"J'établirai un mur de verre entre les influences et les décisions de l'Etat"

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François Bayrou a réagi aux accusations de Ziad Takieddine contre Dominique de Villepin autour du dossier Karachi, jeudi 6 octobre sur I-Télé. "Ce qui se passe au coeur de l'État en France est intolérable", "nos dirigeants doivent être totalement indépendants des réseaux d'influences".

Christophe Barbier : Un mot sur la disparition de Steve Jobs, que représentait-il pour vous ? 

François Bayrou : Il appartenait à une espèce qui est très rare au fond, c'est l'espèce des changeurs de monde. Pas seulement ceux qui ont une idée, pas seulement ceux qui ont une vision, mais ceux qui mettent tout cela en application et tout d'un coup, ça change l'univers. Car dans son cas, c'est évidemment l'ensemble de la terre qui a été changée, et l'humanité. Et donc de ce point de vue-là, il faut le saluer comme une aventure, ou l'aventure par excellence du XXIème siècle. 

Les affaires continuent en France ; Takkiedine ce matin dénonce un complot contre Sarkozy. Il pointe du doigt Dominique de Villepin, alors de quel côté êtes-vous ? 

Moi je dis que ce qui se passe au coeur de l'Etat en France et que l'on découvre page après page depuis des semaines et des mois est purement et simplement intolérable. Alors moi je ne sais pas qui a raison, l'un, l'autre, les troisièmes, mais ce que je sais, c'est que des réseaux sont installés au coeur de l'Etat, qui sont en connivence avec des trafiquants d'armes, que des commissions et des rétrocommissions sont soupçonnées d'être versées et ceci, pour un pays en crise, est purement et simplement inacceptable. 

Comment fait-on pour changer ça ? 

On durcit les lois, et surtout et plus important que tout, on choisit des hommes d'Etat, des responsables pour l'Etat qui soient totalement indépendants de ces réseaux. 

C'est ce qui se joue en 2012 ? 

C'est un des enjeux de 2012. Des gens, ou des responsables, femmes ou hommes, qui seront tellement éloignés de tout ça, qu'ils établiront un mur de verre entre ces influences et les décisions de l'Etat, car les décisions de l'Etat doivent être d'intérêt général, et pas d'intérêts particuliers, quelques soient les intérêts particuliers. Or il se trouve que depuis des décennies, sous les deux partis alternativement, on a eu ce genre de pratique et ceci est insupportable. 

Alors il y en a eu à gauche, mais est-ce que néanmoins Hollande et Aubry les deux favoris de la primaire socialiste vous semblent appartenir à cette catégorie hors de tout réseau, hors de toute compromission ? 

J'espère que non mais ils ne sont pas hors des solidarités de parti. C'est-à-dire que rien n'est plus malsain que d'avoir un parti qui a tous les pouvoirs. Ce n'est pas moi qui l'ai inventé, comme vous le savez il y a des philosophes qui depuis des siècles ont dit cela pour définir la démocratie comme les contrepouvoirs. Imaginer qu'un seul parti pourrait avoir tous les pouvoirs dans la République, c'est une question pour tous les citoyens, en tout cas c'est une question pour moi. 

Alors ces primaires socialistes se terminent, c'est un processus moderne comme dit François Fillon ? 

Oui c'est un processus, quand il n'y a pas de leader qui s'impose dans un parti. 

Cela fabrique un vrai présidentiable. 

Je ne confonds pas candidat et leader, c'est autre chose. Mais cela dit, on verra ce qui en sort, moi j'ai beaucoup de frustrations après avoir vu les débats, parce que je n'ai rien senti des deux nécessités qui selon moi s'imposent: la première c'est que l'on dise la vérité aux Français sur la situation du pays. Or, le programme que le parti socialiste porte, et les ajouts que chacun des candidats y a apportés, c'est purement et simplement je vous le dis et je le dis à ceux qui nous écoutent, impossible à mettre en place. 

Trop cher. 

Mais ce n'est même pas trop cher, c'est hors de proportions avec ce que le pays va pouvoir faire. On ne fera pas 300 000 emplois sur fonds publics, on ne fera pas la retraite à 60 ans, on ne fera pas de recrutements de dizaines et de dizaines de milliers de fonctionnaires, on ne fera pas une allocation généralisée pour tous les jeunes, tout ça ne se fera pas. 

