" Le temps de l'abattement national est fini "

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Dans un entretien accordé au journal Le Figaro, François Bayrou estime que l'élection du candidat d'En Marche ! serait un "signe magnifique envoyé au monde."

LE FIGARO. - Qu'est-ce que le débat de mercredi soir a révélé entre les deux candidats ?

François BAYROU. - Ce débat a été extraordinairement révélateur : on a vu d'un côté un candidat jeune, vigoureux et structuré et de l'autre côté une candidate qui n'était venue que pour l'épreuve de force et l'invective et qui ne maîtrisait pas une ligne des dossiers pourtant dangereux qu'elle portait. Beaucoup ont trouvé le débat pénible, moi, je l'ai trouvé absolument éclairant et significatif. À l'issue du débat, il est devenu évident aux yeux de tous qu'Emmanuel Macron a la stature d'un président de la République. Qu'il a les épaules pour devenir le plus jeune chef d'État de tous les pays développés. Et Marine Le Pen a connu une épreuve de vérité dont elle va avoir du mal à se relever. Ce débat va durablement abîmer l'image qu'elle avait réussi à construire.

Cela peut-il avoir une conséquence sur ceux qui prônent le « ni-ni » , ni Macron ni Le Pen ?

Qui peut, au vu du débat, mettre un signe égal entre les deux candidats ? Entre une vision structurée, solide, responsable et généreuse du pays, et une vision incroyablement régressive et agressive ? Pour refuser de se prononcer entre les deux, si l'on croit aux valeurs civiques, il faut renier ce qu'on est. Pour moi, le « ni-ni » n'a jamais été possible. Il est aujourd'hui inimaginable.

Quel regard portez-vous sur cette folle campagne ?

Je pense que c'est une campagne de vérité profonde sur la situation du pays et ses aspirations. Au fond, que dit-elle ? Elle montre que les deux appareils politiques, le PS et LR, qui exerçaient alternativement le monopole du pouvoir depuis toujours sont épuisés et que leur logique tombe en poussière. Leurs attitudes et leurs pratiques ne sont plus en phase avec les aspirations des Français. Le temps de l'abattement national, qui a duré si longtemps, est fini. Il fallait que la page se tourne pour que s'ouvre un temps nouveau d'optimisme.

Qu'entendez-vous par là ?

La preuve est faite que ce n'est pas l'utilisation régressive et morbide des difficultés du pays qui est la bonne réponse à ses attentes. La France va choisir l'optimisme, et c'est un signe magnifique envoyé au monde, avec le jeune président qu'elle va élire et l'équipe qui va se regrouper autour de lui. D'un coup, grâce à cette séquence institutionnelle, grâce au quinquennat et au calendrier qui fait élire le président avant les députés, on voit le pouvoir donné au peuple : le pouvoir de changer le paysage politique et de renouveler en profondeur ses visages, ses pratiques et ses équilibres.

Donc vous écartez l'hypothèse d'une cohabitation à l'issue des législatives...

Je l'écarte en effet. Après avoir assisté à ce débat et à la révélation de l'énergie et du courage du futur président, qui peut se présenter devant les Français en disant : « Votez pour nous, pour que nous empêchions cet homme de gouverner » ? Qui va suivre une telle absurdité ? La cohérence des deux élections, et l'élan nouveau qui est ainsi créé, c'est la dynamique même de la Ve République. Que des politiques se prétendent gaullistes en prenant le contre-pied des institutions de la Ve République, c'est absurde et illogique.

C'est pourtant ce qu'ont affirmé le bureau politique des Républicains et François Baroin.

