"Je suis prêt à travailler avec tous ceux qui respectent l'exigence d'équilibre dont la France a besoin"

Invité de Jean-François Achilli sur France Info ce matin, François Bayrou est revenu sur l'importance de préserver l'unité au sein de la société française

Bonjour François Bayrou.

Bonjour.

Les militaires de Sangaris sont soupçonnés d'abus sexuels sur des enfants à Bangui en Centrafrique : les accusations sont particulièrement graves. Si les faits sont avérés, que peut-on dire sur ce type d'affaire ?

On peut dire quelque chose de très simple, c'est que si il y a des manquements aussi ignobles que ceux qu'on signale, ils doivent être poursuivis et punis extrême rigueur. J'imagine que tout le monde sera sur la même ligne et exprimera le même jugement.

La justice française enquête vraisemblablement depuis de longs mois, mais il aura fallu attendre un rapport de l'ONU - ce n'est pas rien – et les révélations de la presse britannique …  On dit de l'armée qu'elle est la grande muette, le silence est-il toujours de rigueur dans ce type d'affaire ?

Il ne l'est pas puisqu'on voit que dès l'instant où nous sommes face à des faits d'une telle gravité, il y a ici ou là des communications. J'imagine qu'il faut d'abord et avant tout attendre que les faits soient prouvés. De ce point de vue, nous sommes nous aussi en attente de ce que les enquêteurs de l'armée française diront, mais il faut aucun silence ni aucune inaction en face de faits d'une telle gravité.

Même au risque de fragiliser les troupes qui sont en opération spéciale sur zone ?

Il n'y a pas de fragilisation lorsque des faits aussi ignobles sont commis, s'ils sont avérés.

L'affaire éclate, quelle ironie, le jour où François Hollande donne un coup de pouce aux armées avec une rallonge de près de 4 milliards d'euros sur trois ans. C'est le bon choix François Bayrou ?

Soutenir les efforts de l'armée est nécessaire. On ne peut pas baisser la garde lorsque le monde est aussi dangereux, que les menaces sont aussi importantes et que les risques sont avérés. Nous avons la chance et la charge, nous la France, d'avoir la possibilité de répondre par des actions militaires. C'est une chance parce que nous sommes l'un des seuls pays du monde à avoir cette capacité et c'est une charge parce que tout le monde voit bien évidemment que cela coûte. On ne peut donc qu’approuver les choix qui sont faits lorsqu'ils maintiennent l'effort.

Je voudrais ajouter une chose. Je pense que cette contribution ne doit pas empêcher de réfléchir à l'organisation de nos armées.

Je vais prendre un exemple que nous avons tous les jours sous les yeux : l'opération « Sentinelle ». Cette opération qui organise les patrouilles de soldats dans les lieux publics et devant les bâtiments officiels occupe évidemment beaucoup d'hommes. Ces hommes-là, sont des professionnels formés – à Pau nous avons la plus grande base d’hélicoptères de combat d'Europe, ce sont des personnels extrêmement qualifiés, avec des mécaniciens de haute volée et des servants d'appareils informatiques, numériques, de vision nocturne etc. -  Est-ce leur travail que d'aller faire de la garde statique dans les lieux publics ?

Vous voyez bien qu'il y aurait une toute autre organisation à penser.

Vous pensez qu'ils ne sont pas à leur place ?

Non, je pense qu'on met à la charge de l'armée opérationnelle, l'armée d’intervention, un travail nécessaire de surveillance qui devrait être accompli par une autre organisation de défense civile.

Vous savez bien que les Etats-Unis ont la garde nationale par exemple, c'est à dire des personnes volontaires.

Vous pensez que l’on pourrait rappeler des réservistes en France ?

Oui, je pense que l’on pourrait utiliser des personnels qui seraient moins formés à l’intervention extérieure et à tout ce qu’elle comporte comme technicité, et ce serait une meilleure utilisation de la ressource humaine, des capacités de nos armées et aussi, évidemment, ce serait moins cher.

François Bayrou, une partie de la droite, 3 années après l’élection présidentielle, ne vous pardonne toujours pas d’avoir appelé en son temps à voter François Hollande, Nicolas Sarkozy en tête. Le Mouvement Démocrate est-il aujourd’hui compatible avec l’UMP ? Je vous pose la question parce que vous êtes en plein préparatif des élections régionales.

Et bien c’est très simple.

Ils ne vous pardonnent pas.

Tout cela n’a aucune importance, c’est la polémique politique habituelle et je ne suis pas très accessible à la polémique politique habituelle.