Cela ne serait pas nécessaire quand même 60 000 postes dans l'éducation nationale ? 

60 000, 100 000, il n'y a pas de limites à la surenchère des moyens. Mais ce que je vous dis avec certitude, c'est que si vous le faites dans l'éducation, et moi je suis comme vous le savez, pour à partir de 2012, remplacer poste pour poste tous les départs à la retraite, c'est-à-dire, protéger et garantir les moyens de l'éducation en France, sanctuariser comme j'ai dit depuis longtemps, et comme François Hollande avait dit pendant des mois, sanctuariser les moyens de l'éducation. Et donc je dis que de ce point de vue là, ces promesses ajoutées à des promesses, au fond l'idée que ce serait assez simple de sortir de la crise, il suffirait de mettre des socialistes au pouvoir. Cette idée-là est fausse, elle est mensongère, et elle ne sera pas respectée devant les citoyens. 

Vous pourriez faire alliance par exemple avec François Hollande, pour lui faire entendre cette raison et adosser vos idées ? 

Alors je vais d'abord tout faire, je vais engager toutes nos forces et tout ce que j'ai moi de volonté, pour qu'au contraire soit élu au mois de mai un président qui soit indépendant des deux grands partis. Je vais tout faire pour ça. Je suis persuadé qu'il y a en France une attente, car après les primaires d'un seul parti qui vont s'achever là, dimanche, où le dimanche suivant, vont venir les primaires du pays, des primaires d'alternance beaucoup plus large, dans lesquelles tous les Français vont aller voter, sans avoir à payer un euro, sans avoir à faire allégeance à un camp, et ils vont répondre à une question très importante, c'est: quelle alternance veulent-ils ? Et là ils auront le choix entre deux personnalités, deux projets, deux visions, deux vérités, c'est eux qui vont choisir. Et ça va faire le vrai débat de l'élection présidentielle de 2012. 

Dans cette compétition, le retrait de Jean-Louis Borloo ça vous rapporte combien de points ? 

Je ne raisonne pas en points, c'est une clarification. 

Quelle clarification ? 

C'est très simple: on ne peut pas avoir été un des piliers du gouvernement pendant des années et des années, 10 ans, avoir été aux premières responsablités dans ce que le gouvernement Sarkozy a fait et prétendre derrière que l'on va tout changer. Il y avait là une incohérence et c'est dans cette incohérence je crois, que Jean-Louis Borloo s'est trouvé coincé. 

Pourtant Christian Jacob vous dit "la majorité présidentielle vous est ouverte, vous pouvez apporter votre pierre à un deuxième mandat". 

Il y a cinq ans que j'ai pris la décision que précisément je n'entrerai pas dans cette majorité là parce qu'elle conduirait le pays, pour un certain nombre de raisons que j'ai écrites y compris dans un livre qui afait du bruit à l'époque qui s'appelait Abus de pouvoir, que cette majorité là, elle ne pourrait pas répondre aux exigeances du moment. 

Pourquoi vous ne votez pas le budget 2012, il ne va pas très loin dans la rigueur mais il est dans ce sens ? 

Parce que voter le budget, ça veut dire une chose, ça veut dire que vous approuvez la politique du gouvernement. Et ce que je crois profondément c'est qu'il faut reprendre en profondeur, après un débat avec le pays, parce que c'est ceux qui vous écoutent en ce moment qui vont être les vrais auteurs de la nouvelle politique à suivre. Et ce que je sais et dis, c'est qu'il faudra prendre la politique du pays sur des bases qui soient complètement nouvelles pour les citoyens dont ils soient informés, pas des rustines comme la taxe sur les sodas, pas des choses qui ainsi fassent des petits pansements dans les coins, mais au contraire une vision qui soit complètement différente et complètement équilibrée de ce qu'il faudra faire. 

Dimanche, Angela Merkel et Nicolas Sarkozy se rencontrent, qu'attendez-vous d'eux ? 

Qu'ils continuent à faire ce qu'ils puvent. Je pense qu'ils n'ont pas pris l'orientation majeure qu'il aurait fallue prendre pour que l'euro et la dette européenne soient équilibrés, c'est-à-dire de faire une gestion en commun des dettes que chacun des Etats contractent. Gestion en commun, donc assurance pour que les taux d'intérêt soient les plus bas possibles, et aussi, en échange, discussions de ce qu'il faut faire dans chacun des pays pour changer les choses.

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