Les instances de LR, en choisissant cette position, ont tout faux. Et ceux qui se sont exprimés au sein de ce bureau pour dire qu'il fallait aider à la réussite du futur gouvernement l'ont bien compris. Quand est évoquée l'exclusion de ceux qui, chez LR, se rapprocheraient d'Emmanuel Macron, la démarche est suicidaire ! La majorité du peuple français ne va pas se laisser arrêter dans son élan par des réflexes partisans. Car ce que le pays va manifester largement dimanche prochain, c'est une volonté de renouveau constructive et optimiste, adressant un message au monde qui dit « la France est de retour » .

L'Assemblée nationale ne risque-t-elle pas d'être « éclatée » en plusieurs groupes ?

Je pense que les Français vont donner une majorité nette au président de la République. Je ferai tout ce qu'il faut pour cela. Il est aussi probable que d'autres, qui n'auront pas été élus sous l'étiquette de la majorité présidentielle, puissent la rejoindre pour participer à la reconstruction. On évitera ainsi le piège de 2002, lorsque Jacques Chirac, élu à 80 % contre Le Pen, a refusé l'ouverture de sa majorité. Pour ma part, j'ai toujours plaidé pour le pluralisme. Toutes les sensibilités politiques doivent trouver leur place dans nos institutions, et je reconnais ce droit même à celles que je combats. Une loi électorale enfin juste doit être mise en place. La baisse du nombre des parlementaires et l'adoption d'une dose de proportionnelle vont conduire à un changement total de notre pratique politique. Emmanuel Macron souhaite que cette réforme des institutions soit rapide. Je crois que c'est possible, sans traîner et sans changement de notre Constitution.

Pourquoi n'y a-t-il plus de front républicain face au FN, comme en 2002 ?

Parce qu'en 2017 les intérêts partisans l'ont emporté sur l'intérêt général. Mais je crois que ceux qui ont refusé de s'engager clairement seront sanctionnés par les Français.

Pensez-vous à Jean-Luc Mélenchon ?

Oui, mais pas seulement.

Le MoDem, que vous présidez, a noué un accord électoral avec En marche !. Quelle en est la teneur ?

Nous avons une entente de bonne foi et équilibrée, sans marchandages et sans chantage. Nous nous présenterons unis devant les électeurs.

Pourriez-vous être premier ministre ?

J'ai deux règles de conduite : je suis profondément attaché à ma ville et en même temps je servirai le renouveau du pays. Pour le reste, c'est la responsabilité du président élu que de définir ses équipes. Et il ne doit pas le faire avant son élection.

Pourrait-il y avoir un gouvernement d'ouverture ?

C'est une discussion qui doit avoir lieu entre le président de la République et le premier ministre qu'il aura nommé. À titre personnel, j'ai toujours été favorable à trouver l'assise la plus large possible, à condition que la majorité soit cohérente et unie, et qu'elle soit décidée à conduire une action réellement réformatrice.

La marge de manoeuvre du chef de l'État sera très différente selon son score du second tour...

Plus le résultat est large, plus il sera significatif et emportera l'avenir.

Quel avenir pour les Républicains et le PS ?

Ces deux familles vont devoir se reconstruire. Le PS a déjà implosé. C'est en question pour les Républicains car on voit bien que les deux tendances qui composent ce parti s'éloignent de plus en plus. En réalité, la notion de camp à laquelle ces deux partis se référaient n'existe plus. C'est l'extrême droite et l'extrême gauche qui ont pris la prééminence à l'élection présidentielle.

Jean-Luc Mélenchon a demandé un geste à Emmanuel Macron...

Notre démocratie, ce n'est pas la place du marché ! On n'est pas là pour marchander, acheter et vendre.

Quel sera le pouvoir de nuisance du FN ?

Je ne crois pas à son pouvoir de nuisance parce que la majorité présidentielle sera large et je suis sûr en tout cas que la paralysie que vous évoquez est impossible. Car la Ve République donne au président trois armes irrésistibles pour surmonter les divisions : le 49-3, la dissolution de l'Assemblée et le référendum. Ce sont des institutions antiblocage !

 

 

L'article est disponible sur le site du Figaro via ce lien . 

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