"Nous devons construire un système plus incitatif de retour à l'emploi"

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Sur le plateau de Dimanche+, François Bayrou a appelé à "un renforcement du dialogue social" pour que "les dirigeants d'entreprises partagent leurs objectifs avec les salariés".

Le leader centriste souhaite aussi "un système plus incitatif" de retour à l'emploi, "où les chômeurs pourraient cumuler pendant un certain temps leurs allocations et leur nouveau salaire".

Anne-Sophie Lapix - Doit-on travailler en France aux conditions espagnoles, pour sauver l'industrie de l'automobile ?
François Bayrou - Ce n'est pas cela qui est demandé. Ce qui est demandé, c'est que l'on se trouve avec des grandes entreprises dans lesquelles la direction et les salariés arrivent à partager les mêmes objectifs. Je vais citer un exemple, que tout le monde cite : nous sommes tous envieux de la situation chez Volkswagen. Il y a quelques années, cette entreprise était derrière les nôtres, en chute. Aujourd'hui, elle prend des parts de marché, les salaires augmentent et les embauches aussi. Quel le principal point de différence ? Ils ont réussi à faire partager à la totalité de l'entreprise, des objectifs de haut de gamme et d'amélioration.

Les salariés doivent-ils accepter une baisse momentanée des salaires, dans la mesure où des objectifs de montée en gamme sont définis ?
Je ne suis pas sûr que l’on parle de baisse des salaires. Il peut y avoir des objectifs, quand il y a des coups de feu, de plus d'heures de travail. Je pense que le temps de travail est un point clé et je préfère qu’on agisse sur le temps de travail plutôt que sur les salaires. Je pense que les 35 heures ont été une erreur lorsqu’elles ont été prises. C’est une erreur qui a pesé sur la suite, je les ai combattues à cette époque et je n’ai pas changé d’avis.

Autre conséquence de la crise du secteur automobile, la fermeture du site d’Amiens Nord Goodyear qui employait 1173 employés. Il y avait un repreneur potentiel avec un plan de départs volontaires, la CGT a bloqué un accord. Est-elle responsable aujourd’hui, comme le dit la CFDT, de la fermeture de l’usine ?
Ce blocage est responsable. La CGT s’enorgueillissait de ses choix et déclarait : 'Vous voyez, on n’a pas cédé, et ça dure encore'. Jusqu’au moment où ça ne dure plus. Il y avait un plan de reprise par Titan sur tout le secteur des pneus agricoles, qui marche très bien. Ils proposaient de sauver 600 emplois, peut-être un peu plus. Franchement, avoir par blocage écarté ces repreneurs au risque de la fermeture du site et de l’échec des négociations, il y a de quoi se poser des questions. Au bout du compte, qui va en souffrir ? Les salariés.

On a commencé à réformer le marché du travail. La suite, c’est la réforme du régime chômage qui sera déficitaire de plus de 18 milliards à la fin de l’année. La Cour des Comptes suggère de baisser l’indemnisation des cadres. Est-ce l’étape suivante, une moins forte indemnisation sur une période plus courte qui forcera à accepter un peu n’importe quoi ?
Je pense qu’une autre solution existe. Il y a un problème, ce système n’est pas assez incitatif. Le système d’assurance chômage incite un certain nombre de personnes pendant un certain temps à ne pas reprendre un emploi. Si on compare la situation dans les autres pays à la situation chez nous, c’est ce qui frappe. Je pense qu’on devrait le rendre incitatif, c’est-à-dire que, quand quelqu’un reprend un emploi, le système devrait lui permettre de cumuler pendant un certain temps pour compenser la différence et l’aider à passer le cap. Il n’y a pas que la sanction, on peut aussi pousser à des attitudes plus intéressantes et plus constructives. Je préfère quelqu’un qui travaille.

Le modèle social français, tel qu’on le connaît aujourd’hui, est-il mort ?
Le modèle social français est insoutenable si nous ne redressons pas la production dans notre pays. C’est une obsession que j’ai développée pendant des mois et des années, je vais la reprendre en deux phrases. Notre modèle social de solidarité et de services publics est un modèle très exigent et donc très cher. Il ne peut être soutenu que par un pays dans lequel la production fait que l’on peut payer : tant que nous serons dans la situation d’effondrement de la production, on ira de chute en chute sur le modèle social.

