"De la vérité en politique", rencontre avec François Bayrou autour de son livre

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Mardi 26 mars, le 8e "Rendez-vous de la Démocratie" était consacré à la vérité en politique à l'occasion de la sortie du livre de François Bayrou. Revivez l'événement à travers la synthèse rédigée par les étudiants du MoDem Sciences Po.

Ce huitième rendez-vous de la démocratie était consacré à l’ouvrage de François Bayrou, De la vérité en politique paru le 14 mars dernier chez Plon. Le président du Mouvement Démocrate est intervenu pour présenter les points principaux de ce  livre qui associe réflexion philosophique, diagnostic du système politique français et propositions d’actions concrètes qui s’appuient sur ce bilan.

Cette présentation permet de clarifier le message général de l’ouvrage, en réponse aux incompréhensions qu’il a pu susciter dans certains médias lors de sa sortie. Non, François Bayrou n’explique pas dans son livre qu’il détient la vérité en politique, pas plus qu’il ne cherche à y défendre une vérité politique.

Ces incompréhensions montrent bien qu’il s’attaque là à un concept problématique, qui soulève de nombreuses interrogations, comme en témoignent les questions du public à la fin de la conférence. En effet, celles-ci ont notamment surligné la difficulté d’atteindre cette vérité au regard de la réalité politique : un constat objectif sur un problème politique est difficile à établir, et implique la participation de solides experts, de conseillers le plus objectifs possibles ainsi que de bon sens de la part des décideurs. De plus, la vérité en politique est confrontée à certaines logiques comme le jeu partisan, qui peuvent contribuer à la fausser dans les discours et les actes… Malgré cela, François Bayrou défend qu’elle est plus que jamais nécessaire.

De la nécessité de la vérité en politique.

François Bayrou définit dans son livre la vérité dans le contexte particulier de la politique. Ce concept ne doit pas être assimilé à des vérités qui sont défendues par les différents acteurs politiques, on doit donc différencier la vérité en politique d’une vision politique, même si l’on doit nécessairement articuler ce qu’il définit comme la vérité à une vision politique. La vérité pourrait ainsi être entendue comme « une juste vision du réel » selon François Bayrou, une conception qui s’inspire de celle d’Hannah Arendt, pour qui la vérité est « ce qu’on ne peut pas changer ».

La vérité est donc à comprendre comme un constat objectif sur la situation politique, économique, sociale de notre pays –mais aussi à plus large échelle, de l’Europe et du monde-, sur laquelle le politique doit produire un discours fidèle et mettre en place des politiques (réalisables) cohérentes avec celle-ci. Car la vérité a acquis aujourd’hui une importance cruciale à l’heure des nouvelles technologies de communication comme internet. Si le flot d’informations qu’il engendre peut contribuer à brouiller l’état des choses en politique, l’information est aussi rendue plus accessible au citoyen qui est plus à même de juger de la vérité mais aussi et surtout de la véracité du discours des politiques et de l’accomplissement de leurs promesses. Le décalage entre réalité d’une part, et le discours et action politique d’autre part apparait d’autant plus net, ce qui contribue à aggraver la fracture entre politiques et citoyens.

La vérité en politique apparait donc doublement nécessaire :

- Nécessaire au bon fonctionnement de notre démocratie, fragilisée dans ses institutions. Leur fonctionnement, basé sur une démocratie représentative où le peuple n’intervient surtout que lors des échéances électorales et exerce ainsi son droit de regard, est remis en cause. Le peuple cherche à s’impliquer directement en politique par manque de confiance envers ses élus. Un nouveau contrat social, le « contrat de vérité des peuples » apparait ainsi le précurseur indispensable à toute réforme : les citoyens choisiraient dans l’idéal leurs dirigeants sur les propositions qu’ils énonceraient sur un constat clair et partagé sur la situation du pays.

- Nécessaire à la mise en place de politiques efficaces qui servent l’intérêt de notre pays. Un constat réaliste apparait la base nécessaire à toute action politique. De plus, la vérité permet de lutter contre le fatalisme qui sape les initiatives politiques : si l’on se retrouve dans la situation de crise où l’on est actuellement, c’est par différentes causes que nous devons à nos politiques antérieures. Cette situation n’est pas due seulement au contexte européen ou international : il nous appartient de faire des choix réalistes pour en sortir. Une analyse de la réalité conduit donc à une vérité qui doit être prise en compte et qui permet de refonder l’utilité et la puissance de la politique ; une sortie de crise est possible si l’on part d’un constat clair et que l’on choisit des politiques adaptées, même si l’on a tendance à l’oublier.

