"Nous avons la certitude désormais qu’il n’y a pas de majorité pour conduire la politique que le gouvernement Valls préconise"

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Au micro de BFM TV en duplex depuis Pau ce soir, François Bayrou s'est exprimé sur l'actualité brûlante du jour : le recours à l'article 49-3 de la Constitution utilisé par le gouvernement pour faire passer en force la loi Macron et l'annulation de l'arbitrage Tapie par la cour d'appel de Paris.

Olivier Truchot (BFM TV) - Édition spéciale. Bonsoir Monsieur Bayrou.

François Bayrou - Bonsoir.

C’est un aveu de faiblesse pour le gouvernement Valls ?

Oui. En tout cas, c’est la certitude désormais qu’il n’y a pas de majorité pour conduire la politique que le gouvernement Valls préconise. On se trouve devant une rupture à l’intérieur de la gauche, entre les réformistes – ceux qui veulent que changent les choses – et les jusqu’au-boutistes – ceux qui voudraient que rien ne change ou au contraire que l’on revienne en arrière sur un certain nombre de problèmes que le pays rencontre. Donc, cette fracture – qui existe en réalité depuis le début, depuis l’élection – aujourd’hui, elle est béante, elle s’accuse et tout cela va poser un problème très lourd au gouvernement. Pire encore, cela empêche de mettre en œuvre la politique dont la France a besoin. Après tout, qu’il y ait des difficultés au Parti socialiste ou de la majorité ou de la gauche, c’est assez peu important, mais que, au bout du chemin, on soit incapable de faire passer les textes qui s’imposent, c’est un vrai souci parce que le 49-3 qui a été appliqué aujourd’hui ne peut servir qu’une seule fois par session parlementaire.

On ne demande plus aux députés de voter sur une loi mais de soutenir ou non le gouvernement, on voit mal les frondeurs socialistes voter cette motion de censure. Le 49-3 est prévu par la Constitution de la Ve République, cela a déjà été utilisé plusieurs fois. Michel Rocard par exemple, en son temps, l’avait utilisé 28 fois parce que, à l’époque, il avait une majorité relative. Est-ce que l’on n'est pas en train de dramatiser finalement une procédure qui est prévue par la Constitution et que la droite et la gauche ont déjà utilisée ?

Je pense que vous avez raison, c’est prévu par la Constitution et personne ne dit que c’est inconstitutionnel. Simplement, c’est une procédure qui est faite pour faire plier ceux qui sont en désaccord à l’intérieur du camp de la majorité, en leur disant « Si vous ne pliez pas, je dissous l’Assemblée ». Vous le voyez bien, c’est une épreuve de force, cela prouve qu’il n’y a plus d’adhésion, ni de soutien à l’intérieur de la majorité et même dans l’ensemble de l’Assemblée pour la politique du gouvernement. Comme je vous le disais, c’est l’urgence des réformes nécessaires qui se trouve compromise. Je pense que ceci doit être un grave sujet de préoccupation pour tous ceux qui s’intéressent au redressement du pays.

Attendez, il reste deux ans pour François Hollande, deux ans de quinquennat. Que va-t-il se passer selon vous ?

Je pense que cette fracture va continuer à s’élargir et qu’il faudra, un jour ou l’autre, que le Président de la République s’interroge sur la manière de sortir de cette impasse parce que c’est son action qui va être bloquée.

Sortir de l’impasse et ouvrir la majorité, peut-être vous demander, à vous, d’entrer dans le gouvernement ?

Je ne crois pas du tout que les solutions de bricolage ou les solutions de roue de secours puissent avoir le moindre intérêt. La situation est telle que nous avons des institutions et des règles électorales qui sont aujourd’hui complètement dépassées, qui laissent peut-être 50 % des Français en dehors de la représentation si vous pensez à l’extrême-droite, l’extrême-gauche et le centre. Ce sont des familles politiques, bien qu’étant soutenues par des millions de Français qui aujourd’hui n’ont pas leur place à l’Assemblée nationale. Tout ceci est un jeu politique qui ne ressemble pas au pays.

François Bayrou, je voudrais également vous interroger sur l’autre information principale de la journée, à savoir l’annulation de l’arbitrage Tapie par la cour d’appel de Paris. Arbitrage controversé qui, rappelons-le, avait accordé 403 millions d’euros à Bernard Tapie en 2008 pour solder son vieux litige avec le Crédit lyonnais - 45 millions pour le préjudice moral parmi ces 403 millions – et vous avez été l’un des premiers à dénoncer cet arbitrage. J’imagine votre satisfaction ce soir.

Ce n’est même pas de la satisfaction personnelle car ce n’est pas un combat personnel. C’est le combat de ceux, peu nombreux, qui, depuis le début, ont dit « Attention, cette affaire est insupportable », parce qu’elle est vraiment étrange et on a l’impression qu’il y a eu des interventions mystérieuses diverses et variées, que cela a été un arbitrage déloyal, que le recours à cette procédure était illégal… Ceux-là ont trouvé enfin aujourd’hui, dans une décision sans précédent pour une affaire sans précédent, une décision de justice qui dit à quel point tout cela était inacceptable. Quand vous pensez à tout ce qu’il a fallu faire pour arriver là alors vous vous dites que, en effet, il y avait bien des sujets qui méritaient d’être soulignés dans cette période et dans cette affaire.

Bernard Tapie doit rembourser immédiatement cet argent ? Son avocat dit qu’il n’est pas obligé de le faire, ce n’est pas dans l’arrêt de la cour d’appel.

C’est vrai que cela n’est pas dans l’arrêt de la cour d’appel, c’est dans la logique de la décision. Mais je fais confiance à toutes les procédures lancées par des procéduriers pour que l’on retarde au maximum possible la conclusion qui serait logique, qui serait de rendre l’argent. Mais l’argent existe-t-il encore ? Où est-il ? Vous avez dans cette affaire beaucoup de points d’interrogation, ce qui est frappant pour moi c’est que tout ceci a été conduit par l’Etat alors que c’était illégal. Il y a toujours des personnes qui veulent faire de l’argent avec des affaires diverses et variées, ce n’est pas neuf, il y en a toujours eu sous la République. Mais d’habitude, l’Etat, le gouvernement, la République, sont du côté de ceux qui essaient d’empêcher ces dérives. Là ce qui est frappant, c’est que l’Etat a été du côté de ceux qui organisaient ce trucage. C’est cela qui est particulièrement frappant alors qu’il y a une justice en France. Même si c’est des années et des années après, même s’il a fallu se battre - et parfois seul - on a aujourd’hui, au fond, un sentiment civique, un sentiment de citoyen qui se dit « un pas a été fait dans le sens de la justice ».

Merci François Bayrou pour votre réaction dans cette édition spéciale.

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