AFFAIRE TAPIE: "J'AI MENÉ CE COMBAT SEUL CONTRE L'ÉTAT. AUJOURD'HUI, LA JUSTICE ME DONNE RAISON."

En Corse, les terrains sont l'objet de convoitises et d’arrangements entre élus et promoteurs. Si vous étiez au pouvoir, vous feriez détruire ces paillottes, ces constructions qui ne respectent pas la loi littoral ?
La loi est là pour faire respecter un certain nombre d’obligations et de prescriptions. Si elle ne le fait pas, l’Etat est responsable. Dans le reportage que l’on a vu, une affiche disait absolument ce que je pense en deux mots : ‘Mafia basta’. Il y a des intérêts très importants, locaux ou plus larges encore, des intérêts de réseaux, de bandes. Tout le monde sait bien que c’est très lié à la criminalité sur l’île, à un certain nombre de comportements, d’organisations politiques. Je sais que ce n’est pas facile, sinon l’Etat l’aurait fait. Il n’y a pas à la tête de l’Etat que des pourris, il y a aussi des difficultés, des impuissances. Mais ce principe-là, notamment la défense de la loi littoral, les Corses y sont très attachés et ont raison de l’être.

Abus de pouvoir, c’est le titre de votre livre paru en 2009 dans lequel vous dénonciez un arrangement entre Nicolas Sarkozy et Bernard Tapie pour qu’un tribunal d’exception juge le cas de l’homme d’affaire. Un jugement qui lui avait permis de toucher 400 millions d’euros. Aujourd’hui, trois juges d’instruction enquêtent, perquisitionnent, que peuvent-ils trouver ?
J’ai mené ce combat, presque seul, pendant longtemps, en visant non pas Tapie mais l’Etat. Tapie, c’est un homme d’affaires qui fait des affaires, c’est connu, il a toujours fait ça. C’est l’Etat qui est responsable. Pour la première fois, des magistrats enquêtent en disant qu’il y a soupçon de faux et de détournement d’argent public pour des sommes colossales. C’est pour les citoyens, pour la justice, quelque chose d’énorme.

C’est lié au changement de majorité ?
En tout cas, la justice agit et c’est bien. Mais je rappelle que c’est à la fin du précédent gouvernement que M. Nadal a déclenché cette affaire. Pourquoi ? Je ne sais pas. Il y a plusieurs hypothèses, j’en avance quelques unes dans mon livre. Je pense que quelque chose a dû se produire pour que l’Etat ne puisse pas résister à des demandes de cet ordre. L’Etat, naturellement, au niveau le plus haut.

DETTE: "LE GOUVERNEMENT DOIT VITE DIRE OÙ IL VA FAIRE DES ÉCONOMIES"

Si vous étiez Parisien, pourriez-vous voter pour Jean-Louis Borloo aux municipales ?
S’il se présentait, on pourrait examiner ça, mais il faut que cette question trouve réponse. Cela fait longtemps qu’on dit qu’il pourrait se présenter, il a dit oui, il a dit non. Je pense que son profil pourrait correspondre aux élections municipales à Paris mais c’est à lui de faire ce choix.

Si vous étiez Jérôme Cahuzac, écouteriez-vous votre prédecesseur François Baroin qui commence à dire que 3,5 pour cent de déficit au lieu de 3 pour cent pour 2013, ce ne serait pas plus mal ?
La France a fixé un objectif. C’est un objectif déjà limité, car 3 pour cent, cela signifie que l’on continue à augmenter l’endettement de la France dans des proportions considérables, et que l’on court vers 2000 milliards de dette du pays. Je pense qu’il est sage que le gouvernement dise : ‘On a fixé un objectif, on s’y tiendra’. Mais il y a une chose que je voulais dire sur ce point : si j’étais à la place de Jérôme Cahuzac et du gouvernement, je dirais vite où je vais faire des économies, parce qu’ils ont annoncé des économies de dizaines de milliars, et pour l’instant on n’en voit pas le premier euro.

Si vous étiez député, voteriez-vous le 12 février le mariage pour tous ?
Non. J’ai dit que je défendrais l’Union. Je pense qu’on aurait eu besoin, pour la réconciliation du pays, d’avoir à la fois la reconnaissance et les droits, et en même temps de respecter ceux pour qui le cadre traditionnel est très important. La division est un danger pour la société en crise du pays.

Pour revoir la première partie de l'interview, cliquez ici.

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