistes. »

Le lien se distendra en 1988 entre l’ancien Président et Marielle de Sarnez, qui a pris fait et cause pour Raymond Barre, dont elle animera la campagne. « VGE m’en a voulu. Il n’acceptait pas qu’un autre que lui défende son camp »... La jeune femme organisera une gigantesque fête de la Liberté, pendant de la fête de l’Humanité, qui rassemblera plus de cent mille personnes. Mais elle mesure combien Barre reste avant tout un professeur d’université. « Il était très attachant et rassurant, avec ce slogan “Barre Confiance”. Il avait en revanche une véritable incapacité face au monde politique. » Elle se souvient que les Madelin, Léotard, Longuet et consorts préféraient l’échec de Barre et la victoire de Chirac. Elle en tire une leçon rude pour le centre : « On trahit toujours. On se diminue soi-même en cherchant la protection du tout-puissant. Je refuse ce comportement. Il signifie qu’on ne croit pas en nous, à notre singularité. »

Hors norme

Deux personnalités hors-norme vont encore la marquer avant la destinée commune, avec ses très hauts et ses très bas, avec François Bayrou. Ce sera d’abord Simone Veil, « atypique, fragile, très entière et courageuse, bousculant les codes ». Elle lui voue une grande reconnaissance d’avoir porté cette loi sur l’avortement, d’avoir « tenu bon », malgré la violence des débats. « On l’a traitée d’avorteuse. Un député est venu dans l’hémicycle avec un bocal rempli de fœtus »...

L’autre figure est Jean Lecanuet, qu’elle éclaire d’un jour inattendu. Plus jeune agrégé de France (en philosophie) à 22 ans, « il était plein d’amertume. Il pensait qu’il avait raté une autre vie, vouée à l’écriture. » François Bayrou, c’est précisément dans l’orbite de Lecanuet qu’elle le rencontra. Le jeune leader du CDS (Centre des démocrates sociaux) était rédacteur en chef de la revue Démocratie moderne. « Pour moi, les hommes politiques importants sont ceux qui sont capables de penser par eux-mêmes, qui écrivent leurs discours, qui écrivent tout court, loin des communicants », explique Marielle de Sarnez. « Ils lisent des livres, aiment le débat d’idées, les discussions de fond. » Nul doute que cette lectrice assidue d’Arthur Miller, de Blaise Cendrars, de Malcolm Lowry et de Lawrence Durrell – « des écrivains qui sont de plain-pied dans la vie, dans l’humain » – trouve auprès de François Bayrou cette profondeur. « Personne n’a fait ce qu’il a fait, conclut-elle. Il refuse les préjugés politiques, ne s’arrête pas à l’étiquette sur le front de l’autre. » Et d’appeler de ses vœux, éternel credo, l’avènement d’un centre étendu « de la droite modérée à la social-démocratie pour gouverner la France ». Une configuration qu’elle voit poindre en Allemagne. Qu’elle continue d’espérer avec Bayrou."

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