"On peut être ferme sur des principes républicains et laïcs sans rentrer dans des polémiques"

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Invité de Sud Radio ce midi, Marc Fesneau, secrétaire général du MoDem, a apporté son analyse sur la levée de l'immunité parlementaire de Patrick Balkany, la division permanente de la gauche française et la suppression du menu de substitution dans les cantines d'une commune UMP.

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L’info du jour : la levée de l’immunité parlementaire de Patrick Balkany. Le député-maire UMP de Levallois-Perret qui dénonce un déferlement de mensonges, qui se dit « jeté aux chiens », mais qui ne démissionnera pas, quel regard portez-vous sur cette affaire, Marc Fesneau ?

D’abord c’est une affaire qui traine un peu en longueur puisque cela fait des années que l’on en entend parler. Deuxième élément : la présomption d’innocence est valable pour tout le monde. Ce qui est intéressant dans la démarche des parlementaires, c’est qu’ils ont levé l’immunité c’est-à-dire qu’ils permettent à la justice de continuer son œuvre et son travail, c’est cela le principal. Ensuite je n’ai pas très envie de commenter le fond du dossier parce que je pense – même si nous sommes des adversaires de Patrick Balkany depuis des années dans sa commune, dans son territoire – que ce n’est pas pour autant qu’il ne faut pas respecter la justice dans son fonctionnement. En même temps, reconnaissons que Patrick Balkany – au-delà de cela, y compris dans ses expressions, au-delà de ce pour quoi il a à subir des enquêtes – a des attitudes très loin des valeurs que nous défendons. Pour nous et pour beaucoup d’autres, ce n’est pas un modèle en politique. C’est surtout cela que je retiens. Ce n’est d’ailleurs pas parce que vous êtes réélu que la justice ne doit pas passer. Le fait d’être élu par les électeurs ne donne pas d’immunité, la preuve en est. La responsabilité des électeurs est une chose, mais la responsabilité de la justice est de ne pas être dépendant du vote des électeurs, et c’est tant mieux.

Est-ce que l’idée n’est pas de remettre complètement en cause l’immunité parlementaire ?

Je pense que l’idée de l’immunité parlementaire, c’est que le travail des parlementaires ne soit pas entravé en permanence par des gens qui pourraient leur faire des procès pour des motifs divers et variés, afin qu’il n’y ait pas des effets d’opportunité d’emmener des parlementaires devant la justice pour des affaires de diffamation ou des affaires diverses et variées. Ce que je trouve intéressant dans l’évolution c’est que, désormais, le Sénat – puisqu’il y a eu aussi la même chose au Sénat pour un autre parlementaire – avec l’Assemblée, ont compris qu’il y avait quand même intérêt à laisser faire la justice. D’ailleurs, dans les deux cas, autant que je me souvienne, ou si j’ai bien compris ce qu’il s’est passé ce matin, c’est à l’unanimité des membres du bureau du Sénat et de l’Assemblée que les parlementaires ont décidé de lever l’immunité. C’est bien quand elle peut être levée, car cela veut dire que « immunité » ne vaut pas « immunité générale ». Mais le fait que l’on puisse les protéger, éventuellement de recours un peu opportunistes et qui soient des recours politiques, je trouve cela plutôt positif.

Parlons des élections départementales avant de reparler de Manuel Valls et de Nicolas Sarkozy. Cette déclaration il y a quelques instants sur Sud Radio de Bruno Le Roux, invité politique de Christophe Bordet : « la gauche risque de disparaître ». Est-ce qu’il souhaite faire peur aux électeurs de gauche ?

Je trouve que ces discours en permanence crépusculaires, alarmistes, ne sont pas de bon aloi lorsque l’on est un responsable public. Deuxièmement : pourquoi la gauche est dans cette situation-là ? Parce que les promesses n’ont pas été au rendez-vous et les promesses qu’avait faites le candidat François Hollande n’ont pas été au rendez-vous de ce qu’attendaient les Français. François Hollande a été élu sur un programme sachant très bien qu’il ne pourrait pas l’appliquer et donc, aussitôt élu, il a tourné le dos à la plupart de ses promesses en tout cas à la plupart de ses promesses dans ses fondements.

Bruno Le Roux ne peut s’en prendre qu’à lui-même. Il n’y a pas qu’une gauche, il y a des gauches, on voit bien qu’il y a des lignes de fractures au sein de la gauche qui ne sont pas résolues avec un Parti Socialiste qui essaie à la fois de tenir l’ensemble de la gauche et qui en même temps mène une politique – dans un certain nombre de domaines – qui s’éloigne, en tout cas de la frange la plus radicale ou la plus à gauche de la gauche. Et puis il faut dire quand même une chose, dans les départements – j’ai tourné comme nous tous dans les départements pour soutenir nos candidats - il y a eu une usure aussi du pouvoir. Le Parti Socialiste a été incapable de renouveler ses cadres et par ses attitudes dans un certain nombre de départements, il ne faudra pas qu’il s’étonne qu’il y ait des départements qui basculent. Prenez le cas des Bouches-du-Rhône : ce cas est assez emblématique et intéressant, le Parti Socialiste n’a pas su faire le ménage dans ses propres troupes dans ce département. Résultat des courses, il ne faudra pas s’étonner que : un,  il y aura une montée des extrêmes – du Front National ; et deux, le département est en capacité de basculer. Mais c’est la propre responsabilité du Parti Socialiste de ne pas avoir changé ses méthodes et de s’être installé dans des dizaines de baronnies départementales, de villes ou d’agglomérations, et finalement d’avoir seulement entretenu les baronnies et de ne pas avoir répondu aux attentes des citoyens. Donc Bruno Le Roux devrait d’abord s’en prendre à lui-même, et à l’organisation telle que l’ont engagée les socialistes.

