Jacqueline Gourault, invitée de France Inter - Entretien dans La Provence

Nous vous invitons à réécouter l'interview de Jacqueline Gourault, ministre auprès du ministre d'État, ministre de l'Intérieur, au micro d'Alexandra Bensaid, dans la matinale de France Inter.
Nous profitons également de cette occasion pour vous faire découvrir l'entretien que la ministre a accordé au journal La Provence.

 

Bonjour Jacqueline Gourault.

Bonjour.

 

À Marseille, la colère des élus locaux qui dénoncent la recentralisation, et Edouard Philippe y va, il va prendre la parole, il s'invite. Est-ce qu'il y a urgence à éteindre le feu ? 

Il y a sûrement nécessité d'expliquer un certain nombre de politiques, mais je vais reprendre le sujet que Dominique Seux exprimait...

 

On a en parlé, oui, est-ce que vous les trouvez laxistes ces élus locaux, vous qui voulez leur imposer de revenir sur certains accords avec leurs fonctionnaires territoriaux ? 

Je voulais dire simplement qu'il y a quelques semaines, le président de la République a proposé aux élus locaux de gérer, au fond, la Fonction publique territoriale. Vous savez, on a souvent entendu dire : c'est le gouvernement qui décide de l'augmentation du point d'indice ou pas, ou de telle décision, les élus locaux voudraient se gérer eux-mêmes ou gérer leurs personnels eux-mêmes. Le président de la République leur a proposé, il y a eu un travail de fait notamment par Philippe...

 

Et donc, qu’ont répondu les élus locaux ? 

Au final, ils ont dit non, le Conseil supérieur de la Fonction publique a fait un travail important et au final ils ont dit non, ils ont préféré que ce soit l'Etat qui continue de gérer les personnels de la Fonction publique territoriale.

 

C'est un manque de courage, de votre point de vue ? 

On ne peut pas accuser le gouvernement de centralisation : quand il propose un geste de décentralisation, les élus le refusent.

 

C'est un manque de courage de la part des élus locaux ? 

En tout cas c'est plus facile de dire : c’est de la faute du gouvernement.

 

Que ce soit sur l'apprentissage, sur les emplois aidés, sur les mineurs isolés, sur la taxe d'habitation, ils ont quand même des sujets ces élus locaux et ils vous reprochent toujours moins de pouvoir et toujours moins d'argent. Ils sont de mauvaise foi ? 

En tout cas, ça n'est pas la réalité. Je rappelle tout de même qu’il y a eu une période extrêmement difficile, où l'argent était été prélevé directement sur les budgets des collectivités territoriales, toutes les collectivités territoriales, de la plus petite commune à la plus grande, de tous les niveaux de collectivités territoriales et que le gouvernement a changé sa politique, en faisant une politique de contractualisation.

 

Mais justement, c'est ce qu’ils dénoncent.

Oui, mais quand j'entends aujourd'hui, prenons l'exemple, j'entends François Baroin s'exprimer haut et fort, la contractualisation...

 

Le président de l'Association des maires de France.

Absolument. La contractualisation ne concerne que 322 collectivités en France et c'est une proposition d'ailleurs qui a été faite par l'Association des communautés de France que cette contractualisation. Et moins de 1 % des communes sont concernées par cette contractualisation. Donc il y an, une exagération, et d'autre part le budget et les recettes des collectivités locales, sont restés au même niveau, puisque l'Etat donne autant que l'année précédente. C'est une politique, si vous voulez, qui est une politique de collaboration entre les collectivités locales et l'Etat.

 

Donc, ce que vous dites, c'est qu'ils sont de mauvaise foi, vous ne comprenez pas leur colère, je ne vois pas de raison de se plaindre.

Je vous laisse la formule, si je puis dire, parce que moi je ne suis pas du genre à vouloir mettre de l'huile sur le feu, mais je pense que quand on entend parfois les élus dire, et en particulier les responsables d'associations, il y a baisse des dotations de l'Etat, c'est faux.

 

C'est inégalement réparti, les maires ruraux vous le disent : il n'y a peut-être pas baisse, il n'y a peut-être pas baisse globale, mais c'est inégalement réparti.

Ça a toujours été inégalement réparti, puisque quand même, il faut bien tenir compte de la population, il faut bien tenir compte - excusez-moi c'est un peu technique - de la richesse de la population, ce qu'on appelle le potentiel fiscal, il faut bien tenir compte aussi des quartiers qui sont pauvres, donc on fait de la péréquation, les plus riches doivent donner au plus pauvres. C'est un calcul assez subtil mais qui en tout cas ne provoque pas une baisse des ressources des collectivités territoriales, que ce soit sur le fonctionnement ou l'investissement, jamais les dotations d'investissements n'ont été aussi fortes en France, en direction des territoires ruraux.

