"Je suis contre la politique clanique et je propose une autre voie"

Invité de Bruce Toussaint dans la matinale d'i>Télé ce matin, François Bayrou a soutenu que la situation de notre pays était "assez bouleversante pour que les responsables politiques acceptent de se parler au-delà de leurs inimitiés".

Bruce Toussaint - Nicolas Sarkozy s’explique ce matin dans Le Figaro sur ce qui s’est vraiment passé quand Alain Juppé a été sifflé samedi dernier à Bordeaux : c’est de votre faute François Bayrou. « Beaucoup en Aquitaine ont été ulcérés par le fait que François Bayrou se mobilise pour faire élire François Hollande puis utilise les voix de la droite pour devenir maire de Pau. L’hypocrisie et le mensonge sont de moins en moins tolérés. » a déclaré Nicolas Sarkozy. Qu’est-ce que vous répondez ?

On voit bien que c’est une échappatoire. Nicolas Sarkozy s’est accommodé et réjoui qu’Alain Juppé se soit fait siffler. Il y avait une espèce de jubilation extrêmement visible. Ce qu’il dit est absolument inexact : je n’ai jamais utilisé les voix de personnes. J’ai été candidat en proposant un rassemblement qui allait en effet de la droite à une partie de la gauche, ce qui est mon projet national depuis longtemps. Le jour venu, ce sera indispensable pour l’avenir du pays. L’UMP locale a décidé librement et contre ses chefs nationaux de se joindre à ce rassemblement et nous avons fait les deux tiers des voix. Ceci est un fait, une certitude.

Ce que je viens de vous lire est la version « soft », officielle, qui est dans Le Figaro ce matin. Dans le Canard enchaîné, il y a la version « hard » : « il y avait aussi des militants UMP d’Aquitaine pour lesquels son ami Bayrou est un traître qui a fait élire Hollande. C’est vrai car sans lui, j’aurais été élu » dit Nicolas Sarkozy.

Voilà en tout cas une affirmation qui pèse son poids. Nicolas Sarkozy, cela fait des mois et des années qu’il poursuit la même attitude qui est de dire « si je n’ai pas été élu c’est la faute des autres ». Il dit « c’est de la faute de Bayrou » ou « c’est de la faute de Marine Le Pen », il cherche des causes extérieures. Et moi je lui dis, sans la moindre hésitation que le responsable de la défaite de Nicolas Sarkozy est Nicolas Sarkozy. C’est ses attitudes, ses manières d’être, c’est le fait qu’il tournait la loi ou qu’il acceptait en tout cas qu’on la tourne et c’est le fait qu’il avait choisi une attitude ou une ligne de division du pays. Ceci a entraîné le fait que plusieurs millions de personnes de Français – qui n’étaient pas de gauche – ont dit « il faut que cette page se tourne ». Si vous regardez aujourd’hui, deux ans après, alors vous vous apercevez que dans sa famille politique elle-même, il y a beaucoup de responsables – Alain Juppé, François Fillon, Xavier Bertrand, Bruno Le Maire – qui disent aussi « il faut que cette page se tourne ». Ce n’est pas moi qui le dis, c’est eux.

On est au bord de l’insulte quand même, non ? « Traître » ?

Que voulez-vous ? Que je provoque en duel Nicolas Sarkozy ?

Mais est-ce que cela vous touche ?

Non. Nicolas Sarkozy est dans une campagne électorale interne, c’est une campagne qui n’est pas facile. Alors qu’il dit « j’ai changé », c’est une campagne qui renvoie tous les Français à la nature de Nicolas Sarkozy et à cette incompréhension qu’ils ont eue d’avoir en face d’eux un Président de la République qui se comportait comme chef de clan.

Aujourd’hui, vous êtes en guerre tous les deux. Cela n’a pas toujours été le cas. À un moment, vous vous voyiez. Est-ce que pendant ces deux ans et demi où il était en retrait, vous avez eu un contact avec Nicolas Sarkozy ?

Jamais.

Quand est la dernière fois que vous vous êtes parlés ?

Il était à l’Élysée je pense.

Depuis il n’y a jamais eu un contact ?

Jamais.

Et vous ne le souhaitez pas ?

Pourquoi pas. Les gens qui sont sectaires ne sont pas mes amis. Je pense que la vie politique est assez dure et la situation du pays en crise assez bouleversante pour que les responsables politiques acceptent de se parler au-delà de leurs inimitiés. L’occasion ne s’est pas présentée et je n’avais pas les moyens de la faire naître.

Si vous deviez voter samedi, voteriez-vous pour Sarkozy, Mariton ou Le Maire ?

