Affaire Tapie: "l'État doit se porter partie civile" pour cette "manipulation"

Jean Peyrelevade, proche de François Bayrou et patron du Crédit Lyonnais de 1993 à 2003, a estimé mercredi que l'État français devait se porter partie civile dans l'affaire Tapie/Crédit Lyonnais.

Bruce Toussaint – Bonjour Jean Peyrelevade, vous êtes aujourd’hui PDG de Leonardo & Co, mais ancien patron du Crédit Lyonnais, de 1993 à 2001. Est-ce que vous pouvez nous dire tout simplement votre réaction à ces deux rebondissements ?

Jean Peyrelevade – Je suis heureux de voir que la justice commence à se poser des questions sérieuses sur un arbitrage dont j’ai toujours dit qu’il était premièrement illégal et deuxièmement, à mes yeux, le résultat d’une gigantesque manipulation. Donc, je trouve rassurant en tant que citoyen que, enfin, quelque chose contre ce qui est à mes yeux l’un des plus gros scandales de la République, soit instruit de manière sérieuse par les juges.

Ce sont des accusations très graves que vous portez ce matin. Sur quelles bases ? Lorsque vous dites que c’est illégal, par exemple.

Tout simplement parce que le Code Civil lui-même dit que l’Etat ne peut pas se prêter à arbitrage sauf à recevoir une autorisation explicite du Parlement.

Ce n’est pas ça qui est remis en cause aujourd’hui. Ce qui est remis en cause c’est l’impartialité de ces arbitres.

Ça, c’est la forme, venons sur le fond. La sentence arbitrale est une reconstitution historique qui a un rapport lointain avec la réalité. Simplement, cette œuvre de fiction n’est pas très bien faite, elle est faite assez grossièrement. Les mensonges sont tellement visibles qu’ils ont fini par attirer l’attention des juges.

Mais qui mettez-vous en cause aujourd’hui ? Est-ce que c’est Bernard Tapie qui serait peut-être responsable, selon vous, ou à l’origine de cette manipulation ? Est-ce que c’est Christine Lagarde qui est ressortie avec le statut de témoin assisté il y a quelques jours ?

Je ne suis pas enquêteur, je vais être très logique, je crois. La manipulation, soit elle se situe en amont de l’arbitrage – auquel cas les arbitres sont des victimes qui ont été abusés et on peut regretter leur incompétence – soit elle est interne même au corps arbitral. A ce moment-là, ils sont les acteurs directs, au minimum les complices de la manipulation. C’est l’un ou autre.

Mais, c’est facile aujourd’hui, d’une certaine façon, pour vous Jean Peyrelevade, de revenir sur ce tribunal arbitral…

Bruce Toussaint, ce que je vous dis ce matin, je l’ai dit en détail et de manière explicite devant la Commission des finances de l’Assemblée Nationale. Je ne dis rien de nouveau. J’ai dit devant la Commission des finances qu’il y avait dans cet arbitrage des mensonges grossiers.

Lesquels ?

Je vais vous donner deux exemples qui me concernent directement. L’arbitrage m’accuse d’avoir traité M. Tapie d’ordure…

Ça, ça a coûté très cher.

C’est l’un des fondements des 45 millions d’euros de préjudice moral. Cette accusation a été portée par M. Tapie lui-même contre le Crédit Lyonnais en décembre 1994 devant un tribunal. Le tribunal l’a débouté avec des attendus tels qu’il n’a même pas fait appel. Donc, chose jugée.

Aujourd’hui, qu’est-ce que vous réclamez, concrètement ?

Simplement que la justice aille jusqu’au bout.

Oui mais ça c’est une formule. Qu’est-ce que vous demandez concrètement ?

C’est très simple. J’espère – je ne demande pas – une fois de plus en tant que citoyen, que l’arbitrage sera annulé tellement il a été grossièrement manipulé.

Et les responsabilités politiques dans tout ça, quelles sont-elles selon vous ?

Je ne peux vous donner qu’un sentiment, je n’ai pas de preuve. Mais, une somme de cette importance, une procédure qui est arrêtée au dernier moment alors que la Cour d’Appel, la justice, va vraisemblablement donner plutôt raison à l’Etat, et un arbitrage qui est désastreux pour les finances publiques, ça ne peut pas se faire…

L’Etat doit-il se constituer partie civile comme l’a laissé entendre François Hollande hier soir ?

Absolument. L’Etat d’aujourd’hui doit essayer de compenser les fautes de l’Etat d’hier.

Vous n’avez pas répondu sur Christine Lagarde précisément.

Personnellement, ce n’est qu’un sentiment, je pense qu’elle a transmis des instructions.

Venant de ?

De au-dessus, c’est-à-dire de Nicolas Sarkozy lui-même.

Est-ce que vous pouvez aller jusqu’à demander que Bernard Tapie restitue l’argent ?

Si l’arbitrage est annulé, le droit dit qu’on sera remis dans la situation antérieure à l’arbitrage, c’est-à-dire qu’il y aura une Cour d’Appel qui à nouveau devra trancher finalement le débat.

Je reçois la lettre d'information du Mouvement Démocrate

Engagez-vous, soyez volontaires

A nos côtés, vous serez un acteur de nos combats pour les Français, pour la France et pour l'Europe.

Chaque engagement compte !

Votre adhésion / votre don

Valeur :

Coût réel :

20 €

6,80 €

50 €

17 €

100 €

34 €

Autres montants

Qu'est ce que la déclaration fiscale sur les dons ?
Filtrer par