 

Jacqueline Gourault, est-ce que, par exemple la vague de démissions des maires et en particulier des maires ruraux, qui existait avant d'Emmanuel Macron et qui s'est amplifiée sous Emmanuel Macron, vous inquiète ? 

Là encore c'est une image, il y a toujours eu des démissions de maires, pour des raisons...

 

C'est une comptabilité, ce sont des chiffres qui s’accumulent.

Oui, ce sont des chiffres...

 

Ce sont des voix qui deviennent de plus en plus fortes.

Il y a toujours eu des démissions d'élus, pour des raisons professionnelles, de maladie, de décès, etc., de mésentente au sein de conseil municipal, de gens qui se font mettre en minorité. Et il ne vous a pas échappé qu'il y a deux phénomènes nouveaux qui expliquent aussi l'augmentation du nombre de démissions, c'est la fin du cumul des mandats, et que donc un certain nombre par exemple de sénateurs et députés ont été obligés de quitter leur mairie, ça fait des démissions. Et il y a un deuxième phénomène aussi, ce sont les communes nouvelles, qui sont comptabilisées : si vous faites une commune nouvelle à partir de cinq communes traditionnelle, si je puis dire, il n'y a plus qu'un maire. 

 

Donc, Edouard Philippe, va leur dire à Marseille : je vous entends, mais il n’y aura pas de...

... et donc il n’y a pas d’augmentation, il n’y a pas d’augmentation pour raison politique.

 

Il n’y aura pas de preuve d’amour ? Il y aura des déclarations d'amour à Marseille, le Premier ministre, mais il n’y aura pas de preuves d'amour.

Il y aura des explications. On remettra l'église au milieu du village, si je puis dire.

 

Quand, quand même, votre ministre Gérard Collomb, lui regrette le manque d'humilité de l'exécutif. Quand votre ministre dit qu'on devrait renouer avec la promesse du pacte girondin, est-ce que lui il est de mauvaise foi, est-ce que lui il fait de la politique ? 

Le ministre d'Etat a ses mots propres. Je suppose qu’il a voulu exprimer quelque chose qui lui est personnel. Quant à moi, je suis sur le terrain sans arrêt. Demain, je vais dans le Var. Après-demain, je vais en Moselle. Je vais voir des maires toutes les semaines au moins deux fois par semaine. Je suis toujours très bien accueillie. Alors je ne dis pas que les maires n'ont pas besoin d'explications, sur par exemple le dégrèvement de la taxe d'habitation qui était un engagement de campagne du président de la République. 

 

On ne sait toujours pas comment ça va être compensé

Mais si on le sait, on le sait très bien : pendant 3 ans c'est un dégrèvement, c'est l'Etat qui prend la place et qui donne la somme identique aux collectivités territoriales. Et après...

 

Une vingtaine de milliards.

Et après, il y aura une réforme de la fiscalité locale, et on espère bien que les élus et les associations viendront à la table pour discuter de cette réforme. Je rappelle que sous...

 

Gérard Collomb, Jacqueline Gourault, j'aimerais vous questionner, sur Gérard Collomb. Est-ce que ça n'est pas compliqué de travailler avec un ministre qui a autant l'esprit critique désormais et qui a même la tête ailleurs, aux municipales ? 

Ça n'est pas du tout difficile pour moi, d'abord parce qu'on se connaît depuis longtemps, on était sénateurs ensemble, et il est avec moi en totale confiance et il me laisse gérer les collectivités territoriales.

 

Certains au gouvernement disent qu'il devrait partir plus vite.

Eh bien, je leur laisse leur avis.

 

Quand le député MoDem Jean-Louis Bourlanges dit que les femmes MoDem au gouvernement sont des sous-ministres, sans portefeuille, que leur rôle est dérisoire, c'est violent mais est-ce que c'est vrai ? 

Je n'ai pas l'impression de ne pas avoir de travail et de portefeuille, j'ai eu une explication avec Jean-Louis Bourlanges, qui comme vous le savez a un art de la rhétorique assez développé, ça n'était pas très agréable pour moi  cette expression, ni pour Geneviève Darrieussecq...

 

Mais c'est l’aigreur du MoDem.

C'est au fond dire qu’il faudrait plus de ministres MoDem, au gouvernement, et peut-être qu'il pensait à certaines autres personnes.

 

Jacqueline Gourault, merci d'avoir été sur France Inter.  

 

 

 

 

 

La Provence 


Jacqueline GOURAULT : « Je me demande s’il n’y a pas d’anciens réflexes politiques »

 

Vous attendiez-vous à une telle fronde ou êtes-vous désormais habituée ?