Je ne vote pas samedi.

Je sais bien. Quel regard portez-vous sur la campagne de Bruno Le Maire ?

Les militants UMP ont le choix, ils ont deux candidats en dehors de Nicolas Sarkozy, moi je ne participe pas à cette élection.

Mais vous le connaissez bien Bruno Le Maire ?

Je le connais, mais pas assez pour porter un jugement.

Vous n’avez pas un peu le sentiment d’être instrumentalisé par Alain Juppé dans cette campagne ?

Pas du tout. Les liens que j’ai avec Alain Juppé sont des liens anciens et j’ai choisi de dire quelque chose qui ne se dit pas souvent dans la vie politique : si cet homme-là peut réussir à fédérer autour de lui, je suis prêt à l’aider.

Vous allez la payer chère cette phrase…

Écoutez, j’ai payé des choses beaucoup plus chères que cela. J’ai à la mairie de Pau le mandat que je veux et dans la vie politique nationale le rôle que je dois.

Vous vous retrouvez au cœur de cette campagne à la présidence de l’UMP ! (rires)

Vous voyez bien que c’est un problème central qui est posé là. Ce n’est pas le problème du centre, c’est un problème central qui est : est-ce que la politique est clanique ?

Nicolas Sarkozy a aussi fait l’ouverture, il est connu pour cela, il a fait venir des ministres de gauche dans son gouvernement…

C’est une question très importante : est-ce que la politique est clanique ? Est-ce que c’est « tous aux ordres » ou autrement je fais la guerre ? C’est une conception de la politique qui n’est pas la mienne et elle ne correspond pas au caractère crucial, dramatique, urgent de la situation du pays. Je suis contre la politique clanique et je propose une autre voie et je soutiens ou j’apporte mon amitié, mon aide, à ceux qui proposent une autre voie.

Faut-il qu’Alain Juppé soit candidat quoi qu’il arrive ?

Alain Juppé a choisi une voie, pour laquelle comme vous savez j’ai des points d’interrogations : c’est-à-dire que c’est à l’intérieur d’un camp que l’on va désigner avec les militants et les sympathisants de ce camp celui qui se présentera. J’ai des interrogations sur ce sujet, mais c’est le choix qu’il a fait.

J’aimerais que l’on écoute un petit passage du meeting de Nicolas Sarkozy hier soir à Boulogne-Billancourt, il est revenu sur les raisons qui l’avaient poussé à nommer Rachida Dati en 2007 au poste de Garde des Sceaux, écoutez-bien : « J’avais voulu Rachida Dati parce que je m’étais dit que Rachida Dati, avec père et mère algériens et marocains, pour parler de la politique pénale. Cela avait du sens ! C’était important que nous, la droite et le centre, nous représentions la France dans sa diversité ! Parce que la France d’aujourd’hui est comme cela ! ». Êtes-vous choqué par les propos de Nicolas Sarkozy ?

Je ne vais pas faire de polémique. Simplement, en parlant des êtres humains, des citoyens, vous parlez toujours de l’origine ou de la couleur de la peau, lorsque vous parlez toujours de ces sujets, d’une certaine manière vous faites des catégories différentes de citoyens et ce n’est pas ma vision des choses. Pour parler de la politique pénale, et évoquer « marocain / algérien », cela signifie que l’on s’adresse à une population particulière. Je ne partage pas cette vision. Je pense que ce que la France a d’important, c’est de regarder les gens non pas en fonction de leur origine mais en fonction de la citoyenneté qu’ils portent.

Il y a 20 ans jour pour jour, une femme à la tribune de l’Assemblée, Simone Veil défendait le droit à l’avortement. Cette personnalité est aujourd’hui très discrète, elle est en retrait de la vie politique, ses enfants disaient d’ailleurs qu’elle ne souhaitait plus s’exprimer. J’aimerais savoir quel regard vous portez sur son parcours, sur le combat qu’elle a mené. Avez-vous encore des contacts avec elle ?

Pour l’instant pas, je pense qu’elle est très en retrait. Simone Veil, c’est deux choses. Je n’ai jamais pensé à elle sans penser à son histoire et au camp de concentration et à cette terrible traversée de l’enfer qui a dû être la sienne, c’est le premier symbole. Le deuxième symbole est celui du féminisme. C’est quelqu’un qui aime profondément les femmes. Dans ma vie – j’ai eu des débats avec Simone Veil – je n’ai jamais vu quelqu’un qui a un engagement aussi fort pour la féminité, pour les femmes, et ça ce sont deux choses très importantes pour la trace que Simone Veil va laisser dans l’histoire.

 

 

Merci François Bayrou.

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