"François Hollande est à la traîne d'Angela Merkel"

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Dans une grande interview accordée à Paris Match, le président du Modem, François Bayrou, appelle à rompre avec « les impuissances et les faux semblants ».

Paris Match - Allez-vous accueillir des réfugiés à Pau ?

François Bayrou - Oui, bien sûr, une soixantaine. Proportionnellement, cela représente notre part sur les 24 000 que la France doit accueillir en deux ans. Mais ce chiffre de 24 000 est-il crédible par rapport aux foules d’exilés qui traversent les frontières aujourd'hui? Je n'en suis pas sûr.

C’est-à-dire ?

Nous avons un devoir de secours et d'assistance dans l'urgence. Quand quelqu'un se noie, il faut le tirer de l’eau. On ne peut pas s'y dérober. Mais quelle proposition envisageons-nous à long terme? Nos pays eux-mêmes sont en crise, le chômage de masse frappe depuis trop longtemps et nous subissons un appauvrissement général, lent et insidieux. Je ne crois donc pas que l'on puisse assurer l'intégration de centaine de milliers, voire de millions de personnes simplement par une décision au départ généreuse. Il faut réfléchir à d’autres réponses.

Que proposez-vous ?

Il faut entrer dans une démarche nouvelle : aménager des zones protégées sur le territoire des pays d'origines. Je ne parle pas d’installer quelques tentes supplémentaires ça et là, mais d’isoler de la guerre des zones entières, à l'intérieur même des pays qui sont la proie de la violence. Ces dictatures fanatiques et sans pitié, Daech, les talibans et d’autres sont ravis que les réfugiés partent parce qu'ils leur abandonnent le terrain. C’est pour cela que l'autorité internationale doit prendre l’initiative de dire : voilà des régions intouchables que nous protégeons et dans lesquelles nous avons l'ambition de restaurer une vie normale.

Comment sécuriser ces zones ?

Militairement. Sans se laisser impressionner. Autrement c'est insoluble. Quatre millions de personnes ont quitté la Syrie ! Les Etats-Unis annoncent qu’ils en accueilleront 10 000... L’Europe, un million? Cela ne va pas tenir. Il faut faire quelque chose ! Nous avons les moyens, aériens, terrestres, de garantir la sécurité et la protection de ces zones de sécurité. Si on ne fait pas cela, on n’aura le choix qu’entre l'indifférence ou la dureté de cœur et la générosité sans moyens, qui se révélera très vite impuissante.

François Hollande gère-t-il bien la crise actuelle ?

Il est à la traîne d'Angela Merkel, depuis des mois, et sur tous les sujets. La chancelière veut améliorer l'image de l'Allemagne. Mais en annonçant le chiffre impressionnant de 800 000 réfugiés à accueillir, elle a fait passer un message d’appel, très difficile à gérer, même si l'Allemagne économiquement se porte bien. Les frappes en Syrie annoncées par François Hollande, je dis oui, bien sûr. Je suis évidement pour que nous participions à une coalition qui permette de vaincre ces barbares qui mettent en scène leurs tortures, sans pitié pour la vie humaine et sans respect du patrimoine de l'humanité...

Comment jugez-vous le revirement du Président sur les quotas ?

Ses dernières années de gouvernement sont jalonnées de revirements. C'est Jean-Claude Juncker et Angela Merkel qui ont proposé ces quotas. Il a d’abord dit non, puis dit oui. Encore une fois sous François Hollande, la France n'entraîne pas, n’assume pas… Nous sommes devenus le prince consort de l’Europe.

Avez-vous mal jugé Hollande en 2012 ?

Non, c'est lui qui a choisi de ne pas tenir ses promesses. Il est intelligent, il est affable, mais il ne sait pas tenir un cap et n’a pas de respect pour ses engagements.

Êtes-vous optimiste pour la conférence sur le climat ?

Comme toujours on se prépare à des résolutions purement verbales, une sorte de verre à moitié plein et à moitié vide. Tant mieux si on peut aller au-delà. Mais quand je vois l'état du monde je n'ai pas l'impression qu'il y ait un consensus en train de se cristalliser de manière efficace.

Comment analysez-vous cette rentrée politique ?

C'est une rentrée politique avec chacun des partis en explosion, du Front national jusqu'à l'extrême-gauche, et c'est mauvais signe pour le pays. Devant ce paysage politique en décomposition, il n'y a que deux attitudes : les uns haussent les épaules et se désintéressent, et les autres disent «puisque c'est ça, on va voter extrême». Tout ceci est inquiétant et malsain. Il faut s'adresser aux Français en leur proposant des solutions concrètes et novatrices. Je considère vital que la prochaine échéance présidentielle permette de rompre avec les quinze années précédentes. Pas seulement que l'on change les gouvernants, mais que l'on change la vie politique et de gouvernement, ses règles et sa pratique et que l'on laisse derrière nous ces années d'impuissance et de faux-semblants.

Alain Juppé vous paraît-il le plus apte à cela ?

Il a compris qu’il n’y a pas de réforme sans rassemblement. C’est la clé.

Et vous ?

Moi, j'apporte mon soutien à une démarche de rassemblement. Si l'on peut rassembler j'en serai. Avec Alain Juppé. S'il gagne la primaire, je le soutiendrai. Pourtant, la primaire interne à un camp présente un risque majeur : elle favorise les plus agressifs. Regardez la semaine dernière : Donald Trump est en tête de la primaire américaine, Jeremy Corbyn avec 60% des voix a emporté l’élection du parti travailliste... C'est la même logique des noyaux durs, et c'est cette logique que je redoute.

Seriez-vous favorable à une VIe République ?

Je suis pour un parlement fort en face du président fort. Il faut que toutes les grandes sensibilités du pays soient représentées au Parlement. Aujourd'hui si on additionne Front national, gauche de la gauche et centre indépendant, 50 % des Français n'ont pas de représentants. Nous vivons dans une caricature de démocratie. La proportionnelle était, là encore, une promesse de François Hollande. Dans la tirade «moi président», il y avait cet engagement en toutes lettres.

Vous allez faire votre rentrée dans quinze jours, quel sera votre mot d’ordre ?

L'enjeu pour la France, ce n'est pas de changer de gouvernants, mais notre mode de gouvernement lui-même. Si on reste avec les mêmes postures, on aura les mêmes impuissances. À chaque fois que je le pourrai, je proposerai des solutions concrètes.

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