De la difficulté de la vérité en politique

Pourtant, cette vérité manque aujourd’hui à la vie politique française. François Bayrou s’attarde ainsi sur le processus qui cause cet éloignement de la vérité en politique.

Cette difficulté qu’à la vérité à s’imposer en politique trouve selon lui ses fondements dans la nature de nos institutions, qui non seulement aboutissent à un bipartisme, mais aussi a des conséquences néfastes en ce qui concerne l’avènement de cette vérité. En effet, le mode de scrutin des législatives aboutit à un résultat politique du « tout  ou rien » à l’Assemblée : les gagnant héritent d’un fort pouvoir qui n’est que peu concurrencé par la principale opposition, les indépendants n’étant que très  peu ou pas représentés. La victoire politique devient le but premier des élections, la vérité dans le constat politique et dans les propositions n’est qu’au mieux secondaire.

Cela a pour conséquences concrètes une situation où règne la « fatalité du mieux disant démagogique » au moment des élections quelle qu’elles soient, une escalade de la démagogie dans le but d’attirer la sympathie des votants au détriment du réalisme. On retrouve cet effacement de la vérité telle qu’exprimée par Bayrou dans l’exercice du pouvoir, où les réformes nécessaires sont parfois ignorées ou délaissées dans l’ordre des priorités par peur de l’impopularité. Ainsi s’opère la distinction entre hommes politiques, qui luttent pour leur succès électoral en premier, et hommes d’Etat qui œuvrent pour l’intérêt général.

Si une certaine stratégie électorale peut parfois être cautionnée par un souci d’efficacité électorale, François Bayrou souligne que ceci contribue quand même à entretenir un sentiment de défiance de la part des électeurs, qui s’estiment trompés ; comme il le souligne en s’inspirant de Gandhi, la fin n’est pas à dissocier des moyens.

La vérité, une base de l’action politique

Suite à cette réflexion sur la notion de vérité en politique, son utilité pour l’intérêt général, François Bayrou dresse un constat sur la situation française, qui a été ignoré par les candidats à l’élection présidentielle de 2012 et par les politiques en général, ce qui témoigne de la difficulté d’instaurer de la vérité en politique.

De ce constat réaliste doit émaner une vision politique concrète, une solution à ces maux. En théorie, le conflit politique devrait s’effectuer sur la base de ce constat réaliste partagé par tous, auxquels chacun apporterait une réponse particulière en fonction de sa subjectivité. François Bayrou propose les siennes suite à son diagnostic sur l’état de la France, dont on oublie ou on cache la gravité.

Il propose ainsi l’instauration d’une « politique d’urgence » en réponse à cet état de fait qu’il compare à la veille de la seconde guerre mondiale et sur lequel il faut ouvrir les yeux. Il aborde notamment les points cruciaux suivant :

- La difficulté des chercheurs et des PME, qui aujourd’hui ne travaillent pas des conditions précaires alors qu’ils sont les forces de création et d’initiative de notre pays. Devant les difficultés qu’ils éprouvent au quotidien, une réflexion et des réformes sur les questions du temps de travail et de l’inflation des normes, qui finissent par les paralyser, apparait nécessaire.

- La lourdeur de l’organisation territoriale, avec de nombreuses strates (régionales, départementales, urbaines) qui entrent en concurrence dans la répartition de leurs compétences respectives, ce qui est source de dépenses inutiles et d’inefficacité. Pour plus de cohérence, de simplicité et de compétitivité dans les politiques territoriales, une fusion des organes départementaux et régionaux apparait souhaitable.

- Le malaise concernant l’Europe, qui apparait dur, arbitraire et lointain des peuples, comme le montre l’exemple récent de Chypre. Afin d’éviter un rejet général de l’Europe, un regain de démocratie, de participation  à l’Europe de la part des peuples est  à promouvoir. Une meilleure « pédagogie européenne » est aussi un défi essentiel pour une meilleure légitimation, comme le souligne une intervention dans le public.

Ce que défend François Bayrou dans son ouvrage, c’est la défense la vérité en politique en tant constat lucide et réaliste sur l’état de la France et de l’Europe, envers et contre les pratiques démagogiques et électoralistes qui ont court aujourd’hui.  Ceci dans l’objectif de production d’une vision politique cohérente avec la réalité, avec l’adoption de politiques qui seraient adoptées dans un climat de confiance renouvelée avec les citoyens. Cette vision convient d’être différente selon les subjectivités des acteurs politiques, mais avec pour socle commun un constat qui ne peut être nié car il correspond à l’état réel de choses. Cette philosophie, le président du Mouvement démocrate la décline selon sa vision de la politique et promouvant des réformes qui se veulent porteuses d’efficacité, d’unité et d’espoir.

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