"Le monde par quatre chemins", à lire dans Libération

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Le journal Libération a interrogé les soutiens de quatre candidats à la présidence de la République sur les grands enjeux de politique étrangère. Situation au Moyen-Orient, politique migratoire, défense, diplomatie... Marielle de Sarnez, qui représentait Emmanuel Macron, a participé à ce grand débat. En voici un extrait.

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La politique étrangère française, dans cette campagne électorale, a souvent été ramenée à la seule question des relations avec Moscou. Sans doute car c’est l’un des points de désaccord les plus prononcés entre les candidats, et qu’il est d’une actualité brûlante. Mais la table ronde organisée par Libération avec leurs représentants montre qu’ils expriment aussi des visions nettement différentes de la solidarité internationale, de la crise migratoire, des conflits actuels ou du système onusien. Djordje Kuzmanovic (spécialiste de ces questions pour La France insoumise), Pouria Amirshahi (député et membre de l’équipe de campagne de Benoît Hamon), Marielle de Sarnez (eurodéputée Modem et soutien d’Emmanuel Macron) et Alain Cadec (député européen proche de François Fillon) ont répondu aux questions des journalistes du service Etranger deux heures durant.

Vous inscrivez-vous en rupture avec la politique étrangère du quinquennat de François Hollande ?

Djordje Kuzmanovic : Oui, en rupture totale, d’abord avec le traité sur la stabilité, la coordination et la gouvernance [TSCG, le pacte budgétaire européen]. Je rappelle que François Hollande devait le renégocier. Il n’a pas changé une virgule. Nous considérons qu’à cause des traités de libre-échange, des traités européens et des critères de convergence qui en découlent, celui qui sera au pouvoir ne pourra pas gouverner. Si vous n’avez pas le droit de dépenser l’argent public, vous ne pouvez rien faire !

Marielle de Sarnez : Décider d’intervenir au Sahel pour éviter une déstabilisation de cette partie du continent africain, c’était une bonne décision. Participer à une coalition en Syrie contre Daech, sous mandat de l’ONU, aussi. Mais, faute d’avoir porté une vision claire pour l’Europe, nous n’avons pas vraiment renforcé notre capacité d’influence. Cela devra être corrigé.

Alain Cadec : La France a quasiment disparu de la scène internationale depuis le début du quinquennat. Nous n’existons plus beaucoup en Europe, mais nous n’existons plus du tout au-delà de ses frontières. Les présidents français qui se sont succédé précédemment avaient davantage de poids au niveau international que n’en a eu François Hollande au cours de son quinquennat, c’est très clair.

Pouria Amirshahi : Je veux bien mettre au crédit de François Hollande la COP 21 parce qu’en politique étrangère, il ne faut pas penser simplement les relations diplomatiques traditionnelles, mais aussi les enjeux globaux qui frappent l’ensemble de l’humanité. Benoît Hamon propose ainsi de créer un office mondial des biens publics communs pour la protection de l’air, de l’eau, de l’espace et de la biodiversité. Biens publics qui n’ont pas de statut juridique véritable aujourd’hui, et desquels dépendent aussi notre survie et notre avenir.

Quelle doit être la stratégie française dans le conflit syrien ? Après l’attaque chimique de Khan Cheikhoun, faut-il une réaction militaire ?

M.d.S. : On ne réglera pas, sur le long terme, la question du terrorisme ni celle des migrants sans une perspective d’issue politique en Syrie. Or le crime épouvantable de Khan Cheikhoun montre où nous en sommes et quelle est la responsabilité de Bachar al-Assad ! Un jour, c’est devant les tribunaux internationaux que sa responsabilité sera jugée. Diplomatiquement, si l’on peut encore parler de diplomatie, deux processus sont en cours, Astana et Genève. Les deux processus devront un jour être conjugués. Il faut évidemment que les puissances régionales y participent (Arabie Saoudite, Iran et Turquie, en dépit de leur jeu trouble et ambigu), que la coalition obtienne sur le terrain des résultats décisifs et qu’il y ait une perspective politique prenant en compte les rapports de force, mais en n’oubliant pas ce qu’Al-Assad a fait et continue de faire à son peuple.

A.C. : Il faut commencer par associer les puissances régionales, c’est évident. On ne peut pas parler de cette région sans parler de l’Iran. Tout cela, c’est quoi ? Des chiites d’un côté, et des sunnites de l’autre. Il faut que la France et l’Europe renouent maintenant des relations avec l’Iran, si Téhéran applique bien l’accord sur le nucléaire. Cela fera un contrepoids dans cette région du monde. Bachar al-Assad est un dictateur sanguinaire, on ne peut pas le contester. Mais la réalité c’est que la France est hors-jeu du règlement de la guerre en Syrie. Nous pouvons nous émouvoir à juste titre des exactions commises par le régime syrien, mais nos protestations n’y changeront rien. Aujourd’hui, il faut être pragmatique et consacrer notre énergie à notre priorité, qui est l’éradication de l’Etat islamique.

P.A. : Bachar al-Assad tue et massacre par tous les moyens car il craint plus que tout une solution politique. Alimenter la logique de guerre, c’est sa façon ignoble de garder le pouvoir. N’en déplaise à Poutine et à Trump, le tyran de Syrie ne peut être mieux considéré que les jihadistes assassins. Sa place est devant un tribunal car il ne saurait rester impuni. Il est prêt à gouverner un cimetière et ses morts, pourvu qu’il gouverne. Ne tombons pas dans ce piège : si aucune option ne doit être écartée dès lors que nous avons affaire à des crimes de masse, la question est aujourd’hui de tout faire pour que le processus politique aboutisse à une paix durable en Syrie sous l’égide des Nations unies. S’en remettre, comme le propose François Fillon, à un attelage russo-iranien est une lâcheté inexcusable. Le rôle de notre pays est de s’impliquer fortement pour maintenir une pression maximale sur le régime et en faveur de l’application des résolutions de l’ONU.

D.K. : La question de ce qui doit être fait avec Al-Assad est à nouveau posée après cette terrifiante attaque chimique. Un Etat ne devrait jamais réagir sous le coup de l’émotion. Une intervention armée contre le régime, déjà exigée par les habituels va-t-en-guerre, conduirait in fine à encore plus de morts, de destructions, de réfugiés et de nouveaux foyers terroristes. La solution politique, aussi difficile soit-elle avec de tels personnages, est la seule viable. Mais même après de telles négociations, il ne faut jamais oublier les dictateurs comme Bachar al-Assad car, un jour, on devra les traduire devant la Cour pénale internationale. Et non pas punir les peuples déjà meurtris par de nouvelles guerres - les cas de l’Afghanistan, de l’Irak et de la Libye devraient nous inciter tous à plus de sagesse. Daech est né en Irak, à Abou Ghraib entre autres. C’est la conséquence de la volonté ahurissante des Etats-Unis de désintégrer entièrement l’Etat irakien, de A à Z.Il s’ensuit ce qui s’ensuit : l’Etat islamique a été renforcé par des baasistes sans avenir, et c’est là-bas que survient le plus grand nombre d’attentats ! Depuis celui de Charlie Hebdo, il y a eu plus de 30 000 morts dans des attaques frappant les pays musulmans, et en premier lieu en Irak. Imaginons un seul instant que la dictature de Bachar al-Assad telle qu’elle est, atroce et sanguinaire,s’effondre… Une partie de l’appareil d’Etat syrien pourrait rejoindre Daech comme ça a été le cas en Irak !

(...)

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