Il n’y a pas d’alternative à la gauche, Marc Fesneau, comme le dit Bruno Le Roux ?

On est quand même dans un champ démocratique où l’on vous dit que l’un des ensembles importants va disparaître et deuxièmement qu’il n’y a pas d’alternative à la gauche. Je trouve que c’est une drôle de conception de la démocratie. La démocratie c’est la capacité à proposer une alternative, et c’est ce que l’on essaie de proposer.

Il n’y a pas d’alternative à la gauche, je précise.

À la gauche, j’ai trouvé cela plus grave. C’est un discours qu’il adresse aux électeurs de gauche pour essayer de rassembler son camp. Manifestement, il y a deux lignes politiques à gauche, je suis désolé de le dire. S’ils ont été obligés d’œuvrer au travers du 49-3 pour faire passer la loi Macron c’est que, manifestement, il y avait une proposition alternative, qui plus est qui ne permettait pas d’avoir une majorité solide, donc il y a quand même des propositions différentes. Je considère qu’entre les propositions de Jean-Luc Mélenchon et celles de Monsieur Macron, il y a quand même deux lignes politiques différentes, il faudrait quand même que Monsieur Le Roux s’en rende compte. Le problème du Parti socialiste c’est qu’il vit depuis 20 ans sur une ambigüité, il n’a pas fait un choix de ligne. Il va falloir qu’il fasse un choix !

Chalon-sur-Saône : est-ce que Nicolas Sarkozy a raison de jouer la carte de la fermeté ?

Je ne sais pas si c’est vraiment jouer la carte de la fermeté. Je pense que l’on peut être ferme sur des principes républicains et laïcs sans rentrer dans des polémiques que je trouve un peu stériles. On est à trois ou quatre jours des élections départe : fin du menu de substitution dans les cantines d'une commune UMP : finmentales. Le maire de Chalon a été élu il y a plus d’un an et il prend tout d’un coup cette décision. Or on est quand même dans un monde où l’effet médiatique de la moindre décision est davantage ce que l’on recherche que le fond de la question. Deuxièmement, oui il peut y avoir une question de laïcité qui se pose : je siège d’ailleurs au bureau de l’AMF, il y a un groupe transpartisan qui est en train d’essayer de travailler pour pas que l’on ait des réponses comme cela abruptes au fil de l’actualité et pour faire un effet comme ça de visibilité à quatre ou cinq jours des départementales. Ce sont des sujets suffisamment sérieux pour que l’on puisse les traiter avec sérieux et pas simplement sur des antennes. Une chose qui me choque : on ne peut pas à la fois dire « je défends l’école publique » et inciter tous ceux avec lesquels nous pourrions être en débat sur la laïcité à aller dans des écoles confessionnelles. Il y a quelque chose qui est un peu contraire à l’esprit républicain et à l’esprit de la laïcité. Il y a des écoles privées et je défends cela sans aucune difficulté mais en même temps on ne peut pas dire à ceux qui seraient dans des choix différents d’aller dans des écoles confessionnelles. L’objectif n’est pas de multiplier les écoles confessionnelles. Je trouve qu’il y a quelque chose de paradoxal et vraiment je n’aime pas trop cette mise en scène. On est sur des sujets suffisamment sensibles et suffisamment sérieux pour ne pas les instrumentaliser.

Nicolas Sarkozy a dit hier « Le chômage baissera quand François Hollande partira ». Qu’en pensez-vous ?

Oui, enfin franchement, avec tout le respect que l’on doit à un ancien Président de la République, ce n’est quand même pas au niveau du débat politique. Il n’a même pas dit cela, il a dit « le jour MÊME où François Hollande ». On est là dans le registre du miraculeux et il faut aller mettre des cierges pour penser cela ! Est-ce que du temps de Nicolas Sarkozy, on n’a pas vu le chômage augmenter ? Est-ce que du temps d’une alternance avec l’UMP, on n’a pas vu le chômage augmenter ? Même si nous n’avons pas gouverné, nous les centristes, depuis un certain temps, je considère que la classe politique dans son ensemble est responsable de la situation politique du pays. On essaie de proposer des solutions différentes. On essaie de penser qu’il y a des rassemblements différents qui doivent s’opérer. Mais s’affranchir comme cela devant les électeurs, et dire « si c’est moi, le chômage baisse, et si c’est les autres, le chômage augmente », c’est une vision vraiment caricaturale. Mais enfin François Hollande est Président de la République que depuis trois ans ! La désindustrialisation du pays, l’endettement du pays, l’incapacité du pays à se réformer. On ne pense pas que Nicolas Sarkozy en porte une part de responsabilité ? L’absence de modestie et les réponses toutes faites aux tribunes médiatiques et au journal de 20h sont caricaturales et c’est tout ce qui fait que les gens n’ont plus envie de s’intéresser à la politique. Qui peut croire sérieusement qu’au lendemain du départ de François Hollande les énergies se libéreraient, que la France retrouverait sa compétitivité et que l’industrie se relocaliserait en France ? Ce n’est pas sérieux. À chaque fois que l’on a des processus électoraux, il faudrait que l’on évite de se complaire dans ce genre de schéma un peu binaire.

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