Cela ne vous chagrine pas d’être brocardé dans des meetings ?

Tout cela n’a strictement aucune importance. Regardons le fond, parce que c’est le fond qui est important. Il y a, dans la société française, dans la démocratie française, un courant d’opinion qui est un courant que j’appelle central, qui est un courant réformiste et modéré qui ne veut pas que l’on n’entraine la France, notre pays tout entier, dans une espèce d’affrontement interne, de division, dans lequel on dresse une partie de la France contre l’autre.

C’est ce que vous dites depuis plus de 10 ans.

C’est ce que je dis depuis plus de 10 ans et je le maintiens ; la preuve que c’est un succès, c’est que vous m’invitez régulièrement pour le répéter !

Ce n’est pas faux.

C’est parce que c’est une sensibilité que ressentent beaucoup de Français qui veulent que l’on soit équilibré dans les réponses que l’on donne aux défis de notre temps. Equilibré, cela veut dire que l’on est inflexible lorsqu’il s’agit de faire attention aux menaces et aux risques mais qu’en même temps on refuse de couper la société ou de souffler sur les braises qui ne demandent qu’à flamber.

Ca c’est votre définition de ce courant central ? Qui va où ? De Monsieur Juppé à Monsieur Valls par exemple ? Quelque chose comme cela ?

Voilà des noms, des sensibilités de cet ordre. Or vous me demandez : « Est-ce que vous êtes compatible ? ». Bien sûr, je suis prêt à travailler, à tout instant, avec tous ceux qui respectent cette exigence d’équilibre et qui ne se laissent pas aller ou ne choisissent pas d’aller à l’excitation des divisions du pays. C’est une société en crise - vous savez bien qu’elle affronte des mutations immenses - on ne peut pas et l’on ne doit pas en faire un lieu d’affrontement interne. Un pays c’est une unité, c’est comme une famille. Et voilà exactement pourquoi il y a des personnalités, qu’importe leur étiquette, avec qui nous nous sentons en phase et prêt à travailler, et d’autres à qui nous disons attention.

La politique c’est aussi une incarnation, des femmes et des hommes, donc en clair, vous ne pouvez pas aller avec Monsieur Wauquiez en Rhône-Alpes Auvergne ni avec Christian Estrosi En Provence-Alpes-Côte d’Azur parce qu’ils incarnent cet autre versant que vous aimez moins en fait.

Dans la période où nous sommes, comme vous l’avez dit à juste titre, qui est une pré-campagne – ces élections viendront dans 8 mois, on a le temps – nous avons le devoir de présenter une autre approche et une autre sensibilité.

Oui parce que vous constituez des listes et des candidatures ?

Oui. Je pose une question : à quoi cela sert-il d'annoncer que le Front National est l'ennemi numéro 1 si c'est pour reprendre exactement ses mots, ses phrases et ses obsessions ?

Vous pensez à qui ?

Vous savez très bien à qui et à quoi je pense. Et donc, à quoi cela sert-il ? Il faut une cohérence qui présente devant les électeurs – si on veut en effet se séparer de ces obsessions – une autre approche. Une approche qui ne ferme les yeux sur rien mais qui en même temps ne se laisse pas entraîner à perpétuellement verser de l'essence sur le feu.

Cela signifie quoi François Bayrou ? Que Nicolas Sarkozy doit clarifier au sein de cette future UMP « Les Républicains », une ligne idéologique ?

Je ne donne pas de leçon aux autres. Je parle de l'attente de millions de Français avec qui je me sens en phase, que je représente dans le paysage politique national et qui disent : « Ecoutez nous avons des choses précieuses à défendre et nous ne voulons pas nous laisser entraîner par un pays qui est perpétuellement dans cette excitation, et où se manifeste l'envie de certains de cibler et de détester des compatriotes, parce que nous avons besoin de vivre ensemble ! ».

Question ultime et brève : Vous voyez toujours François Hollande ?

Non je ne l'ai pas vu depuis longtemps.

C'est fini ?

Ce n'est pas fini. Si François Hollande veut rencontrer les responsables politiques, bien entendu je le verrais. Si Nicolas Sarkozy voulait rencontrer les responsables politiques, bien entendu je le verrais, parce que je considère que nous somme les uns et les autres coresponsables de l'avenir du pays et que nous avons besoin de travailler ensemble. C'est peut-être là notre marque de fabrique différente : cette compréhension mutuelle et cette clarté dans le débat que je porte dans la vie politique française.

Merci François Bayrou.

Merci à vous.

 

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