J’arpente chaque semaine les territoires. J’ai été maire pendant 25 ans, sénatrice, conseillère départementale et régionale. Je connais bien l’état d’esprit des élus locaux. Ils ont besoin d’être rassurés. Mais chacun de mes déplacements se passe dans le calme et le respect, même dans les territoires où il y a des tensions. Ce ressenti du terrain est sans commune mesure avec l’expression des associations d’élus. Je ne globalise pas. Mais je vois bien que les démarches unies cachent des intérêts différents. Je peux comprendre que les Départements ayant des soucis financiers attendent des réponses du gouvernement. Même si je regrette le malentendu du mois de juillet. Mais il y a d’autres associations dont on se demande d’où vient leur mécontentement.

 

Vous pensez aux Régions ?

Oui. Leurs représentants ne parlent que de recentralisation. Mais à quoi cela correspond-t-il réellement ? Il y a de quoi s’interroger. Dans la loi NoTre, les Régions ont à peu près eu tout ce qu’elles réclamaient comme compétences. Elles voulaient un impôt dynamique. Elles l’ont obtenu avec la TVA. Grâce à elle, les recettes des Régions ont augmenté de 262 millions par rapport à 2017 où la dotation globale de fonctionnement était fixe. Elles ont les compétences et les moyens financiers pour agir.

 

Leur grogne est-elle purement politicienne ? Ou n’y a-t-il pas de vrais débats comme sur l’apprentissage et la formation ? 

Il y a un vrai débat sur ce sujet. Il y a nécessité à mettre en adéquation les formations et les métiers, à associer les acteurs de l’économie. Hervé Morin était d’accord pour cela. Aujourd’hui, lorsque les présidents de Régions disent que l’Etat récupère les compétences, ce n’est pas vrai. Sur l’apprentissage, le Gouvernement a fait le choix de faire confiance aux entreprises et aux branches, qui connaissent leurs besoins, tout en maintenant les régions à bord pour assurer la présence des CFA dans les zones les plus fragiles. Sur la formation professionnelle, non seulement elles gardent les compétences mais l’Etat augmente leurs moyens financiers grâce aux moyens du plan d’investissement dans les compétences (1,5 Md€ en 2018 ; 3 Mds€ en 2019). Même chose pour lorientation.

 

La contractualisation est un autre point d’achoppement. Comment expliquez-vous que certaines collectivités ne veuillent pas signer ?

Pendant quatre ans, toutes les collectivités ont été frappées par la baisse unilatérale des dotations, de la plus petite commune à la grande Région. Onze milliards d’euros ont ainsi été prélevés de façon arbitraire. Cela avait conduit à une baisse de l’investissement dans les territoires et poussé le précédent gouvernement à créer un fonds d’investissement pour les collectivités locales. Après une telle démarche injuste et conflictuelle, nous avons fait le choix de la confiance, par une méthode contractuelle. Nous proposons ainsi aux 322 collectivités représentant 2/3 de la dépense locale en France de maîtriser l’augmentation de leurs dépenses de fonctionnement à hauteur de 1,2% par an. Il est légitime que chacun participe à l’effort de la maîtrise de nos dépenses publiques. Chacun peut comprendre qu’il n’y a pas d’un côté les collectivités, de l’autre l’Etat mais que nous appartenons tous à un même ensemble, la Nation France. Quand j’entends l’association des maires crier au feu, alors que plus de 70% des 322 collectivités ont signé, et que seul 1% des communes n’est concerné, je me demande s’il n’y a pas d’anciens réflexes politiques.

 

Les présidents des associations sont tous chez Les Républicains… 

Oui et je me souviens du programme de François Fillon qui était beaucoup plus sévère que celui d’Emmanuel Macron : 20 milliards d'euros d’économies étaient demandés aux collectivités locales ! Quand certains disent que nous voulons faire disparaitre des communes, les bras m’en tombent. L’an prochain, l’Etat versera 48,2 milliards d’euros aux collectivités locales. Un concours financier auquel s’ajoutent 2,1 milliards d’investissements pour les territoires ruraux, dont 1,8 milliard aux communes.

 

Certains élus réclament, au-delà des financements, un assouplissement des règles pour la fonction publique territoriale…

Le président de la République voulait confier la gestion de la fonction publique territoriale aux élus locaux. Mais il n’a pas rencontré l’adhésion escomptée. Peut-être préfèrent-ils que l’Etat continue de se charger de ces schémas complexes qui touchent aux statuts ou à la durée du temps de travail.

 

Doit-on s’attendre à un discours à une congre attaque d’Edouard Philippe ce jeudi à Marseille ?

Le Premier ministre va se livrer à un exercice de pédagogie et sans doute rappeler certaines vérités. N’oublions pas que nous avons créé la conférence des territoires à la demande des élus locaux. Il est dommage que cette démarche de dialogue qui permet de garantir les moyens aux collectivités locaux, débouche sur la situation d’aujourd’hui.

 

 

 

 

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